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Magazine Rénovation Urbaine n° 9 mars-avril 2013 - pdf - Anru

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Le magazine<br />

n o 9<br />

« tout doit partir<br />

des habitants »<br />

<strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

sondage<br />

CSA / <strong>Anru</strong><br />

exclusif<br />

La vie des<br />

quartiers<br />

CéCile duflot,<br />

ministre de l’égalité<br />

des territoires et du logement<br />

DOSSIER<br />

médiation nomade, à clichy-sous-bois / lfm, radio féminine et citoyenne /<br />

gouvernance, culture et rénovation à bilbao / écrivain en résidence à angers<br />

cités actives<br />

avec les conclusions du civ


02<br />

La culture avec<br />

un grand M située à mi-chemin entre les<br />

quartiers Reynerie et bellefontaine,<br />

c’est la ville de toulouse tout<br />

entière qui, depuis un an déjà,<br />

peut profiter des 1 400 m 2 d'une<br />

médiathèque moderne et épurée :<br />

le Grand M !<br />

→ Quartier de la reynerie, toulouse (crédit photo : ville de toulouse - arthur péquin)


pages<br />

sommaire n o 9 <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

19<br />

22<br />

04 miX<br />

06<br />

sondage<br />

CSA / <strong>Anru</strong><br />

exclusif<br />

La vie des<br />

quartiers<br />

PersPective<br />

entretien avec Cécile Duflot, ministre de l’Égalité<br />

des territoires et du Logement<br />

« tout doit partir des habitants »<br />

08 d’eXPérience<br />

PaROLeS De CamiOnneTTe<br />

09 DOSSIER<br />

16 cités actives<br />

10<br />

11<br />

civ, ville humaine<br />

12<br />

15<br />

parole donnée<br />

15<br />

16<br />

solidarités<br />

17 inFluences<br />

biLbaO, eSPagne<br />

Gouvernance, culture et rénovation<br />

DOSSIER cités<br />

actives<br />

page26<br />

18<br />

22<br />

anru<br />

18 G. haMeL va quitteR ses fonctions /<br />

JouRnÉe nationaLe des chefs<br />

de pRoJets<br />

19 SOnDagE<br />

22<br />

23 ProFil<br />

Dalida, primo-accédante<br />

à la propriété, colombes<br />

24 reg'arts<br />

25<br />

pages<br />

initiatives<br />

les enFants<br />

de la radio<br />

la vie des quartiers<br />

24 angers, lettres à domicile<br />

25 Saint-Herblain, la maison des arts<br />

mise sur la mixité<br />

26 initiatives<br />

mantes-la-Jolie : les enfants de la radio<br />

27 ParticiPe Passé<br />

09<br />

16<br />

06<br />

pages<br />

07<br />

entretien<br />

cécile duflot,<br />

ministre de l’égalité<br />

des territoires<br />

et du logement<br />

photos couverture : ministère de l’égalité des territoires<br />

et du logement ; istockphotos ; Juliette monbureau / oup<br />

© Juliette monBureau / oup<br />

© lFm<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

03<br />

magazine publié par l’anRu,<br />

69 bis rue de Vaugirard, 75006 Paris<br />

directeur de publication :<br />

pierre sallenave<br />

directrice de la rédaction :<br />

élizabeth Broge<br />

Rédacteur en chef :<br />

Jean-denis espinas<br />

coordination éditoriale :<br />

Béatrice rochat<br />

comité de rédaction :<br />

Wilfrid Geiller, thierry asselin, céline Gipoulon,<br />

Jean-charles le Guen, élodie Bugnazet,<br />

Béatrice rochat<br />

secrétaire de rédaction :<br />

Gabriel henry<br />

ont contribué à ce numéro :<br />

alessandro casamento, Jean-denis espinas,<br />

Gabriel henry, aude Joly, camille lefebvre,<br />

Fanny poste, isabelle sanséau, Françoise sigot<br />

conception & réalisation :<br />

à vrai dire la ville<br />

Graphisme : Flgraf / François lemaire,<br />

sonia Blanchard<br />

impression : édiphisme<br />

Imprimé sur papier recyclé


04 mix<br />

vitRy-suR-seine<br />

baLzaC SquaTTe Le LOuVRe !<br />

implanter un morceau d'un immeuble de la cité Balzac de vitry-sur-seine au<br />

milieu de la cour du louvre : si le collectif d’artistes 6bis mène son projet à terme,<br />

la dernière étape risque de marquer les esprits. le collectif mèle les conceptions<br />

du patrimoine et nous rappelle que l’art est dans chaque chose, à condition que<br />

l’on déplace son regard.<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

© daniel purroy<br />

gOneSSe / ViLLieRS-Le-beL<br />

sous l’épiderme du cliché<br />

mi-documentaire, mi-fiction, le film Épidermique dissèque sans<br />

concession le cliché du « jeune de banlieue ». en s’appuyant<br />

sur les jeux d’improvisation de 18 jeunes de Gonesse et villiersle-Bel,<br />

son réalisateur olivier mitterrand plonge le spectateur<br />

dans l’univers d’une petite bande aux dialogues vifs, nourris de<br />

vannes et de jeux de mots, sans jamais quitter le huis clos d’un<br />

minibus. un dvd doit bientôt sortir et des projections sont<br />

prévues en région parisienne.<br />

© paQ’la lune<br />

angeRS<br />

chantier<br />

artistiQue<br />

en cours<br />

la cité verneau des hauts de saintaubin<br />

est devenue le théâtre de scènes<br />

délirantes retraçant les aventures de<br />

la Famille Cartophille, que la compagnie<br />

PaQ’la Lune fait vivre au pied des<br />

résidences. ni grues ni pelleteuses à<br />

l’œuvre mais des artistes portant costume<br />

d’acteur ou de danseur. partis à la<br />

rencontre des habitants, ils les invitent<br />

à participer aux spectacles et immortalisent<br />

les scènes pour compléter la<br />

collection familiale de cartes postales en<br />

mouvement.<br />

http://www.famillecartophille.fr.<br />

© olivier mitterand


© Génération réactive<br />

STainS<br />

SainT LazaRe ReSSuSCiTé<br />

soutenu par l’unité de <strong>Rénovation</strong> urbaine<br />

de stains, le site « Reporter dans mon quartier »<br />

se présente d’abord comme le projet d'une la<br />

classe de 5 e du collège Maurice thorez. avec<br />

leurs petits moyens et leurs grandes idées, ces<br />

collégiens nous livrent une vision bien à eux<br />

du quartier du clos saint-Lazare. et quand<br />

ils ne sont pas sur leur blog, c’est à leur<br />

film qu’ils travaillent. une affaire à<br />

suivre donc.<br />

PaRiS, 1954-1962, « VieS D’exiL »<br />

Jusqu’au 19 mai <strong>2013</strong>, le palais de la porte dorée à paris propose<br />

une immersion dans le quotidien de familles migrantes<br />

algériennes en France, pendant la guerre d’algérie. d’abord reléguées<br />

dans des bidonvilles, beaucoup se sont ensuite installées<br />

dans les quartiers d’habitat social nouvellement construits.<br />

© m. hervo<br />

© hdr<br />

ROuen<br />

FréQuence citoyenne<br />

dans le quartier des hauts de rouen, la radio associative<br />

hdr diffuse sur les ondes depuis 15 ans déjà une programmation<br />

éclectique. multiculturelle et citoyenne, elle donne<br />

la parole aux habitants, aux associations comme aux<br />

entrepreneurs et s’engage auprès des écoles et collèges du<br />

quartier pour partager la culture radiophonique.<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

