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fascicule 2.pdf - EPFL

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[ univers de la bière, entre imagerie et identité ]<br />

des lieux de la bière au projet<br />

<strong>fascicule</strong> 2<br />

« Des esprits simples croient encore qu’on ne demande<br />

à la bière que de calmer nos soifs ! Pardonnez-leur, ils<br />

ne savent pas ! En vérité, c’est mille choses que l’on<br />

attend d’elle, simples, subtiles et délicates, et qu’elles<br />

nous accordent avec générosité. Elle édifi e et fortifi e<br />

amitiés et alliances en de mémorables soirées où se<br />

mêlent folie et sagesse. A qui cherche l’oubli, elle procure<br />

brume bienfaisante de l’esprit et apaisement des<br />

sens. Fidèle compagne de l’âme solitaire, elle adoucit le<br />

mal de vivre et la désespérance en donnant à l’existence<br />

de plus engageantes couleurs. Enfi n, douce et charitable<br />

aux cœurs meurtris par les peines amoureuses, elle<br />

dépose sur les blessures les plus cruelles un onguent<br />

bienfaisant. C’est dire si grandes sont ses vertus ! »<br />

(Pierre Guingamp, in Histoires de Bières, Le serment<br />

des Cats)


[ préambule ]<br />

Je n’oserais quand même pas dire que sans la bière nous ne sommes plus rien, mais<br />

presque. Remontant à la préhistoire, elle fait partie de l’histoire des peuples et des sociétés.<br />

N’était-ce pas elle qui, sous une forme simplifi ée, permettait par une sorte d’enivrement<br />

la communication avec les esprits ? N’est-ce pas elle qui par ses qualités et sa pureté a<br />

permis de limiter en partie des épidémies du moyen âge comme la peste ? C’est aussi elle,<br />

qui par ces hautes qualités nutritives et son bas coût représentait un aliment important<br />

pour les classes moyennes à pauvres.<br />

La bière a toujours existé et fait partie, qu’on le veuille ou non, de l’histoire de l’homme par<br />

son histoire, ces traditions et ses croyances. Si aujourd’hui nous avons oublié en grande<br />

partie tous les bienfaits qu’elle a pu nous assurer, nous continuons à nous retrouver avec<br />

les bons amis, autour d’une table et d’une bonne bière.<br />

Le premier <strong>fascicule</strong> de ce travail nous a rappelé toute l’importance de la bière dans nos<br />

sociétés, et en présente aussi les particularités.<br />

Le second <strong>fascicule</strong>, quant à lui, se rapporte aux lieux de la bière, menant ainsi cette<br />

réfl exion vers le projet. En traversant les différents bars, tavernes, estaminets et autres,<br />

ainsi que les diverses brasseries, nous verrons qu’il existe à l’heure actuelle un véritable<br />

problème d’identité, certains bars misant sur la décoration à outrance pour créer une<br />

sorte de cachet historique de la bière, alors que les grandes brasseries se sont tellement<br />

industrialisées qu’elles ont perdu tout contact avec l’humain et ressemblent à n’importent<br />

quelle autre usine de par le monde…<br />

L’âge d’or de la construction de la brasserie est passé avec ses grands bâtiments de<br />

briques, ses hautes cheminées et ses grandes vitres donnant sur les salles de brassage, est<br />

passé. Aujourd’hui, un nouveau type de brasserie fait surface. Les brasseries artisanales<br />

connaissent un regain d’intérêt important depuis une quinzaine d’années. Cependant,<br />

certaines de ces petites brasseries ont connu le succès, les obligeant à s’agrandir tout un<br />

voulant garder les spécifi cités artisanales qui ont fait leur renommée.<br />

C’est ainsi que se pose la question du projet, de la recherche d’une nouvelle identité<br />

accompagnée d’un nouveau programme correspondant aux brasseries naissant<br />

actuellement.<br />

« L’église est proche, mais la route est verglacée. Le bar est loin, mais je marcherai avec prudence. »<br />

(proverbe russe)


Les Demis de Maigret de Georges Simenon<br />

(in Cahier Simenon 8, 1994)<br />

Une des questions qu’on m’a posées le plus souvent et à laquelle, au début, je ne trouvais guère de réponse<br />

satisfaisante, est:<br />

« Pourquoi Maigret boit-il de la bière ? »<br />

Car Maigret est né dans une campagne de France qui produit un agréable petit vin blanc et vit<br />

ordinairement à Paris où les apéritifs sont à l’honneur. La plupart du temps, je répondais:<br />

« Le voyez-vous boire de la menthe verte, ou de l’anisette ? »<br />

C’est une erreur de croire qu’un auteur décide délibérément que son personnage sera bâti de telle ou telle<br />

façon, aura tel ou tel goût. La création d’un personnage est une chose quelque peu mystérieuse, qui se passe<br />

pour la plus grande part dans le subconscient. Pour être tout à fait franc, j’aurais pu dire:<br />

« Il boit de la bière parce qu’il ne peut faire autrement que boire de la bière. Pourquoi avez-vous le nez<br />

long, vous ? Et pourquoi mangez-vous des pommes frites à la plupart des repas ? »<br />

Or, je suis allé récemment à Liège, pour un trop bref séjour, malheureusement. Mais cette brièveté n’a été<br />

qu’apparente. En effet, pendant les semaines, les mois qui suivirent, mille détails enfouis au plus profond<br />

de ma mémoire se mirent à remonter à la surface. Par exemple, j’ai revu la rue de l’Offi cial, où la bonne<br />

vieille Gazette de Liège possédait ses bureaux au temps où j’étais un jeune reporter. J’ai revu la Violette,<br />

où je me rendais presque quotidiennement, et les locaux du commissariat central. A cause de cela, par la<br />

suite, de retour ici, il m’est arrivé de refaire les chemins que le jeune homme en imperméable beige faisait<br />

jadis. Tiens! Vers midi, il m’arrivait de m’arrêter à tel endroit... A cinq heures de l’après-midi, presque<br />

chaque jour, de rencontrer un ami à tel autre. Trois endroits en tout, que j’avais presque oubliés, mais que<br />

je revois aujourd’hui avec une précision photographique et dont, même, je retrouve l’odeur. Trois endroits,<br />

comme par hasard, où j’allais boire de la bière.<br />

L’un était un café, dans le bas de la Haute-Sauvenière, un café calme et propre où ne fréquentaient que<br />

des habitués, j’allais dire des initiés, et, pour la plupart, ils avaient, dans une armoire vitrée, leur verre


personnel, marqué à leur chiffre, de beaux verres à pied de la contenance d’un litre dans lesquels on<br />

dégustait avec respect de la bière limpide.<br />

Le rendez-vous de cinq heures, c’était dans un autre café, non loin de là, juste de l’autre côté du Théâtre<br />

Royal, le Café de la Bourse, où les clients, toujours les mêmes, aux mêmes tables de marbre, jouaient<br />

aux cartes ou au jaquet et où le patron, le matin, en bras de chemise, passait plus d’une heure a nettoyer<br />

avec amour la tuyauterie de sa pompe à bière. C’est lui qui, un jour, m’expliqua l’importance de cette<br />

opération, qu’il ne confi ait à aucun de ses garçons.<br />

Le troisième endroit... Ma foi, c’était à l’ombre de l’Hôtel de Ville, une pièce sombre, en contrebas, que<br />

le passant avait peu de chance de remarquer et où il n’y avait jamais plus de deux ou trois personnels à la<br />

fois. La bière y était servie par une femme blonde et forte sortie d’un tableau de Rubens qui s’asseyait à<br />

votre table et buvait avec vous en riant d’un bon rire indulgent à vos plaisanteries. Cela n’allait pas plus<br />

loin, d’ailleurs. Et c’était la compagne idéale pour vous aider à savourer un demi bien tiré.<br />

Pourquoi Maigret boit-il de la bière ?<br />

Je crois que ces trois images fournissent la réponse à la question et je n’y aurais sans doute jamais pensé<br />

sans mon récent voyage et sans le souper inoubliable que j’y ai fait, avec mes confrères, dans une sorte de<br />

sanctuaire de la bière, la Brasserie Piedbœuf, à Jupille, où j’ai retrouvé, non seulement mes vieux amis<br />

de jadis, mais les jeunes qui sont venus ensuite, en même temps que cette bonne odeur de bière fraîche qui<br />

reste pour moi comme l’odeur de la Belgique.<br />

Georges Simenon,<br />

Lakeville, Connecticut,<br />

le 3 janvier 1953.


[ préambule ] p. 3<br />

[ introduction ] p. 11<br />

des espaces de la bière<br />

[ des lieux pour boire ] p. 17<br />

de l’estaminet et autres lieux associés p. 17<br />

salon du peuple p. 27<br />

[ les bâtiments de brasserie ] p. 30<br />

[ typologie : d’une organisation verticale à horizontale ] p. 31<br />

[ classification des types ] p. 41<br />

type 1 : les brasseries monacales p. 41<br />

- constructions idéales : de Saint-Gall à Villers-la-Ville p. 41<br />

- trappistes et abbayes p. 47<br />

- installation des bâtiments p. 48<br />

type 2 : brasseries en régions habitées p. 51<br />

- les bâtiments isolées et les bâtiments en alignement de rue p. 51<br />

- la brasserie Cantillon, Bruxelles p. 53<br />

- les bâtiments en îlot p. 56<br />

- la brasserie Friart p. 57<br />

- les petites usines p. 69


type 3 : la brasserie-ferme p. 61<br />

- la brasserie du Bocq p. 65<br />

type 4 : les grandes brasseries de brique p. 69<br />

- les moyennes et grandes usines p. 69<br />

- les brasseries-châteaux p. 71<br />

- la brasserie de Feldschlösschen p. 73<br />

type 5 : les brasseries béton p. 77<br />

type 6 : du cube métallique p. 79<br />

type 7 : la brasserie bricolage ou la brasserie en devenir p. 83<br />

type 8 : la micro-brasserie urbaine p. 83<br />

[ la question du terroir et du rapport au sol ] p. 86<br />

[ état actuel, entre brasseries artisanales et grosses industries ] p. 88<br />

vers le projet<br />

[ introduction et problématique ] p. 92<br />

[ BFM – Brasserie des Franches Montagnes ] p. 95<br />

la déficience industrielle p. 97<br />

principes de base de la production de BFM p. 98<br />

organisation de la production actuelle p. 98<br />

plan actuel de la brasserie p. 103<br />

description détaillée des différentes étapes p. 103<br />

7<br />

[ table des matières ]


gênes de la brasserie, points faibles p. 115<br />

nouveau bâtiment, nouveau programme p. 117<br />

questionnement autour du caractère artisanal p. 119<br />

caractère du bâtiment p. 121<br />

Stimmung et ambiance de brasserie p. 121<br />

relation entre production et dégustation p. 123<br />

gênes pour la dégustation / restauration p. 124<br />

prévisions pour l’agrandissement p. 125<br />

matériel p. 127<br />

parties du projet p. 128<br />

exigences architectoniques p. 129<br />

dangers spéciaux p. 129<br />

énergétique p. 130<br />

question de froid p. 132<br />

relation avec les environs p. 132<br />

le choix de l’implantation p. 132<br />

[insertion dans un milieu : la Chaux-de-Fonds ] p. 138<br />

entre les sapins… p. 141<br />

ville industrielle… et internationale p. 143<br />

structure de la ville p. 145<br />

en découvrant la ville p. 152<br />

- notion d’espace p. 152<br />

- perspective p. 153<br />

- un mélange de constructions p. 153


- le massif bien ordonné p. 159<br />

- décorations, ornementations et neutralité p. 163<br />

- couleurs ! p. 163<br />

- toitures p. 165<br />

-manufactures et usines p. 165<br />

[ intégration dans le site : le quartier Le Corbusier ] p. 170<br />

situation p. 171<br />

mémoire du lieu p. 173<br />

enjeux de l’aménagement du quartier par rapport à la ville p. 175<br />

relation avec le reste de la ville et intégration p. 175<br />

prolongement du damier p. 185<br />

mixité et dynamisme du site p. 185<br />

éléments du site p. 187<br />

une implantation par étapes p. 189<br />

du minéral au végétal p. 191<br />

accessibilité p. 193<br />

conclusions au sujet du plan d’urbanisme p. 194<br />

situation de la brasserie dans le quartier p. 195<br />

[ volontés de projet, synthèse et conclusion ] p. 203<br />

du côté des domaines viticoles p. 203<br />

caractère du bâtiment p. 205<br />

image du bâtiment p. 207<br />

aspect extérieur du bâtiment et conception p. 207<br />

relations entre production et restauration p. 209<br />

9<br />

[ table des matières ]


lumière ! p. 209<br />

des toits p. 211<br />

une différenciation par la structure et les matériaux ? p. 211<br />

la brasserie dans la ville p. 214<br />

agrandissement p. 215<br />

questionnements autour de l’architecture industrielle p. 215<br />

conclusion p. 218<br />

[ programme ] p. 220<br />

[ bibliographie ] p. 223<br />

[ sources iconographiques ] p. 229<br />

[ remerciements ] p. 235


[ introduction ]<br />

La première partie de cette recherche a permis d’évoquer l’art et la tradition de la bière,<br />

d’appréhender la brasserie à travers ses métiers, d’essayer de saisir le caractère populaire<br />

de la bière ainsi que son rôle social. C’est cette convivialité qui est le facteur essentiel,<br />

celui d’une boisson réunissant les hommes. C’est donc naturellement à partir de ce<br />

concept que se poursuivra ce travail, afi n de défi nir un programme précis pour le projet<br />

ainsi qu’une proposition de site.<br />

Comme nous avons pu le constater dans le chapitre concernant l’imagerie actuelle de la<br />

bière, la rupture entre ce qui est présenté au consommateur et ce qui se trouve réellement<br />

derrière l’image véhiculée par la publicité est parfois surprenante. Le consommateur n’est<br />

certes pas trompé sur la qualité de ce qu’on lui sert - la législation est très stricte désormais<br />

à ce sujet - mais tout est fait pour le rendre complice d’un mensonge auquel il veut bien<br />

croire. Ce problème d’image que l’on a évoqué dans les publicités et les étiquettes de bière<br />

se retrouve aussi ici dans les lieux sur la bière, les bars et les grandes brasseries actuelles.<br />

Il convient donc dans cette deuxième partie, de se poser les questions relatives aux<br />

différents lieux consacrés à la bière (débits de boissons et brasseries). Ensuite on<br />

s’intéressera à l’image de l’usine à travers le temps, ainsi que de la question de leur<br />

rapport à la ville.<br />

Avant de pouvoir formuler une proposition, il sera donc d’abord et à nouveau question<br />

d’histoire, celle de l’évolution des brasseries, de même que celle de l’évolution de l’usine<br />

à travers sa représentation sociale.<br />

Il s’agit maintenant d’aller plus loin dans l’exploration de l’univers de la bière, et de<br />

s’interroger sur son identité, ou plutôt sur l’image que les brasseries tentent d’en<br />

projeter. On verra que si certaines marques de bière, si certains lieux de production et<br />

de consommation visent à maintenir présentes des traditions anciennes, voire même à<br />

susciter l’image d’un passé inexistant en dotant leurs bières d’un cachet historique qu’elles<br />

n’ont pas toujours, d’autres au contraire, font fi de cette image passéiste et jouent sur<br />

le caractère contemporain de cette boisson rafraîchissante, ne négligeant certes pas sa<br />

dimension traditionnelle, mais mettant l’accent sur la jeunesse du produit, tout autant que<br />

sur celle d’une partie des consommateurs.<br />

Il n’est pas étonnant dès lors, au delà des nécessités de la production brassicole moderne,<br />

que ces brasseries se présentent presque comme ce qu’elles sont en fait devenues, un<br />

univers industriel de haute technologie, très largement robotisé, presque déshumanisé.<br />

Des usines qui ressemblent plus à un laboratoire pharmaceutique ou à une installation<br />

chimique, qu’à la fabrique de bière qu’elles étaient jadis, cet antre des maîtres brasseurs<br />

s’activant autour de leurs cuves de cuivre comme l’image d’Epinal aime à les présenter.<br />

« _N’y compte pas, Marcellus. Au cours des siècles la bière changera, de couleur, de parfum et de saveur,<br />

tant est si bien qu’un jour les hommes ne pourront même plus imaginer le goût de celle du temps jadis.<br />

C’est ainsi. » (Pierre Guingamp, in Histoires de Bières, Le Dragon de Mormal)<br />

11<br />

[ introduction ]


Pourtant, même dans les usines les plus modernes, la fonctionnalité et l’esthétisme<br />

du bâtiment ne sont pas nécessairement antinomiques. Les architectes des brasseries<br />

anciennes dont les bâtiments subsistent toujours aujourd’hui cherchaient aussi en leur<br />

temps à réconcilier les exigences industrielles à une vision esthétique et même éthique de<br />

ce que devait être l’usine moderne. S’interroge-t-on suffi samment lorsque l’on se penche<br />

sur l’archéologie industrielle de nos pays, sur ce qui distinguait à l’époque les premières<br />

brasseries modernes d’autres bâtiments industriels contemporains, les premiers tissages<br />

industriels, les tanneries ou les premières fabriques de voitures ? De mêmes grands<br />

halls de briques rouges, aujourd’hui noircis par le temps, de mêmes hautes cheminées<br />

cerclées de fer, le portail, les bâtiments annexes où se tenaient les employés. Et pourtant<br />

la brasserie se distinguait des autres usines, non pas par une frise qui aurait orné ses<br />

murs, ou tels autres détails esthétiques, ni même par l’odeur du houblon moins âpre que<br />

celle des huiles et des vapeurs diverses des autres fabriques, mais par la disposition des<br />

bâtiments, celle-ci répondant à une logique du traitement de la matière première. Pour<br />

le visiteur d’aujourd’hui, ces vieilles brasseries pourtant ne se distinguent pas d’autres<br />

vestiges industriels, et c’est l’imagination et le cœur qui sont sollicités pour y faire revivre<br />

ce qui les différenciaient de toute manière des autres bâtisses, cet esprit qui en imprégnait<br />

les murs, celui la même des alchimistes que j’évoquais dans la première partie, ces hommes<br />

transformant de l’orge en or liquide, par le simple jeu de l’eau, du feu et du temps.<br />

C’est ainsi que se pose la question du projet. La recherche d’une identité nouvelle pour<br />

la brasserie, d’une éthique de sa conception ne s’inspirant peut-être pas seulement de<br />

son passé artisanal, mais bien surtout de la dimension conviviale du produit qu’on y<br />

fabrique, et qui lui, à travers les styles architecturaux, le choix des matériaux, les progrès<br />

technologiques est resté le même. Un breuvage qui a la faculté de rendre les hommes<br />

heureux et de les rassembler autour d’une table.<br />

En discutant avec Yvan de Baets, brasseur à la brasserie de la Senne à Bruxelles et expert<br />

de ce projet de diplôme, nous faisions une comparaison entre la création d’une bière et<br />

le développement du projet d’architecture. Si les deux amènent à un objet concret, ils<br />

se fondent sur des techniques et une histoire de ce qui s’est fait auparavant. L’étude de<br />

l’existant permet de s’interroger sur ce qui va venir et de faire des propositions. Ce n’est<br />

pas une base à copier, imiter ou recréer, mais une source d’où j’aillissent les questions, que<br />

l’on peut prendre comme référent pour amener son sujet et réinterpréter le thème selon<br />

ses propres convictions et pensées. Copier une bière pour juste reproduire un produit<br />

n’est pas intéressant. Par contre, le changement et les améliorations d’un genre sont un<br />

exercice autrement plus captivant.<br />

Nous proposerons dans la dernière partie de ce travail de projeter un bâtiment pour<br />

les installations de brassage de la brasserie des Franches-Montagnes. La brasserie est<br />

actuellement située dans une zone industrielle à Saignelégier . Notre projet propose son<br />

déplacement vers la ville de la Chaux-de-Fonds.<br />

“Ce qui se dit à la table du buveur ne dure guère.” (proverbe allemand)


