6. Les tentatives de destruction des maquis en juillet 1944 et le rôle ...

6. Les tentatives de destruction des maquis en juillet 1944 et le rôle de la
Résistance
Après le temps des sabotages et des embuscades sur un terrain choisi en juin, vient
celui des combats pour la défense des maquis en juillet quand l’occupant décide
d’éradiquer ces noyaux de « terroristes », plus agaçants que dangereux militairement.
Quelques exemples pris surtout dans l’ouest du département montrent bien l’urgence
pour la Résistance de la percée américaine tant attendue.
Près de Guingamp, le maquis de Plouisy doit se déplacer à 3 reprises vers le nord en
juin jusqu’à l’attaque du 2 juillet à Kermoroc’h (3 morts). Il se réorganisera fin juillet pour
participer avec 350 hommes environ à la libération de Guingamp le 7 août. Les
Allemands veulent en finir dans le Trégor avec les sabotages de la voie ferrée Guingamp-
Paimpol, suivis de l’attaque du train comme le 12 juin (FTP de Squiffiec et de Plouisy), et
les embuscades meurtrières pour eux et nombreuses (une vingtaine).
Ainsi le maquis de Pommerit-Jaudy (120 hommes armés) commandé par Corentin
André, le capitaine Maurice affronte l’épreuve du feu le 9 juillet (3 assauts, 8 tués), puis
se replie. Le 10 juillet, prévenu, le maquis de Mantallot peut se disperser avant l’attaque
mais celui de Pluzunet est investi le 16 (5 FTP arrêtés) lors d’une grande rafle. Le 18
juillet, celui de Pommerit-le-Vicomte rompt l’encerclement mais le maquis de Trévérec
est détruit (7 morts) et celui de Plélo attaqué. Le 15 juillet, ce sont 5 jeunes FFI qui ont
été tués à Pommerit-le-Vicomte, leur voiture étant tombée dans une embuscade
allemande. Manquant souvent d’armes, de formation et d’encadrement, les jeunes
maquisards bretons ne font guère le poids face à des troupes aguerries et aux abois
voulant « nettoyer » leurs arrières pour pouvoir mettre en œuvre leurs plans de repli vers
les côtes. Face aux attaques qui se multiplient, le salut réside dans le repli et la
dispersion.
Dans cette région, sabotages et accrochages n’en continuent pas moins avec des
coups de mains audacieux et dangereux. Désiré Camus et le maquis de Squiffiec
veulent investir Pontrieux mais un accrochage le 28-29 juillet conduit à ajourner
l’opération. Pour obtenir la libération d’un compagnon, le chef du maquis et 2 hommes
enlèvent le capitaine allemand, commandant la place. Les Allemands refusent l’échange :
le résistant puis l’officier sont exécutés.
Des opérations de grande ampleur visent aussi les maquis du sud-ouest. Deux jours
après la destruction du camp de Plésidy-Saint-Connan, les Allemands aidés de miliciens
investissent la zone de Paule-Plévin tenue par plusieurs maquis du bataillon Guy
Môquet et des groupes du Morbihan. Tout au long de cette journée du 29 juillet, on se
bat dans cette région ; des groupes FTP arrivent en renfort. Les pertes sont lourdes (une

dizaine de FTP pour des dizaines d’Allemands). Dans la soirée, la Wehrmacht rentre
s’enfermer dans ses casernements urbains sans être parvenue à briser les maquis.
Un peu plus au nord, les maquis Tito de la région de Peumerit-Quintin sont plus
actifs que jamais : combats de Duault le 12 juin et de Kérien le 5 août ; attaque des 13
Allemands en garnison à Bourbriac par 50 hommes le 16 juillet provoquant l’installation
d’effectifs très supérieurs puis libération de 13 détenus à la prison de Lannion le 22 ;
libération de Callac le 4 août. Cette insécurité grandissante et sans doute la
connaissance de la présence de l’état-major départemental FFI conduit le 7 juillet la
Wehrmacht, des Waffen SS et des miliciens de la Bezen Perrot à une grande rafle dans
la région de Saint-Nicolas-du-Pélem, qui dure plusieurs jours. Résistants et civils
interceptés meurent souvent sous la torture à Uzel. Mais cette répression ne parvient pas
à briser les maquis et à arrêter les parachutages.
La région briochine n’est pas en reste. Le groupe FN-FTP de Pierre Le Gorrec (tué
le 8 juillet) et Max Le Bail est très actif, sabotant régulièrement la ligne Paris-Brest et
coupant les lignes téléphoniques, en liaison avec les résistants des PTT. Des équipes de
saboteurs mixtes opèrent presque chaque jour en utilisant les plans des lignes
souterraines fournis par l’inspecteur des PTT Le Bourdonnec ou en détruisant plus d’un
kilomètre de ligne téléphonique à Plaintel le 29 juin. Le Plan Violet est appliqué avec
efficacité en juin-juillet 1944. De même les opérations en ville sont de plus en plus
fréquentes (libération de 11 réfractaires le 18 juin, récupération de près d’un million de
francs par le FN en 3 fois), couronnées par l’attaque de la prison le 1 er août pour
empêcher l’exécution de 19 prisonniers. La coopération du groupe briochin de Max Le
Bail avec les maquisards de Trégenestre qui fournissent les armes permet de neutraliser
les 2 postes de garde allemands, sans effusion de sang, et de libérer 33 détenus.
Un peu plus à l’est, dans le secteur de Lanrodec-Plouagat-Binic, les sections de
l’ORA posent des mines sur les routes et tendent des embuscades pour entraver la
circulation des Allemands. Cette géographie de l’action des FFI en juin-juillet 1944,
montre bien la réalité dans les Côtes-du-Nord d’une résistance déjà engagée dans
un combat insurrectionnel. La vigueur de la riposte témoigne elle aussi de l’importance
accordée par l’armée allemande aux dangers représentés par les actions de ces
« terroristes » en Bretagne.
Christian Bougeard, Le Choc de la guerre dans les Côtes-du-Nord 1939-1945, Ed. Gisserot, 1995, p. 117-
119.