05


06 PersPective<br />

entretien cécile duflot,<br />

ministre de l’égalité des territoires et du logement<br />

« Tout doit partir<br />

des habitants »<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong>


À travers votre réflexion sur l’égalité des<br />

territoires, vous élargissez la géographie de<br />

la souffrance sociale au monde rural et à<br />

des secteurs urbains autres que les<br />

quartiers d’habitat social. Privilégiez-vous<br />

désormais des approches et des réponses<br />

plus transversales ?<br />

oui. l’enjeu, c’est notre cohésion nationale.<br />

Quand on aime son pays, on sait bien que l’égalité<br />

ne se découpe pas et on ne souscrit pas à<br />

la concurrence de tous contre chacun. par bien<br />

des aspects, les difficultés rencontrées dans<br />

des territoires hyper-ruraux recoupent celles<br />

des zones périurbaines, des bassins d’emplois<br />

désindustrialisés ou des quartiers sensibles de<br />

nos villes. dans la plupart de ces lieux se posent<br />

par exemple, à des degrés différents, de graves<br />

problèmes socio-économiques ou d’accessibilité<br />

aux services.<br />

notre responsabilité politique, c’est d’agir pour<br />

ces territoires qui payent plus que d’autres leur<br />

tribut à la crise en les mettant en capacité d’agir<br />

pour leur développement. il faut garantir à leurs<br />

habitants les mêmes opportunités d’accès à la<br />

santé, au numérique, à l’éducation ou à l’emploi.<br />

ce qui nécessite effectivement de sortir d’une<br />

vision cloisonnée de l’action publique et de proposer<br />

une ambition transversale, qui va au-delà<br />

des clivages entre la ville et la campagne, et des<br />

approches segmentées de chaque ministère.<br />

en quoi, pourquoi, la politique de la ville<br />

menée au cours des décennies passées<br />

n’a-t-elle pas, selon vous, été capable de<br />

satisfaire les attentes des habitants des<br />

quartiers ?<br />

parce que leur situation ne s’est pas améliorée.<br />

la politique de la ville ne peut être conçue en<br />

dehors d’une politique d’égalité plus globale. or,<br />

à mesure qu’ont augmenté les crédits dédiés à<br />

la politique de la ville dans les quartiers, diminuaient<br />

ceux dédiés au droit commun. en donnant<br />

d’une main, tout en retirant d’une autre,<br />

l’état ne peut s’étonner de la défiance que ressentent<br />

les habitants des quartiers envers lui.<br />

parce que ce sont ces territoires qui ont le plus<br />

besoin d’encadrement scolaire, de présence<br />

policière de proximité, de conseillers de pôle<br />

emploi, d’une offre de santé adaptée.<br />

le problème n’est donc pas vraiment la politique<br />

de la ville qui a parfois été très durement<br />

critiquée. il faut saluer le travail mené depuis<br />

plus de vingt ans par les acteurs sur le terrain,<br />

à la fois dans les associations et les collectivités.<br />

sans eux, la situation serait bien pire.<br />

mais peu d’actions structurées en faveur de<br />

l’emploi ont été menées pour lutter contre le<br />

taux de chômage exponentiel, véritable fléau<br />

dans ces quartiers. la question de l’implication<br />

des citoyens a aussi été oubliée, voire sciemment<br />

négligée. la peur des habitants a trop souvent<br />

fait partie de l’adn des pouvoirs publics.<br />

il est temps de changer de vision : on ne peut<br />

se cantonner à une logique de contrôle social,<br />

il faut redonner du pouvoir aux habitants. Je<br />

propose que lors de toute opération de rénovation<br />

urbaine, une part du budget autour de<br />

1% soit dédiée à la participation des habitants.<br />

J’appelle cette proposition le 1% citoyenneté.<br />

Face à l’inégalité persistante entre<br />

territoires, vous dénoncez les tentations<br />

libérales et prônez la refonte radicale de<br />

l’action publique. quels en seraient les<br />

contours ? quels en seraient les acteurs ?<br />

depuis une décennie au moins, toutes les politiques<br />

d’aménagement ont organisé la mise<br />

en œuvre d’une concurrence exacerbée entre<br />

les territoires. en généralisant le principe des<br />

appels à projet, par exemple, qui favorisent<br />

les collectivités les mieux dotées en ingénierie,<br />

aggravent de ce fait la situation des plus faibles,<br />

et le creusement des inégalités. de la même<br />

façon, sous couvert de rationalisation dans le<br />

cadre de la révision générale des politiques<br />

publiques, certains territoires ont vu fermer<br />

successivement une caserne, un tribunal et un<br />

service hospitalier.<br />

la Peur des habitants<br />

a troP souvent Fait<br />

Partie de l’adn<br />

des Pouvoirs Publics.<br />

Je refuse que de telles aberrations se reproduisent.<br />

il faut aujourd’hui construire une véritable<br />

coordination de l’état avec les collectivités<br />

territoriales, mais également entre les collectivités.<br />

dès qu’un projet ou un contrat sera élaboré,<br />

impactant massivement la vie des habitants, je<br />

souhaite que ces derniers soient réellement impliqués<br />

dans la construction des objectifs poursuivis.<br />

si l’on veut partir des potentialités d’un<br />

territoire pour bâtir son développement, qui de<br />

mieux que les acteurs locaux et les habitants<br />

pour aider à les identifier ? lors du comité interministériel<br />

des villes, il a été décidé d’inscrire de<br />

manière durable la participation des habitants<br />

comme une composante cruciale des projets<br />

et des futurs contrats uniques de ville. il ne faut<br />

pas que cette décision reste lettre morte.<br />

Le chantier de la rénovation urbaine<br />

représentait une opportunité majeure de<br />

concrétiser la ville durable que vous<br />

défendez. Comment a-t-elle été saisie ?<br />

À ce jour, nous sommes très en deçà de la mutation<br />

nécessaire. la ville durable repose sur l’articulation<br />

cohérente des préoccupations sociales,<br />

économiques et environnementales. la rénovation<br />

urbaine telle qu’elle a été menée par les<br />

précédentes mandatures n’a pas réussi, à mon<br />

sens, à répondre à ces défis. on peut bien sûr saluer<br />

certains projets bien menés. mais d’autres,<br />

montés trop vite, avec la pression de l’urgence,<br />

ne se sont pas appuyés sur une réflexion globale<br />

et partagée, qui seule permet de changer<br />

la vie des habitants. comment espérer retisser<br />

les liens si la fréquence de la desserte de transport<br />

ne correspond pas aux horaires de travail ?<br />

Je le répète, tout doit partir des habitants. il<br />

faut s’appuyer sur leur élaboration, de manière<br />

à répondre à leurs besoins et attentes et qu’ils<br />

puissent s’approprier pour longtemps leur lieu<br />

de vie. en combinant ces aspects, en partant<br />

des ressources locales et du potentiel des habitants,<br />

je suis persuadée que l’on peut insuffler<br />

une stratégie de développement pérenne sur le<br />

long terme. les annonces faites lors du comité<br />

interministériel des villes du 19 février vont en ce<br />

sens : réinvestissement du droit commun dans<br />

les quartiers, co-construction des projets, prise<br />

en charge intercommunale, ou encore développement<br />

des éco-quartiers. ce dernier point est<br />

essentiel à mes yeux. les quartiers populaires<br />

ont le droit à l’excellence environnementale.<br />

Le renouveau de l’offre de logement social<br />

est-il suffisant si on n’en revoit pas<br />

également les modalités d’accès ?<br />

c'est une question majeure. J’ai décidé d’ouvrir<br />

une large concertation sur les modalités d’attribution<br />

des logements sociaux. le projet de loi<br />

urbanisme et logement sur lequel je travaille<br />

actuellement et qui sera présenté cette année<br />

au parlement apportera aux procédures existantes<br />

un certain nombre d'améliorations. c'est<br />

un sujet déterminant pour nos concitoyens qui<br />

ont besoin de transparence, et pour l’aménagement<br />

équilibré de nos villes.<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

07


08 D’EXPÉRIENCE<br />

yazid Kherfi parcourt les quartiers à la nuit tombée pour, tout<br />

simplement… dialoguer. retour sur les déambulations nocturnes<br />

en camionnette d’un ancien détenu déterminé à changer le destin<br />

de jeunes en mal de repères.<br />

PaROLeS De CamiOnneTTe<br />

en tendant l’oreille, le soir, au chêne<br />

pointu à clichy-sous-Bois, on peut<br />

entendre des maximes de martin luther<br />

King ou de l’abbé pierre résonner dans<br />

les halls d’immeuble. c’est précisément<br />

ces lieux que yazid Kherfi, président de<br />

l’association Pouvoir d’Agir 93 a choisi<br />

d’investir avec son équipe de bénévoles.<br />

« Jeune, je les occupais déjà le soir. Je<br />

constate simplement que la majeure<br />

partie des difficultés des banlieues —<br />

violence, toxicomanie, dégradation —<br />

naissent à l’heure où centres sociaux et<br />

MJC font portes closes ». celui que les<br />

institutions pénitentiaires cataloguaient<br />

« irrécupérable » est devenu consultant<br />

en prévention urbaine. aujourd’hui, il<br />

aide ceux à qui il ressemblait plus jeune,<br />

pour empêcher leur dérive faute de<br />

dialogue. pour s’adapter à ce public fragile,<br />

il crée en 2010 l’association Pouvoir<br />

d’Agir 93 et Médiation Nomade, avec<br />

l’aide de la fondation abbé pierre.<br />

À l’heure « où seul le commissariat est<br />

ouvert », yazid Kherfi arrête sa camionnette<br />

bariolée sur les parkings des cités.<br />

en quinze minutes, grâce aux habitués<br />

qui ont pris le pli, le montage du barnum<br />

est achevé, tables et chaises sont installées.<br />

une trentaine de personnes se succèderont<br />

jusqu’à minuit pour échanger<br />

dans une ambiance chaleureuse.<br />

les mères de famille, les enfants, puis<br />

les adolescents que yazid ne se prive<br />

pas d’aller rejoindre directement dans<br />

les halls d’immeubles. « Au départ, on<br />

parle de tout et de rien, du dernier match<br />

de foot, des histoires du quartier. Très<br />

vite, les jeunes se livrent. J’observe surtout<br />

une forme de découragement face<br />

aux institutions, aux acteurs locaux. On<br />

veut leur redonner l’envie de se bouger,<br />

de se sentir citoyen ».<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

© pouvoir d'aGir 93<br />

1 soir<br />

par semaine<br />

5h<br />

de dialogue<br />

30<br />

participants<br />

en moyenne<br />

provocateur … de rencontres<br />

au fil du temps, les missions de Médiation<br />

Nomade ont pris de l’ampleur :<br />

accompagnement scolaire, rencontre<br />

parent/professeur, aide administrative,<br />

remise en relation avec les partenaires<br />

sociaux, médiation avec les forces de<br />

l’ordre, prévention contre drogues et<br />

alcools, rénovation d’appartements…<br />

Quelles qu’elles soient, le dialogue<br />

prime. « La rencontre a quelque chose<br />

de magique, il faut la provoquer avec des<br />

gens qui ne se seraient pas croisés, des<br />

personnes extérieures au quartier. Elle<br />

change le regard des uns sur les autres,<br />

la parole est plus forte que la violence »<br />

explique yazid Kherfi. À ses côtés sont<br />

donc venus échanger des travailleurs<br />

sociaux, des jeunes de quartiers voisins,<br />

un chanteur de rap, un militant venu du<br />

Bronx, des étudiants, de futurs chefs<br />

d’entreprises et même des policiers.<br />

pourtant, à travers son travail, yazid<br />

observe des clichés encore difficiles à<br />

© istocKphoto<br />

dépasser comme l’incompréhension<br />

entre générations, la difficulté à faire<br />

participer les jeunes filles…<br />

pansement<br />

yazid Kherfi a bien conscience de combler<br />

aujourd’hui un manque. « L’association<br />

n’est qu’un pansement, nous restons tant<br />

que les Villes n’ont pas pris le relais. Je me<br />

bats pour la création de lieux ouverts à<br />

tous, le soir ». en attendant, sur les territoires<br />

qu’il a parcourus, yazid Kherfi initie<br />

la transition : « certains jeunes viennent<br />

tous les vendredis et sont, du coup,<br />

devenus les meilleurs médiateurs ! Je leur<br />

propose de venir dans d’autres quartiers ».<br />

après clichy-sous-Bois, c’est au cœur des<br />

quartiers de Bondy, amiens et aubervilliers<br />

que Médiation Nomade continuera<br />

son itinérance. l’association n’a pas fini de<br />

faire parler. aude Joly<br />

@ www.kherfi.fr<br />

La camionnette de la Médiation<br />

Nomade, à clichy-sous-bois


© Juliette monBureau / oup<br />

DOSSIER<br />

cités actives<br />

À bas les idées reçues, les quartiers sont engagés ! Sous des formes d'expressions<br />

multiples, ils s'investissent plus que jamais dans l'élaboration des projets et dans leurs<br />

lendemains. Une tendance reconnue lors du dernier Comité Interministériel des Villes.<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

9


10<br />

DOSSIER cités actives<br />

CIV, VILLe huMaIne<br />

l’action de solidarité nationale menée par l’état en direction des quartiers défavorisés méritait<br />

d’être repensée. lors du dernier civ, le premier ministre a dévoilé une politique de la ville<br />

nouvelle manière. elle affirme haut et fort le rôle des habitants.<br />

Le Comité Interministériel des Villes (CIV) du<br />

19 février dernier a levé le voile sur le futur de la<br />

politique de la ville. Le gouvernement s’engage<br />

sur cinq points : construire ensemble la politique<br />

de la ville, territorialiser les politiques de<br />

droit commun, rénover et améliorer le cadre<br />

de vie, concentrer les interventions publiques<br />

et lutter contre les discriminations. 27 décisions<br />

en découlent. Présentées à Jean-Marc<br />

Ayrault par François Lamy, ministre délégué<br />

à la ville, elles s’inspirent très largement des<br />

préconisations de la concertation nationale<br />

« Quartiers, engageons le changement ! ». Un<br />

processus largement ouvert durant lequel les<br />

habitants des quartiers ont pu, entre octobre<br />

2012 et janvier <strong>2013</strong>, s’exprimer au même titre<br />

que les acteurs de la politique de la ville.<br />

à l’écoute de tous les acteurs<br />

Quatre « rencontres avis citoyens », mobilisant<br />

en début d’année pas moins de 1 600<br />

personnes à Rennes, Bobigny, la Seyne-sur-<br />

Mer et Strasbourg, ont notamment donné<br />

la possibilité aux habitants de témoigner de<br />

leurs attentes. Ils ont pu apporter, surtout à la<br />

réflexion globale, une contribution irremplaçable<br />

: le savoir d’usage. Cette large mobilisation<br />

a permis de prendre la mesure de la volonté<br />

qui les anime de participer à la vie locale.<br />

Leurs voix semblent avoir été entendues. Pour<br />

preuve, dans les décisions présentées lors du<br />

CIV, la toute première est intitulée « donner<br />

toute leur place aux acteurs de proximité et aux<br />

habitants » ! Lors de cette importante phase<br />

amont, des cahiers d’acteurs réservés cette<br />

fois aux professionnels de la politique de la<br />

ville leur ont permis de s’exprimer librement<br />

et d’émettre des propositions. Plus de 600 cahiers<br />

ont ainsi été remis.<br />

Parallèlement 150 personnes, élus, représentants<br />

de l’État, associations et habitants, ré-<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