En préservant l’aspect populaire et social de la bière, le programme de production va<br />

être doublé d’un deuxième programme plus public correspondant à la dégustation et<br />

à la restauration sur le lieu de production même. Ce mélange de deux programmes<br />

nous rapproche de l’archétype de la brasserie-taverne, disparu avec l’industrialisation<br />

et le développement de débits de boissons simples. Il ne s’agit nullement d’une de<br />

ces tentatives, basées sur l’artifi ce d’un passé révolu, comme certaines mini-brasseries<br />

installées dans les villes en sont le triste exemple. Il s’agit donc de réinventer ce qui<br />

existait jadis, cette combinaison heureuse de la brasserie lieu de production et lieu de<br />

consommation. L’agrandissement de la brasserie des Franches-Montagnes se traduit<br />

en un projet industriel dans lequel on voudra mêler le savoir-faire des brasseurs à la<br />

convivialité des buveurs et amateurs de bière.<br />

“Contre la bière et le tabac, les ruses des femmes échouent.” (Goethe)<br />

13<br />

[ introduction ]


_ des espaces de la bière


Le Café de l’Union, huile sur toile de Jean-Louis Tinguely, 1975


[ des lieux pour boire ]<br />

« Qui n’a pas écumé les pubs de Dublin, les tavernes de Prague, les estaminets de Bruxelles ou les caves<br />

de Munich, ne connaît rien du senti de la bière en ces lieux d’expression idéale pour les relations humaines<br />

qualifi és par les Anglais de parlement miniature.» (Jean Claude Colin)<br />

Estaminets, bistrots, pubs, brasseries ou Bierstube, ces lieux étaient d’abords tenus par<br />

les brasseurs mêmes qui y écoulaient leur propre bière. Ce chapitre a pour but d’identifi er<br />

au cours de l’histoire des tavernes à bière quelle a été leur évolution et quelles sont les<br />

caractéristiques similaires de certains lieux ainsi que de leurs particularités. Souvent tout<br />

de bois vêtu, avec de grandes tables, peu éclairés, recouverts de décorations en tout<br />

genre et de vielles enseignes de bière, ces lieux sont hauts en couleur. Malheureusement<br />

aujourd’hui, les nouveaux cafés cherchent à recréer une sorte de cachet relatif à la bière,<br />

masquant la production actuelle et plongeant le buveur dans un passé imagé.<br />

Il est certain que le caractère convivial de la dégustation de la bière dépend dans une large<br />

mesure du sentiment de bien-être que ressent le consommateur. Le café, l’estaminet, la<br />

brasserie, sont pour beaucoup non seulement le lieu où l’on boit de la bière, mais celui<br />

de l’amitié et du copinage, des rencontres et des confi dences, des parties de cartes ou de<br />

billard. C’est le lieu où l’on se quitte après le travail, c’est celui où l’on se retrouve avant ou<br />

après une sortie. Pour beaucoup, le bistrot ou le café, est comme un autre chez soi.<br />

de l’estaminet et autres lieux associés<br />

On distingue en général le cabaret du café, de l’auberge, de la taverne, du bar, de la cantine,<br />

et autres guinguettes. A l’origine, le cabaret était un débit de boisson situé le plus souvent<br />

à l’entrée des villes ou à un point de relais, accueillant les voyageurs pour se désaltérer.<br />

On distingue aussi les auberges des tavernes à bières. Si les premières permettaient au<br />

voyageur de se reposer et d’y passer la nuit, les tavernes se limitaient au seul débit de<br />

boisson et à la restauration. Le café est apparu avec l’introduction au XVII ème siècle du<br />

café en Europe. Si aujourd’hui les cafés débitent toutes sortes boissons confondues, ils<br />

se limitaient à l’époque au simple café, ne servant ni bière, ni vin, ni quelconque autre<br />

boisson alcoolisée.<br />

Il existe plusieurs origines au mot estaminet. La mise en perce d’un nouveau tonneau<br />

était annoncée dans la rue par le brasseur qui invitait les convives. Plus tard, cette tâche<br />

fut confi ée à des crieurs publics portant la bannière de la brasserie. A ce moment-là, le<br />

brasseur suspendait à sa porte une longue étamine bicolore : le mot estaminet en serait<br />

« Déguster une bière c’est bien, mais déguster une bière dans de bonnes conditions, c’est mieux. »<br />

17<br />

[ des lieux pour boire ]


« On s’affairait moult en ce lieu. Serviteurs et marmitons allaient et venaient, portant plateaux et fl acons.<br />

Au plafond pendaient gélines, lapins et gibiers. Sur les tables on coupait, dressait, tranchait. Dans la<br />

cheminée tournaient volailles et cuisaient hochepots. Cà et là s’apprêtaient civets, truites farcies, poulardes<br />

rôties. La lueur changeante des fl ammes dessinait en clairs-obscurs d’appétissantes natures mortes, comme<br />

aiment à en peindre les artistes des Pays-Bas. De l’air fl ottaient d’ineffables parfums de viandes, farces,<br />

herbes et épices, propres à faire chavirer les âmes les mieux trempées. »<br />

(Pierre Guingamp, in Histoires de Bières, Noël en ville)<br />

1. 2. 3.<br />

4. 5.<br />

1. crieur annonçant la mise en perce<br />

2. L’Etrille, rue de Rollebeek, Bruxelles<br />

3. brasserie au XVIIIème siècle<br />

4. A l’Imaige Nostre-Dame, estaminet à Bruxelles<br />

5. L’impasse des Cadeaux à Bruxelles qui abrite<br />

l’Imaige Nostre-Dame


donc un dérivé. Une autre version vient de l’interjection « Sta mijnher – arrêtez-vous,<br />

Monsieur », qui aurait donné à la suite « allons au staminet ». (Bertrand Hell, l’Homme<br />

et la bière)<br />

Les XIX ème et XX ème siècles voient des genres nouveaux se développer : le bar, la buvette,<br />

la cantine, la guinguette. Si le bar dérive du mot barre de la cours de justice, c’est parce que<br />

l’on n’y passe un moment à discuter, debout, appuyé contre la console en bois. La buvette<br />

avait pour habitude de se trouver proche des lieux de travail des ouvriers qui venaient s’y<br />

rafraîchir, ces mêmes lieux ont commencé eux aussi à servir à manger, se transformant<br />

alors en cantine. Les guinguettes quant à elles avaient un aspect plus bucolique, situées la<br />

plupart du temps en bordure de fl euve ou de rivière. Le bistrot, apparu à Paris en 1815,<br />

après la chute de Napoléon, lors de l’occupation de la ville par la coalition de l’époque,<br />

dont des troupes russes. Le mot bistro voulant dire vite en russe, c’est sans doute parce que<br />

ces soldats russes exigeaient d’être servis rapidement, que les débits de boissons qui les<br />

avaient pour clients ont fi ni par se faire nommer de la sorte.<br />

L’évocation de ces débits de boissons nous montre que leur histoire est longue et qu’ils<br />

n’étaient pas tous associés dès l’origine, à la bière, alors qu’aujourd’hui il est rare de ne pas<br />

trouver de bière dans un café. Ces lieux existent depuis près de 700 ans, et sont devenus<br />

avec le temps des lieux de mémoire et de convivialité indiscutables.<br />

Comme nous l’avons vu dans la première partie, les brasseurs du moyen âge possédaient<br />

dans leur brasserie leur propre débit de boisson et en étaient les uniques négociants.<br />

Ainsi, les brasseries urbaines possédaient leur propre salle. Il s’agissait en général d’un<br />

espace attenant à la salle de brassage, la bière étant tirée directement du fût. Les premières<br />

salles étaient assez rudimentaires : peu de chaises, on s’asseyait sur des bancs autour de<br />

grandes tablées. Cette salle avait parfois plusieurs usages : salle à manger ou cuisine pour<br />

la famille du brasseur. Ainsi, elle mêlait régulièrement les clients à la famille créant un<br />

espace de convivialité.<br />

A l’époque romaine déjà, les auberges se signalaient par une enseigne, généralement une<br />

couronne de laurier pendue au dessus de la porte. Au début du moyen âge, on accrochait<br />

au bout d’un bâton quelques feuilles de lierre au dessus de la porte, un cerceau ou une<br />

couronne de feuilles. Ces signes plutôt rudimentaires ont été remplacés par commodité<br />

dans les villes possédant plusieurs maîtres brasseurs par des enseignes de plus en plus<br />

imposantes. Les nouvelles enseignes portaient en général des noms farfelus identifi ant<br />

la maison du brasseur (la numérotation des maisons n’existait pas encore). Le poids des<br />

enseignes augmentant, on créa une sorte de console d’appui, support de l’imagination<br />

créative des artisans. Passant de simple panneau en bois, l’enseigne est devenue art de<br />

ferronnerie et de peinture se présentant sous divers matériaux : bois peint, fer forgé,<br />

cuivre, bronze et parfois même feuilles d’or. On suspendait souvent au dessous l’étoile<br />

du brasseur ou alors encore une couronne, souvent peinte en or.<br />

« Si l’on vous sert une tasse de café, ne vous efforcez pas d’y trouver de la bière. » ( Anton Tchekhov)<br />

19<br />

[ des lieux pour boire ]


1. 2.<br />

3. 4.<br />

5.<br />

1. Cabaret du moyen âge, dessin de Henri Pille<br />

2. La Grande Cave de Berne, dessin de Auguste<br />

Viollier<br />

3. Brasserie Alsacienne<br />

4. Le Café bauer à Berlin, dessin de w. Busch<br />

5. L’arrivée du nouveau tonneau à la Brasserie Royale<br />

de Munich


A la fi n du XVIII ème siècle, avec la suppression des privilèges des corporations, tout le<br />

monde pouvait vendre de la bière, ce qui fi t augmenter considérablement le nombre<br />

d’auberges.<br />

Les brasseries avaient l’habitude d’offrir quelques mets frugaux pour accompagner<br />

la bière : fromage, pain, saucisson et bretzel. Mais à partir du XIX ème , les brasseries<br />

commencèrent à proposer des mets régionaux. En effet, le nombre de client ayant<br />

augmenté, et les possibilités de voyage s’étant accrues avec le chemin de fer, il fallait<br />

pouvoir répondre aux nombreuses demandes de repas. Les auberges se transformèrent<br />

aussi grâce à l’avènement du progrès, prenant la forme des restaurant brasseries typiques<br />

que nous connaissons aujourd’hui. De plus, l’éclairage public augmentant dans les rues,<br />

on se mit à sortir plus pour se retrouver dans les café, auberges, restaurants, etc. Les salles<br />

des cafés se sont aussi grandement améliorées depuis les premières tavernes.<br />

« Dallées, garnies de grossiers bancs et tables, la bière servie dans des canettes en bardeaux goudronnés,<br />

un verre pour deux ou quatre buveurs, une chandelle allumée sur chaque table et qui, à peine, jetait une<br />

lumière vacillante dans cet horizon de fumée ou de brouillard, des murs noirs comme la nuit, telles étaient<br />

les anciennes brasseries. Aujourd’hui que le luxe et le confort ont envahi la société moderne, les brasseries<br />

de Strasbourg se sont réformées de même et se sont transformées à leur avantage, non que la bière vaille<br />

mieux que jadis, mais le service en canette en grès ou en verre, couvertes de brillants couvercles en étain,<br />

un verre au service de chaque buveur est plus propre, plus décent ; le papier peint qui couvre les murs, le<br />

gaz qui éclaire, les planchers en bois qui remplacent les dalles froides et humides et la ventilation établie<br />

ont même fait donner aux brasseries un luxe que n’avaient pas les cafés d’autrefois. »<br />

(F. Piton Strasbourg illustré, 1855)<br />

Bon nombre d’estaminets présentent des murs jaunâtres à brunâtres, à force d’avoir<br />

accueilli des générations de buveurs accompagnant leur bière d’un peu de tabac. Dans<br />

les croyances populaires, ce serait le diable qui aurait apporté la bière ainsi que le tabac<br />

aux hommes. Aussi n’est-il pas étonnant que l’un ne soit pas envisageable sans l’autre<br />

dans des lieux aussi populaires. Cette habitude de consommation entre bière et tabac<br />

remonterait au XVII ème siècle, certains historiens mettant en relation l’augmentation de<br />

la consommation de la bière avec les habitudes tabagiques ; il n’était d’ailleurs pas rare de<br />

trouver dans les estaminets de nombreux pays, du tabac offert gratuitement aux buveurs<br />

de bière.<br />

L’image de ces différents lieux a passablement évolué au cours du temps. Au XVIII ème<br />

siècle, on considérait les endroits de bière comme peu fréquentables : « La vapeur du<br />

poêle, la chaleur étouffante, la fumée de pipes, les aigres exhalations de la bière font de<br />

ces asiles du plaisir un vrai gouffre de putréfaction » (L. Durive, Le tabac à Strasbourg<br />

et en Alsace, Institut d’ethnologie de Strasbourg, 1979, p.79), plus tard, on parlait aussi<br />

d’affreux bouges aux murs noirâtres et à l’ambiance enfumée. Enfumés donc, et manquant<br />

« Les peuples de la rive gauche du Rhin et de la Belgique ont complètement vécu, lorsqu’après un certain<br />

nombre d’années on les porte au sépulcre gonfl és de bière et enfumés de tabac » (selon un voyageur français<br />

en Alsace, cité par F. Reiber.)<br />

21<br />

[ des lieux pour boire ]


1. 2.<br />

3.<br />

1. Les fumeurs, Adriaen Brouwer, 1638, huile sur bois<br />

2. Autoportrait dans une auberge, David Ténier le Jeune, 1646, huile sur toile<br />

3. In the Pub, John-Henry Henshall, 1928, huile sur toile


souvent d’aération étant donné que de nombreux estaminets se situaient dans une arrière<br />

salle ou alors dans des caves. Ces lieux étaient donc reconnus pour manquer d’hygiène.<br />

Dans les tavernes allemandes, en particulier dans la région de Munich, on avait installé<br />

tout un système de tuyauterie et de rigoles reliant les tables des buveurs à l’extérieur des<br />

rues. Ainsi les buveurs pouvaient continuer à boire sans jamais se soucier d’avoir à se<br />

lever. Cette coutume a encore cours de nos jours lors de la fête de la bière à Munich, où<br />

certains bars disposent des seaux sous les tables.<br />

Les lieux de bières ont fortement évolués avec le temps, et ont heureusement perdu<br />

cette image négative. Le mot brasserie a toutefois évolué dans deux sens différent : l’un<br />

s’attachant uniquement à l’activité brassicole, et l’autre découlant de l’évolution du genre<br />

de l’estaminet en simple lieu de restauration. La brasserie de restauration, que l’on pourrait<br />

presque appeler brasserie française ou parisienne (c’est là que l’on y trouve l’archétype) a donc<br />

développé un style bien à elle : boiseries, glaces biseautées, faïences peintes, appliques<br />

murales en verre et grand lustre. Même si l’on y sert des plats traditionnel, appelés par<br />

extension mets de brasserie, nous ne nous intéresserons pas à ce type, entendu qu’il n’a plus<br />

grand-chose à voir avec la bière et que le nom même a tendance à semer le trouble.<br />

« Non, il n’est pas vrai que vous soyez dans votre majorité des lieux mal famés, vous, estaminets du<br />

bassin houiller, où les mineurs font halte entre deux descentes. Vous, guinguettes des faubourg où l’on<br />

allait manger en famille les petits pains au jambon et fêter la « ducasse à haufes », cette kermesse à<br />

gaufres qui mettait en joie un quartier. Ni vous, vieux cabarets patriarcaux de la campagne fl amande<br />

où le Christ étend sur le mur, au-dessus du comptoir, ses bras protecteurs largement ouverts. Durant des<br />

années, des siècles certains d’entre vous ont servi de « maison commune », de mairie, et nul n’a pu trouver<br />

à y redire. D’autres ont habité des sociétés de bienfaisance, voire des confréries religieuses ou littéraires<br />

comme ces « chambres de rhétorique ». Tous ont accompli loyalement leur métier, leur mission de centre<br />

de réunion et de délassement où les jeux et les concours, fl échettes et bourboires, javelottes et « platte<br />

molle », coqs et pinsons avaient leurs places et leurs dates marquées. Le décor a fort peu changé depuis les<br />

tapisseries fl amandes sorties des ateliers lillois de la veuve Wernier, où l’on voit des fumeurs et des buveurs<br />

attablés autour des pots mousseux dans une composition à la Teniers. »<br />

(A, Depoorter, la Vie du Nord, 1943)<br />

C’est dans les diverses représentations faites par les artistes que l’on retrouve les éléments<br />

typiques des bars à bières qui changent selon les régions et les pays. Dans tous les cas,<br />

le bois est l’élément le plus présent : en passant par les chaises, les tables, le bar et les<br />

boiseries aux murs. Il en est un des éléments incontestables créant une partie de l’identité<br />

du bar à bière. Par sa nature souvent sombre, il contribue à l’aspect calfeutré, mais dans<br />

la gamme de ces nuances, il rappelle les différentes couleurs ainsi que la lumière de la<br />

bière. Si en Suisse, ces bars sont en général assez simples et rudimentaires, ils trouvent<br />

des formes beaucoup plus étudiées dans le nord, en particulier en Allemagne et en<br />

Belgique.<br />

« C’est le seul lieu où le docker côtoie le gentleman de la City .» (Jean Claude Colin)<br />

23<br />

[ des lieux pour boire ]


1.<br />

2.<br />

1. Le Poechenellekelder, en face du Manneken-Pis, à Bruxelles<br />

2. Le Dulle Griet à Gand


Si dans certains ce sont les peintures exécutées par quelques artistes habitués qui font<br />

la fi erté du bar, d’autres collectionnent des objets tels que pipes, pots à tabac, statues<br />

en bois représentant quelque saint buveur, rangements de cartes à jouer, jeux tels que<br />

javelots, toupie, marteau, grenouille etc. Il est fréquent aussi de retrouver aux fenêtres des<br />

vitraux, montrant brasseurs et saints. Tout ceci mis ensemble, même tant les plus anciens<br />

bars, contribue à donner un caractère quelque peu kitch mais néanmoins diffi cilement<br />

imitable.<br />

« Le long d’un mur s’étire un banc en faux acajou moulé, à décor de petits trou et de volutes dorées :<br />

calées les unes contre les autres, les fesses seront bien quand on se racontera les derniers potins. Dans<br />

la cheminée où on a collé des carreaux de faïence rappelant la vie d’autrefois avec des colombiers et des<br />

bergères, on a poussé un vieux feu à platine. Le patron explique aux curieux que l’on tirait le four sur<br />

le côté pour y poser des pommes à cuire et, si vos yeux pétillent de nostalgie, il ajoutera que sa grandtante<br />

les enrobait de pâte feuilletée et que ça embaumait dans toute la maison. » ( Jacques Messiant in<br />

