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288 LIBERTÉ<br />

Georges BERNANOS / La France contre les robots (1946) / Essais et écrits de combats II / Bibliothèque<br />

de la Pléiade / nrf Gallimard 1995<br />

« L’idée qu’un citoyen, qui n’a jamais eu affaire à la justice de son pays, devrait rester parfaitement libre<br />

de dissimuler son identité à qui il lui plaît, pour des motifs dont il est seul juge, ou simplement pour son<br />

plaisir, que toute indiscrétion d’un policier sur ce chapitre ne saurait être tolérée sans les raisons les plus<br />

graves, cette idée ne vient plus à l’esprit de personne. Le jour n’est pas loin peut-être où il nous semblera<br />

aussi naturel de laisser notre clef dans la serrure, afin que la police puisse entrer chez nous nuit et jour,<br />

que d’ouvrir notre portefeuille à toute réquisition. Et lorsque l’État jugera plus pratique, afin d’épargner le<br />

temps de ses innombrables contrôleurs, de nous imposer une marque extérieure, pourquoi hésiterions-nous<br />

à nous laisser marquer au fer, à la joue ou à la fesse, comme le bétail? L’épuration des Mal-Pensants, si<br />

chère aux régimes totalitaires, en serait grandement facilitée. »<br />

< p.992 ><br />

Henri LABORIT / Éloge de la fuite / Robert Laffont 1976 - Gallimard folio-essais 7<br />

« La sensation fallacieuse de liberté s’explique du fait que ce qui conditionne notre action est généralement<br />

du domaine de l’inconscient, et que par contre le discours logique est, lui, du domaine du conscient. C’est<br />

ce discours qui nous permet de croire au libre choix. Mais comment un choix pourrait-il être libre alors que<br />

nous sommes inconscients des motifs de notre choix, et comment pourrions-nous croire à l’existence de<br />

l’inconscient puisque celui-ci est par définition inconscient? Comment prendre conscience de pulsions primitives<br />

transformées et contrôlées par des automatismes socio-culturels lorsque ceux-ci, purs jugements de<br />

valeur d’une société donnée à une certaine époque, sont élevés au rang d’éthique, de principes fondamentaux,<br />

de lois universelles, alors que ce ne sont que les règlements de manœuvres utilisés par une structure<br />

sociale de dominance pour se perpétuer, se survivre? »<br />

<br />

« La sensation fallacieuse de liberté vient aussi du fait que le mécanisme de nos comportements sociaux<br />

n’est entré que depuis peu dans le domaine de la connaissance scientifique, expérimentale, et ces mécanismes<br />

sont d’une telle complexité, les facteurs qu’ils intègrent sont si nombreux dans l’histoire du système<br />

nerveux d’un être humain, que leur déterminisme semble inconcevable. Ainsi, le terme de "liberté" ne s’oppose<br />

pas à celui de "déterminisme" car le déterminisme auquel on pense est celui du principe de causalité<br />

linéaire, telle cause ayant tel effet. Les faits biologiques nous font heureusement pénétrer dans un monde<br />

où seule l’étude des systèmes, des niveaux d’organisation, des rétroactions, des servomécanismes, rend<br />

ce type de causalité désuet et sans valeur opérationnelle. Ce qui ne veut pas dire qu’un comportement soit<br />

libre. Les facteurs mis en cause sont simplement trop nombreux, les mécanismes mis en jeu trop complexes<br />

pour qu’il soit dans tous les cas prévisible. Mais les règles générales que nous avons précédemment schématisées<br />

permettent de comprendre qu’ils sont cependant entièrement programmés par la structure innée<br />

de notre système nerveux et par l’apprentissage socio-culturel »<br />

<br />

« La liberté commence où finit la connaissance (J. Sauvan). Avant, elle n’existe pas, car la connaissance des<br />

lois nous oblige à leur obéir. Après, elle n’existe que par l’ignorance des lois à venir et la croyance que nous<br />

avons de ne pas être commandés par elles puisque nous les ignorons. En réalité, ce que l’on peut appeler<br />

"liberté", si vraiment nous tenons a conserver ce terme, c’est l’indépendance très relative que l’homme peut<br />

acquérir en découvrant, partiellement et progressivement, les lois du déterminisme universel. Il est alors<br />

capable, mais seulement alors, d’imaginer un moyen d’utiliser ces lois au mieux de sa survie, ce qui le fait<br />

pénétrer dans un autre déterminisme, d’un autre niveau d’organisation qu’il ignorait encore. Le rôle de la<br />

science est de pénétrer sans cesse dans un nouveau niveau d’organisation des lois universelles. »<br />

<br />

Emil CIORAN / Le livre des leurres (1936) / Œuvres / Quarto Gallimard 1995<br />

« La liberté est un joug trop lourd pour la nuque de l’homme. Même pris d’une terreur sauvage, il est plus<br />

assuré que sur les chemins de la liberté. Bien qu’il la considère comme la valeur positive par excellence, la<br />

liberté n’a jamais cessé de lui présenter son revers négatif. La route infaillible de la débâcle est la liberté.<br />

L’homme est trop faible et trop petit pour l’infini de la liberté, de sorte qu’elle devient un infini négatif. Face

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