© a. louBry / ville de rouBaix<br />

partis en trois groupes de travail, ont débattu<br />

de différentes thématiques afin de formuler<br />

ensemble les préconisations proposées au ministre<br />

délégué à la ville.<br />

concertation nourricière<br />

La traduction très directe des idées émises<br />

par ces groupes de travail dans les engagements<br />

de l’État a été particulièrement appréciée<br />

au terme du processus. Ainsi, pour<br />

Annie Guillemot, maire de Bron et co-présidente<br />

du groupe Contractualisation et gouvernance,<br />

« l’objectif était de faire émerger des<br />

contrats de ville nouvelle génération. À l’issue des<br />

débats, nous nous sommes entendus sur l’idée<br />

d’un contrat unique, traitant à la fois des aspects<br />

urbains et humains, en mobilisant le plus grand<br />

nombre d’acteurs possible. Nous voulions qu’il<br />

s’inscrive dans un cadre intercommunal et que<br />

les habitants soient associés autant que possible<br />

à sa définition et à son suivi ». Des intentions<br />

clairement confirmées par les engagements<br />

gouvernementaux sur la concentration des<br />

interventions publiques et sur la construction<br />

commune de la politique de la ville.<br />

Gabriel henry<br />

Lancement de la concertation nationale,<br />

le 11 octobre 2012 à Roubaix


questions à pierre sallenave, directeur général de l'anru<br />

Le comité interministériel des villes a rendu<br />

publiques, le 19 février dernier, 27 décisions<br />

autour de cinq axes stratégiques. Lesquelles<br />

revêtent-elles une importance particulière<br />

pour l’anRu ?<br />

deux décisions sont essentielles à mes yeux.<br />

la décision 17 qui assure la bonne fin du pnru,<br />

dont l'échéance est reportée de fin <strong>2013</strong> à fin<br />

2015. le gouvernement s'est engagé le 19 février<br />

à assurer le financement des opérations<br />

prévues jusqu'à leur terme. nous attendions<br />

cette confirmation depuis un moment. elle<br />

conforte l'action menée depuis bientôt 10 ans<br />

par les élus, les acteurs de terrain, toutes les<br />

équipes de l'agence, des services de l'etat mobilisés<br />

au quotidien, avec l'objectif de mener<br />

à bien ce programme national. la décision 18,<br />

quant à elle, vise à lancer, sur la période 2014-<br />

2020, une nouvelle génération de projets de<br />

renouvellement urbain qui s'inscrivent dans le<br />

cadre des futurs contrats de ville.<br />

deux décisions entérinent, l’une l’achèvement<br />

du pnRu et, l’autre, l’intégration d’une nouvelle<br />

génération d’opérations de renouvellement<br />

urbain dans les contrats de ville 2014-<br />

2020. quelles pourraient être, dans cette<br />

perspective, les constantes et les évolutions<br />

de l’action de l’agence ?<br />

les futurs projets de renouvellement urbain seront,<br />

comme pour le pnru, construits et portés<br />

par les acteurs locaux, sur la base de conventions<br />

et d'engagements financiers pluriannuels.<br />

le ministre de la ville l'a rappelé, ces projets<br />

seront désormais adossés à un projet global<br />

de territoire porté par l'intercommunalité, et<br />

c'est une très bonne chose, car c'est l'un des<br />

facteurs clés d'une meilleure intégration des<br />

quartiers dans les dynamiques d'agglomération.<br />

la rénovation urbaine ne peut se penser<br />

que dans une perspective qui allie l'urbain,<br />

l'économique, le social et l'environnemental.<br />

ces paramètres sont indissociables.<br />

par ailleurs, nous irons vers une simplification<br />

de nos règlements, ce qui ne sera pas pour<br />

déplaire à certains ! les règles d'intervention<br />

devront être plus incitatives, voire innovantes<br />

et prendre en compte les spécificités locales<br />

en s'adaptant aux territoires comme cécile<br />

duflot, ministre de l'egalité des territoires et<br />

du logement, l'appelle de ses vœux.<br />

symboliquement, la première des décisions<br />

du civ est de « donner toute leur place aux<br />

acteurs de proximité et aux habitants ». L’an-<br />

Ru restait jusqu’ici, sur ce plan, en retrait des<br />

collectivités. et à l’avenir ?<br />

l'expérience du pnru a permis d'apprendre<br />

en marchant et les méthodes de concertation<br />

ont beaucoup progressé depuis dix ans. Je ne<br />

peux donc pas laisser dire que l’anru est restée<br />

jusque là en retrait dans ce domaine.<br />

Je rappellerai que la rénovation urbaine<br />

concerne 4 millions d'habitants.<br />

on ne peut pas modifier un quartier de fond<br />

en comble sans associer ceux qui y vivent et<br />

y travaillent. la concertation a toujours été au<br />

cœur des préoccupations de l'agence et de<br />

ses représentants locaux. nous avons toujours<br />

donné une impulsion forte avec les moyens<br />

« s'inscrire durablement<br />

dans la perspective<br />

d'une ville solidaire »<br />

financiers nécessaires, sachant qu'il incombait<br />

aux élus et aux acteurs locaux de la mettre<br />

en œuvre. sans vraie concertation il n'y a pas<br />

d'appropriation par les habitants.<br />

pour autant, l'expérience accumulée montre<br />

qu'il est possible de faire mieux.<br />

dans le cadre de la poursuite de ce programme,<br />

telle qu'elle vient d'être décidée,<br />

l'anru ira donc encore plus loin en renforçant<br />

ses exigences.<br />

que peuvent apporter les nouveaux critères<br />

de la géographie prioritaire par rapport à ceux<br />

antérieurs du pnRu ?<br />

ils vont permettre de concentrer efforts et<br />

moyens sur un noyau dur de quartiers qui en<br />

ont le plus besoin. l’anru, à l’intérieur de ces<br />

quartiers prioritaires, interviendra sur ceux<br />

présentant les plus forts dysfonctionnements<br />

sociaux et urbains.<br />

© anru<br />

un contrat de ville cadre unique et global apparaît.<br />

plus global, plus intercommunal, plus<br />

partenarial, plus ouvert à la société civile et<br />

aux habitants. quelles perspectives d’intervention<br />

ouvre-t-il à l’anRu ?<br />

cette nouvelle ambition que représente le<br />

contrat de ville unique permettra de prendre en<br />

compte toutes les dimensions qui font la ville et<br />

d'élaborer des projets à une échelle plus vaste,<br />

pour concourir à l'objectif premier : réduire<br />

les inégalités et s'inscrire durablement dans la<br />

perspective d'une ville solidaire.<br />

a l'image de ce qui se passe dans certains pays<br />

européens, en France, il nous faut encore faire<br />

évoluer certains modèles. il en va de l'avenir<br />

de nos concitoyens dans une ville qui leur<br />

ressemble.<br />

ayons tous à l'esprit que la jeunesse de notre<br />

pays se trouve massivement dans ces quartiers,<br />

qui sont le creuset de notre prospérité future.<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

11


12<br />

DOSSIER cités actives<br />

paroLe donnée<br />

La concertation dans tous ses états<br />

l’anru n’exprime pas d’exigences absolues en termes de concertation dans les projets<br />

de rénovation urbaine, mais elle incite vivement les porteurs de projet à mettre en place<br />

la démarche. aujourd’hui, elle capitalise les expériences.<br />

Si la concertation est de tous les projets de rénovation,<br />

c’est avant tout parce qu’elle est bel et<br />

bien entrée dans les mœurs, notamment celles<br />

des élus locaux. « Elle représente pour eux, soutient<br />

Éléonore Hauptmann, responsable du<br />

Pôle d’Appui Opérationnel de l’ANRU, un réel<br />

outil d’aide à la décision. La concertation facilite<br />

l’acceptabilité de projets qui sont très perturbateurs<br />

pour les riverains et souvent sources de malentendus.<br />

Un des enjeux est la bonne compréhension<br />

des différentes parties ». L’Agence n’a pas de rôle<br />

directif en la matière, mais elle apporte un<br />

soutien méthodologique aux porteurs de projet.<br />

Elle a ainsi proposé, dès l'origine du PNRU,<br />

une fiche repère riche d’éléments de méthodologie<br />

et d’exemples sur lesquels peuvent<br />

s’appuyer les équipes porteuses de projet. Un<br />

appui financier est également envisageable.<br />

L’ANRU subventionne à hauteur de 50% la<br />

mission d’un expert en concertation, mobilisé<br />

à la demande d’une collectivité. Elle peut<br />

aussi, dans certains cas, apporter directement<br />

elle-même un appui opérationnel grâce à son<br />

« pôle d'experts ». Ces missions ne sont déclenchées<br />

que lorsque les porteurs de projet<br />

font face à des situations complexes qui requièrent<br />

un regard extérieur. Une situation de<br />

blocage extrêmement rare, à laquelle Éléonore<br />

Hauptmann n’a été confrontée que trois fois.<br />

une relative prudence<br />

Consciente de la multitude des démarches<br />

engagées, l’ANRU a souhaité en constituer<br />

une vue d’ensemble, à travers l’organisation<br />

d’un atelier de capitalisation, qui permettra<br />

de dresser un état de l’art sous la<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

