Tome 1 - "L'Initiation"

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— Les Visiteurs de l'Espace-Temps — Il y a environ deux minutes qu'aux accents de la bossa-nova, j'ai entrepris d'agresser l'ancestrale indifférence. Soudain, d'un bond, Dakis se lève et interrompt l'enregistrement, s'écriant : - Je connais cette chanson ! Je le mets en garde contre une possible confusion de sa part, mais rien n'y fait. Il jure ses grands dieux qu'il a déjà entendu cette mélodie et ces paroles. N'ayant eu l'opportunité d'interpréter "Ultime Carnaval" qu'en une seule occasion, je lui rétorque alors qu'il ne peut avoir entendu ma chanson qu'au cours de l'automne 1971, lorsque Peggy m'avait fait participer au concours du "Coup de Pouce" au casino de Cassis. A ces mots, Dakis se décontenance totalement, visiblement aussi ému qu'en face d'un phénomène paranormal. Sa faconde, muée en une sorte d'ânonnement intraduisible, a plongé la pièce dans un silence de cathédrale qu'il ne laisse à personne le soin de rompre. Son regard, dans lequel baigne un sourire entendu, me fixe avec insistance. Il se rassied alors, comme si un poids invisible s'était employé à lui faire fléchir d'un seul coup les genoux. Une gorgée de whisky a raison de son bégaiement, et voilà qu'il me décrit avec force détails tel que j'étais effectivement apparu en cette soirée, dans un costume blanc ne contrastant avec la pâleur de mon trac qu'à la faveur d'un foulard de soie bleu marine, noué autour de mon cou. Ainsi, pratiquement deux ans auparavant, Jean-Claude Dakis, qui se trouvait être un spectateur parmi tant d'autres dans la salle de spectacle du casino de Cassis, avait rencontré, sans le savoir, celui avec lequel il allait partager, au fil des années, l'Initiation et le Message, pour reprendre la définition d'Olivier Sanguy dont ce dernier voulait d'ailleurs faire le titre du film qu'il réalisa avec Jimmy Guieu, quelque vingt années plus tard 8 . Cette nuit-là, Lucette se réveilla en sursaut, victime d'un cauchemar qui, hélas, n'était rien d'autre qu'un rêve prémonitoire. Elle m'annonça, alors que, brisé par la fatigue des nuits et des jours précédents, je m'étais laissé envelopper par un sommeil des plus profonds, qu'un avion avait pris feu et venait de tomber sur une piste d'aérodrome. A cette époque, Lucette n'était pas coutumière du fait, ce qui ne m'empêcha pas, tout en la rassurant, de la prendre au sérieux : c'était bien la moindre des choses, étant donné le caractère plus qu'insolite des événements auxquels il nous était donné de participer. 8 Se reporter à nouveau, dans la série des vidéocassettes "Les Portes du Futur", à la K7 N°9 "Contacts Espace/Temps : Jean-Claude Pantel et ses étranges visiteurs". - 194 -