Estaminets du Nord)<br />

Les pubs Anglais quant à eux, privilégient aussi le bois sombre, en particulier dans les<br />

boiseries des murs et des plafonds, utilisant aussi les réminiscences du passé. Ils se<br />

distinguent particulièrement par leur devanture extérieure, revêtue de bois peint, arborant<br />

des couleurs diverses et dont l’enseigne est incluse dans le revêtement.<br />

Aujourd’hui, nous nous retrouvons entre trois types de bars à bières existant : les vieux<br />

estaminets dont la décoration n’a quasiment jamais changé depuis une centaine d’année,<br />

conservant le charme de leur origine, repris de patrons en patrons, dont la clientèle est<br />

constituée d’habitués. Ensuite, nous avons des nouveaux bars à bières qui misent en<br />

grande partie sur la décoration du lieu pour créer une sorte d’ambiance ou de cachet. Ils<br />

donnent bien souvent l’impression d’avoir toujours existé. Certains se légitiment comme<br />

le Poechenellekelder (Pouch’) à Bruxelles, qui garnit ses murs d’une étonnante collection de<br />

vieilles marionnettes et de représentations du Manneken Pis. On peut certes critiquer la<br />

création d’un décor autour de la bière et des traditions, mais au moins, ce décor vient<br />

d’un vrai amusement et d’une envie de recréer l’histoire du lieu situé en face de la célèbre<br />

statuette, et de redonner vie à un passé.<br />

Ce qui est critiqué en revanche, dans le troisième type de bars à bière, est le fait qu’il<br />

mise plus sur sa représentation, et sur l’ambiance recréée pour attirer le buveur dans<br />

la nostalgie d’un soi-disant décor authentique et créé de toutes pièces. Il s’agit pour la<br />

plupart de nouvelles micro-brasseries installées en ville, chacune retranscrivant un décor<br />

qui se veut authentique. Mais à force de vouloir créer une authenticité toute faite, on<br />

tombe dans un faux-semblant, une illusion dont se contentent pourtant nombre de<br />

consommateurs. Il est étonnant de remarquer certaines similitudes entre ces bars du<br />

point de vue de leur décoration : ardoises, copies d’anciennes pancartes en bois peintes,<br />

« Le goût des réunions joyeuses et des festins. » (Brillat-Savarin)<br />

25<br />

[ des lieux pour boire ]


copies d’anciens encarts publicitaires, tout ce qui fait rétro a l’air de faire bière. Le cas le<br />

plus fl agrant étant la chaîne des 3 Brasseurs qui possède plusieurs centaines de bars et qui<br />

pourrait être comparée à un Mc Donald’s de la bière.<br />

Dernier bémol encore, du moins pour celles visitée se trouvant en Romandie, est la<br />

mauvaise qualité de la bière servie dans ce type de lieu. Ceci tendrait à prouver l’argument<br />

selon lequel toute cette décoration n’est là que pour attirer le buveur et supplanter au goût<br />

de la bière un décor surfait. En effet, ces bars micro-brasseries qui se veulent producteurs<br />

d’une bière authentique reçoivent de la part de dégustateurs les plus mauvaises notes quant<br />

à la qualité de leur bière. Or ces mêmes critiques ont la plupart du temps extrêmement<br />

bien récompensé les autres petites brasseries de Suisse qui ne possédent pas de salle de<br />

débit.<br />

Evidemment il n’y a pas que les bars micro-brasseries qui misent sur cet effet-décoration.<br />

D’un certain point de vue, cette création du décor cache quelque chose de problématique :<br />

elle noie le consommateur dans un univers pseudo artifi ciel et intemporel. Se protéger<br />

et se cacher derrière une image rappelant des vestiges du passé obstine à ne pas voir<br />

l’univers actuel de la bière et de sa production. On peut comparer cette fausse décoration<br />

à certaines publicités pour la bière et aux étiquettes, cultivant aussi l’image comme<br />

certaines bières d’abbaye qui montrent un splendide vitrail d’église, alors que la bière est<br />

produite en masse dans une usine dont l’ampleur dépasse l’imagination.<br />

« Le débit de boisson est pour le peuple le seul lieu de réunion, de causerie, de réconfort, le seul où il fait<br />

bon, où il fait chaud, où il fait clair. N’est-il pas alors, après une journée de dur labeur, l’endroit de vie et<br />

d’oubli, où la compagnie engendre l’espoir de la conquête sociale et du progrès familial. » (Charles Gide)


« Les maisons de la bière sont les garderies du crime. » (Brillat-Savarin)<br />

salon du peuple<br />

Ces estaminets, cafés, tavernes et autres lieux de boissons ont été et sont avant tout des<br />

lieux de rencontre et de réunion. Dans les villages et les quartiers des villes, ils servent<br />

en général de point de rendez-vous entre les habitants. On y parlait, on y buvait, on y<br />

rencontrait, et ceci, toute génération confondue. « La tradition orale leur doit beaucoup<br />

car ils ont été longtemps, et sont encore en certains endroits, des sanctuaires où se sont<br />

perpétués et entretenus des traditions et des langages locaux, les empêchant de sombrer<br />

à jamais dans l’oubli ». (Dominique Ramaut, in Estaminets du Nord). C’était là que se<br />

passait une grande partie de la vie sociale autour du champagne du pauvre.<br />

Une récente étude en Suisse a montré que l’activité sociale ou culturelle la plus pratiquée<br />

par la population vivant dans des villages ou dans les petites villes était le bistrot. Les<br />

cinémas, théâtres et autres lieux de loisirs se trouvent passablement éloignés ; en revanche,<br />

on trouve toujours un bar dans un périmètre restreint où l’on peut rencontrer des amis.<br />

Les vieux bars et estaminets semblent immuables, garant d’une tradition, renfermant<br />

souvent l’âme d’un village, d’une région ou d’une ville, pour ceux qui ont subsistés. Pour<br />

ceux qui servent aussi à manger, on y retrouve une cuisine familiale, des plats de toujours.<br />

Jacques Messiant nous dit qu’on y mange comme chez notre grand-mère et qu’on y joue<br />

comme son grand père le faisait.<br />

Comme Simenon l’évoque dans son texte sur Maigret et la bière, ces lieux étaient souvent<br />

fréquentés à des moments précis de la journée, relatifs à l’organisation de la communauté :<br />

accueillant les gens à la sortie de l’église, les ouvriers dans leur moment de pause, la fi n de<br />

journée des travailleurs, et les jours de marché. Utilisé aussi comme lieu de réunion des<br />

ouvriers au moment de l’ère industrielle, il devient nécessaire pour le prolétariat. Certains<br />

des estaminets sont même devenus des lieux de résistance décriés par la bourgeoisie<br />

régnante qui ne voulait que les faire fermer, argumentant que les bars nuisaient à la santé<br />

des ouvriers qui y dépensaient leur salaire en ivrognerie, et que ces foyers étaient un vrai<br />

danger politique.<br />

Bien sûr, nous pourrions parler des différentes rixes, des problèmes de prostitution et de<br />

l’alcoolisme qui ont contribué à l’image négative des tavernes. C’en est un des aspects,<br />

il est vrai, mais qui rompt fortement avec la convivialité et l’aspect social qui étaient<br />

reconnus aux autres lieux. Il ne s’agit pas de cacher, ou de mettre de côté un des aspects,<br />

mais tous les bars à bière n’étaient pas des bouges ou des endroits mal famés comme on<br />

a longtemps voulu le faire croire. Ce sont souvent les mauvais cas que l’on retient, et ici,<br />

le caractère même des lieux, sombres, associés à l’alcool et à la fumée, a fortement subi la<br />

mauvaise réputation de quelques uns d’entre eux.<br />

27<br />

[ des lieux pour boire ]


_ des bâtiments de brasserie


[ des bâtiments de brasserie ]<br />

Un brasseur vous dira qu’il existe autant de brasseries différentes que de bières. Chacune<br />

a débuté à sa manière, s’est développée selon ses propres moyens, provoquant ainsi un<br />

énorme hétéroclisme entre leur apparence et leur organisation. Si à l’époque, les brasseries<br />

commençaient en réunissant quelque casseroles dans la grange ou dans la cuisine de leur<br />

maison, cet état de fait n’a pas changé, et de nombreuses micro-brasseries actuelles ont<br />

d’abord commencé ainsi, s’installant du mieux qu’ils pouvaient, là où ils le pouvaient.<br />

Les bâtiments de brasseries présentent de nombreuses différences de par leur ancienneté,<br />

mais aussi dans leurs dimensions, leur aspect extérieur, leur construction et leurs matériaux.<br />

Si certaines brasseries se sont installées dans des bâtiments préexistants, les transformant<br />

au cours de leur évolution, d’autres brasseries ont choisit en s’agrandissant, de construire<br />

de nouveaux bâtiments voulant signifi er l’ampleur de leur renommée.<br />

Aujourd’hui, on constate, entre les grandes brasseries comme Feldschlösschen à<br />

Rheinfelden, les anciennes fermes transformées, les grandes usines à bières et les zonings<br />

industriels, un certain éclectisme de ces bâtiments. Bien que les procédés de fabrication de<br />

la bière soient plus ou moins identiques d’un pays à l’autre, toutes les brasseries n’utilisent<br />

pas le même matériel. Aussi celui-ci conditionne en grande partie la bière en production<br />

et la forme du bâtiment.<br />

Idéalement, il aurait été intéressant de pouvoir comparer les plans des différentes brasseries<br />

afi n d’établir une logique dans les processus de fabrication ayant une répercussion sur<br />

la forme des bâtiments ainsi que de leur agglomération. Malheureusement, peu de<br />

brasseries possèdent les plans de leurs locaux. Les grandes brasseries refusent de fournir<br />

leur plans pour des raisons de confi dentialité, et les brasseries de moyenne envergure ainsi<br />

que les petites se sont souvent reconstruites sur elles-mêmes, au gré des besoins et sans<br />

planifi cation spéciale.<br />

Cette multitude de brasseries différentes, les différents moyens techniques utilisés par les<br />

brasseurs, l’évolution de leurs techniques rendent diffi cile l’établissement d’une typologie,<br />

la mise en évidence de règles fi xes d’organisation des bâtiments, ainsi que des impératifs<br />

d’implantation dans un site.<br />

Nous commencerons par parler du changement d’organisation typologique des<br />

brasseries, passant d’une organisation verticale à une organisation horizontale. Ensuite,<br />

nous proposerons une classifi cation de différents bâtiments de brasserie.<br />

« La route qui mène à Dieu est d’avoir une bière dans les mains. » ( proverbe koffyar)


[ typologies : d’une organisation verticale à horizontale ]<br />

Faute de plans réels, nous allons baser la partie de l’étude concernant la typologie verticale<br />

sur les écrits théoriques concernant les bâtiments de brasserie, en particulier sur le Traité<br />

théorique et pratique de la Fabrication de la Bière de F. Rohart avec une étude de brasserie<br />

modèle de A. Riche, datant du début du XX ème siècle. Quant aux typologies horizontales,<br />

elles seront tirées des différentes conclusions suite aux visites de brasseries et à l’ouvrage<br />

de Briggs.<br />

L’évolution des techniques ainsi que du matériel de brassage est une des causes principales<br />

du changement de typologie typique des brasseries. Si chacune varie en fonction de son<br />

installation sur le site et du bâtiment qu’elle a investi ou construit, nous sommes à même<br />

de tirer quelques règles d’organisations dépendant de la machinerie utilisée. En effet,<br />

pour des raisons de simplicité mais aussi pour économiser le travail humain, les anciennes<br />

brasseries étaient organisées selon un principe de verticalité afi n de pouvoir profi ter des<br />

différentes lois de la physique.<br />

Dans son plan pour une brasserie-modèle, A. Riche voulu établir un système de brasserie<br />

modèle dont la typologie suivrait une logique d’organisation et d’économie du travail, en<br />

réduisant non seulement les coûts, mais aussi le nombre d’employés, convaincu que de<br />

l’organisation de la brasserie répond la qualité de la bière.<br />

Une des premières conditions de l’établissement d’une brasserie était de se trouver en<br />

dehors de tout voisinage de marais, et en dehors de ville. D’une part, car les marais<br />

n’offraient pas des qualités d’eau et d’air suffi santes, mais aussi parce que l’installation<br />

extra muros permettait l’accès à des terrains moins onéreux, sachant que le prix du<br />

transport de la bière ne représentait qu’une fraction minime. La proximité d’un point<br />

d’eau pur était aussi un élément important étant donné les grandes consommations d’eau<br />

des brasseries, mais aussi pour pouvoir profi ter des avantages de la force hydraulique<br />

pour les moulins et les machines de brassage.<br />

Ce sont les questions d’organisation intérieures qui sont intéressantes et qui infl uencent<br />

l’aspect ainsi que les espaces de la brasserie. Le bâtiment-modèle est composé en trois<br />

parties nettement reconnaissables en façade : un corps principal abritant la production de<br />

bière en tant que telle, et deux parties latérales et identiques correspondant aux activités<br />

annexes : malterie et tonnellerie. Chacune de ces deux parties contient exactement le<br />

même programme. Il ne s’agit apparemment pas d’une question de soucis de symétrie<br />

du bâtiment, mais de responsabilisation de l’ouvrier. En effet, chaque partie est gérée<br />

par un seul ouvrier. De plus, cela permet une mise en concurrence des deux ouvriers<br />

augmentant l’effi cacité de la brasserie.<br />

« La fi délité apporte la bière et le pain. L’infi délité, la peur et le besoin. » ( proverbe allemand)<br />

31<br />

[ typologies ]


1.<br />

2.<br />

1. façade principale d’un projet de brasserie-modèle par A. Riche<br />

2. coupe longitudinale de l’ensemble<br />

(légende de la numérotation page suivante)


3.<br />

4.<br />

3. plan du rez<br />

4. coupe transversale<br />

33<br />

[ typologies ]


légende des plans représentés :<br />

planche 1 : plan général de l’usine<br />

planche 2 : coupe transversale de l’usine,<br />

prise derrière la cheminée centrale et<br />

faisant face à l’ouverture des foyers des<br />

chaudières<br />

planche 3 : coupe longitudinale de<br />

l’ensemble de l’usine<br />

planche 4 : élévation générale de<br />

l’établissement sur la façade principale.<br />

1. machine à vapeur et générateur<br />

2. moulin à orge<br />

3. magasin à houblon<br />

4. tourailles<br />

5. tonnelages<br />

6. cheminée de l’usine<br />

7. chaudières à coction<br />

8. cuve-matière<br />

9. tonnelleries, magasin de dépôt, écuries,<br />

etc.<br />

10. cour<br />

11. trappes des caves et germoirs<br />

12. cheminées horizontales<br />

13. galeries souterraines<br />

14. entrée principale des caves<br />

15. passage conduisant dans l’intérieur<br />

de l’usine<br />

« Bière qui mousse amasse la foule. » ( Claude Frisoni)<br />

16. germoirs<br />

17. ventilation<br />

18. galeries voûtées<br />

19. soupiraux des germoirs<br />

20. massif des chaudières<br />

21. réserves de combustible<br />

22. portes des foyers et cendrier<br />

23. passage communiquant avec le<br />

monte-jus, la cuve matière et la cour<br />

24. cuves-guilloires<br />

25. cuves-mouilloires<br />

26. magasins à orge brute<br />

27. porte communicant des chaudières à<br />

la cuve matière<br />

28. grenier d’aérage<br />

29. refroidissoir<br />

30. foyer<br />

31. cheminée du générateur<br />

32. fenêtres des salles de tonnelage<br />

33. foyer des chaudières<br />

34. monte jus<br />

35. caves<br />

36. galeries menant aux trappes des<br />

germoirs<br />

37. nettoyage et magasin des fûts<br />

38. réservoir d’eau<br />

39. refroidisseur<br />

40. grenier d’approvisionnement de malt


La malterie s’organise tout comme l’espace de production de la bière de manière verticale.<br />

L’orge brute est amenée sous les fenêtres du magasin d’orge (26), un système de poulie<br />

permettant à l’orge d’être ainsi montée à l’étage. Les ouvertures des cuves-mouilloires sont<br />

disposées au fond du magasin au niveau du plancher, permettant d’y pousser simplement<br />

l’orge à l’aide d’un râteau pour qu’il tombe au niveau inférieur.<br />

Les cuves-mouilloires (25) demandent une certaine quantité d’eau. Celle-ci est amenée<br />

depuis le réservoir d’eau (38) situé au dessus de la cuve-matière par un système de<br />

tuyauterie qui dessert toute la brasserie.<br />

Une fois trempée, l’orge est descendue par des conduites mobiles sortant des cuvesmouilloires<br />

et menant directement dans les germoirs placés au dernier étage inférieur. La<br />

ventilation est assurée par des soupiraux donnant directement à l’extérieur de l’usine (19).<br />

La salle de germination (16) est attenante à des galeries voûtées (18) qui permettaient de<br />

recevoir des corbeilles transportant l’orge germée dans les greniers d’aérage(28)situés<br />

au-dessus. Ceux-ci présentent eux aussi des persiennes aux fenêtres afi n de permettre<br />

l’aération. La ventilation se fait de manière constante et permet d’évacuer les vapeurs<br />

d’eau contenues dans les grains, arrêtant ainsi leur germination et les préparant pour le<br />

touraillage.<br />

Seuls le touraillage (4) et le grenier d’approvisionnement du malt (40) se trouvent dans<br />

le corps principal, permettant ainsi de partager les machines (production de chaleur et<br />

concasseur) avec le reste de la production.<br />

Les systèmes de pompes ont permis de transvaser plus facilement le liquide d’une cuve<br />

à l’autre. Ainsi, on voit sur la coupe longitudinale la machine du monte-jus (34) qui<br />

permettait de passer le liquide de la cuve matière (8) à la chaudière (7) et fi nalement de<br />

le remonter jusque dans les bacs refroidissoirs (29) situés à l’étage et dont les fenêtres<br />

étaient pourvues de persiennes pour permettre un abondant passage d’air.<br />

La malterie ainsi que la concoction de la bière produisant beaucoup de chaleur, il fallait<br />

mettre en place un important système d’extraction d’air. La grande cheminée principale,<br />

colonne vertébrale de tout ce système, permet une aspiration suffi sante se transmettant au<br />

reste des conduites. Les cheminées horizontales sont affectées à la ventilation de toutes<br />

les parties de l’usine et conduisent la fumée des chaudières de coction dans la grande<br />

cheminée principale. Les galeries souterraines (12) quant à elles, menaient des trappes<br />

(11) à l’intérieur des caves situées en dessous. Quant aux ventilations des germoirs que<br />

l’on voit sur la coupe transversale, elles communiquent avec le système de cheminées<br />

horizontales. Une structure métallique permettait de tenir les deux hottes d’extraction<br />

d’air de la chaudière et de la touraille, reliées par des conduites à la cheminée principale<br />

Le malt étant stocké dans le haut du bâtiment, il peut ainsi descendre par son propre<br />

poids dans la trémie du moulin (2) (concasseur) situé au rez-de-chaussée. La transition<br />

« Il n’y a pas au monde deux brasseries identiques ». (Jean Claude Colin, l’histoire de la bière par la<br />

carte postale)<br />

35<br />

[ typologies ]


1.<br />

2.<br />

ci-dessus: schéma expliquant le principe de verticalité des anciennes brasseries et plans des brasseries<br />

Artois à Louvain. Toutes les brasseries suivaient alors la même organisation, seules les dimensions<br />

changeaient.


d’une manœuvre à une autre a été effectuée jusqu’ici par des moyens de transports<br />

mécaniques ou naturels. Malheureusement, le moulin se situe à une certaine distance de<br />

la cuve matière (8), ce qui oblige de transporter la farine d’un point à l’autre de manière<br />

manuelle.<br />

Le malt est ensuite déposé dans la cuve matière (8) qui va être remplie d’eau chaude<br />

provenant directement des chaudières (7) situées en contrebas, l’eau étant pompée par le<br />

système de monte-jus (23). Le brassage dans la cuve est rendu possible par la machine à<br />

vapeur (1) qui commande la machine à vaguer.<br />

Ensuite, le liquide passe naturellement de la cuve aux chaudières situées en contrebas pour<br />

la cuisson du moût et le houblonnage. C’est à nouveau le monte-jus qui va permettre de<br />

remonter le moût des cuves au bac refroidissoir (29) situé dans le grenier.<br />

Le liquide est ensuite amené dans les cuves guilloires (24) pour être descendu vers la salle<br />

de tonnelage juste en dessous. Le sol de la salle est légèrement surélevé et percé de trous,<br />

permettant à l’eau d’être facilement évacuée pour des mesures d’hygiène.<br />

Une fois les fûts remplis, ils sont descendus dans les caves par un système de trappes et<br />

de poulies ou amenés à l’arrière de la salle s’ils doivent être directement livrés. Notons<br />

que la surélévation du sol permet aussi au plancher de se situer à la hauteur des voitures<br />

de transport, facilitant le chargement.<br />

Comme on peut le voir, tout ce système est organisé de manière à économiser au mieux les<br />

efforts ainsi que le temps de travail pour rentabiliser au maximum l’espace. Les malteries<br />

ont peu à peu disparu des brasseries, ce qui a permis une simplifi cation des bâtiments se<br />

limitant uniquement à la production. Le système d’organisation verticale était cependant<br />

conservé pour les facilités de transport, les sacs de malt étant stocké dans les greniers<br />

on continuait de faire tomber les grains dans le concasseur, et de là, suivre son chemin<br />

conventionnel. Nous pouvons citer comme exemple la brasserie Friart, Cantillon et du<br />

Bocq qui fonctionnent selon ce système et que nous verrons par la suite.<br />

Aujourd’hui, les immenses usines brasseries mises à part dont le nombre de salles et la<br />

complexité suffi raient à remplir un seul mémoire, les nouvelles brasseries présentent une<br />

organisation horizontale. Celle-ci est rendue possible par l’amélioration des machines,<br />

mais aussi des systèmes de pompes qui peuvent passer le liquide se trouvant dans une<br />

cuve à la cuve voisine se trouvant sur le même étage. Surtout, le système d’horizontalité<br />

est privilégié car il limite la fatigue des employés. En effet, les petites et moyennes<br />

brasseries emploient peu de personnel, et l’organisation par étage les contraindraient à<br />

passer leur journée à monter et descendre des escaliers pour suivre les différentes phases<br />

de production. L’organisation horizontale permet aussi d’éliminer presque tout système<br />

de monte charge et autres poulies, toutes les étapes se situant sur le même étage, un<br />

simple transpalette suffi t.<br />

« Quel événement est plus fondamentalement important pour une colonie anglaise que la construction de<br />

sa première brasserie?» ( Révérend Sidney Smith, pasteur anglais)<br />

37<br />

[ typologies ]


_ d’une organisation verticale à une organisation horizontale<br />

1. schéma d’une organisation verticale de brasserie d’après BRIGGS D. E<br />

1.