© cuadd<br />

forme d’un guide méthodologique. Depuis<br />

décembre 2012, Hervé Saillet, directeur de<br />

CUADD Conseil et expert du pôle concertation<br />

de l’ANRU, rencontre des porteurs de<br />

projet, recueille leurs expériences et retient<br />

les bonnes pratiques. L’un de ses objectifs<br />

est de faire émerger les fondements communs<br />

d’une démarche qui varie infiniment<br />

d’un projet à l’autre. Car, témoigne-t-il :<br />

« Chaque équipe de projet a développé ses propres<br />

méthodes. Il y a une multitude de manières de<br />

concerter ! ».<br />

Le critère majeur de classification de ces expériences<br />

demeure le degré d’association des<br />

habitants aux décisions. « À l’heure actuelle,<br />

la concertation dans les projets de rénovation<br />

consiste, la plupart du temps, à recueillir la pa-<br />

coproduction avec les habitants dans le cadre de<br />

l'aménagement de la plaine centrale, à Grigny<br />

role des habitants et à les informer » explique<br />

Éléonore Hauptmann. C’est en quelque sorte<br />

le premier stade d’un processus qui, en fonction<br />

des moyens et du savoir-faire des porteurs<br />

de projet, mais aussi et surtout de la<br />

volonté politique, peut être plus ou moins<br />

poussé. « La palette des possibilités est large,<br />

allant jusqu’à la coproduction avec les habitants,<br />

même si ce cas de figure mériterait d’être<br />

développé » confirme Hervé Saillet. Ces derniers<br />

n’ont d’ailleurs pas toujours la volonté<br />

ni la possibilité de dépasser ce stade informatif.<br />

Participer à la concertation demande<br />

du temps et, pour les néophytes, certains<br />

aspects techniques peuvent être difficiles<br />

à appréhender à court terme. Le critère du<br />

temps est donc un autre aspect décisif de la<br />

démarche. Gabriel henry<br />

© istocKphoto


entretien avec rené girard,<br />

habitant du quartier malakoff à nantes<br />

« La boutique gPV,<br />

un outil formidable »<br />

Je participe depuis 2003 à la concertation<br />

du projet malakoff à nantes, dont la partie<br />

amont est achevée, alors que les secteurs<br />

centre et aval sont encore en travaux. en<br />

première phase, les habitants ont été très<br />

impliqués, dans le cadre d’ateliers mensuels<br />

rassemblant l’architecte, gérard Penot, le<br />

bailleur, nantes Habitat, et la collectivité.<br />

J’ai le sentiment d’un dialogue constructif<br />

au cours duquel les habitants ont été écoutés,<br />

entendus même ! ainsi, nous avons<br />

contribué à faire évoluer le projet, en particulier<br />

certains tracés de rues. Concernant<br />

les parties encore en travaux du projet malakoff,<br />

je regrette une concertation moins<br />

soutenue. Toutefois, je suis globalement satisfait<br />

du projet et de la démarche et trouve<br />

formidable un outil tel que la boutique gPV<br />

à laquelle les habitants se rendent pour<br />

échanger, s’informer, faire part de difficultés<br />

liées aux mises en chantier.<br />

questions à francK leibundgut,<br />

chargé de mission, pôle concertation, agence ville ouverte<br />

Comment définiriez-vous le rôle<br />

de concertant ?<br />

nous sommes à la fois urbanistes et concertants,<br />

deux compétences qui se nourrissent<br />

l’une l’autre au sein de l’agence. notre mission<br />

est d’accompagner, valoriser mais aussi rendre<br />

compte de la parole des habitants. dans cette<br />

perspective, il est indispensable de définir<br />

très tôt leurs marges de manœuvre réelles et<br />

d’expliciter les points sur lesquels leur avis et<br />

leur expertise pourront amender le projet.<br />

quels sont les intangibles d’une « bonne »<br />

concertation ?<br />

si chaque concertation est unique, nous<br />

veillons à l’équilibre de trois étapes<br />

fondamentales. une préalable, de<br />

mobilisation et d'information qui, si elle<br />

se fonde sur des productions originales,<br />

permet d’interpeller vraiment les habitants.<br />

nous établissons ensuite un cadre<br />

d’échanges autour d’une double exigence : la<br />

Jusque<br />

dans les halls<br />

Le quartier Malakoff, à Nantes, possède<br />

une longue expérience en matière de<br />

concertation. Initiée dès 2000, lorsque le<br />

quartier est retenu au titre de Grand Projet<br />

de Ville (GPV), la démarche s’est poursuivie<br />

jusqu’en 2008. Elle s’articulait autour d’un<br />

groupe de pilotage, « vivre à Malakoff Pré-<br />

Gauchet », réunissant régulièrement 70 élus,<br />

habitants et représentants institutionnels<br />

et associatifs, cherchant à dégager de leurs<br />

discussions les grandes lignes du projet.<br />

Parallèlement, des ateliers thématiques<br />

mensuels, animés par l’équipe de maîtrise<br />

d’ouvrage du projet, donnaient également<br />

la parole aux habitants. Au terme de chacun<br />

d’eux, un compte-rendu était transmis<br />

constitution d’un langage commun au moyen<br />

de photographies, cartographies, maquettes ;<br />

et le développement de rencontres « hors<br />

salle » en allant voir les gens là où ils se<br />

trouvent, dans l’espace public, ou en se<br />

réunissant chez eux, entre voisins. le dernier<br />

temps, celui de la restitution, est pour nous<br />

tout aussi crucial. À chaque fin d’atelier,<br />

nous fournissons un compte-rendu détaillé<br />

à l’ensemble des parties prenantes. chacun<br />

aux porteurs de projet afin qu’ils prennent<br />

en compte, autant que possible, les<br />

contributions émises.<br />

Au quotidien, l’équipe GPV a mené des actions<br />

destinées à informer les habitants avec<br />

la ferme résolution de jouer la proximité. La<br />

convivialité des « hall cocktails », qui investissaient<br />

en toute simplicité les entrées<br />

d’immeubles, permettait ainsi à l’équipe<br />

d’échanger avec les riverains, y compris<br />

ceux qui ne fréquentaient pas les réunions<br />

de concertation. Aujourd’hui, le projet est<br />

encore concerté, mais plus ponctuellement,<br />

autour de thèmes précis comme, par exemple<br />

en 2011, les futurs espaces de jeux dans la<br />

partie aval du quartier. Gh<br />

« maintenant, c'est notre projet ! »<br />

© Juliette monBureau / oup<br />

doit pouvoir s’y reconnaître, une manière<br />

aussi de faciliter l’appropriation du projet.<br />

Quand, lors de la présentation finale, un<br />

habitant nous confie « maintenant, c’est<br />

notre projet ! », nous pouvons dire que la<br />

mission est accomplie. aude Joly<br />

@ www.ville-ouverte.com<br />

bande-dessinée sur<br />

la concertation du projet<br />

de rénovation de la noue,<br />

à Montreuil<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

13


14<br />

DOSSIER cités actives<br />

Quatre ChaIses, une tabLe<br />

À en croire certains, la concertation publique relèverait d’une alchimie mystérieuse nourrie surtout de nombreux<br />

artifices. or, de la méthode et beaucoup de volonté politique sont les véritables clés du succès.<br />

On a pu assister depuis quelques années à une<br />

étonnante surenchère des moyens déployés au<br />

nom de la concertation publique. La demande<br />

des collectivités pousse, il est vrai, à la sophistication,<br />

le marché et les effets de mode transformant<br />

une des expressions les plus basiques<br />

de la vie démocratique locale en un show technologique<br />

plus ou moins clinquant. Batteries<br />

de vidéos, télévotation en direct, réalité augmentée…<br />

et l’Agora devient Barnum. Ce déploiement<br />

d’artifices n’est hélas pas innocent.<br />

La mise en scène masque fondamentalement<br />

la pauvreté de l’échange, l’impossibilité d’une<br />

contribution fondée, l’échec annoncé de la coproduction.<br />

Étonnamment, même lorsque les<br />

moyens se réduisent, et c’est le cas pour nombre<br />

de processus de concertation suscités par la<br />

rénovation urbaine, la question matérielle demeure<br />

prédominante. Publications, expositions,<br />

projections s’imposent comme les indis-<br />

quelle est votre philosophie ?<br />

au fondement de notre démarche, il y a l’idée<br />

que la participation colle au projet, particulièrement<br />

en termes de temporalité. pour y parvenir,<br />

nous essayons autant que possible de<br />

travailler avec les habitants en même temps<br />

que la maîtrise d’œuvre. nous sommes par<br />

ailleurs très attachés au principe de co-coproduction.<br />

selon nous, l’habitant est au même<br />

niveau que le décideur et le concepteur. Je<br />

n’ai pas dit non plus au-dessus. cela signifie<br />

qu’à la fin de la démarche, le projet a tellement<br />

été débattu qu’il est parfaitement approprié<br />

et partagé : personne ne sait d’où viennent<br />

les propositions. on se définit comme facilitateurs,<br />

voire comme traducteurs, et dans<br />

les deux sens. nous essayons de faire que les<br />

différents acteurs se comprennent les uns les<br />

autres. enfin, nous pensons qu’il est extrêmement<br />

utile de présenter les résultats de<br />

l’implication des habitants. c’est souvent la<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

pensables vecteurs de l’échange alors que bien<br />

souvent ils ne peuvent prétendre qu’à le nourrir,<br />

l’information demeurant l’indispensable préalable<br />

au dialogue.<br />

L’immense majorité des organisateurs — parfois<br />

l’immense majorité des participants — n’est,<br />

il faut le reconnaître, même pas consciente de<br />

ces faux-semblants. Une question candide posée<br />

a posteriori suffit à en juger : la concertation<br />

a-t-elle été réussie ? Si la réponse se perd<br />

dans l’énumération des moyens mis en branle<br />

ou additionne les réunions publiques et leurs<br />

participations record, il est légitime de s’inquiéter.<br />

Rien dans tout cela ne garantit d’une<br />

quelconque manière le succès de la concertation.<br />

Seul devrait-on retenir le résultat : le<br />

projet a-t-il évolué depuis sa formulation initiale<br />

? Peut-il s’enorgueillir d’apports citoyens ?<br />

La société locale a-t-elle gagné à s’impliquer ?<br />

meilleure garantie de pérenniser la concertation,<br />

en gommant les a priori entre acteurs :<br />

un élu n’est pas quelqu’un qui a décidé tout<br />

seul dans son coin, un archi ne dessine pas<br />

sans observer ni écouter, et un habitant ne dit<br />

pas toujours non à tout.<br />

À quels moyens recourez-vous ?<br />

nous avons une multitude d’outils et de méthodologies,<br />

mais nous partons du principe<br />

qu‘il y a plein de choses, malheureusement<br />

négligées, qui se font sur les territoires. nous<br />

démarrons donc chacune de nos démarches<br />

par un diagnostic. les pratiques et les usages<br />

du territoire une fois identifiés, nous adaptons<br />

ou choisissons nos outils. nous ne croyons<br />

pas à une démarche unique. il y a des gens<br />

qui n’écrivent pas, qui ne parlent pas, qui ne<br />

peuvent pas se déplacer, ou qui ne viennent<br />

pas aux réunions publiques. c’est d’ailleurs la<br />

majorité. de ce point de vue, nous ne cher-<br />

Autrement-dit, la finalité même du processus<br />

d’échanges a-t-elle été respectée ? Ces interrogations<br />

sont d’évidence délicates car elles renvoient<br />

fondamentalement à la volonté politique,<br />

accessoirement technique, de partager le projet.<br />

Malgré l’impératif légal et la diffusion galopante<br />

de la pratique, beaucoup n’y sont pas prêts. Une<br />

fois le pas franchi pourtant, se laisser guider<br />

par le bon sens. Annoncer d’emblée, et sans<br />

ambiguïté l’objet de la démarche et ses limites<br />

éventuelles, fixer les modalités de l’échange,<br />

livrer toute information utile à l’engagement<br />

du débat, ménager les temps indispensables à<br />

l’appropriation des contenus et à la formulation<br />

de contributions autant qu’à leur analyse par la<br />

maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre, justifier<br />

des choix de ces derniers, présenter le projet<br />

amendé, valoriser la méthode et ses résultats…<br />

Revenir en un mot au dialogue et célébrer<br />

ses vertus. Jean-denis espinas<br />

l’association robins des villes milite pour un dialogue sur la ville au plus près des citoyens.<br />

