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128 CROYANCE<br />

Rémy de GOURMONT / Épilogues (3) / Mercure de France 1923<br />

« La croyance en une cause unique est certainement la plus dangereuse superstition dans laquelle l’humanité<br />

puisse tomber. Tout le raisonnement en est faussé ; la vue du monde en est viciée ; on ne peut rien<br />

comprendre à la vie, ni même aimer la vie. Il est très probable que la notion de la providence est le mensonge<br />

qui a fait le plus de mal aux hommes. Quand on croit à la providence, on n’a pas le droit de rire de<br />

la plus grossière pratique fétichiste ; la providence est un fétiche près duquel tous les autres sont raisonnables.<br />

»<br />

< septembre 1903, p.199 ><br />

Sigmund FREUD / Essais de psychanalyse / Petite Bibliothèque Payot (44) 1973<br />

« Seuls les croyants qui demandent à la science de leur remplacer le catéchisme auquel ils ont renoncé,<br />

verront d’un mauvais œil qu’un savant poursuive et développe ou même qu’il modifie ses idées. »<br />

< Au-delà du principe du plaisir, 1920 p.81 ><br />

André GIDE / Journal 1889-1939 / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1951<br />

« On se persuade de tout et l’on croit ce que l’on veut croire. Puis on appelle "réalité supérieure" cette<br />

construction de l’esprit. Comment ne serait-elle pas supérieure à tout, dès qu’on y croit ? Et comment y<br />

pourrait-on croire, sinon en la croyant supérieure à tout...?<br />

Et si "la perle de grand prix" pour la possession de laquelle un homme laisse tous ses biens, se découvre<br />

une perle fausse?...<br />

- Qu’importe? Si celui qui la possède ne le sait pas. »<br />

< 4 février 1930 p.967-8 ><br />

« Ces idées dont on croit d’abord ne point pouvoir se passer. D’où grand danger d’installer son confort<br />

moral sur des idées fausses. Contrôlons, vérifions d’abord. Naguère le soleil tournait autour de la terre ;<br />

celle-ci, point fixe, demeurait le centre du monde, foyer d’attention du bon Dieu... Et puis non ! C’est la<br />

terre qui tourne. Mais alors, tout chavire ! Tout est perdu !... Pourtant rien n’est changé que la croyance.<br />

L’homme doit apprendre à s’en passer. De l’une, puis de l’autre, il se délivre. Se passer de la Providence :<br />

l’homme est sevré.<br />

Nous n’en sommes pas là. Nous n’en sommes pas encore là. Cet état d’athéisme complet, il faut beaucoup<br />

de vertu pour y atteindre ; plus encore pour s’y maintenir. Le "croyant" n’y verra sans doute qu’invite à la<br />

licence. S’il en allait ainsi : vive Dieu ! Vive le sacré mensonge qui préserverait l’humanité de la faillite,<br />

du désastre. Mais l’homme ne peut-il apprendre à exiger de soi, par vertu, ce qu’il croit exigé par Dieu? Il<br />

faudrait bien pourtant qu’il y parvienne ; que quelques-uns, du moins, d’abord ; faute de quoi la partie serait<br />

perdue. Elle ne sera gagnée, cette étrange partie que voici que nous jouons sur terre (sans le vouloir, sans le<br />

savoir, et souvent à cœur défendant), que si c’est à la vertu que l’idée de Dieu, en se retirant, cède la place ;<br />

que si c’est la vertu de l’homme, sa dignité, qui remplace et supplante Dieu. Dieu n’est plus qu’en vertu de<br />

l’homme. Et eritis sicut dei. (C’est ainsi que je veux comprendre cette vieille parole du Tentateur - lequel,<br />

ainsi que Dieu, n’a d’existence qu’en notre esprit - et voir dans cette offre, qu’on nous a dite fallacieuse,<br />

une possibilité de salut.) »<br />

< 1947 p.310 ><br />

ALAIN / Les idées et les âges / Les Passions et la Sagesse / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard<br />

1960<br />

« Le conteur, qui veut faire paraître des choses absentes, y réussit bien mieux par le frisson de la peur que<br />

par une suite raisonnable de causes et d’effets ; les membres sanglants d’un homme tombant par la cheminée<br />

dans la poêle à frire, cela se passe de preuves, par l’épouvante ; tout se trouve lié dans l’imagination par<br />

l’impression forte, dès que l’expérience réelle est impossible, ou n’est point faite. Ce qui est indifférent<br />

n’est jamais cru, si vraisemblable qu’il soit ; ce qui touche violemment est toujours cru, et l’absurde est<br />

bien loin d’y faire obstacle, puisque l’absurde lui-même épouvante. »<br />

< p.215 >

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