2.<br />

2. schéma d’une organisation horizontale actuelle d’après BRIGGS D. E.<br />

39<br />

[ typologies ]


On peut remarquer que l’organisation horizontale serait en quelque sorte une rationalisation<br />

des premières brasseries, les étapes se faisant les unes à la suite des autres, de manière<br />

linéaire, rappelant les études sur les mouvements des ouvriers.<br />

La brasserie de Val Dieu qui s’est installée dans un petit bâtiment attenant à l’abbaye<br />

a adopté ce système jugé plus simple vu le petit nombre d’employé. La brasserie des<br />

Franches-Montagnes qui loue un espace d’un seul étage a elle aussi été obligée de<br />

s’organiser ainsi, cependant, le manque de place ne lui a pas permis de s’organiser selon<br />

un système linéaire.<br />

Avec l’évolution des techniques, on s’approche d’un nouveau programme qui exige une<br />

typologie nouvelle. Aujourd’hui, on sépare les parties de production entre le chaud, le<br />

froid, le stockage et l’embouteillage ou mise en fût.<br />

« Je ne m’inquiète guère de bière, hormis le cas où il s’agit de ma propre boisson. » (Pline)


[ classification des types ]<br />

Cette classifi cation a été établie suite aux différentes visites de brasserie ainsi qu’à la<br />

recherche de documentation afi n d’établir les similitudes ainsi que les différences entre<br />

les brasseries. Cette classifi cation reprend en quelque sorte l’évolution du bâtiment de<br />

brasserie au travers de l’histoire. Outre ce côté historique, elle s’attache d’abord à une<br />

question de la représentation du bâtiment, à son image extérieure, au langage évoqué,<br />

ainsi qu’à son organisation et à sa situation. Nous verrons aussi que l’évolution de ces<br />

fabriques s’accompagne de celle de ses matériaux et de son mode de construction.<br />

type 1 : les brasseries monacales<br />

Plan de l’abbaye de Saint-Gall, Saint-Gall, Suisse – Abbaye de Villers-la-Ville, Belgique – Abbaye<br />

Notre Dame d’Orval, Villers-devant-Orval, Belgique – Abbaye Notre Dame de Scourmont, Baileux,<br />

Belgique – Abbaye de Westmalle, Malle, Belgique – Abbaye Saint-Sixte de Westvleteren, Westvleteren,<br />

Belgique – Abbaye Saint-Benoît d’Achel, Achel, Belgique<br />

Nous ne voulons pas ici retranscrire l’histoire des bâtiments de brasserie dans les abbayes,<br />

ni même reparler des règles de construction des abbayes car le sujet serait beaucoup<br />

trop long et le propos n’est pas là. Nous parlerons donc pour commencer de deux plans<br />

idéaux, celui de Saint-Gall et celui de Villers-la-Ville. Le premier a servi de référence<br />

pour les constructions suivantes et le deuxième se différencie par ses proportions basées<br />

sur le nombre d’or. Nous avons choisi aussi de parler ici de la différence les brasseries<br />

produisant des bières trappistes et des bières d’abbaye.<br />

constructions idéales : du plan de Saint-Gall à Villers-la-ville<br />

Le document qui nous intéresse concernant l’abbaye de Saint-Gall est un plan carolingien<br />

qui aurait servi de base à la construction de l’abbaye. Il s’agit en réalité plus d’un schéma<br />

d’organisation de bâtiments monastiques que de plans précis de construction ; l’ensemble<br />

du dessin recouvre tout le parchemin et aucun contexte ou site n’est défi ni. Seuls le<br />

vaisseau de l’église et la partie attenante à l’est auraient été construits.<br />

Le plan de Saint-Gall est donc une proposition idéelle. Au premier abord, il fait penser<br />

à l’organisation rationnelle d’un groupe de maisons indépendantes et séparées les unes<br />

des autres. L’église et son cloître sont disposés au centre du plan ; tout autour se trouvent<br />

les bâtiments attenants qui devaient être en bois et organisés en 33 groupes respectant la<br />

tripartition prière, travail et repos.<br />

« La bière est une preuve indéniable que Dieu nous aime et veut nous voir heureux. » (Benjamin<br />

Franklin)<br />

41<br />

[ classification des types ]


ci-dessus: le plan de Saint Gall


1. 2.<br />

3.<br />

Comme nous l’avons vu dans la première partie de ce travail, trois brasseries étaient<br />

prévues correspondant aux trois différentes bières produites : la brasserie des pèlerins<br />

(bracitorium), une auberge avec brasserie (domus confi ciendae celiae) et une brasserie réservée<br />

aux moines (hic fratibus confi ciatur cervisia).<br />

Selon le plan, on voit que les trois brasseries présentaient la même confi guration: un<br />

bâtiment comprenant deux espaces différents, l’un réservé à la brasserie et l’autre à la<br />

boulangerie. Ainsi rien ne les différenciait mise à part leur destination. Chacune possédait<br />

une grande chaudière à feu nu alimentée par quatre foyers, un bac de refroidissement et<br />

une cuve de fermentation.<br />

Dans la malterie, devait se trouver une aire de germination en forme de croix qui permettait<br />

une germination simultanée de quatre couches de grains d’orge ou d’avoine. A côté de ce<br />

germoir, était installée la touraille. L’orge qui devait y germer était soumise à l’action de<br />

la chaleur en étant étalée sur des plateaux d’osiers, recouverts d’étoffes grossières, fi xés<br />

autour d’une cheminée. Dans une pièce voisine, des pilons concassaient le malt.<br />

Les trois brasseries étaient alimentées par cette même malterie, et organisées de manière<br />

très rationnelle, produisant donc chacune son type de bière sans avoir à changer son<br />

1. auberge avec brasserie (domus confi ciendae celiae)<br />

2. brasserie des pèlerins (bracitorium)<br />

3. brasserie réservée aux moines (hic fratibus confi ciatur cervisia)<br />

43<br />

[ classification des types ]


ci-dessus: plans de la brasserie de l’abbaye de Villers-la-Ville aujourd’hui en ruines


programme de fabrication ni ses outils.<br />

Si la confi guration des brasseries reste la même, leur disposition dans le plan selon leur<br />

destination est différente. Ainsi, la brasserie des moines (hic fratibus confi ciatur cervisia)<br />

se trouve dans une partie de l’abbaye regroupant les différents ateliers d’artisanats, les<br />

moines devant se dédier au travail durant huit heures de leurs journées. Cette partie est<br />

séparée du reste des activités monastiques. Le seul lien direct s’effectue par la boulangerie<br />

et la brasserie. En effet, elles sont disposées à côté du réfectoire des moines et un passage<br />

couvert permet la transition entre les cuisines et la brasserie. La malterie concernant<br />

l’ensemble des brasseries de l’abbaye se trouve située, avec sa touraille dans le bâtiment<br />

attenant à celui de la brasserie des moines.<br />

La brasserie des pèlerins ou bracitorium, se trouvait non loin, reliée directement au<br />

bâtiment de l’aumônerie des pauvres. L’axe de l’église crée une symétrie entre la brasserie<br />

des pèlerins et l’auberge avec brasserie (domus confi ciendae celiae), située de l’autre côté.<br />

L’auberge servant à accueillir les gens venant s’arrêter et se rafraîchir, elle a été disposée<br />

dans un groupement de maisons concernant l’accueil de l’abbaye.<br />

Si l’abbaye de Saint Gall existe encore actuellement, les traces des parties détruites ne<br />

nous permettent pas de dire si trois brasseries ont réellement existé sur le site, le plan<br />

dont nous venons de parler ayant été souvent confondu dans de nombreux livres avec le<br />

vrai plan de l’abbaye au XII ème siècle.<br />

Nous voulons encore parler ici d’un autre plan idéal, celui de l’abbaye de Villers-la-Ville<br />

construite en 1146 en Brabant wallon. Les moines y bâtirent une abbaye inspirée des<br />

plans de Cîteaux. Au début du XIII ème siècle, on construisît l’église abbatiale, la salle du<br />

chapitre, les logements des moines ainsi que la brasserie.<br />

Malheureusement aujourd’hui, il ne reste plus que des ruines de cette abbaye qui a subi<br />

les dommages des guerres de religion du XVI ème siècle ainsi que les destructions de la<br />

Révolution Française. Toutefois, subsistent quelques restes de la brasserie, en particulier<br />

des murs d’une dimension imposante. Le bâtiment de la brasserie était construit dans le<br />

style roman et présentait 38 mètres de long pour 10 mètres de large.<br />

Nous en parlons ici car il s’agit de l’unique construction de brasserie qui aurait suivit les<br />

dimensions indiquées par le nombre d’or. En effet, c’est toute l’abbaye de Villers-la-Ville<br />

qui aurait été érigée selon ces proportions, la brasserie suivant les mêmes règles. Nous<br />

reproduisons ici une partie du plan reconstitué de la brasserie. Malheureusement, aucun<br />

livre concernant la bière ne parle de Villers-la-Ville en terme de nombre d’or et à part<br />

cette particularité, la brasserie ne présente pas de différence avec l’organisation d’une<br />

brasserie comme celle de Saint Gall.<br />

« Remercions Dieu pour le houblon et le malt. » (inscription dans certaines brasseries allemandes)<br />

45<br />

[ classification des types ]


1. 2.<br />

3. 4.<br />

5. 6.<br />

1-2. abbaye Notre Dame d’Orval<br />

3. brasserie Chimay à l’abbaye de Scourmont<br />

4. abbaye de Westmalle<br />

5. salle de brassage, brasserie de Chimay<br />

6. salle de brassage, abbaye Notre-Dame de<br />

Saint-Rémy, Rochefort


trappistes et abbayes<br />

« Le respect de la tradition, ce n’est pas arrêter le temps. Tradition et progrès font bon ménage. Notre<br />

brasserie est une entreprise moderne, où hygiène, sécurité et qualité priment. Certes, nous pourrions<br />

travailler à l’ancienne, mais cela ne se justifi e pas au niveau qualité. Le côté religieux ne devrait jamais<br />

être un argument de vente. Les bières trappistes sont les produits les plus intimement liés aux abbayes.<br />

Et pourtant, ce sont justement les abbayes qui se réfèrent le moins au religieux. Parfois, les publicitaires<br />

nous suggèrent : « Mettez un moine sur vos étiquettes.» Mais ce n’est pas ce qui nous intéresse ! » (Frère<br />

Benedict, abbaye de Westmalle)<br />

Les dernières abbayes trappistes ayant toujours une activité brassicole sont au nombre de<br />

sept, dont six en Belgique et une aux Pays-Bas. Leur établissement est tardif, étant donné<br />

qu’il est la conséquence de la Révolution Française, de la dissolution des congrégations<br />

religieuses et de la nationalisation des biens de l’Eglise en 1790. Face à l’anticléricalisme<br />

de la politique française, les moines trouvèrent refuge dans de nouvelles terres, plus au<br />

Nord, pour la plupart à la limite des frontières françaises. Leur installation n’aura pas été<br />

de tout repos et ceci jusqu’à l’indépendance de la Belgique et la promulgation en 1831 de<br />

la liberté de culte et d’association.<br />

Le nom de trappiste vient du nom de l’abbaye cistercienne de Notre-Dame de la Trappe<br />

dans l’Orne en France datant du XII ème siècle. Armand de Rancé, moine cistercien<br />

imposa une réforme rétablissant les anciens idéaux de Cîteaux. Cette réforme se défi nira<br />

comme la stricte observance, en comparaison des autres abbayes non réformées considérées<br />

de commune observance. Le mot trappiste sera utilisé par la suite pour évoquer les régimes<br />

de stricte observance.<br />

Leur mode de vie était particulièrement austère et rude, privilégiant le travail manuel, ils<br />

vivaient en retrait de la civilisation, et n’avaient que peu de contact avec l’extérieur. Ces<br />

règles vont être adoucies plus tard en permettant aux moines de consommer sans abus de<br />

la bière ou du cidre, produits du terroir, et permettant d’assurer une hygiène et une pureté<br />

que l’eau ne permettait pas toujours.<br />

Les bières trappistes ont du attendre le XX ème siècle pour se faire connaître du grand<br />

public, leur renommée s’affi rmant dans l’entre-deux guerre pour se consolider dans les<br />

années 50. Ces bières étaient déjà connues dans leur région, mais l’investissement des<br />

moines dans les technologies brassicoles, ainsi que l’avènement des moyens de transports<br />

leur permirent de se faire connaître à une échelle nationale et internationale. Ils ont<br />

aussi pu profi ter de l’intérêt suscité à la même époque par les bières dite d’ abbaye qui se<br />

réclamaient de tradition monastique.<br />

Cependant, peu de bières d’abbaye sont fabriquées dans des abbayes (sauf quelques<br />

exceptions). Ces bières sont en réalité fabriquées par d’autres brasseries qui en ont repris<br />

le nom. Dans le cas d’abbayes toujours existantes, les brasseries en ont racheté le nom et<br />

« Si seulement à l’église on nous donnait de la bière, et un feu confortable pour régaler nos âmes, nous<br />

passerions le jour en chants et prières sans jamais vouloir nous en tenir écartés. » (William Blake)<br />

47<br />

[ classification des types ]


leur reversent une partie de leur gain. Citons par exemple la Saint Feuillien de la brasserie<br />

Friart qui emprunta le nom à l’abbaye de Saint Feuillien qui était située non loin et qui<br />

n’existe plus depuis longtemps. La bière de l’abbaye de Leffe par exemple est brassée<br />

par le groupe InBev. Si tel est le cas en Belgique, il existe encore en Allemagne un<br />

petit nombre d’abbayes non trappistes qui continuent de brasser. Cependant, on peut<br />

comprendre leur volonté de faire reconnaître l’origine de leur production.<br />

Face à cette situation, assez confuse pour le consommateur croyant que sa bière a été<br />

brassée au sein d’une congrégation religieuse, les trappistes ont donc fait protéger leur<br />

nom par une appellation contrôlée en 1997. Ce label est à la foi un certifi cat de qualité,<br />

mais aussi l’assurance que la bière a été brassée selon les principes trappistes : au sein<br />

de l’abbaye, sous le contrôle de moines trappistes, que les revenus sont utilisés pour la<br />

maintenance des bâtiments de l’abbaye ainsi que pour des œuvres caritatives et sociales.<br />

En Allemagne, le même problème se pose, mis à part que leurs abbayes trappistes ne<br />

brassent pas de bière. Les autres abbayes brassant de la bière se voient concurrencées par<br />

d’autres brasseries ayant racheté un nom.<br />

installation des bâtiments<br />

Les abbayes se situaient en général à l’écart des villes, dans un lieu leur permettant le<br />

calme et la méditation. Brassant pour eux-mêmes et pour les pèlerins, la vente de leur<br />

production a permis à certaines abbayes de traverser le temps en bon état.<br />

Les abbayes trappistes relativement récentes dans l’histoire, ont du surmonter de<br />

nombreuses diffi cultés pour voir le jour, la Révolution française, Napoléon ensuite<br />

1. 2.<br />

1. intérieur de l’église de l’abbaye de Scourmont, Chimay<br />

2. vue extérieurs de abbaye de Scourmont, Chimay


s’opposant à l’indépendance qu’elles voulaient préserver. Dans certains cas, comme à<br />

Westmalle le terrain leur a été offert par une personne désireuse de voir la congrégation<br />

s’installer dans la région. Dans d’autres cas, comme Chimay, le terrain leur a été donné, mais<br />

il s’agissait d’un terrain dépourvu d’intérêt et jugé comme inutilisable par le propriétaire<br />

des terres. Ces installations ont demandé énormément de courage et de travail : tout était<br />

à faire. Du réseau d’irrigation, des puits percés, de l’érection des bâtiments, tout a été<br />

construit petit à petit par les moines.<br />

La bière leur était interdite, mais très vite, face à cette vie rude, et ne buvant que de l’eau<br />

fade qui était tout sauf revigorante, ils se permirent de commencer à brasser. Les ventes<br />

de la bière leur ont permis de continuer l’édifi cation de leur domaine.<br />

Leurs préceptes de vie étant particulièrement rudes, les bâtiments refl ètent en quelque<br />

sorte cette sobriété. Ils ne présentent que peu de fi oritures, souvent fabriqués en briques<br />

ou en pierres. L’intérieur des églises est par exemple d’une sobriété étonnante, celle de<br />

l’abbaye de Scourmont, brassant la Chimay est recouverte de chaux blanche, rendant une<br />

atmosphère de sobriété, comme perdue entre ciel et terre.<br />

Si leurs brasseries présentaient un côté très artisanal à l’époque, il n’en est rien aujourd’hui,<br />

les moines ont suivi l’évolution des technologies au même titre que les autres brasseries<br />

laïques, permettant ainsi d’augmenter leur production. La salle de brassage de Westmalle<br />

est par exemple complètement contrôlée par ordinateur.<br />

Devenant célèbres, la question de l’augmentation de la production a posé quelques<br />

problèmes aux moines. En effet, ceux-ci ne brassaient pas la bière en vue d’augmenter<br />

un capital, mais pour répondre aux principes de labeur, prière et repos prêchés par la<br />

Trappe. Ainsi, la production de la bière ne devrait pas venir troubler leur recueillement.<br />

Si certaines abbayes comme Westvleteren ont décidé de garder une production réduite,<br />

d’autres comme Chimay ont accepté d’augmenter leur production tout en engageant du<br />

personnel non religieux et en délocalisant l’embouteillage dans une zone industrielle.<br />

De nouveau ici, chaque brasserie a évolué de manière différente selon les volontés du<br />