entretien avec Fabien Bressan, son délégué général.<br />

« un habitant ne dit pas toujours non à tout »<br />

© roBins de villes<br />

chons pas la représentativité absolue mais la<br />

diversité. on reconnaît le droit aux gens à ne<br />

pas participer.<br />

propos recueillis par camille Lefebvre<br />

@ www.robinsdesvilles.org


© istocKphoto<br />

En pleine réforme des Contrats urbains de<br />

cohésion sociale (CUCS), dont le Conseil<br />

interministériel des villes a fait l’annonce le<br />

19 février, l’Acsé s’est donnée une feuille de<br />

route claire pour <strong>2013</strong>. Elle met au centre de<br />

ses préoccupations le soutien aux associations<br />

de proximité dans tous les domaines<br />

intéressant la vie des habitants. Avec la lutte<br />

contre les discriminations, il s’agit d’une de<br />

ses priorités transversales. L’Acsé finance déjà<br />

plus de 7 000 associations, petites et grandes,<br />

et 96 % de ses crédits sont déconcentrés sur<br />

les territoires au bénéfice des collectivités et<br />

soLIdarItés<br />

« L’association est un moyen d’expression citoyenne »<br />

Le renfort à la vie associative est<br />

au cœur des priorités de l’agence pour<br />

la cohésion sociale et l’égalité des<br />

chances (acsé).<br />

du tissu associatif, dans le cadre des CUCS. Des<br />

associations, têtes de réseau au plan national,<br />

dans des domaines aussi divers que l’éducation<br />

populaire, la création d’activités, la prévention<br />

et la lutte contre les discriminations, font partie<br />

des bénéficiaires. Charge à elles d’accompagner<br />

les acteurs locaux dans les quartiers. Mais<br />

« il est aussi indispensable d’aider les associations<br />

de proximité, porteuses de lien social et de vie dans<br />

les quartiers », insiste Sylvie Durand-Trombetta,<br />

directrice générale adjointe. C’est souvent<br />

en leur sein que s’exerce la première citoyenneté.<br />

Leur financement et leur pérennisation<br />

sont parmi les priorités du ministre François<br />

Lamy. De plus, l’Acsé participe au financement<br />

de postes associatifs, les adultes relais<br />

ou les postes FONJEP * . L’Acsé a pour ambition<br />

de mettre les habitants au centre des projets<br />

de rénovation et de territoire. « Les associations<br />

représentent un bon moyen d’expression<br />

citoyenne » souligne Sylvie Durand-Trombetta.<br />

Aussi, l’Acsé revivifiera les fonds de participation<br />

des habitants et continuera à soutenir les<br />

diagnostics de gestion urbaine de proximité<br />

qui associent de près la population.<br />

isabelle sanséau<br />

* le FonJep (Fonds de coopération de la jeunesse<br />

et de l’éducation populaire) est une subvention<br />

(dénommée poste FonJep) dont le but principal est<br />

de faciliter la rétribution de personnels permanents,<br />

employés par les associations, remplissant des fonctions<br />

d’animation et/ou de gestion.<br />

@ www.lacse.fr<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

15


16<br />

DOSSIER cités actives<br />

haBitants proFessionnels !<br />

Révéler et valoriser économiquement<br />

les capacités relationnelles d’habitants,<br />

les rendre acteurs de la transformation<br />

de leur quartier, l’association “Voisin<br />

Malin“ de Courcouronnes leur fait franchir<br />

le pas… de la porte. L’idée est de<br />

proposer aux institutions, bailleurs sociaux<br />

et entreprises de services urbains,<br />

les prestations rémunérées d’habitants<br />

volontaires. Sélectionnés pour leurs<br />

talents et leur sens du contact, puis formés<br />

et encadrés, ils vont à la rencontre<br />

de leurs pairs porter l’information sur<br />

un droit, accompagner des démarches<br />

administratives, aider à l’utilisation<br />

d’un service ou d’un équipement do-<br />

entretien<br />

croisé<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

à courcouronnes,<br />

quartier du canal<br />

10<br />

voisins<br />

en cdi de 12h<br />

= 1 équivalent<br />

temps plein<br />

1 500<br />

familles visitées<br />

en 1 an<br />

+25%<br />

d’habitants à<br />

une réunion publique<br />

perrine, dimitri<br />

et alexandre témoignent<br />

de leur service civique à unis-cité*<br />

« ne plus arrêter<br />

de s’engager »<br />

* association organisant et promouvant le service civique en france<br />

© Fanny poste<br />

mestique. Des missions qui relèvent<br />

tant de la médiation que de la pédagogie.<br />

« La rénovation urbaine est un changement<br />

très concret dans la vie des habitants mais<br />

génère de l’incompréhension et parfois des<br />

tensions avec les acteurs locaux » constate<br />

Anne Charpy, directrice de “Voisin<br />

Malin“. Sans se substituer à son mandataire,<br />

« le Voisin facilite le lien entre les<br />

usagers et les opérateurs ou institutions. Sa<br />

visite témoigne de la considération de celui<br />

qui l’envoie », ajoute-t-elle.<br />

entreprise sociale et solidaire<br />

Née à Courcouronnes en 2010, “Voisin<br />

Malin“ s’appuie sur un modèle écono-<br />

Comment êtes-vous devenus<br />

des “médiaterre”?<br />

P. / J’étais étudiante en économie sociale<br />

et familiale, j’ai profité d’une période de<br />

transition pour utiliser mon temps au<br />

service des autres.<br />

a. / Je me suis engagé très tôt dans<br />

le milieu associatif : sport, protection<br />

animale et handicap. on y fait de<br />

nombreuses rencontres qui amènent à<br />

découvrir d’autres causes.<br />

D. / moi j’ai fait le tour de l’europe, un<br />

service civique et une formation d’entraîneur<br />

de basket en italie par ce biais. c’est<br />

là-bas qu’on m’a parlé d’unis-cité.<br />

que retenez-vous de votre expérience<br />

du Service Civique ?<br />

a. / d’abord une construction personnelle<br />

mais aussi une contribution aux<br />

enjeux sociétaux, on y découvre une<br />

réalité différente de celle des médias.<br />

D. / et on apprend en retour sur nousmêmes.<br />

P. / on s’investit beaucoup, notre équipe<br />

c’est comme une famille. il nous arrive de<br />

nous appeler en pleine nuit pour partager<br />

nos idées pour le lendemain.<br />

que pensez-vous de l’engagement<br />

citoyen ?<br />

D. / dans le quartier de la Grande résidence<br />

à lens, beaucoup de choses se<br />

passent. deux artistes ont eu l’idée de<br />

mique pérenne qui ne repose pas sur<br />

des subventions publiques. L’association<br />

“s’exporte“ déjà et devrait séduire<br />

dans toute la France. En décembre 2012,<br />

elle a reçu le prix “vie quotidienne et lien<br />

social“ du concours “S’engager pour les<br />

quartiers“, à l’initiative de l’ANRU et de<br />

la Fondation FACE. Sa directrice espère<br />

que ces expériences locales nourriront<br />

les pratiques des commanditaires et<br />

permettront de stimuler le dialogue.<br />

fanny poste<br />

@<br />

www.voisin-malin.fr<br />

photographier les anciens résidents des<br />

tours détruites et d’en faire une fresque.<br />

c’est important pour garder la mémoire<br />

des lieux.<br />

a. / les familles que l’on rencontre sont<br />

matraquées par les messages sur le<br />

développement durable, notre mission<br />

est de leur proposer d’agir à leur échelle.<br />

c’est une démarche individuelle, participative<br />

et adaptée à chaque besoin. pour<br />

les accompagner on rentre dans leur<br />

intimité, ça peut paraître intrusif.<br />

P. / oui, mais on doit convaincre sans<br />

jamais juger.<br />

et après votre Service Civique ?<br />

P. / J’hésite entre un service civique en<br />

europe et un voyage humanitaire. Quand<br />

on est engagé, on ne peut plus arrêter<br />

de s’engager.<br />

D. / avec un autre médiaterre, on veut<br />

informer les collégiens sur le service<br />

civique. Quand je vois des jeunes qui<br />

restent dans leur quartier sans savoir<br />

ce qu’il y a de l’autre côté de la route, je<br />

veux leur dire: « tu ne sais pas quoi faire<br />

pour l’instant, fais un service civique ! »<br />

a. / Je vais développer mon projet professionnel<br />

dans le monde associatif, il y a<br />

beaucoup à apprendre et à faire !<br />

@<br />

www.uniscite.fr<br />

www.service-civique.gouv.fr


© ville de BilBao<br />

biLbaO, eSPagne<br />

gouvernance, culture<br />

et rénovation<br />

au début des années 80, Bilbao est frappée très<br />

durement par la crise économique. désaffectation<br />

de vastes secteurs industriels, chômage, paupérisation<br />

et perte d’habitants s’en suivent. la cité<br />

basque doit se réinventer et mise sur une nouvelle<br />

vocation tertiaire. elle gagne son pari grâce à une<br />

stratégie urbaine volontariste qui vise une mutation<br />

profonde de la cité : reconquête des friches<br />

industrielles en cœur de ville, aménagement des<br />

berges du fleuve – qui devient le fil conducteur<br />

d’une succession d’espaces publics majeurs –<br />

construction de nouveaux quartiers, réalisation<br />

d’équipements, d’un métro, d’un tramway, d’immeubles<br />

tertiaires… cette stratégie s’appuie sur<br />

des projets phares : le musée Guggenheim, œuvre<br />

de l’architecte Franck Gehry, est le plus emblématique<br />

d’entre eux.<br />

pour un des participants à ce séminaire, l’expérience<br />

de Bilbao comporte un double intérêt.<br />

premier d’entre eux, l’étendue du processus couvrant<br />

une agglomération de 900 000 habitants<br />

et les dispositifs de péréquation institués. la<br />

transformation des quartiers périphériques a pu<br />

bénéficier de la plus-value dégagée par le réaménagement<br />

des quartiers centraux, attractifs<br />

aux yeux des investisseurs privés. le foncier<br />

était apporté gratuitement par les autorités publiques<br />

au capital de Bilbao ria 2000, organisme<br />

de pilotage du renouvellement urbain. cette instance<br />

de gouvernance représente le second<br />

point d’intérêt, et non le moindre, de l’expérience<br />

espagnole. car, la structure décisionnelle<br />

est unique pour toute l’agglomération. elle associe<br />

l’état, le gouvernement basque, la province<br />

de Biscaye et la commune de Bilbao, sous la présidence<br />

du maire de la ville. avec un effectif léger,<br />

elle coordonne et exécute l’ensemble des<br />

projets d’urbanisme, de transport et d’environnement<br />

prévus par le plan d’ensemble, évitant<br />

ainsi toute fragmentation institu-tionnelle dans<br />

la mise en œuvre de celui-ci.<br />

une autre représentante de l’anru a retenu la<br />

capacité de Bilbao ria 2000 à miser sur le potentiel<br />

de ses territoires déqualifiés, en faisant le<br />

choix, pour les redynamiser, de la dimension<br />

culturelle. au delà du musée Guggenheim,<br />

inFluences 17<br />

en juillet 2012, dans le cadre de la formation professionnelle, des représentants de l’anru ont<br />

