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Voir - Bribes

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504 STYLE<br />

Francisque SARCEY / Quarante ans de théâtre (1) / Bibliothèque des Annales politiques et littéraires<br />

1900<br />

« La manière commence où le style fini.<br />

Elle se compose des formes, tours, façons de parler, métaphores, et pour tout dire d’un mot, des procédés de<br />

langage au moyen desquels on déguise l’absence de l’idée première, à moins qu’ils ne servent simplement<br />

à relever l’insuffisance d’un lieu commun. C’est une anomalie étrange, mais bien souvent constatée : le<br />

public rechigne souvent à des idées nouvelles. Une manière nouvelle le séduit toujours.<br />

En général, ce charme ne dure pas bien longtemps, et la postérité en fait toujours justice. Mais tant qu’il<br />

dure, il a pour la génération qui l’a vu naître, l’attrait irrésistible de la mode. Il n’y faut pas contredire ; il<br />

prévient les esprits les plus exempts de préjugés, il met des coquilles sur les yeux les mieux ouverts et les<br />

plus perçants. »<br />

< Jules Janin, 29 juin 1874, p.76 ><br />

Jules RENARD / Journal / Robert Laffont - Bouquins 1990<br />

« Le style, c’est l’oubli de tous les styles. »<br />

< 7 avril 1891 p.71 ><br />

ALAIN / Propos I / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1956<br />

« Il y eut un style de la plume d’oie, un style de la plume sergent-major; il y a un style du stylo, et peutêtre<br />

un style de la machine à écrire ; car aucun de ces procédés ne manque d’arrêt ; tous offrent l’occasion<br />

d’attendre, et à un moment où on n’attendrait pas ; le corps humain se tord et détord, et nous fait ressentir<br />

la houle animale, c’est-à-dire la vraie difficulté de penser, qui n’est jamais où on la cherche. »<br />

< 1 août 1933 p.1170 ><br />

Jean COCTEAU / Journal (1942-1945) / Gallimard 1989<br />

« Ce que nous prenons pour le style classique de Molière, était le charabia de l’époque, grossi. »<br />

< 17 mars 1942, p.44 ><br />

Louis-Ferdinand CÉLINE / Louis-Ferdinand Céline vous parle (1957) / Romans (2) / Bibliothèque de la<br />

Pléiade / nrf Gallimard 1996<br />

« Je ne suis pas un homme à message. Je ne suis pas un homme à idées. Je suis un homme à style. Le<br />

style, dame, tout le monde s’arrête devant, personne n’y vient à ce truc-là. Parce que c’est un boulot très<br />

dur. Il consiste à prendre les phrases [...] en les sortant de leurs gonds. Ou une autre image : si vous prenez<br />

un bâton et si vous voulez le faire paraître droit dans l’eau, vous allez le courber d’abord, parce que la<br />

réfraction fait que si je mets ma canne dans l’eau, elle a l’air d’être cassée. Il faut la casser avant de la<br />

plonger dans l’eau. C’est un vrai travail. C’est le travail du styliste. »<br />

< p.934 ><br />

Alexandre VIALATTE / Chroniques de La Montagne (1) / Robert Laffont - Bouquins 2000<br />

« Il n’est rien de plus étrange que l’homme : il va demander des leçons de morale aux écrivains ! Lui qui<br />

n’achèterait pas ses souliers chez le coiffeur ou son chapeau chez le marchand de bicyclette, il s’adresse<br />

à un marchand de phrases pour apprendre comment se conduire dans la vie ! Or l’écrivain commence au<br />

style, ou à la prétention au style, et il finit exactement au même endroit. Il n’y a pas plus de morale de<br />

l’art que de la brouette ou du fer à repasser. Il y a en revanche une morale de l’artiste. Mais on n’a pas<br />

plus de chance de la trouver chez lui que chez le fabricant de brouette, fût-elle à frein sur jante, ou de<br />

fer à repasser, fût-il à marche arrière. Il se peut qu’en vous vendant son précieux véhicule le fabricant de<br />

brouettes scrupuleux vous exhorte à ne pas faire trop de vitesse, à ne pas brûler les feux rouges, à ne pas<br />

écraser les piétons, bref vous donne mille conseils moraux. Il se peut aussi que l’écrivain vous engage à<br />

offrir votre place aux dames âgées et à ne pas dire du mal de vos meilleurs amis que lorsqu’ils ne peuvent<br />

vous entendre. Mais c’est hasard, dans un cas comme dans l’autre ; du moins n’est-ce pas obligatoire. Ce<br />

qu’il faut demander au marchand de brouettes c’est de la brouette, à l’homme de lettres c’est du style. Le<br />

reste est chimère et confusion. »<br />

< 297 - 30 septembre 1958 p.678 >

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