Père qui gérait l’abbaye. Nous avons reproduit ci-contre une série d’images de ces abbayes<br />

trappistes ainsi que de l’intérieur de leurs brasseries afi n de montrer qu’elles se sont tout à<br />

fait modernisées et qu’elles ne correspondent pas forcément à la vieille image romantique<br />

du moine brassant encore avec son fourquet dans une grande cuve en bois…<br />

« Au ciel il n’y a pas de bière, mieux vaut la boire ici sur terre. » (proverbe trappiste)<br />

49<br />

[ classification des types ]


ci-dessus: les bâtiments isolés de brasserie, de gauche à droite et de bas en haut, la suite des images suit la<br />

liste donnée sur la page contre.


type 2 : brasseries en régions habitées<br />

Il a été diffi cile de défi nir clairement ce type. Par région habitée il faut entendre une zone<br />

dans laquelle il se passe des activités tierces menées par les hommes. Habité n’était pas<br />

exactement le mot, cependant il confère un caractère vivant et tiers à l’environnement de<br />

ce type. Les brasseries qui se retrouvent dans cette catégorie sont soit de petites brasseries<br />

se limitant à un brassage pour le village soit des brasseries de moyenne envergure<br />

concernant une région.<br />

Au fur et à mesure du classement des brasseries, on dénote grand nombre de brasseries<br />

faisant partie de lieux habités et ayant un lien direct avec les habitants, marquant ainsi un<br />

attachement au lieu important. Les résultats ont donc été divisés en trois catégories : les<br />

bâtiments indépendants, les bâtiments en alignement de rue, les bâtiments s’organisant<br />

en îlot et les petites usines.<br />

les bâtiments indépendants et les bâtiments en alignement de rue<br />

Les bâtiments isolés : brasserie Grain d’orge, Hombourg, Belgique – brasserie Caracole, Flamignoul,<br />

Belgique – brasserie Fantôme, Soy, Belgique – brasserie Achouffe, Achouffe, Belgique – brewery Big<br />

Horse, Hood River, USA – brewery Sea Dog, Camden, USA – brewery Travellers Inn, Pen-y-cefn,<br />

Walles – Brauerei Hasli, Lagenthal, Suisse – brasserie Lowengarten, Rohrschach, Suisse – brasserie<br />

Adler, Schwanden, Suisse – brasserie Gossau, Stadtbuhl, Suisse – Brauerei Brautigam, Weissbrunn,<br />

Allemagne – Brauerei Rittmayer, Willensdorf, Allemagne<br />

Les bâtiments en alignement d’une rue : Brauerei Kloster, Bamberg, Allemagne – Brauerei Scherdel,<br />

Hof, Allemagne – brewery Wern Fawr, Ystyfera, Walles – brewery Brains, Cardiff, Walles – Brasserie<br />

Cantillon, Bruxelles, Belgique – brasserie Gouden Boom, Brugge, Belgique – Brauerei Sternen,<br />

Frauenfeld, Suisse – Brauerei Rathaus, Lucerne, Suisse<br />

Par bâtiment indépendant, nous marquons la distinction avec le bâtiment en alignement de<br />

rue. En général, les bâtiments indépendant abritant une brasserie ne se trouvent pas en<br />

contiguïté des bâtiments environnants. On trouve ces cas dans les villages ou les petites<br />

agglomérations où la faible densité et la structure du bâti le permettent. La plupart du<br />

temps, il s’agit de maisons villageoises abritant à la fois une petite brasserie, une auberge<br />

au rez-de-chaussée ainsi que l’habitation familiale à l’étage.<br />

Etant donné qu’il s’agit dans la plupart des cas de maisons, celles-ci s’inscrivent dans le<br />

même mode de construction et d’apparence (nombre d’étages, matériaux de construction,<br />

fenêtres, toiture). Elles ne sont pas réellement discernables en tant que brasserie du reste<br />

des bâtiments alentours.<br />

« Un homme qui ne boit que de l’eau cache quelque chose à ses semblables. » (Charles Baudelaire)<br />

51<br />

[ classification des types ]


ci-dessus: les bâtiments de brasserie en alignement d’une rue, de gauche à droite et de bas en haut, la suite des<br />

images suit la liste donnée sur la page précédente.


Dans certains cas, la production de la bière a demandé un agrandissement, comme pour<br />

la brasserie Adler en Suisse ou la brasserie Landwehr à Reichelshofen en Allemagne. Cet<br />

agrandissement n’étant pas possible autour de la maison, il a généralement été effectué<br />

au bord du village. On peut déplorer que le manque de moyens de ces brasseries les ait<br />

poussé à l’économie, faisant ainsi leur agrandissement sans souci d’intégration avec le<br />

reste du bâti.<br />

La plupart de ces brasseries possèdent au rez-de-chausée, un bar ou un restaurant où<br />

débiter la bière. Par leur aspect social, elles sont un élément fédérateur du village dans<br />

lequel elles se trouvent. Par contre, d’autres ont été installées dans une maison villageoise<br />

en vue de l’unique production. Comme dans le cas de certaines brasseries fermes actuelles,<br />

il s’agit de passionnés de bières qui ont voulu faire revivre un peu leur village en lui<br />

redonnant une nouvelle âme par l’installation d’une production de bière.<br />

Les bâtiments situés en alignement de rue reprennent eux aussi le même dialogue que les<br />

bâtiments environnant. En général, ils suivent le même alignement et les mêmes hauteurs<br />

de façades. Etant donné que leur situation ne leur permet aucun agrandissement, ce sont<br />

des brasseries qui sont restées familiales et particulières à un quartier. Elles possèdent<br />

parfois un restaurant au rez-de-chaussée permettant le débit de leur bière et ayant ainsi<br />

la même confi guration que celles dont nous venons de parler. Si dans certains cas, les<br />

maisons ont été construites directement en vue d’accueillir une brasserie, d’autres ont été<br />

récupérées.<br />

la brasserie Cantillon, Bruxelles.<br />

La brasserie Cantillon est installée au 56 de la rue Gheude à Bruxelles, dans la commune<br />

d’ Anderlecht, non loin de la gare du Midi. Il s’agit d’une brasserie particulière. Fondée<br />

en 1900 elle est installée dans une ancienne menuiserie. Elle est l’une des quelques<br />

rares survivantes pouvant encore brasser des lambics. Son procédé de fabrication se<br />

particularise donc par la fermentation spontanée. Les micro-organismes permettant la<br />

fermentation vivent alors dans l’air ambiant du bâtiment. Ceux-ci se trouvaient à l’époque<br />

dans une partie de la région bruxelloise, mais la croissance de la ville et le changement<br />

d’air ambiant du à la pollution les ont fait disparaître. Les seuls lieux dans lesquels on peut<br />

encore retrouver cet air chargé de levures sont donc des brasseries qui n’ont jamais cessé<br />

de pratiquer la fermentation spontanée. Par ce fait, il est évident qu’il s’agit exactement<br />

du type de brasserie qui ne pourra jamais se déplacer étant donné que l’essence même de<br />

la fabrication de leur bière réside dans le bâtiment.<br />

En voulant préserver la fabrication de bière de fermentation spontanée, la brasserie a donc<br />

conservé toutes les techniques de fabrication artisanales datant de la fi n du XIX ème siècle.<br />

Ainsi, les machines d’époque sont encore utilisées, et la brasserie ne tourne qu’en hiver<br />

puisqu’il s’agit de la seule saison où la température est adéquate au travail des levures.<br />

« Un verre c’est suffi sant, deux verres c’est trop, et trois, pas assez. » (proverbe espagnol)<br />

53<br />

[ classification des types ]


1. 2. 3.<br />

4. 5.<br />

6. 7.<br />

1. le concasseur relié au grenier situé au<br />

dessus (2e)<br />

2. la cuve d’empâtage situé à l’étage inférieur<br />

du concasseur (rez)<br />

3. la cuve d’ébullition située au même étage que le concasseur<br />

(1e)<br />

4. magasin de futaille (2e et 1e)<br />

5. bac refroidissoir situé dans le grenier (2e)<br />

6. système de poulie pour descendre les tonneaux à<br />

l’étage inférieur<br />

7. nettoyage des fûts (sous-sol)


Comme le reste des anciens bâtiments bruxellois, la façade est très étroite (moins de 10m).<br />

La brasserie est organisée sur quatre niveaux dont une cave en sous-sol. Son organisation<br />

n’est pas forcément des plus simples étant donné que le bâtiment n’avait pas été construit<br />

à cette fi n. Ainsi, les escaliers internes sont très étroits menant d’une salle à une autre et<br />

ne se superposant pas. La traversée de la brasserie dès lors, représente un parcours dans<br />

lequel il faut croiser les pièces des étages pour arriver aux escaliers suivants.<br />

Malgré cela, l’installation de la brasserie suit la logique d’organisation verticale. Au dernier<br />

étage du bâtiment, se trouve le grenier à grain servant à entreposer les sacs de froment,<br />

de malt et de houblon. La cuve guilloire y est aussi installée permettant de contrôler<br />

la température et les degrés plato du moût en sortant du bac refroidisseur. Celui-ci se<br />

trouve dans une salle attenante et surélevée d’environ un mètre. Le bac en cuivre est très<br />

peu profond, mais présente une grande surface pour privilégier le contact de l’air et du<br />

moût. Des sortes de persiennes installées sur les murs des façades permettent à l’air de<br />

pénétrer dans la salle tout en assurant un renouvellement constant. Elles peuvent être<br />

ouvertes à différents degrés afi n de régler la température de la salle pour suivre la courbe<br />

de refroidissement du moût.<br />

Un étage plus bas, se trouve le concasseur placé au centre de la salle et recevant directement<br />

les grains depuis le grenier pour les transformer en farine qui sera déposée un étage<br />

en dessous dans la cuve-matière. A côté du concasseur, deux autres cuves servent à<br />

l’ébullition du moût. Un système de pompe permet au moût d’être amené depuis le rezde-chaussée<br />

où se trouve la cuve matière à l’étage supérieur où il sera cuit.<br />

Le magasin de futaille où sont entreposés les tonneaux se trouve aussi au premier étage,<br />

et en lien direct avec la cuve guilloire. La bière est alors mise dans des fûts de chêne ou<br />

de châtaignier dans lesquels elle commencera une longue fermentation d’une durée de<br />

trois ans. Au fond du magasin de futaille se trouve une trappe percée dans le plancher et<br />

qui permet à l’aide de poulies de descendre les fûts vers le rez-de-chaussée où s’effectue<br />

le nettoyage des tonneaux.<br />

La production d’une bière traditionnelle chez Cantillon dure environ trois ans, alors que<br />

les grandes usines arrivent à réduire leur processus à quelques semaines, voire quelques<br />

jours parfois. Ceci implique que la brasserie doit disposer d’un important espace de<br />

stockage pour les tonneaux, et d’un caveau plein de quelques 11.000 bouteilles.<br />

Cette brasserie, fait partie des incontournables pour tous ceux qui s’intéressent à la bière,<br />

car elle se distingue par son mode de production et sa volonté de préserver des techniques<br />

presque disparues aujourd’hui. Liée à ce bâtiment, ainsi qu’aux anciennes machines qui<br />

s’y trouvent, la brasserie ne peut pas s’agrandir ni changer de lieu.<br />

« La bière nous porte mieux au travers des jours sans argent que l’argent ne nous porte au travers des<br />

jours sans bière. » (anonyme)<br />

55<br />

[ classification des types ]


les bâtiments en îlot<br />

Timmermans, Itterbeek, Belgique – Het Anker, Mechelen, Belgique – Silly, Silly, Belgique – Cnudde,<br />

Eine, Belgique – Friart, Le Roeulx, Belgique – Bürgerbrauerei, Bad Reichenhall, Allemagne – Brauerei<br />

Fletzinger, Wasserburg<br />

Il s’agit de brasseries situées en région urbaine ou villageoise, et dont l’implantation et<br />

l’organisation des bâtiments défi nissent une cour intérieure produisant ainsi un ensemble<br />

en îlot. L’entrée de la brasserie s’effectue généralement par l’intérieur de la cour à laquelle<br />

on accède en franchissant un portail qui sert aussi de passage aux différents moyens de<br />

transports servant à la livraison. Dans la plupart des cas, à l’exception de la brasserie Anker<br />

à Mechelen, il s’agit d’un portail construit, c’est-à-dire d’un passage creusé dans la masse<br />

d’un des bâtiments donnant sur la rue, permettant ainsi de garder un certain alignement<br />

avec le reste du bâti. Les façades s’intègrent dans le continuum de la rue par la hauteur<br />

des étages ainsi que par la forme et la rythmique des fenêtres qui sont similaires à celles<br />

des autres maisons avoisinantes. Les matériaux utilisés pour la construction s’apparentent<br />

ci-dessus: les bâtiments en îlot, de gauche à droite et de bas en haut, la suite des images suit la liste donnée<br />

sur la page ci-contre.


eux aussi à ceux du reste du bâti, pierre et crépi pour la Burgerbrauerei à Bad Reichenhall,<br />

crépi et briques pour les brasseries Timmermans et de Silly, et enfi n brique pure dans les<br />

brasseries Cnudde, Anker et Friart. Notons aussi que des peintures décoratives ont été<br />

apposées à certaines façades, de manière légère chez Timmermans alors que de véritables<br />

fresques ont été peintes sur l’ancien bâtiment de la Burgerbrauerei en Allemagne.<br />

Malgré ces similitudes, ces brasseries se différencient souvent par leurs dimensions,<br />

atteignant en général trois ou quatre étages. Se trouvant pour la plupart dans des villages<br />

où les maisons ne dépassent que rarement le nombre de deux niveaux, ces brasseries<br />

étaient des ouvrages imposant au moment de leur construction. Leur cheminée marquait<br />

un point haut dans la silhouette de la localité.<br />

L’organisation même de ces bâtiments sous la forme d’îlot, dénote déjà l’importance<br />

de ces brasseries au niveau régional. En effet, le fait de laisser un grand espace libre à<br />

l’intérieur de la cour permettait la livraison des matières premières ainsi que le chargement<br />

et déchargement des tonneaux et bouteilles de bières destinés à la livraison. Celle-ci se<br />

faisait au moyen de charrettes tirées par des chevaux. Aussi, une partie de ces brasseries<br />

possédait des écuries. Aujourd’hui inutilisé, cet espace a permis un agrandissement<br />

conséquent.<br />

Ci-contre, la deuxième photographie depuis la gauche représente la brasserie Het Ankert,<br />

située à Malines, dans la province d’Anvers en Belgique. Elle est la plus ancienne de ce<br />

type, datant du XV ème siècle. Construite à la limite de la ville, le bâti s’est peu à peu constitué<br />

autour. Aujourd’hui, elle se positionne entre vieille ville et constructions modernes, au<br />

bord d’un grand axe routier. Son bâtiment était contigu à celui de l’hôpital qui a été repris<br />

plus tard par la brasserie, permettant de défi nir et de fermer un système de cour.<br />

« Trop boire noie la mémoire. » (proverbe français)<br />

la brasserie Friart<br />

La brasserie Friart est installée au Roeulx, un village proche de la Louvière, dans le<br />

Hainaut, en Belgique également. Il s’agit d’une brasserie de dimension moyenne située<br />

à l’angle de deux rues. Au XIX ème siècle, ce village possédait deux brasseries : la brasserie<br />

Denis dite celle d’en haut, et la brasserie Friart, celle d’en bas. La brasserie d’en bas, plus<br />

petite, avait été bâtie par la famille Friart en 1860. En 1920, la brasserie d’en haut avec sa<br />

malterie, jugée plus récente grâce à de nouvelles installations, est rachetée par les Friart.<br />

Le bâtiment de cette brasserie date de la moitié du XIX ème siècle. Sa position à l’angle de<br />

deux rues, forme deux ailes principales défi nissant l’intérieur de la cour. On y accède par<br />

un portail situé entre les deux ailes et surmonté d’un balcon. Défi nissant l’arrière de la<br />

cour, un bâtiment en brique sert aujourd’hui de dépôt alors qu’il accueillait à l’origine la<br />

malterie à l’étage.<br />

57<br />

[ classification des types ]


1. plan masse de la brasserie Friart, sans échelle<br />

2. bâtiments de la brasserie, on distingue l’entrée<br />

de la cour à l’angle des deux bâtiments<br />

3. bâtiments environnants au village du Roeulx<br />

4. concasseur situé au grenier<br />

5. cuve d’empâtage à fond perforé


Le bâtiment dans lequel est effectué le brassage proprement dit est situé à droite du portail<br />

et comprend quatre étages (cave, rez-de-chaussée et deux étages). Il a été conçu de manière<br />

à permettre l’organisation verticale du système de production de la bière. L’intérieur du<br />

bâtiment comprend toujours une partie des installations d’origine, notamment une très<br />

belle cuve d’empâtage, une cuve d’ébullition, des escaliers en fonte, et un grenier qui<br />

présente comme dans de nombreuses maisons de la région une magnifi que charpente<br />

abritant le stock de malt et le concasseur.<br />

Jusqu’au milieu des années 30, ces deux brasseries resteront conjointement en activité. En<br />

1937, la brasserie d’en bas laisse son activité, et la brasserie d’en haut devient défi nitivement<br />

la brasserie Friart. La brasserie développe alors les techniques de fermentation basse,<br />

mais la conjoncture économique ainsi que l’état des installations la pousse à déléguer le<br />

brassage à la brasserie du Bocq à Purnode. C’est en 1986, qu’un des petits-fi ls décide de<br />

créer la bière Saint-Feuillien et de remettre les machines de la brasserie Friart en activité<br />

ainsi que de les moderniser.<br />

Aujourd’hui, l’activité de cette brasserie s’est accrue, les obligeant à s’agrandir.<br />

Heureusement, le terrain comprenait quelques bâtiments de type ferme qui ont été<br />

détruits pour permettre la construction d’autres bâtiments abritant les nouvelles cuves de<br />

garde, du stock, ainsi qu’une salle d’embouteillage moderne. Ces travaux sont actuellement<br />

en cours. Si la structure des nouvelles constructions est métallique, la brasserie a voulu<br />

donner une image de continuité à cet agrandissement, lui donnant un appareillage de<br />

brique, conservant ainsi le même langage que le reste de la cour et du bâti.<br />

les petites usines<br />

Brewery Brains, cardiff, Walles – brewery Webb’s, Aberbeeg, Walles – brewery Samuel Adams,<br />

Boston, USA – Brauerei Falter, Unterkotzau, Allemagne – Brauerei Hartmann, Wurgau, Allemagne<br />

– brasserie Bosteels, Buggenhout, Belgique – brasserie Valaisanne, Sion, Suisse – Lowenbrauerei,<br />

Passau, Allemagne<br />

Il existe peu de petites usines ou fabriques de bière dans des régions urbaines, ou présentant<br />

une zone mixte entre logements, commerce et production. Ceci est la conséquence du<br />

manque d’espace permettant un agrandissement conséquent des bâtiments.<br />

Cependant, il existe quelques cas où la production de bière en milieu urbain a pu se faire<br />

sans gêner le reste des habitations par sa croissance. Dans certains cas, la brasserie s’était<br />

déjà installée en limite de la ville, et ce sont les constructions qui sont venues peu à peu se<br />

placer autour du bâtiment, comme c’est le cas pour la brasserie Valaisanne à Sion.<br />

En général, la production de la bière n’est pas un élément gênant au niveau de la ville, ne<br />

« Si le Danois perdait sa bouillie de gruau, le Français son vin, le Suisse sa soupe et l’Allemand sa bière,<br />

ils seraient perdus tous les quatre. » (vieux dicton allemand)<br />

59<br />

[ classification des types ]


ci-dessus: les petites usines en milieu habité, de gauche à droite et de bas en haut, la suite des<br />

images suit la liste donnée sur la page ci-contre


produisant que peu de rejet. Les seuls éléments pouvant être problématiques sont une<br />

légère odeur qui se dégage de l’usine ainsi que la présence de camions. Cependant, étant<br />

donné qu’il s’agit de fabriques relativement petites en comparaisons des grandes usines<br />

que nous verrons plus tard, leur assimilation à un tissu mixte ne pose pas particulièrement<br />

de problèmes. Certaines brasseries se sont bien intégrées par leur image extérieure,<br />

par exemple la brasserie Falter à Unterkotzau dont les matériaux de construction sont<br />

les mêmes que ceux utilisés dans la région. Par contre, on pourrait critiquer certaines<br />

fabriques suisses qui se sont érigées comme des blocs de béton que nous verrons par la<br />

suite.<br />

Certes il convient sans doute ne pas succomber à la tentation du mimétisme en cherchant<br />

absolument à calquer le style d’une fabrique sur le reste du bâti du milieu urbain ou semiurbain<br />

où elle doit s’implanter, mais un minimum d’interrogation d’ordre architectural<br />

face à la ville et à l’ensemble du bâti semble néanmoins indispensable pour permettre<br />

à ces brasseries de continuer leur activité dans des lieux habités, à l’instar des petites<br />

brasseries évoquées plus haut.<br />

« Il faut soigner le corps pour que l’âme s’y plaise. » (Saint François de Sales)<br />

type 3 : la brasserie-ferme<br />

Brasserie du Bocq, Purnode, Belgique – brasserie Dupont, Tourpes, Belgique – brasserie Ecaussines,<br />

Ecaussines, Belgique – brasserie St Monon, Ambly, Belgique – brasserie Piron, Aubel, Belgique –<br />

brasserie de Dool, Helchteren, Belgique – brasserie des Murailles, Meinier, Suisse – Brauerei Aemme,<br />

Langnau, Suisse – Braui, Eiken, Suisse – Brauerei Kundig, Rietheim, Suisse – Brauerei Sauhof,<br />

Laufen, Suisse – Brewery Leavenworth, Leavenworth, USA – Brewery Bar Harbour, Bar Harbour,<br />

USA – brewery Mount Hood, Mount Hood, USA – brewery Rogue, Newport, USA<br />

Aujourd’hui, de nombreuses nouvelles brasseries artisanales s’installent dans des fermes.<br />

Comment peut-on expliquer le choix de ce lieu ? Souvent, il s’agit d’un héritage familial<br />

mis en valeur d’une façon différente par un passionné brassicole, et dans de rares cas,<br />

d’une volonté délibérée d’installation en campagne. Par exemple, la brasserie des Murailles<br />

à Meinier dans le canton de Genève s’est installée dans la ferme familiale. Le nom a<br />

simplement repris celui du hameau de maisons : les Murailles. Afi n d’exploiter au mieux<br />

les possibilités de la ferme, les exploitants étudient actuellement la possibilité de planter<br />

leur propre houblon pour avoir, sur leur domaine, une partie de la culture des matières<br />

premières.<br />

61<br />

[ classification des types ]


ci-dessus: les brasseries-fermes, de gauche à droite et de bas en haut, la suite des images suit la liste donnée<br />

sur la page ci-contre.