découvert à Bilbao un des processus de régénération urbaine les plus aboutis des quinze dernières<br />

années en europe. l’opportunité de mettre en perspective leur expérience française.<br />

d’autres actions l’ont affirmée. la réalisation du<br />

centre culturel alhondiga – ancien entrepôt restructuré<br />

par philippe starck – en est une. le développement<br />

de la vocation universitaire grâce à la<br />

nouvelle bibliothèque de l’université deusto et au<br />

nouvel auditorium de l’université du pays basque<br />

et a création du Bilbao exhibition center en sont<br />

d'autres. ce lieu d’accueil d’événements grand<br />

public, situé à Barakaldo, réinscrit cette commune<br />

densément peuplée et très populaire dans le<br />

fonctionnement de l’agglomération. en plus de la<br />

dimension culturelle, une démarche de marketing<br />

urbain a joué un rôle clé dans la reconversion de<br />

Bilbao. la ville a su mettre en valeur les résultats<br />

atteints grâce notamment à l’action de metropoli-30.<br />

créée par le pouvoir politique local, cette<br />

association réunit institutions publiques et grands<br />

acteurs privés. elle mène des études visant à alimenter<br />

le processus de rénovation. elle se<br />

consacre également à la mobilisation de la société<br />

civile et à la promotion de la métropole aux<br />

niveaux régional et international, auprès du<br />

monde économique comme du grand public.<br />

alessandro casamento<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong>


18<br />

anru<br />

D<br />

e l’avis unanime de ceux qui l’ont côtoyé,<br />

Gérard hamel s’est engagé de façon excep-<br />

tionnelle pour l’agence et ses salariés, toujours à<br />

l’écoute des habitants mais aussi des élus et des<br />

délégués territoriaux. il a aussi été un président<br />

complice avec ses homologues de l’anah et de<br />

l’acsé, facilitant ainsi cette nécessaire coordination<br />

entre des agences qui œuvrent de façon<br />

complémentaire sur des territoires complexes.<br />

nommé le 19 septembre 2007, Gérard hamel a<br />

revêtu ses habits de président alors que philippe<br />

van de maele était à la tête de l’agence. il a, par<br />

en quelques années à peine, ils sont devenus les<br />

chevilles ouvrières des démarches de rénovation<br />

urbaine qui se multiplient dans l’hexagone. les<br />

directeurs et chefs de projet réunis le 30 janvier<br />

à reims à l’occasion d’une première journée<br />

nationale* pour penser les enjeux urbains, économiques<br />

et sociaux de la ville de demain. peu<br />

de professionnels sont aussi bien placés pour<br />

aborder cette perspective en s’appuyant sur une<br />

expérience d’une richesse exceptionnelle. il faut<br />

dire que cette compétence ne relève pas exclusivement<br />

des parcours personnels des uns et des<br />

autres mais du savoir collectif qui les unit. car,<br />

très tôt, directeurs et chefs de projet ont ressenti<br />

le besoin impérieux de partager les espoirs et<br />

les craintes inhérents à un métier en plein essor.<br />

un métier qui requiert des compétences managériales<br />

évidentes, une dextérité certaine en<br />

mode projet et le goût des dynamiques de<br />

réseaux. un métier qui surtout devra relever<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

© a. BuJaK<br />

la suite, accueilli en août 2008 pierre sallenave,<br />

qui dirige depuis lors l’anru.<br />

Fidèle à ses convictions sur la politique de la ville<br />

et la rénovation urbaine, il s’est constamment<br />

mobilisé afin que les objectifs et les ambitions de<br />

l’agence traversent les alternances et soient portés<br />

au plus haut niveau.<br />

Gérard hamel est rapidement devenu le porte<br />

parole des quelques 350 maires porteurs de projet<br />

tout en étant le garant des fondamentaux de<br />

la rénovation urbaine.<br />

il a toujours été impressionné par les compétences<br />

humaines et techniques que recèle l’agence et a<br />

découvert les 1001 facettes de la rénovation urbaine<br />

au détour de ses réunions hebdomadaires à<br />

l’anru, des échanges informels avec les collaborateurs<br />

et des nombreux déplacements.<br />

sous sa présidence, l’agence s’est enrichie de<br />

deux nouveaux programmes, au-delà du pnru<br />

« historique » : le pnrQad et les internats d’excellence.<br />

le plan de relance en 2009 fut aussi<br />

source d’une grande fierté car il a permis le déblocage<br />

d’opérations qui ralentissaient l’exécution<br />

des projets. aujourd’hui, l’anru va encore<br />

porter de nouvelles missions.<br />

Gérard hamel a toujours honoré les rendez-vous<br />

chef de projet, la reconnaissance en marche<br />

gérard hamel va quitter ses fonctions<br />

demain concomitamment des défis sociaux,<br />

économiques et urbains. une compétence rare<br />

parmi les spécialistes de la ville.<br />

en septembre <strong>2013</strong>, l’anru, en partenariat avec<br />

pres paris-est et l’essec, lancera un cycle supérieur<br />

de formation à destination des directeurs et<br />

chefs de projet de rénovation urbaine. sur une durée<br />

de 9 mois, 17 journées seront ainsi dédiées au rôle<br />

de management et de pilotage de ce métier « clé ».<br />

Jean-denis espinas<br />

*organisée par l’anru en partenariat avec le ministère<br />

de l’égalité des territoires et du logement, action<br />

logement, le comité interministériel des villes, l’union<br />

sociale pour l’habitat, la caisse des dépôts, le réseau<br />

des centres de ressources politique de la ville et la<br />

mission europe urbain, et avec la participation de<br />

l'union nationale des acteurs et des structures du<br />

développement local (unadel), l'inter réseaux<br />

des professionnels du développement social urbain<br />

(irdsu), l’acsé, l’association « Question de ville »,<br />

la fédération des epl et le cnFpt.<br />

© exalta / GréGoire avenel<br />

des grandes manifestations que sont les Fraru<br />

(Forum régionaux des acteurs de la rénovation<br />

urbaine) et les Jeru (Journées d'échanges de la<br />

rénovation urbaine), de même qu’il a régulièrement<br />

participé à des congrès et colloques, inlassable<br />

porte-voix de l’anru.<br />

en 2012, il a créé le club des maires de la rénovation<br />

urbaine (cmru), tel un bras armé de l’anru,<br />

car « la voix des élus est notre force pour poursuivre<br />

et amplifier les programmes portés par<br />

l’Agence ».<br />

Gérard hamel va quitter la présidence de l’anru,<br />

atteint par la limite d’âge, mais avec le sentiment<br />

du devoir accompli et confiance dans l’avenir :<br />

« la poursuite de la rénovation urbaine est une impérieuse<br />

nécessité. L'état des finances publiques<br />

est fortement dégradé mais nous savons être innovants,<br />

nous saurons mobiliser les partenaires<br />

privés s’il le faut et les collectivités font de ce programme<br />

une de leurs priorités budgétaires. »<br />

après avoir accepté d'assurer l'intérim de la<br />

présidence du ca jusqu'à la nomination de son<br />

successeur, il va passer le flambeau mais continuera<br />

à défendre une politique publique dont il a<br />

toujours dit sa fierté d’en avoir porté les couleurs<br />

pendant plus de 5 ans.<br />

débats lors de la journée métier du 30 janvier, à Reims


© istocKphoto<br />

sondage<br />

CSA / <strong>Anru</strong>*<br />

exclusif<br />

La vie des<br />

quartiers<br />

peut-on évaluer la satisfaction<br />

des habitants des quartiers<br />

en cours de rénovation ?<br />

L'anRu se prête une nouvelle<br />

fois à l'exercice après les<br />

enquêtes 2007 et 2011.<br />

une large adhésion s'en<br />

dégage.<br />

* enquête réalisée téléphoniquement par CSA entre le 11 et le 17 janvier <strong>2013</strong>, auprès d’un échantillon représentatif de 1004 personnes âgées de 15 ans et plus,<br />

résidentes d’un quartier inscrit dans le PNRU dont la mise en exécution des travaux date de plus de quatre ans.<br />

anru<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

19


20<br />

anru<br />

la satisfaction à l’égard de la vie dans le quartier<br />

Diriez-vous que<br />

vous êtes<br />

très satisfait,<br />

plutôt satisfait,<br />

plutôt pas satisfait<br />

ou pas satisfait du tout<br />

de vivre dans<br />

votre commune ?<br />

rappel février 2007 //<br />

Diriez-vous que<br />

vous êtes<br />

très satisfait,<br />

plutôt satisfait,<br />

plutôt pas satisfait<br />

ou pas satisfait du tout<br />

de vivre dans<br />

votre quartier ?<br />

rappel février 2007 //<br />

avez-vous le sentiment<br />

que, depuis quelques<br />

années, la vie ici<br />

dans votre quartier<br />

a évolué plutôt en bien<br />

ou plutôt en mal ?<br />

ne se prononce pas<br />

Etes-vous très optimiste, assez optimiste, assez pessimiste ou très pessimiste pour… ?<br />

... votre propre avenir ... l'avenir de votre quartier<br />

20 %<br />

38 %<br />

31 %<br />

41 %<br />

36 %<br />

21 %<br />

9 %<br />

14 %<br />

31 %<br />

soit soit<br />

des habitants optimistes pour leur avenir et l’avenir de leur quartier<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

10 %<br />

29 %<br />

18 %<br />

59 %<br />

55 %<br />

2 %<br />

1 %<br />

soit 79 % satisfaits, 19 % pas satisfaits et 2 % qui ne se prononcent pas<br />

49 %<br />

soit 67 % satisfaits, 32 % pas satisfaits et 1 % qui ne se prononcent pas<br />

7 % 4 % 12 %<br />

11 % 4 %<br />

48 % 47 %<br />

8 %<br />

33 %<br />

5 %<br />

11 %<br />

8 %<br />

11 %<br />

68 % optimistes 28 % pessimistes 59 % optimistes<br />

37 % pessimistes<br />

1 %<br />

soit<br />

un niveau de satisfaction élevé<br />

à l’égard de la vie dans sa commune<br />

soit<br />

un niveau de satisfaction élevé<br />

à l’égard de la vie dans son quartier<br />

une majorité estime que la vie<br />

dans le quartier s’est améliorée<br />

26 %<br />

86 % satisfaits<br />

13 % pas satisfaits<br />

78 % satisfaits<br />

22 % pas satisfaits<br />

rappel février 2007 // 48 % 44 % 8 %<br />

ne se prononce pas


Conseilleriez-vous<br />

à un de vos proches<br />

de venir habiter<br />

dans ce quartier<br />

rénové ?<br />

oui, tout à fait<br />

les effets perçus du Programme de rénovation urbaine<br />

un quartier rénové que l’on<br />

recommande à ses proches<br />

Selon vous, lorsque les travaux de rénovation urbaine de votre quartier<br />

seront terminés …<br />

... vous vous sentirez davantage en sécurité dans votre quartier ?<br />

24 %<br />

33 %<br />

18 %<br />

19 %<br />

soit<br />

soit<br />

65 % oui<br />

57 % oui<br />

... il y aura une plus grande diversité de catégories sociales dans le quartier rénové ?<br />