— L'Initiation — Mercredi 11 juillet : nous allumons la radio, dès notre lever, pour écouter les informations qui ne font part d'aucune catastrophe aérienne. Lucette se réfugie alors dans sa théorie de cauchemar… Bien que je ne l'en dissuade pas, je demeure perplexe, sachant trop bien qu'une telle vision ne saurait être fortuite. De toute façon, lieu et temps nous ont toujours échappé en matière d'événements appelés à se produire, exception faite pour le slalom spécial des olympiades de Grenoble, le 17 février 1968... En fin de matinée, je me suis rendu au service des fournitures de bureau de la Sécurité sociale, où Robert Rebattu s'affaire seul, en l'absence de Giorgi. Je conte à Robert nos dernières mésaventures, dont la résiliation de l'acte d'achat de l'appartement que nous "convoitions". Robert m'invite alors à faire parvenir une demande de logement, comme il vient de le faire pour son compte, à la C.P.L.O.S.S. (commission paritaire des logements des organismes de Sécurité sociale). Il se propose, du fait que je suis en congé de maladie, d'aller chercher lui-même, auprès de monsieur Valentin, responsable de tous les projets de cet ordre, les imprimés nécessaires à l'opération. Monsieur Valentin, homme affable d'une cinquantaine d'années, effectue ses permanences dans un petit bureau qui jouxte le mien au 14 boulevard Notre-Dame. De ce fait, nous nous connaissons déjà et, sans que nous entretenions des rapports particuliers dans notre profession, il est au courant de tous les tracas que j'ai pu subir avec notre employeur. Il ne lui en faut pas davantage pour remettre à Robert Rebattu deux exemplaires d'un formulaire sur lesquels il ne me reste plus qu'à établir ma demande de logement à l'O.P.A.C. (Office public d'aménagement et de construction). Qui plus est, il se trouve que le "paranormal", de par la relation de cause à effet qu'il inspire, m'autorise à bénéficier du statut de "cas social", et que mon dossier, une fois rempli, sera traité en priorité. Monsieur Valentin s'est avancé au point de promettre à Robert que les Pantel seraient logés, au pis aller, à la fin de l'automne, les vacances ralentissant les démarches administratives, sous toutes leurs formes. Si elle atténuait sensiblement le désappointement de la veille, cette bonne nouvelle que Robert nous apporta en fin d'après-midi ne résolvait pas tout, loin s'en faut. Comment ne pas s'avouer que, dans notre cas, habiter en collectivité semblait pour l'heure une gageure, le "provisoire" ne cédant jamais sa place qu'au "momentané". Comme a si bien su le chanter - 195 -

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Mercredi 11 juillet : nous allumons la radio, dès notre lever, pour écouter les<br />

informations qui ne font part d'aucune catastrophe aérienne. Lucette se réfugie alors dans sa<br />

théorie de cauchemar… Bien que je ne l'en dissuade pas, je demeure perplexe, sachant trop<br />

bien qu'une telle vision ne saurait être fortuite. De toute façon, lieu et temps nous ont toujours<br />

échappé en matière d'événements appelés à se produire, exception faite pour le slalom spécial<br />

des olympiades de Grenoble, le 17 février 1968...<br />

En fin de matinée, je me suis rendu au service des fournitures de bureau de la Sécurité<br />

sociale, où Robert Rebattu s'affaire seul, en l'absence de Giorgi. Je conte à Robert nos<br />

dernières mésaventures, dont la résiliation de l'acte d'achat de l'appartement que nous<br />

"convoitions". Robert m'invite alors à faire parvenir une demande de logement, comme il vient<br />

de le faire pour son compte, à la C.P.L.O.S.S. (commission paritaire des logements des<br />

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chercher lui-même, auprès de monsieur Valentin, responsable de tous les projets de cet ordre,<br />

les imprimés nécessaires à l'opération.<br />

Monsieur Valentin, homme affable d'une cinquantaine d'années, effectue ses<br />

permanences dans un petit bureau qui jouxte le mien au 14 boulevard Notre-Dame. De ce fait,<br />

nous nous connaissons déjà et, sans que nous entretenions des rapports particuliers dans notre<br />

profession, il est au courant de tous les tracas que j'ai pu subir avec notre employeur. Il ne lui<br />

en faut pas davantage pour remettre à Robert Rebattu deux exemplaires d'un formulaire sur<br />

lesquels il ne me reste plus qu'à établir ma demande de logement à l'O.P.A.C. (Office public<br />

d'aménagement et de construction). Qui plus est, il se trouve que le "paranormal", de par la<br />

relation de cause à effet qu'il inspire, m'autorise à bénéficier du statut de "cas social", et que<br />

mon dossier, une fois rempli, sera traité en priorité. Monsieur Valentin s'est avancé au point de<br />

promettre à Robert que les Pantel seraient logés, au pis aller, à la fin de l'automne, les vacances<br />

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Si elle atténuait sensiblement le désappointement de la veille, cette bonne nouvelle que<br />

Robert nous apporta en fin d'après-midi ne résolvait pas tout, loin s'en faut. Comment ne pas<br />

s'avouer que, dans notre cas, habiter en collectivité semblait pour l'heure une gageure, le<br />

"provisoire" ne cédant jamais sa place qu'au "momentané". Comme a si bien su le chanter<br />

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