Toutefois, le fait de se trouver à la campagne ne signifi e pas forcément qu’une partie de ces<br />

matières premières provienne du lieu même. Nous avons vu dans la première partie que<br />

seules quelques régions d’Europe cultivaient du houblon. En Suisse, les seules brasseries<br />

à utiliser du houblon régional se situent dans le canton d’Appenzell. Quant à l’orge, il était<br />

cultivé sur les terres des anciennes brasseries-fermes. Ces brasseries étaient en quelque<br />

sorte auto-dépendantes, le travail dans les champs occupant les mois de printemps et<br />

d’été, était suivi du passage en malterie et fi nalement du brassage en hiver.<br />

Cependant, les nouvelles techniques de production ont permis de brasser toute l’année<br />

permettant ainsi à certaines brasseries de se développer. Leur agrandissement a souvent<br />

eu comme conséquence l’abandon ou la transformation de la malterie, afi n de gagner de<br />

la place. L’orge n’était donc plus cultivé sur les terres. Le malt a alors commencé à être<br />

une matière première importée pour ce type de brasseries.<br />

Dans tous les cas, on remarque que l’attachement au lieu est très important et signifi catif<br />

de l’identité de la brasserie de la même manière que les brasseries s’étant installées dans de<br />

petits villages ou des régions faiblement urbanisées. La ferme se situant à la campagne, ce<br />

lieu marque l’attachement à un terroir ainsi qu’aux villages avoisinants. Pour les brasseries<br />

anciennes ayant fortement augmenté leur production, la dimension régionale est d’autant<br />

plus marquée, que la brasserie est souvent devenue le principal employeur local. C’est le<br />

cas par exemple de la brasserie du Bocq à Purnode, en Belgique, qui emploie une grande<br />

partie des habitants du village. Ces brasseries cultivent toutes une image qui se rapporte<br />

soit à la tradition, soit à un produit naturel ou se rapprochant du terroir.<br />

Aujourd’hui, une installation nouvelle dans une ferme à proximité d’un village est<br />

l’occasion de redonner un peu de dynamisme au lieu, de retrouver des racines et de<br />

proposer un élément fédérateur pour une région. C’est un moyen aussi de faire face<br />

à l’exode vers la ville. Souvent, cette installation est sans rapport avec un ancien passé<br />

brassicole de la région, et est uniquement motivée par une passion et un lieu.<br />

L’installation en campagne présente un coût beaucoup moins élevé. Même si les<br />

diffi cultés de transport peuvent être vues comme un inconvénient, les petites brasseries<br />

brassent essentiellement pour la région ou le village. Quant aux plus anciennes, elles ont<br />

pu s’agrandir en augmentant leur production grâce à l’évolution des techniques et des<br />

différents moyens de transports leur permettant l’export routier.<br />

« Ah! Plaignez, plaignez le pauvre homme solitaire, qui n’a jamis reçu le baiser de la bière. »<br />

(vieux poème français)<br />

63<br />

[ classification des types ]


18ème 1861 1867 1901 1920<br />

1936 1948 1972 1990<br />

1. évolution des bâtiments de la brasserie à travers le temps<br />

2. vue aérienne de Purnode


« La beauté est dans les yeux de celui qui tient le verre de bière. » (anonyme)<br />

la brasserie du Bocq<br />

La brasserie du Bocq est une ancienne brasserie de ferme fondée aux alentours de 1858<br />

et toujours en activité à l’heure actuelle. Elle doit son origine à Martin Belot qui hérita<br />

de la ferme familiale construite à côté de la future brasserie. Nous avons vu dans la<br />

première partie de ce travail que de nombreuses fermes brassaient de la bière depuis la fi n<br />

du XVII ème siècle. Les drèches étaient utilisées pour nourrir le bétail, tandis que la bière,<br />

avant même d’être produite pour être vendue, atténuait la soif du personnel. De plus,<br />

cela permettait d’occuper largement les personnes, le travail dans les champs se faisant<br />

durant les saisons chaudes tandis que le brassage avait lieu durant les saisons froides.<br />

Aujourd’hui, la brasserie fi gure parmi les plus importantes de la région. Elle s’est développée<br />

petit à petit, se construisant sur elle-même tout en gardant les constructions d’origine.<br />

On pense que le premier bâtiment hébergeant la brasserie daterait du XVIII ème siècle.<br />

Cependant il ne reste plus de grandes traces de ce vestige. Les premières constructions<br />

importantes ont été réalisées en 1861, en remaniant le corps de logis et en construisant<br />

deux ailes attenantes défi nissant clairement un espace de cour sur le devant de la brasserie,<br />

au bord de la route. Cette cour avait la même fonction que les cours des brasseries-îlots,<br />

son espace était utilisé pour le chargement, les livraisons, ainsi que le transport de la bière<br />

mise en tonneau.<br />

La construction de ces bâtiments s’apparente à celle de la région où les maisons utilisent<br />

une sorte de pierre verte. Ainsi, le corps de logis repose sur un soubassement en pierre.<br />

L’aile de droite abritait l’ancienne malterie. Elle a été passablement malmenée suite à<br />

diverses transformations : l’installation de nouvelles cuves a demandé de percer le mur<br />

extérieur pour permettre leur entrée dans le bâtiment, les planchers en bois ont été sciés<br />

pour installer des nouvelles machines, etc. Quant à l’aile gauche, elle était occupée par<br />

l’ancien abri à voitures, transformé aujourd’hui en salle de dégustation pour les visiteurs.<br />

En 1867, un agrandissement est effectué sur l’aile droite, alors qu’une cave hors sol est<br />

aménagée dans l’angle droit de la cour. Cette cave est nettement visible sur les images<br />

reproduites ci-contre. Même si ces bâtiments ont été édifi és à des moments différents<br />

entre 1861 et 1926, l’ensemble garde une certaine cohérence et homogénéité dues aux<br />

façades de chaux blanche, ainsi qu’à leur organisation autour de la cour.<br />

L’aile droite qui avait déjà été augmentée en 1867 abritait la malterie. Elle a été réaménagée<br />

en 1891, complétée par une nouvelle touraille ainsi qu’un nouveau germoir. Nous avons<br />

vu dans les cycles de préparation du malt que l’orge avait besoin d’être chauffée, torréfi ée<br />

et de recevoir le dernier coup de feu qui la transformerait fi nalement en malt. La malterie<br />

comprenait donc des séchoirs, ainsi que des dômes de dispersion de chaleur dans les<br />

étages supérieurs du bâtiment. La chaleur était produite au rez-de-chaussée par un four à<br />

coke malheureusement détruit au cours des aménagements successifs pour laisser place<br />

à une nouvelle cuve de fi ltration. Dans les étages supérieurs, on peut encore voir les<br />

65<br />

[ classification des types ]


3.<br />

1. 2.<br />

1-2. système de montée des sac de malt dans le grenier<br />

3. vue extérieure de la brasserie du Bocq, on distingue sur le devant la surrélévation dûe à la cave hors<br />

sol


anciennes machines servant pour le grain. Un intéressant système de poulie est adossé<br />

en façade, permettant d’acheminer les grains de l’extérieur du bâtiment jusque dans les<br />

combles.<br />

En 1920, un nouveau bâtiment est construit dans la continuité de l’alignement au bord de<br />

la route, mais séparé toutefois du corps de logis. Ce bâtiment marque alors sa différence<br />

par un habillage de pierre, et sera complété en 1936 par une extension le reliant au reste<br />

du bâtiment de la brasserie. Y seront installés une salle de fermentation, des appareils de<br />

production de froid et une chambre chaude.<br />

La suite des agrandissements de la brasserie suit l’évolution des techniques ainsi que la<br />

production croissante : en 1948, on construit à l’arrière du corps de logis un nouveau<br />

bâtiment plus moderne et au toit plat dans lequel a été installée la nouvelle brasserie. Des<br />

entrepôts et quais de chargements ont aussi été érigés à l’arrière du bâtiment au début des<br />

années 50, suivis d’une nouvelle salle d’embouteillage en 1972. Finalement, la dernière<br />

intervention date de 1991 avec la construction d’une halle d’entrepôt.<br />

Les différents agrandissements suivent une logique d’économie de construction. Ainsi, si<br />

les premiers bâtiments s’identifi ent à la manière traditionnelle et régionale de construire,<br />

le dernier ajout répond à une certaine économie avec sa structure métallique et son<br />

revêtement de tôle.<br />

On remarque que l’évolution de la production se développe à l’arrière du bâtiment, les<br />

anciennes caves dont l’accès se faisait depuis la cour sont aujourd’hui inutilisées, seule<br />

l’aile droite conserve une utilisation pour la production. L’ensemble de la cour constitue<br />

la porte d’entrée de l’ensemble et marque une image forte du passé de la brasserie, tandis<br />

que la grande cheminée et le panneau de brasserie installé sur le plus haut toit sont les<br />

éléments reconnaissables dans le paysage.<br />

Dans le cas de cette brasserie, il est intéressant de voir l’installation de bâtiments brassicoles<br />

conjointement à une ferme s’agrandir au fi l des années. Si certaines fermes ne se sont<br />

pas développées de la sorte et que les nouvelles brasseries-fermes restent artisanales, la<br />

brasserie du Bocq illustre bien le développement progressif possible d’une brasserieferme<br />

dans son milieu naturel. Ceci nous amène aux sujets suivants, concernant des<br />

bâtiments construits directement en vue d’être des fabriques ou usines à bières.<br />

« Bénie soit la bonne bière qui te fait la panse et l’âme tout ensoleillées! »<br />

(légende de Lamme Goedzak)<br />

67<br />

[ classification des types ]


ci-dessus: les moyennes / grandes fabriques et les grandes usines de briques, de gauche à droite et de bas en haut,<br />

la suite des images suit la liste donnée sur la page ci-contre.


type 4 : les grandes brasseries de brique<br />

Nous avons ici défi ni un type en fonction de son matériau et de sa dimension en tant<br />

que fabrique ou usine. De nombreuses brasseries du XIX ème et XX ème étaient construites<br />

en brique ; l’utilisation de ce matériau pouvait servir autant de porteur que de revêtement<br />

et permettait aussi différents jeux dans son appareillage ainsi que dans ses couleurs.<br />

La plupart de ces bâtiments ont été construits dans les cent cinquante dernières<br />

années. Cependant, on peut voir que des bâtiments modernes, comme celui de la Stella<br />

Artois à Louvain en Belgique, présentent aussi des bâtiments rectangulaires en brique<br />

apparente. Deux types différents ont été défi nit en fonction de l’aspect des bâtiments<br />

ainsi que de l’appareillage des briques : les moyennes et grandes brasseries rationnelles et<br />

les brasseries-château.<br />

les moyennes et grandes usines<br />

Les moyennes et grandes fabriques : Stadtbrauerei, Arnstadt, Allemagne – Lowenbrau Barth, Aalen,<br />

Allemagne – Vereinsbrauerei, Apolda, Allemagne – brewery Fernvale, Pontygwaith, walles – brewery<br />

Border, Wrexham, Walles – brewery Brains, Cardiff, Walles – brasserie Eylenbosch, Schepdaal,<br />

Belgique – brasserie Roman, Mater, Belgique – brasserie Lembeek, Boon, Belgique – brasserie<br />

Strubbe, Ichtegem, Belgique – brewery Elysian, Seattle, USA – brewery Lakefront, Milwaukee,<br />

USA – brewery Chicago, Las Vegas, USA<br />

Les grandes usines : brasserie Haacht, Boortmeerbeek, Belgique – brasserie Stella Artois, Louvain,<br />

Belgique – brasserie Liefmans, Oudenaarde, Belgique – brasserie Moorgat, Breendonk, Belgique<br />

– brasserie Maes, Waarloos, Belgique – brewery Welsh, Cardiff, Walles – brewery Anheuser Busch,<br />

St Louis, USA<br />

La fi n du XVIII ème et le début du XIX ème siècles correspondent à l’âge d’or des constructions<br />

de bâtiments de brasseries, suite à l’avancée des techniques utilisées, mais aussi à la<br />

production de la pils, bière nouvellement arrivée de Tchécoslovaquie et fort appréciée<br />

de la population. Les brasseries de toute l’Europe se modernisèrent, perfectionnant leurs<br />

installations à une vitesse impressionnante ; après les machines à vapeur, c’est l’électricité<br />

qui fi t son entrée dans la machinerie brassicole, venant bouleverser les possibilités de<br />

production. En conséquence, le bâtiment prit alors de l’ampleur et fi gurait l’importance<br />

de la brasserie. A l’extérieur, mais à l’intérieur aussi, la pièce maîtresse étant toujours la<br />

salle de brassage. Par exemple, dans la brasserie Heineken à Schiltigheim, le carrelage<br />

habituel était remplacé dans une composition en mosaïques reproduisant l’emblème de<br />

la brasserie.<br />

La construction de ces premières grandes brasseries suivait une certaine tradition de<br />

« En chaque enclos l’été, l’hiver sous chaque toit où la province s’attable au jour et boit, le bourgmestre<br />

est prince mais le brasseur est roi. » (Emile Verhaeren)<br />

69<br />

[ classification des types ]


la construction. Mêlant souci de l’esthétique de la forme et de la mesure, les bâtiments<br />

étaient bien souvent agrémentés de décorations permises par la mise en œuvre des<br />

briques ainsi que leurs couleurs. Au début, ces constructions s’inspiraient donc fortement<br />

de l’architecture traditionnelle, de la forme des maisons et des fermes. Ces bâtiments<br />

de taille moyenne restaient ainsi, de par leur apparence et leurs dimensions, à l’échelle<br />

humaine. Les éléments de fenêtres, de portes, les murs, ressemblaient à ceux des maisons<br />

environnantes, elles n’avaient alors pas encore une forme spécifi que à l’industrie.<br />

Les moyens de production évoluant, l’image ainsi que les dimensions des bâtiments<br />

évoluèrent avec eux, se dissociant de l’architecture traditionnelle et des particularités d’un<br />

site, en proposant la forme la plus simple et la plus effi cace possible. La structure aussi se<br />

retrouvait simplifi ée, présentant souvent un système de poteaux-poutres permettant une<br />

certaine liberté d’aménagement.<br />

L’augmentation ainsi que la facilité des moyens de transport permirent à ces usines de se<br />

placer à l’extérieur de tout lieu bâti, construisant leur propre entité ; s’affranchissant aussi<br />

par là même de toutes considérations et connotations liée au territoire, telle la proximité<br />

d’une source d’eau, ou l’identité d’un lieu vis-à-vis de sa population, etc.<br />

Ces bâtiments ont tous été construits en vue d’abriter une brasserie préexistante et dont<br />

l’augmentation de la production avait nécessité de plus grands espaces. Ce changement de<br />

bâtiment impliquait souvent un déplacement de la production. Ainsi, le site nouvellement<br />

construit devait montrer l’importance ainsi que la grandeur de cette brasserie devenue<br />

usine. Désormais la taille et la cheminée écrasait l’humain par ses dimensions, même<br />

si aujourd’hui cette cheminée évoque l’ image actuellement réconfortante d’un passé<br />

industriel encore en activité.<br />

La conception était directement guidée par les exigences de production de la brasserie :<br />

hauteur du bâtiment, forme économique et rectangulaire, organisation des bâtiments<br />

en plusieurs secteurs (brassage, production de froid, stockage, transport, etc.). Nous<br />

pouvons dire que certaines de ces usines, présentant déjà la forme de grands hangars<br />

rectangulaires, comme la brasserie Brains. Elles préfi guraient en quelque sorte le type à<br />

venir le la grande halle métallique totalement hermétique au monde extérieur. D’ailleurs,<br />

ces usines reprenaient la typologie des halles de marché faites d’acier. La construction se<br />

rationalisa alors avec une structure métallique recouverte de murs de briques. Le béton<br />

armé pris aussi de l’importance, permettant la fabrication de planchers plus résistants,<br />

élément non négligeable vu la dimension et le poids des différentes cuves qui n’étaient que<br />

très rarement placées au rez-de-chaussée. Si le béton fait son entrée dans la construction<br />

industrielle, il n’est pas encore laissé apparent et brut, et reste recouvert de briques.<br />

« Beaucoup de batailles ont été menées et gagnées par des soldats abreuvés de bière. »<br />

(Frédéric Guillaume)


« Il faut que bière jeune fermente. »<br />

les brasseries-châteaux<br />

Par brasserie-château, il faut comprendre un type de bâtiment particulièrement mis<br />

en valeur par l’appareillage et souvent par l’utilisation bicolore des briques. Ce type a<br />

été développé à partir de la seconde moitié du XIX ème siècle jusque dans les années<br />