24 %<br />

17 %<br />

17 %<br />

... l'accès à l'emploi des habitants du quartier rénové sera amélioré ?<br />

16 % 23 % 22 %<br />

28 %<br />

6 %<br />

9 %<br />

11 %<br />

ne se prononce pas<br />

la notoriété et la perception du projet de rénovation<br />

oui, tout à fait<br />

33 %<br />

oui, plutôt<br />

oui, plutôt<br />

34 %<br />

31 %<br />

non, plutôt pas<br />

non, plutôt pas<br />

12 %<br />

21 %<br />

2 %<br />

non, pas du tout<br />

non, pas du tout<br />

soit<br />

soit<br />

ne se prononce pas<br />

33 % non<br />

37 % non<br />

57 % oui 34 % non<br />

44 % oui 45 % non<br />

anru<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

21


22<br />

anru<br />

la notoriété du projet de transformation du quartier<br />

Connaissez-vous<br />

le projet<br />

20 %<br />

de transformation<br />

de votre quartier ? 51 %<br />

Êtes-vous<br />

satisfait<br />

de votre<br />

logement ?<br />

41 %<br />

le souhait du niveau de priorité que le gouvernement devrait accorder à l’amélioration<br />

de la situation des quartiers en difficulté<br />

L'amélioration<br />

de la situation des quartiers<br />

en difficulté doit-elle être<br />

pour le gouvernement<br />

prioritaire, importante<br />

ou secondaire ?<br />

rappel février 2007 // 64 % prioritaire, 28 % importante, 5 % secondaire et 3 % qui ne se prononcent pas<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

29 %<br />

41 %<br />

soit 82 % satisfaits 18 % pas satisfaits<br />

38 %<br />

9 %<br />

8 % 10 %<br />

1 %<br />

52 %<br />

non<br />

oui, mais je ne vois pas précisément ce dont il s'agit<br />

oui et je vois précisément ce dont il s'agit<br />

soit oui à 49 %<br />

Prioritaire<br />

importante<br />

secondaire<br />

ne se prononcent pas<br />

Pas du tout satisfaits<br />

Plutôt pas satisfaits<br />

Plutôt satisfaits<br />

très satisfaits<br />

une satisfaction à l’égard de son logement<br />

REtROuvEz L'IntégRaLIté Du SOnDagE SuR www.anRu.fR


© dr<br />

D’Où Je VienS<br />

Je vis à colombes depuis de nombreuses années.<br />

Jusqu’en 2001, je louais un appartement dans le parc<br />

privé. pour des raisons financières, j’ai fait une demande<br />

de logement social et je l’ai obtenu.<br />

Ce que Je FaiS auJOuRD’Hui<br />

J’habite seule avec mes deux enfants dans une hLM<br />

du quartier de petit-colombes. c’est ce qui m’a valu la<br />

chance d’être mise en relation avec le bailleur social qui<br />

gère à présent mon dossier d’accession à la propriété.<br />

Ce que Je FeRai PLuS TaRD<br />

dès la fin de l’année 2014, je pourrai rentrer dans mon<br />

nouveau logement à l’Île Marante. c’est un quartier très<br />

proche de celui où je vis, c’est un grand avantage. Mes<br />

enfants seront toujours entourés de leurs amis et je pourrai<br />

garder la nourrice qui va les chercher à l ‘école.<br />

J’ai toujours voulu devenir propriétaire mais je ne pouvais<br />

pas y prétendre jusque-là. pour mon futur logement, j’ai<br />

pu bénéficier du prêt Logement 92 à taux zéro.<br />

Ce que J'ai aPPRiS<br />

aVeC La RénOVaTiOn uRbaine<br />

dans mon quartier, on déconstruit beaucoup et on reconstruit<br />

derrière. La rénovation urbaine apporte avant<br />

tout de la beauté au quartier, une nouvelle apparence.<br />

c’est très important lorsque vous recevez des amis. on<br />

avait déjà la chance d’habiter à quelques minutes de la<br />

défense, c’est un atout supplémentaire.<br />

Ce que Je COmPTe RéuSSiR<br />

cette acquisition est déjà un énorme pas en avant pour<br />

moi. Je n’ai vu l’appartement qu’en maquette, ce sera<br />

une surprise de grande taille. Je pourrai laisser quelque<br />

chose à mes enfants, ce n’est pas de l’argent jeté par<br />

les fenêtres. et pourquoi pas acheter un autre bien plus<br />

tard… mais là, il faut que je gagne au loto !<br />

Ce qui m’imPORTeRa quanD La RénOVaTiOn<br />

uRbaine SeRa TeRminée<br />

Je veux du renouveau, que ce soit fleuri partout. Je pense<br />

qu’on vivra mieux. Mais surtout j’espère que les gens respecteront<br />

les lieux. beaucoup ne se préoccupent pas des charges<br />

à venir, alors je souhaite que l’embellissement contribue à<br />

faire changer les comportements.<br />

ma PLuS gRanDe SaTiSFaCTiOn<br />

avoir été appelée par le conseiller commercial du programme.<br />

cela faisait un an que j’attendais !<br />

mOn RegReT<br />

Je n’en ai aucun parce qu’avec de la persévérance,<br />

on y arrive toujours.<br />

Propos recueillis par Fanny Poste<br />

ProFil<br />

Dalida<br />

44 ans, décoratrice florale<br />

primo-accédante à la propriété,<br />

quartier de l’Île Marante à colombes (92)<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

23


24<br />

reg’arts<br />

Y<br />

lettres<br />

à domicile<br />

Côtoyer un écrivain en chair<br />

et en os n’est pas donné à tout<br />

le monde. Pendant deux mois,<br />

les habitants de la Roseraie,<br />

à angers, ont eu cette chance.<br />

Durant sa résidence,<br />

eric Pessan a su les emmener<br />

à la rencontre de la littérature<br />

contemporaine.<br />

l’apocalypse. tel était le thème de la com-<br />

mande sur lequel eric pessan, écrivain,<br />

devait plancher pendant ses deux mois de<br />

résidence angevine. si le sujet est un peu<br />

sombre, rassurez-vous, les ateliers d’écriture<br />

et de lecture qu’il a animés dans ce<br />

cadre se sont très bien déroulés.<br />

pour ces temps de médiation culturelle,<br />

au contact du public de la roseraie, l’écrivain<br />

a travaillé en partenariat avec le<br />

centre socioculturel Jean vilar, au cœur<br />

du quartier, et des établissements scolaires.<br />

doté d’une certaine expérience des<br />

résidences d’écriture, eric pessan explique<br />

que « dans pareil contexte, son objectif<br />

était de toucher un public le plus divers<br />

possible ». il a donc organisé des rencontres<br />

de lecture, avec des lecteurs volontaires<br />

habitués de la médiathèque angevine<br />

toussaint, mais aussi des ateliers<br />

d’écriture, avec des élèves des trois lycées<br />

de la roseraie. « Les scolaires, qui n’ont<br />

pas le choix de leur participation, font parfois<br />

montre d’une certaine défiance au<br />

début, notamment ceux qui pensent que<br />

la littérature n’est pas pour eux » confie<br />

eric pessan. « Mais ils finissent par se<br />

prendre au jeu et ont des fulgurances<br />

étonnantes. » ajoute-t-il.<br />

les habitants se livrent<br />

après deux ans d’existence, l’objectif principal<br />

de ces résidences portées par la ville<br />

d’angers est toujours le même : soutenir<br />

la littérature contemporaine. ce qui signifie<br />

à la fois offrir des opportunités à des<br />

auteurs mais aussi faire découvrir des<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