20. L’image que donnaient ces bâtiments n’avait que peu de choses à voir avec une<br />

architecture rationnelle, mais jouait sur son aspect, tirant fortement vers un symbolisme<br />

de la représentation. Bien que les autres brasseries de la même époque présentent elles<br />

aussi quelques ornementations, les brasseries-châteaux les ont poussés à l’extrême. Ainsi,<br />

certaines de ces brasseries ressemblaient moins à un lieu industriel qu’à une somptueuse<br />

demeure.<br />

Avec le développement de l’électricité en 1870, commence une nouvelle phase<br />

d’industrialisation qui pousse certains industriels et architectes à rechercher une nouvelle<br />

forme artistique pour la construction des usines. Les architectes reviennent alors à des<br />

styles de construction historique pour s’en inspirer afi n de trouver une nouvelle image<br />

digne des aspirations de grandeur des industriels.<br />

Au XIX ème siècle, le Burgenmotiv est un élément récurent dans les arts, en particulier la<br />

musique et la littérature (Faust, Ring des Nibelungen, Parsifal, etc). Le château est alors<br />

vu comme le trésor des plus hauts bonheurs, comme un Himmelburg. On était alors à la<br />

recherche d’une sorte d’idéalisme perdu, d’une tentative de retrouver des temps anciens.<br />

Cette recherche d’un idéal pour l’image industrielle était poussée par une sorte d’exaltation<br />

religieuse et d’idéalisation de la machine, se voulant le point de départ d’un nouveau style<br />

de vie, d’indépendance, de force et de pouvoir. En même temps, le bâtiment cherchait à<br />

montrer tout le caractère du produit, ne voulant pas se réduire à la simplicité des grands<br />

bâtiments de brique. Curieusement, malgré cette exaltation, la machine était cachée<br />

derrière tout ce décor, sans distinction de fonction entre les bâtiments, le seul élément<br />

réellement industriel sortant de l’ensemble étant la cheminée.<br />

Au XIX ème siècle, ce style de construction se rencontrait fréquemment. Nous pouvons<br />

citer les exemples de la Brauerei Maisel ou la Bolten Brauerei en Allemagne. Le style<br />

atteint quelques temps plus tard la Suisse, avec des bâtiments comme la Brauerei Merain<br />

à Bâle (1856-1857), la Brauerei Löwenbräu à Zurich (1898), et la Ziegelhof à Liestal dont<br />

les façades ont été remodelées dans le style en 1906. Cependant, ce style de château fort,<br />

nommé Burgenstil, n’a pas été seulement utilisé dans l’industrie, mais aussi pour des gares<br />

(Glaris 1902), des casernes (Bâle 1860-1863), des musées (Landesmuseum, Zurich, 1893-<br />

1898), des hôtels (Palace-Hotel à St-Moritz en 1892-1897), etc.<br />

71<br />

[ classification des types ]


1.<br />

2.<br />

1. maquette de train éléctrique reprenant la forme de ces brasseries - château<br />

2. vue extérieure de la brasserie Feldschlösschen, entre créneaux, mâchicoulis et meurtrières


« Il s’améliore comme une bière médiocre mise en perce. »<br />

la brasserie de Feldschlösschen<br />

La brasserie de Feldschlösschen constitue l’archétype poussé à l’extrême de ce mouvement.<br />

Elle est située au sud-ouest de Rheinfelden, non loin de Bâle. Construite en 1876, elle<br />

transmet le style romantique du château de brique, en version brasserie. Son image ne<br />

peut que frapper dans ce paysage campagnard ou rien ne suppose une telle rencontre. On<br />

reconnaît de loin de grandes tours, ainsi que la silhouette des créneaux des bâtiments.<br />

Tout évoque le château moyenâgeux, la conception, l’organisation ainsi que l’agencement<br />

des bâtiments, mais dans une version détournée, déguisée, comme si l’on avait voulu<br />

reproduire tous ces archétypes, donnant presque une image de décor en papier carton<br />

pour un théâtre.<br />

Les créneaux, les meurtrières, les mâchicoulis et les tours d’angles ont perdu leur<br />

signifi cation et leur fonction dans le cadre de la brasserie ; ils n’ont plus de but de défense,<br />

personne n’est là pour tirer à l’arc, ou protéger les murs, car il n’y a rien à attaquer. Ces<br />

éléments doivent simplement être compris dans l’idée d’une image du château ; tout ici<br />

est fonction symbolique.<br />

Sous son aspect déroutant, il est le témoin reconnu d’une époque, restée fi gée même<br />

dans les différents agrandissements subis par la brasserie, de peur de voir un exemple de<br />

l’architecture industrielle du XIX ème et XX ème siècles disparaître sous les modernisations.<br />

Ainsi, même une partie des caves, construites entre la fi n des années 1970 et le milieu des<br />

années 1980 perpétue le style qui constitue alors le leitmotiv de la construction.<br />

L’aspect actuel de la brasserie est le résultat de plusieurs étapes. De nombreuses brasseries<br />

se sont développées dans des styles différents, rompant la continuité du bâti et des<br />

matériaux, mais Feldschlösschen a au contraire continué son Burgenstil jusqu’à le mener<br />

dans le présent.<br />

Feldschlösschen existe depuis 1876. A cette époque, la brasserie était installée dans une<br />

construction déjà présente, très sobre et sans ornements. En 1882, la fabrique s’agrandit,<br />

et on construisit alors le premier bâtiment Burgenstil du site : la malterie, suivie dix ans<br />

plus tard par une nouvelle salle de production, une salle des machines ainsi qu’une aile<br />

sud. L’aspect du château allemand se confi rme et se développe. Ainsi, la construction<br />

en 1908 de la Südhaus est effectuée par le bureau d’architecte Zimmermann (Freiburg<br />

am Breisgau) qui avait déjà commis le bâtiment de la Löwenbrau à Zürich. Le nouveau<br />

bâtiment de la Südhaus se veut être le couronnement de la construction, signifi ant le<br />

niveau artistique des bâtiments ; le burgenstil néogothique se trouvant enrichi par ce<br />

nouvel ajout.<br />

Les temps changent heureusement quelque peu et le nouveau bâtiment qui devait<br />

comprendre un silo à grain est toujours construit en brique mais cette fois avec moins de<br />

73<br />

[ classification des types ]


1. salle de brassage<br />

2. fresque dans la salle des machines<br />

3. salle de brassage<br />

4. détail du vitrail de la salle de brassage<br />

1. 2.<br />

3. 4.<br />

5. entrepôt et embouteillage<br />

6. cuves de garde


fi oritures et d’une manière un petit peu plus rationnelle. Il ne faisait donc plus partie du<br />

Burgenstil néogothique proprement dit, mais présentait toujours ce même appareillage<br />

de briques bicolores, s’inscrivant ainsi dans une sorte de continuité plus fonctionnaliste<br />

et néoclassique.<br />

Cette volonté de conservation et de continuité de construction dans un style hors<br />

d’époque a été motivée par la volonté de préserver la représentation d’ensemble et de<br />

grandeur de ce bâtiment considéré comme le château préféré des Suisses. On remarquera<br />

que, contrairement aux bâtiments se situant en contiguïté des anciens bâtiments de 1900<br />

et présentant le même aspect, les deux bâtiments administratifs ainsi qu’un énorme<br />

entrepôt datant aussi des années 1970 situés à une petite distance du château, présentent<br />

une construction moderne. Seule la couleur de leurs façades métalliques bicolores,<br />

reproduisant artifi ciellement les teintes des briques, permet de les rapprocher du reste<br />

des bâtiments. Toute cette brasserie peut donc être vue comme un combat contre les<br />

rationalistes, préférant la fi oriture et la décoration aux simples prismes.<br />

5. 6.<br />

« La cuisine anglaise? Si c’est froid, c’est de la soupe. Si c’est chaud, c’est de la bière.» (dicton français)<br />

75<br />

[ classification des types ]


ci-dessus: les brasseries béton, de gauche à droite et de bas en haut, la suite des images suit la liste donnée<br />

sur la page ci-contre.


type 5 : les brasseries béton<br />

Lowenbrauerei, Pasau, Allemagne – Braueri Memminger, Amendingen, Allemagne – Brauerei Baar,<br />

Baar, Suisse – brasserie Boxer, Romanel-sur-Lausanne, Suisse – brasserie Calanda, Choir, Suisse<br />

– Brauerei Eichof, Lucerne, Suisse – Brauerei Falken, Schaffouse, Suisse – Brauerei Rosengarten,<br />

Einsideln, Suisse – Rugenbrau, Matten, Suisse – Brauerei Schutzengarten, Saint Gall, Suisse –<br />

Brauerei Sonnenbrau, Rebstein, Suisse – brasserie valaisanne, Sion<br />

Par brasserie-béton, nous comprenons des brasseries dont une grande partie du bâtiment<br />

a été réalisée en béton, donnant ainsi une impression de masse importante et parfois<br />

de lourdeur. Si l’on voit une différence d’aspect entre ces brasseries et les brasseries de<br />

briques, leurs installations, leur agencement et leur fonctionnement sont restés plus ou<br />

moins les mêmes. Ainsi, nous ne nous étendrons pas sur ce sujet.<br />

Notons toutefois que ce type de brasserie s’est énormément développé en Suisse, ceci sans<br />

doute parce que la production et la culture de la bière ne sont arrivées que tardivement<br />

à cause de la prédominance du vin.<br />

Le béton constitue le matériau supplantant la brique, présentant une meilleure résistance<br />

aux surcharges ainsi qu’aux risques d’incendies. Il infl uence aussi en partie l’aspect de<br />

la toiture des bâtiments. Si les fabriques des premiers temps, celui de la brique, avaient<br />

encore des charpentes en bois, les suivantes des charpentes en métal, ici la structure et<br />

les façades sont presque complètement réalisées en béton. Ce matériau permet aussi plus<br />

facilement la mise en œuvre d’une toiture plate, rapprochant ainsi les bâtiments de grands<br />

prismes.<br />

L’aspect extérieur de ces bâtiments exprime tout à fait l’économie de moyen, ainsi que<br />

l’industrie, abandonnant tout type de décoration, mise en avant ou fi oriture. Seul l’encart<br />

lumineux publicitaire de la brasserie permet d’y mettre un peu de couleur.<br />

Alors que ces brasseries en béton sont en Suisse généralement des usines de tailles<br />

moyennes, nous trouvons en Belgique par exemple le cas de l’ancienne brasserie Atlas à<br />

Bruxelles, ainsi que les anciens bâtiments de la Stella Artois qui ne sont pas sans rappeler<br />

les grands silos américains utilisés par Le Corbusier pour illustrer le volume dans Vers<br />

une architecture.<br />

« C’est plein d’horizons à nous rendre fous, mais l’alcool est blond, le diable est à nous.»<br />

(Jacques Brel)<br />

77<br />

[ classification des types ]


ci-dessus: les cubes métalliques, de gauche à droite et de bas en haut, la suite des images suit la liste donnée<br />

sur la page ci-contre.


« Il y a plus de vieux ivrognes que de vieux docteurs. »<br />

type 6 : du cube métallique<br />

Brauerei Goller, Zeil am Main, Allemagne – Brauerei Landwehr, Reichelshofen, Allemagne – Brauerei<br />

Maisel, Bayreuth, Allemagne – brewery Brecon, Breconshire, Walles – brewery Thomas & watkin,<br />

Llansamlet, Walles – brasserie Alken-Maes, Alken, Belgique – brasserie Artois, Louvain, Belgique<br />

– brasserie Jupiler, Jupille, Belgique – brasserie Bavik, Bavikhove, Belgique – brasserie Belle Vue, Sint<br />

Pieters Leeuw, Belgique – brasserie Hoogarden, de Kluis, Belgique – brasserie Moortgat, Breendonk,<br />

Belgique – brasserie Adler, Schwanden, Suisse – brasserie des Franches Montagnes, Saignelégier, Suisse<br />

– brasserie du Cardinal, Fribourg, Suisse – Brauerei Aarebier, Aarberg, Suisse – brewery Cape Cod<br />

Beer, Hyannis, USA – brewery Nicolet, Florence, USA<br />

Le nom de ce type, qualifi é de cube métallique est quelque peu caricatural. Il comprend en<br />

réalité les constructions métalliques ainsi que les grandes usines alliant béton et métal<br />

ayant en commun de donner toujours en premier cette même impression d’espace clos.<br />

Le type de la grande halle métallique recouverte de bardage est en général soit utilisé pour<br />

la production, soit pour les entrepôts. Les usines alliant béton et métal sont quant à elle<br />

généralement des usines de très grande envergure.<br />

On retrouve en général dans ce type de bâtiments des brasseries de taille moyenne à<br />

grande. Cependant, on y retrouve aussi de petites brasseries. Par exemple, la Brasserie des<br />

Franches Montagne loue un espace dans un zoning situé à Saignelégier.<br />

Pour des raisons de disponibilité des espaces, mais aussi suite à des règles d’urbanisme les<br />

confi nant dans des zones industrielles, ces bâtiments se trouvent éloignés de toute zone<br />

d’habitation. Construits sur une surface neutre, ils se trouvent en quelque sorte libérés<br />

des contingences du sol, comme simplement déposés là, sans faire particulièrement<br />

attention au paysage. Les matériaux mêmes qui y sont utilisés connotent particulièrement<br />

ces bâtiments en tant qu’industries. La plupart du temps, ils présentent la forme la plus<br />

simple et économique possible, en général un prisme rectangulaire, formant ainsi de<br />

grands espaces facilement aménageables et pouvant accepter sans trop de problèmes les<br />

changements. Ainsi, la fabrication de ces bâtiments est normalisée, faite d’assemblages<br />

d’éléments eux aussi issus de l’industrie, et reproductibles. Cela leur donne parfois l’air<br />

d’êtres assemblés pour quelques temps, presque temporaires, asservis aux changements<br />

techniques.<br />

La recherche de formes ainsi que de volumes est en quelque sorte annihilée par ce type<br />

de constructions présentant un nombre d’éléments limités recouverts d’une enveloppe<br />

aveugle. Apparemment, ce genre de construction serait apparu peu avant la deuxième<br />

guerre mondiale aux Etats-Unis. Il permettait un contrôle total des espaces intérieurs (air,<br />

humidité, lumière, etc.) créant ainsi une sorte d’univers clos. Cette fermeture du bâtiment<br />

permettait aussi une sécurité de tout ce qui se passait à l’intérieur puisque rien ne pouvait<br />

être vu de l’extérieur. De même, les ouvriers, ne pouvaient voir ce qu’il y avait au dehors,<br />

79<br />

[ classification des types ]


limitant ainsi leurs possibilités de distraction. Ce modèle s’est développé à partir des<br />

années 1950 en Europe, les protestations des ouvriers ayant été rapidement oubliées par<br />

les industriels au vu de l’effi cacité et de l’économie offerte par ce type de construction.<br />

Après la guerre, les grandes brasseries se modernisèrent énormément, devenant des usines<br />

de pointe, dans lesquelles le processus était totalement contrôlé. Le bâtiment devint lui<br />

aussi partie intégrante du processus en tant qu’outil de production au même titre que les<br />

machines. Aussi, dans cette logique de contrôle de la production et de rentabilité, était-il<br />

logique que ces grandes brasseries commencent à s’installer dans des constructions de<br />

ce type.<br />

Aujourd’hui, certaines de ces usines, comme les bâtiments de InBev sur le site de Jupille,<br />

sont devenues tellement grandes et gigantesques qu’elles n’ont plus grand-chose à voir<br />

avec le fameux tour de main du brasseur, mais seraient plutôt le fruit de savants calculs<br />

2. 3.<br />

1. vue aérienne du site InBev à Jupille, Liège, sources : InBev<br />

2. l’impressionante salle de brassage<br />

3. entrepôt et embouteillage<br />

1.


de réduction de la durée du processus et des coûts de production de la bière. Tout y est<br />

automatisé, aseptisé, contrôlé, réglé par des machines et des ordinateurs, de la livraison<br />

du malt à l’embouteillage, la main de l’homme ne touche plus rien. A Jupille, on emploie<br />

quarante personnes pour produire quelques 4 millions d’hectolitres par an ! Les nouvelles<br />

méthodes de gestion, la technologie évolutive, la robotique et le marketing font que la<br />

plupart des employés de ces usines se trouvent plus souvent dans des bureaux gérant les<br />

chiffres de la production et les goûts du consommateur plutôt qu’en salle de brassage.<br />

« Dans une maison de cette taille, un brasseur n’a guère à penser aux recettes, mais plutôt à faciliter le<br />

processus de fabrication. Tout changement du process ne se fait qu’avec l’aval du secteur marketing qui<br />

appuie ses demandes sur des études et des enquêtes de terrain. Le secteur marketing défi nit l’approche, le<br />

brasseur fabrique, avec un souci commun en tête : celui de vendre le plus possible de bière. » (René Sépul,<br />

Brasseur d’ici)<br />

« Vous comprenez qu’il n’y a pas grand monde en salle, tout est chez nous sous le contrôle des technologies<br />

les plus modernes. Nous ne parlons d’ailleurs plus de bières de fermentation haute ou de fermentation<br />

basse, ces notions étant quelque part dépassées avec ce qu’offre aujourd’hui la technologie. » (D’après<br />

Michel de Maeght, cité par René Sépul dans Brasseurs d’ici)<br />

Ainsi donc, ces bâtiments doivent en premier lieu accueillir des machines et du stock, peu<br />

d’êtres humains en somme, ce qui pourrait expliquer parfois leur aspect hors d’échelle<br />

lorsque l’on tente de les parcourir à pied ainsi que le clair manque de lumière dans les<br />

différents locaux. La protection du secret de production, l’abri pour les machines, le<br />

cloisonnement pour des raisons sanitaires expliquent que la plupart de ces usines se<br />

montrent sous la forme de grand blocs métalliques.<br />

Si les premiers lieux de fabrication de la bière s’apparentaient à l’architecture traditionnelle,<br />

ici, les bâtiments industriels sont donc avant tout construits sans tradition, obéissant<br />

uniquement aux besoins d’espace et de production. Ces grands complexes industriels ne<br />

ressemblent à rien d’existant au préalable, représentant une sorte de nouveauté dictée par<br />

la technique.<br />

« Si le vin est élitiste, la bière est conviviale et l’eau porte les bateaux.» (Gaston Marinx)<br />

81<br />

[ classification des types ]


ci-dessus, les brasseries bricolage ou brasseries en devenir, sont représentées: Brauerei Ubelhack, brasserie<br />

Achilles, brasserie Alvinne, brasserie Blaugies, brasserie Baisy-Thy, brasserie Kundig


type 7 : la brasserie bricolage ou la brasserie en devenir<br />

Brauerei Ubelhack, Weiglathal, Allemagne – brasserie Achilles, Itegem, Belgique – brasserie Alvinne,<br />

Ingelmunster, Belgique – brasserie de Blaugies, Blaugies, Belgique – brasserie Baisy-Thy, Brabant,<br />

Belgique – brasserie Kundig, Rietheim, Suisse – brasserie des Murailles, Meinier, Suisse – brasserie<br />

artisanale du Dérochet, Jouxtens-Mézery, Suisse – …<br />

Les grandes brasseries ont toutes commencé par être petites. Certaines, comme la<br />

brasserie du Cardinal à Fribourg commençaient en quelque sorte avec les moyens du<br />

bord, s’installant d’abord dans la cuisine familiale, ensuite la ferme, jusqu’à fi nalement<br />

devenir une des plus grandes brasseries de Suisse. Aujourd’hui aussi, les petites brasseries<br />

commencent avec de petits moyens, obligées parfois de récupérer des matériaux pour<br />

construire des cuves, récupérer des moteurs que l’on transforme, etc. L’installation dans<br />

un lieu précis se fait selon les possibilités à disposition : grenier, grange, ferme. Tout est<br />

bon et récupérable pour le féru de bière qui veut commencer à brasser.<br />

Toutefois, l’installation de certains est facilitée par les possibilités offertes par les fabricants<br />

de machines brassicoles. Ayant fl airé la tendance, ils proposent aujourd’hui autant des<br />

packs pour produire sa propre bière chez soi dans sa cuisine, que de vrais systèmes<br />

de cuves, refroidisseurs, tanks de fermentation et de garde, etc. tout cela contrôlé par<br />

ordinateur et directement livrable monté, prêt à servir.<br />

Il s’agit donc fi nalement d’un type indescriptible, mais qu’il fallait tout de même citer<br />

puisque ces brasseries, mises toutes ensembles constituent tout de même une production<br />

assez importante, et que leur état actuel n’est pas loin de ressembler à celui des débuts<br />

des grandes brasseries.<br />

« Je ne bois pas plus qu’une éponge.» (François Rabelais)<br />

type 8 : la micro-brasserie urbaine<br />

Nous avons déjà quelque peu évoqué de ce type en parlant des différents débits de bières.<br />

En ville, se sont installés une série de bars produisant leur propre bière, devenant ainsi<br />

des micro-brasseries urbaines. Ces bars ou restaurants se trouvent en général en centre<br />

ville pour assurer suffi samment de clientèle afi n de rendre la production de la bière<br />

maison rentable. Nous avions critiqué la décoration toute-faite et artifi cielle de certains<br />

de ces bars. Pour contrebalancer cette critique, nous allons ici parler de quelques bars<br />

micro-brasseries, qui n’ont pas misé sur la décoration à outrance, mais se sont installés<br />

simplement, comme presque n’importe quel autre café.<br />

83<br />

[ classification des types ]


1. ZIP City Brewery, New York<br />

2. Brauhaus Goslar, Hambourg<br />

3. les Brasseurs, Lausanne<br />

1.<br />

2.<br />

3.