© ville d'anGers<br />

© p. devresse<br />

»<br />

U<br />

Q<br />

R<br />

il y a<br />

toujours des<br />

surprises.<br />

certains<br />

ont des<br />

fulgurances<br />

étonnantes. »<br />

V<br />

G<br />

E<br />

L A<br />

M<br />

Z<br />

œuvres au plus grand nombre, notamment<br />

à des publics « éloignés du livre ».<br />

l’an passé, c’est le quartier saint-aubin,<br />

en pleine rénovation, qui accueillait l’écrivain<br />

emmanuel adely. il avait fait travailler<br />

des habitants sur les thèmes de l’exil et de<br />

la mobilité. le sujet avait pris une résonance<br />

d’autant plus forte qu’une partie<br />

des participants était des étrangers auxquels<br />

l’association lec (lire, ecrire,<br />

compter) donnait des cours d’alphabétisation.<br />

d’autres, qui au contraire n’avaient<br />

jamais quitté saint-aubin, ont témoigné<br />

du bouleversement que fut leur déménagement<br />

dans le cadre de la rénovation.<br />

en 2012, le thème proposé par eric pessan<br />

était « le savoir ». cette fois-ci, les « écrivains<br />

en herbe » ne se sont pas directement<br />

exprimés sur les mutations de leur<br />

environnement de vie. « Ce n’était pas<br />

dans mon projet. Je n’étais pas dans l’optique<br />

de collecter la mémoire du quartier,<br />

même si le sujet peut apparaître par bribes<br />

dans certains écrits » explique l’écrivain.<br />

O<br />

H<br />

N<br />

D<br />

S T<br />

C<br />

P<br />

B<br />

K<br />

l’engouement pour les ateliers semble<br />

croissant. le nombre de participants a<br />

plus que doublé entre 2011 et 2012.<br />

« Dans le cadre de sa résidence, Eric Pessan<br />

a travaillé avec 572 personnes ! »<br />

comptabilise christine tharel, responsable<br />

des animations et de la communication<br />

à la bibliothèque d’angers. parmi<br />

ceux-ci, certains ont gardé contact entre<br />

eux et avec les écrivains, et continuent à<br />

s’échanger leurs textes personnels. des<br />

liens entre acteurs locaux ont également<br />

émergé. « L’idée, c’est aussi de favoriser<br />

la rencontre entre structures et faire<br />

naître des partenariats au sein d’un même<br />

quartier » conclue christine tharel.<br />

en <strong>2013</strong>, la résidence se déplace de nouveau<br />

et devrait couvrir deux autres quartiers<br />

en rénovation urbaine, monplaisir et<br />

deux croix-Banchais. nul doute qu’il y ait<br />

là encore de belles surprises à la clé.<br />

Gabriel henry<br />

@<br />

http://residenceangers2012.<br />

wordpress.com<br />

J<br />

I<br />

W<br />

F


là où la majorité des villes opte pour le qualificatif<br />

d’école, saint-herblain a choisi d’installer musique,<br />

arts plastiques, et arts numériques dans<br />

une « maison ». simplement parce que la maison<br />

des arts (mda), si elle fait une large place à l’apprentissage,<br />

va bien au-delà. « Saint-Herblain disposait<br />

d’un théâtre et d’une médiathèque, mais les<br />

pratiques artistiques étaient mal servies, c’est<br />

pourquoi la municipalité a souhaité leur dédier un<br />

lieu dont la vocation est d’apprendre, mais pas<br />

seulement. Entièrement vouée aux pratiques artistiques,<br />

la Maison des Arts accueille les enfants à<br />

partir de 3 ans, les adolescents et les adultes qui<br />

souhaitent apprendre ou pratiquer la musique, les<br />

arts plastiques et les arts numériques. Sa proposition<br />

va de la découverte au parcours complet de<br />

Ouverte fin 2010 dans les quartiers<br />

est de Saint-Herblain, la maison<br />

des arts décline la pratique<br />

artistique sous toutes ses formes<br />

et pour tous ses habitants.<br />

la maison<br />

des arts<br />

mise sur<br />

la mixité<br />

formation d'un artiste amateur », retrace Jean-<br />

François Fourichon, directeur des lieux. installé au<br />

cœur du quartier Bellevue, cet équipement structurant,<br />

qui rayonne sur toute l’agglomération, est<br />

devenu en trois ans à peine un véritable symbole<br />

du vivre ensemble.<br />

culture pour tous<br />

chacun y trouve une façon de s’exprimer et de<br />

se passionner pour un art, et tous se côtoient en<br />

ignorant les barrières culturelles, financières,<br />

géographiques ou générationnelles. ainsi, bien<br />

qu’installée dans un quartier peu facile d’accès,<br />

la maison des arts séduit au-delà de son territoire,<br />

tout en fidélisant les habitants de Bellevue,<br />

de plus en plus nombreux à la fréquenter. pour<br />

lever autant que possible les freins financiers, la<br />

municipalité a fait le choix d’indexer les tarifs sur<br />

le quotient familial. autour de ce fil d’ariane<br />

visant à ouvrir ce lieu à tous, la maison des arts<br />

varie les esthétiques pour ne pas susciter de<br />

rejets communautaires. enfin, aux côtés des<br />

jeunes - public le plus important -, parents et<br />

grands-parents ont toute leur place. les ateliers<br />

multi-âges d’art plastiques, tous les samedis, illustrent<br />

bien cette réalité. « La mission de la MdA<br />

est d’abord de donner accès à la culture par la<br />

pratique, et c’est aussi un centre ressource capable<br />

de renseigner les habitants sur l'offre du<br />

territoire en la matière. Mais la caractéristique de<br />

notre établissement est cette volonté de n’être<br />

pas seulement sur la transmission d’un patrimoine<br />

culturel, mais d’aller plus loin sur les enjeux<br />

sociaux et de contribuer au vivre ensemble.<br />

Cela se conjugue avec les problématiques éducatives.<br />

En plus des 1200 usagers inscrits à une acti-<br />

© ville de saint-herBlain<br />

© deuxpointdeux.com<br />

vité hebdomadaire, nous touchons également<br />

près de 2000 enfants sur temps scolaire dans le<br />

cadre du parcours culturel mis en place par la<br />

ville, sans oublier les enfants en crèche, les adolescents<br />

et les lycéens. Outre les interventions<br />

musique et arts plastiques dans toutes les écoles<br />

qui en font la demande, l’action de la MdA « hors<br />

les murs » se décline par des dispositifs plus pérennes.<br />

À l’image d’un partenariat culturel avec le<br />

collège Ernest Renan, intégrant entre autres actions<br />

des Classes à Horaires Aménagés Musique<br />

(CHAM) et dès 2008 la création d’orchestres de<br />

steel drum* dans les classes de CM1 et CM2 des<br />

écoles élémentaires de la ville situées en ZEP »<br />

explique le directeur. la maison des arts s’ouvre<br />

également très largement sur l’extérieur par la<br />

multiplication de passerelles avec les autres<br />

équipements culturels de la ville et de l’agglomération,<br />

en organisant des rencontres d’artistes<br />

et en accompagnant les apprenants sur de nombreux<br />

projets et spectacles.<br />

françoise sigot<br />

*instrument de percussion en métal<br />

@<br />

reg’arts<br />

maisondesarts-saintherblain.blogspot.fr<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

25


26<br />

initiatives<br />

en quelques années à peine, lFm, radio féminine et citoyenne,<br />

s’est imposée à mantes-la-Jolie comme le média du territoire.<br />

LeS enFanTS De La RaDiO<br />

pari réussi pour lFm écoutée par<br />

95,5 mhz<br />

à mantesla-jolie<br />

52 000<br />

auditeurs<br />

par jour<br />

12 salariés<br />

52 000 auditeurs en moyenne chaque<br />

jour ! la radio associative qui émet pour<br />

la première fois en 2009 salarie désormais<br />

douze personnes. pourtant, seulement<br />

quatre ans se sont écoulés depuis<br />

la découverte par lahbib eddaouidi<br />

d’une annonce du parisien par laquelle<br />

le conseil supérieur de l’audiovisuel<br />

(csa) lance l’attribution de la fréquence<br />

95,5 mhz à mantes-la-Jolie. entouré de<br />

quelques amies, il présente le projet lFm<br />

et remporte l’appel d’offres face à nrJ,<br />

skyrock et chérie Fm !<br />

une radio engagée<br />

place aux femmes ! lFm fait entendre<br />

leurs voix, c’est le concept initial, mais veut<br />

aussi « relayer une information plus juste<br />

et réaliste sur les quartiers », précise rajaa<br />

moumene, la directrice de l’antenne. pour<br />

cela, la radio est proche des habitants,<br />

tout particulièrement ceux du val Fourré<br />

d’où elle émet. pour lahbib eddaouidi, «<br />

il n’est pas question de nier les difficultés.<br />

rénovation urbaine / <strong>mars</strong> - <strong>avril</strong> <strong>2013</strong><br />

Les quartiers concentrent une grande<br />

part de frustration et de misère. Mais, ils<br />

cachent aussi des talents que nous voulons<br />

valoriser. »<br />

Féminine donc, la radio a l’engagement<br />

dans les gènes. lFm promeut la<br />

citoyenneté. « tous aux urnes » a ainsi<br />

animé les ondes le temps de la dernière<br />

campagne présidentielle incitant chacun<br />

à aller voter. lFm insère. depuis 2010,<br />

197 personnes ont bénéficié du programme<br />

« code emploi », avec un taux<br />

de reclassement de 86,7 %. et puis, lFm<br />

accompagne et forme les plus jeunes.<br />

pour son fondateur, il s’est toujours<br />

agi d’une priorité. ainsi, pendant les<br />

vacances scolaires, la radio accueille des<br />

apprentis-journalistes venus des collèges<br />

ou du tissu associatif. avec bienveillance<br />

et tendresse, rajaa moumene parle « des<br />

enfants ». parmi eux, « les experts »<br />

forment un petit groupe, jusqu’à une<br />

dizaine d’adolescents, les plus assidus,<br />

qui se retrouvent chaque semaine.<br />

© lFm<br />

jeunes talents<br />

comme presque tous les mercredis, au<br />

premier étage des locaux de lFm, « les<br />

experts » travaillent. ahmed, almamy,<br />

clara et lydie, présents ce jour-là, ont 16<br />

ans et sont au lycée. encadrés par olivier,<br />

ils participent avec assiduité aux ateliers<br />

radio, depuis trois ans pour le premier, deux<br />

ans pour les autres. tous ont à leur actif<br />

quelques scoops qui les font sourire. par<br />

deux fois, almamy a interviewé François<br />

hollande : le candidat en déplacement sur<br />

le marché du val Fourré en décembre 2011 ;<br />

le président de la république en visite dans<br />

un collège de trappes en septembre 2012.<br />

les trois autres adolescents peuvent se<br />

vanter d’interviews exclusives comme celle<br />

d’alberto contador pour ahmed au départ<br />

du paris-nice en 2010. audacieux, le journaliste<br />

en herbe a tenté sa chance et interpellé<br />

le coureur en langue espagnole, dont il a<br />

la maîtrise courante. en juin 2012, clara et<br />

lydie ont été les seules à être reçues par le<br />

chanteur corneille avant une représentation.<br />

pour rajaa moumene, c’est la récompense<br />

d’un travail acharné et de rencontres<br />

bien préparées en amont. s’ajoute peut-être<br />

la surprise pour les personnalités d’être<br />

interpellées par ces jeunes gens qui les<br />

incitent à accorder un peu de leur temps.<br />

ces ateliers donnent aux adolescents des<br />

clés pour réussir. olivier remarque que,<br />

depuis leurs premiers pas, l’évolution de<br />

leurs travaux est considérable et leur regard<br />

critique affûté. les bienfaits sont évidents.<br />

almamy a progressivement appris à vaincre<br />

sa timidité, à prendre des initiatives. tous<br />

ont le sentiment d’avoir enrichi leur vocabulaire,<br />

multiplié leurs contacts, appris à<br />

mettre en forme et à concrétiser leurs idées.<br />

ici, ils font tout : écriture, prise de rendezvous,<br />

recherche d’informations, animation<br />

d’émissions au cours desquelles ils se font<br />

même parfois remarquer : le 1er février, dans<br />

l’émission « Face à l », manel a été longuement<br />

applaudie en studio pour son brillant<br />

portrait du parolier claude lemesle. Quels<br />

talents ! isabelle sanséau<br />

@<br />

www.lfm-radio.com


ParticiPe Passé<br />

agenda a posteriori,<br />

ParticiPe Passé retient<br />

quelques-uns des événements<br />

majeurs des deux<br />

derniers mois pour prendre<br />

du recul et proposer prolongements<br />

et approfondissements<br />

de la réflexion.<br />

4 & 5<br />

décembre<br />

PaRiS<br />

Salon de l’immobilier d’entreprise<br />

organisé par le groupe moniteur.<br />

l’anru, parrain du cycle stratégie<br />

urbaine. www.simi.salons.<br />

groupemoniteur.fr<br />

30 & 31<br />

décembre ReimS<br />

Journées de la<br />

rénovation urbaine<br />

LyOn<br />

conférences sur le thème « tolérance,<br />

pluralisme et cohésion sociale en<br />

europe aujourd’hui », organisées par<br />

Banlieues d’europe<br />

www.banlieues-europe.com<br />

© simi 2012<br />

© Grdr<br />

24 & 25<br />

janvier<br />

© service photo / matoGnon<br />

© Banlieues d'europe<br />

15<br />

décembre<br />

31<br />

janvier<br />

19 février<br />

CLiCHy-SOuS-bOiS eT PaRiS<br />

visite du premier ministre et conseil<br />

interministériel des villes<br />

www.ville.gouv.fr<br />

PaRiS<br />

« entreprenariat et diversité » :<br />

Forum sur la création d’entreprise<br />

dans les quartiers, organisé par le<br />

Grdr ile-de-France en partenariat<br />

avec la cité des métiers.<br />

www.grdr.org/bilan-du-forum-<br />

entreprenariat-dans,740.html<br />

PaRiS<br />

clôture à l'assemblée nationale,<br />

en présence de François lamy,<br />

de la concertation nationale<br />

« quartiers, engageons le changement<br />

! », pour la réforme de la<br />

politique de la ville.


tout ce que vous Rêviez de savoiR<br />

suR Les cLauses d'inseRtion<br />

dans Les pRoJets de RÉnovation uRbaine<br />

MINISTÈRE<br />

DE L’ÉGALITÉ<br />

DES TERRITOIRES<br />

ET DU LOGEMENT<br />

MINISTÈRE<br />

DÉLÉGUÉ À LA VILLE<br />

C O M I T É<br />

I N T E R M I N IST É R I E L<br />

D E S V I L L E S<br />

SECRÉTARIAT GÉNÉRAL

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