La seule différence avec un simple bar reste la présence des cuves dans la salle. Parfois,<br />

elles sont placées derrière le comptoir pour rester du côté du personnel tout en étant<br />

attenantes à la cuisine et aux raccords en eau. Mais la plupart du temps, celles-ci sont<br />

mises en évidence dans la salle, marquant bien la destination du lieu : ici, on est là pour<br />

boire de la bière ! Elles sont placées parfois sur une sorte de scénette, les mettant bien<br />

en vue, mais qui en réalité permet de faire passer les différents raccords dont les cuves<br />

ont besoin.<br />

Même si elles se situent au milieu de la salle, ou dans n’importe quelle partie réservée<br />

au public, les cuves, sont toujours protégées par des barrières entourant la zone de<br />

production, évitant ainsi que n’importe qui vienne les toucher. Elles font ainsi partie du<br />

décor, se trouvent proches des personnes qui viennent prendre un verre, sans toutefois<br />

que ceux-ci puissent les approcher de trop près.<br />

Dans d’autres cas où la production est un peu plus grande, les cuves sont clairement<br />

séparées du reste de la salle du bar ou du restaurant, créant ainsi deux espaces adjacents<br />

et complémentaires. Cependant, à chaque fois, les clients continuent à avoir une vue sur<br />

les cuves.<br />

Ce genre de micro-brasseries urbaines produit uniquement la quantité de bière qui sera<br />

débitée dans le bar. En général, ce nombre est assez restreint, ce qui fait qu’il est assez<br />

rare de voir le brasseur à l’œuvre, ne brassant en général qu’un jour par semaine. De<br />

plus, les horaires d’ouvertures de ces lieux permettent au brasseur de travailler en toute<br />

tranquillité, sans clients dans la salle. A noter que vu la position des cuves dans la plupart<br />

des endroits, le travail en même temps que la présence des clients ne serait pas totalement<br />

impossible mais du moins fortement désagréable. S’il reste amusant de boire une bière<br />

tout en voyant les cuves, on est bien obligé d’admettre que c’est bien tout ce que l’on<br />

voit…<br />

« A un certain degré d’ivresse lucide, l’espoir n’est plus une torture. » (Albert Camus)<br />

85<br />

[ classification des types ]


[ la question du terroir et du rapport au sol ]<br />

La question du rapport au lieu ou à un certain terroir a été quelque peu bousculée par<br />

les évolutions techniques ainsi que par l’avènement des grandes usines. Ainsi, à l’époque<br />

l’eau utilisée provenant d’une source locale faisait la qualité de la bière et la fi erté de la<br />

brasserie. La brune de Munich par exemple tenait sa couleur du calcaire contenu dans l’eau<br />

utilisée, la Pilsen quant à elle était élaborée à partir d’une eau très douce issue des couches<br />

de gypse contenues dans le sol. Aujourd’hui, les brasseurs ont les moyens d’ajuster et de<br />

corriger l’eau utilisée. Or, l’eau était en général la seule matière première provenant du<br />

territoire même de la brasserie.<br />

En effet, contrairement à la production viticole dont l’ensemble des matières premières,<br />

la vigne, se trouve sur les terres mêmes du domaine, limitant ainsi les possibilités de<br />

productions, mais constituant en même temps un lien particulier à la terre, les matières<br />

premières de la bière sont actuellement importées. Cette espèce d’affranchissement<br />

vis-à-vis d’un terrain constituait l’un des aspects populaires et accessibles de la bière,<br />

permettant à quiconque de brasser dans la mesure où il arrivait à s’approvisionner en<br />

malt et en houblon. En même temps, la brasserie s’affranchit des limites de productions :<br />

tant qu’elle produit, vend, achète ses matières premières, elle peut continuer de croître,<br />

trouvant donc la seule limite dans les possibilités d’agrandissement de ses bâtiments.<br />

C’est exactement ce qui est arrivé avec les grandes brasseries devenues aujourd’hui des<br />

usines. Ayant besoin de s’agrandir, elles ont dû se déplacer, quitter la maison d’origine dans<br />

laquelle elles s’étaient vues naître pour s’installer dans un lieu propice à leur expansion, en<br />

général au bord de voies de chemin de fer, ou près d’un accès autoroutier.<br />

Cet affranchissement vis-à-vis du territoire se voit très nettement dans les deux brasseries<br />

jumelles de InBev, l’une située à Louvain et l’autre à Jupille. Ces deux brasseries se trouvant<br />

sur deux sites différents appartiennent au même groupe et produisent exactement les<br />

mêmes bières. L’eau, unique matière première qualifi ant le site, est traitée dans les deux<br />

usines soit par fi ltrage soit par traitement chimique, pour n’avoir plus aucune particularité<br />

de la terre dont elle provient. Ainsi, il est totalement impossible au consommateur de<br />

faire la différence entre une Jupiler brassée à Jupille ou à Louvain.<br />

De la même manière, les rachats ainsi que les fusions des brasseries entre elles ont<br />

aussi provoqué une perte de notion de terroir ou territoire. Par exemple, le groupe<br />

Feldschlösschen avait racheté les brasseries du Cardinal à Fribourg, produisant ainsi de<br />

manière équivalente des Cardinales et des Feldschlösschen sur les deux sites. Depuis<br />

quelques années, Feldschlösschen a été racheté par Carlsberg et les bières Carlsberg que<br />

nous pouvons acheter en Suisse ne sont fi nalement pas produite au Danemark, mais à<br />

Fribourg et Rheinfelden.<br />

« Dieu a créé l’alcool pour empêcher les Irlandais de dominer le monde. » (James Joyce)


La mondialisation, la croissance des différentes entreprises et la délocalisation ont créé<br />

une sorte d’affranchissement total du sol touchant aussi les brasseries. Il est amusant de<br />

voir que l’unique exception à la règle de cet affranchissement territorial viendrait de la<br />

volonté de certains consommateurs. Par exemple, il serait plus rentable de la part d’InBev<br />

d’installer des usines aux Etats-Unis produisant exactement la même Stella Artois que<br />

celle qui est produite à Jupille ou à Louvain. Cependant, InBev n’a pas encore franchi le<br />

cap sous la pression du consommateur américain qui préfère lire la mention « made in<br />

Belgium » sur sa bouteille par soucis d’authenticité.<br />

L’image du terroir des grandes usines s’est alors changée en outil marketing, cachant<br />

une réalité de production. C’est ce qui est d’ailleurs très souvent critiqué pour certaines<br />

bières dites d’abbaye. Malgré leur nom, elles sont pour la plupart produites hors de tout<br />

contexte religieux.<br />

A l’heure actuelle, on assiste à un regain d’intérêt très marqué auprès de la population pour<br />

les produits du terroir, provoquant un nouvel attrait vers les petites brasseries, représentant<br />

une certaine image ainsi qu’un attachement à une région. De plus, on peut remarquer que<br />

cet intérêt est lié à une sorte de recherche d’un paradis perdu, d’une authenticité que l’on<br />

ne retrouve plus dans les bières produites en masse et distribuées à tout vent. Ces petites<br />

brasseries recherchent dès lors une différenciation, une identité propre qui fera qu’elles<br />

ne ressembleront à aucune autre, qu’elles seront presque uniques. En général, ces bières<br />

présentent un goût complexe, marqué par une identité forte inssufl ée par le brasseur.<br />

Si certaines de ces brasseries gardent une production très limitée et ne brassent quasiment<br />

que pour leur village, d’autres on vu leur renommée croître spectaculairement ces dernières<br />

années, les forçant à s’agrandir, posant parfois aussi la question d’un déplacement de la<br />

brasserie.<br />

« J’aime la boisson mais pas l’ivresse.» (Louis Scutenaire)<br />

87<br />

[ la question du terroir ]


[ état actuel, entre brasseries artisanales et grosses industries ]<br />

« Si la diminution des risques d’infection, la plus grande stabilité biologique de la bière, la garantie d’un<br />

produit de couleur, de goût, de limpidité constante tout au long de l’année sont synonymes de progrès,<br />

alors le terme s’impose incontestablement ; les brasseurs ont réussi grâce à leur esprit d’innovation et à<br />

la recherche scientifi que à éliminer tous les « hasards de la fabrication », hasards qui d’après les textes<br />

du moyen âge conféraient souvent à la bière un goût désagréable, voire des propriétés toxiques… Il n’est<br />

cependant pas déraisonnable de penser que, dans un avenir peut-être proche, lorsque cet extraordinaire<br />

essor de la brasserie dû à la fois à ces innovations technologiques et à l’accroissement spectaculaire de la<br />

consommation se sera stabilisé, certaines brasseries reviendront parallèlement bien sûr à la production<br />

d’une bière « courante », à des techniques de brassage apparemment « archaïques », non par simple<br />

tradition mais pour retrouver des bières plus typées. » (Bertrand Hell in l’homme et la bière, p. 86-88)<br />

Au niveau de la production de la bière, c’est à partir des étapes de fermentation que le<br />

processus de fabrication est le plus discuté entre industries et brasseurs artisanaux. Si la<br />

production d’une bière dure environ trois mois, et dans des cas exceptionnels comme<br />

pour l’élaboration d’une gueuze chez Cantillon trois ans, les brasseries industrielles ont<br />

réussi, en réduisant le processus et en gérant au maximum l’économie de la brasserie,<br />

à produire une bière en moins de 3 semaines. On comprend donc qu’il y a un univers<br />

entre les brasseurs qui utilisent encore des bacs de refroidissements et des tonneaux<br />

de chênes, d’autres petits brasseurs qui ont fait entrer chez eux plus de technique en<br />

gérant leurs brassins par ordinateur et possédant des cuves inoxydables, et fi nalement,<br />

les grandes brasseries industrielles dans lesquelles la trace de la main de l’homme s’est<br />

presque effacée.<br />

Si les brasseries artisanales ont toujours existé, nous assistons depuis quelques années à<br />

une explosion de leur nombre. En Suisse, si la partie suisse alémanique possédait déjà un<br />

certain nombre de petites brasseries, celles-ci se sont développées en Romandie à partir<br />

des années 90. Face à la mondialisation, aux produits insipides venant tout droit des<br />

grandes industries, certains consommateurs ont éprouvé le besoin de retrouver une sorte<br />

d’équilibre, de revenir à des produits plus typés.<br />

En effet, pour pouvoir produire en grande quantité et distribuer leur bière sur le territoire<br />

le plus large possible, les grandes brasseries doivent répondre en quelque sorte aux<br />

goûts de la masse, et produire une bière qui plaira au plus grand nombre, une bière qui<br />

fi nalement n’aura plus de particularité. La montée en force de l’industrialisation de la<br />

brasserie ainsi que la société de consommation de masse a poussé vers la production<br />

d’une bière sans âme, de standardisation.<br />

« Une ivresse efface mille tristesses.» (proverbe chinois)


« Les Africains n’aiment guère l’amertume tandis que les Tchèques en raffolent. En Italie, on ne jure<br />

que par des bières sèches alors qu’elles sont souvent plus moelleuses, plus fl euries et plus amères au Nord.<br />

Vous comprenez dès lors qu’une bière très répandue géographiquement soit moins personnelle et plus<br />

neutre. » (Entretien avec André Devreux, in Brasseurs d’ici)<br />

C’est justement cela que certaines brasseries artisanales tentent de contrer. En parlant<br />

de la Brasserie des Franches-Montagnes, le journal Le Temps titrait : Le pari des bières<br />

invendables. Autrement dit : comment produire des bières tellement particulières qu’elles<br />

ne correspondent pas aux goûts de la moyenne des consommateurs, trop habituée à<br />

ingurgiter un coca-cola entre grignotages de chips et bonbonailles. Particulière oui, et<br />

avec une réelle identité.<br />

On peut alors se poser la question suivante : qui achète ces bières et le marché n’estil<br />

pas déjà totalement saturé par les grandes marques comme Heinneken, Cardinal,<br />

Feldschlössen, Kronenbourg, Carlsberg, Stella Artois, etc ? Oui, quelque part le marché<br />

est saturé, mais saturé essentiellement par un certain type de bière. Si on trouve dans<br />

les supermarchés de Romandie quelques bières artisanales suisses comme la Calvinus<br />

et les bières des Franches-Montagnes, les bières artisanales sont avant tout distribuées<br />

dans quelques bars et magasins spécialisés. Aussi leurs possibilités de vente se trouvent<br />

quelque peu limitées et empêchées par la présence des gros producteurs.<br />

Cependant, on remarque qu’une part des buveurs de bière de Suisse boit moins mais<br />

mieux. Autrement dit, qu’ils commencent à s’ouvrir à ces nouveautés, et choisissent leur<br />

bière, ce qui n’était pas le cas lorsque la plupart des supermarchés et des bars se limitaient<br />

à proposer de la pils. Ainsi, les brasseurs artisanaux ont constitué leur propre clientèle,<br />

tout en grignotant une part du marché occupée par les grandes brasseries.<br />

« La bière nourrit, le vin ronge.» (proverbe allemand)<br />

89<br />

[ état actuel ]


_ BFM - Brasserie des Franches - Montagnes


[ introduction et problématique ]<br />

Nous avons déjà quelque peu évoqué la problématique dans les préambules des deux<br />

<strong>fascicule</strong>s. Les études sur la bière, ses rapports à l’homme ainsi que les divers lieux de la<br />

bière nous ont permis de poser l’état des choses afi n de pouvoir trouver une problématique<br />

et un projet.<br />

Par l’étude des bars, estaminets et autres débits de boissons, on a pu voir un certain<br />

changement dans les mœurs et la fréquentation de ces lieux, passant ainsi d’une image<br />

de bouge réservé au bas peuple, à un lieu plus démocratique. Aujourd’hui, la bière est<br />

débitée dans n’importe quel café, bar ou restaurant, ne présentant ainsi plus un espace<br />

spécifi que à cette boisson.<br />

Les bars actuels se disant bar à bière oscillent généralement entre une fausse décoration,<br />

un foisonnement de décoration antiquisante rappelant le glorieux passé de la bière,<br />

et quelques bars tout simple produisant leur propre bière, trop souvent de mauvaise<br />

qualité.<br />

Les bâtiments de brasseries, quant à eux, ont adoptés leurs formes et leur typologie<br />

en fonction de l’évolution des techniques. La simple brasserie médiévale, que nous<br />

avions évoquée en parlant du plan de Saint-Gall, a fait place à une organisation plus<br />

compliquée et organisée en étages. Aujourd’hui, les divers moyens techniques permettent<br />

aux nouvelles brasseries de simplifi er leur installation tout en limitant les efforts des<br />

employés, s’organisant ainsi de manière horizontale.<br />

En exagérant un peu, on peut dire qu’aujourd’hui l’univers de la brasserie est comme<br />

divisé en deux : d’un côté les grandes brasseries avec un passé important, établies dans un<br />

lieu fi xe avec leur propre bâtiment, et de l’autre côté, les nouvelles brasseries artisanales<br />

qui apparaissent en grand nombre depuis une vingtaine d’années, mais qui, par leur<br />

moyens limités, s’installent tant bien que mal là ou il y a de la place. Par conséquent, elles<br />

n’ont pas encore réellement trouvé de lieu qui corresponde à leurs besoins.<br />

Il n’y a aujourd’hui pas d’espace qui soit réservé uniquement à la bière et qui lui corresponde<br />

telle qu’elle est aujourd’hui.<br />

En analysant les différents types de brasseries, nous avons vu qu’à chaque époque<br />

correspondait un type de brasserie particulier, répondant aux techniques et à l’ampleur des<br />

productions. Aujourd’hui, ce sont ces brasseries artisanales grandissantes qui ont besoin<br />

de trouver un espace leur correspondant, tout en rendant plus simple l’organisation de<br />

leur installation, leur permettant de garder les spécifi cités artisanales qui ont fait leur<br />

renommée, tout en s’abritant dans un espace évocateur de leur image et de leur identité.<br />

Nous nous occuperons, dans le cadre du projet, du cas des brasseries artisanales afi n de


proposer un lieu ainsi qu’un programme alternatif pour ce nouveau type de brasserie.<br />

En effet, certaines d’entre elles ont connu un succès mérité et nécessitent aujourd’hui de<br />

s’agrandir, de construire un nouveau bâtiment ou de changer de lieu.<br />

Forte de ces constatations, l’envie était née de faire un projet de petite fabrique de bière<br />

ayant une identité propre et reconnaissable, dialoguant tout autant avec les traditions<br />

de la bière qu’avec la modernité, et accueillant directement une clientèle venue pour se<br />

restaurer ou simplement déguster une bière dans un réel cadre de production.<br />

Toutefois, ne voulant pas me lancer dans le vide en créant des suppositions et en imaginant<br />

de toutes pièces un programme, j’ai recherché une brasserie artisanale répondant à la<br />

problématique développée. Mais dans quel pays, quelle région ? Mes choix se portaient<br />

essentiellement pour des raisons d’affi nités entre la Suisse et la Belgique. Mais proposer<br />

un travail sur une brasserie en Belgique me semblait trop caricatural.<br />

C’est en faisant de nombreuses visites de brasseries, que j’ai fi ni par découvrir la Brasserie<br />

des Franches-Montagnes, située dans le village de Saignelégier dans les Franches-<br />

Montagnes (région jurassienne) et correspondant en tout point à ce que je recherchais.<br />

Cette brasserie réfl échit à un futur besoin de changement de lieu et d’agrandissement.<br />

En discutant avec Jérôme Rebétez, brasseur et directeur de la brasserie, l’idée de mêler<br />

un programme plus public au lieu de production permettait ainsi de ramener plus de<br />

clientèle et de faire grandir la renommée de la bière. Ce double programme nécessitait<br />

aussi de mon point de vue une installation en ville, de sorte à renouer avec l’aspect social<br />

de la brasserie tout en se rapprochant de lieux plus vivants. C’est donc sur ces bases que<br />

vont pouvoir commencer les premières interrogations de projet.<br />

93<br />

[ introduction et problématique ]


[ BFM - brasserie des Franches-Montagnes ]<br />

La brasserie des Franches Montagnes est née en 1997, grâce aux efforts de Jérôme Rebetez,<br />

initiateur de la brasserie. Après des études d’œnologie, il s’est quelque peu détourné du<br />

vin voulant brasser une bière aux saveurs typées du terroir jurassien, (www.brasseriebfm.ch).<br />

Un concours lancé à l’époque, proposait de récompenser des projets entreprenants et<br />

innovants dans des régions déshéritées. La plupart des participants avaient proposé des<br />

projets dans le tiers-monde, Jérôme Rebetez avait défendu l’idée d’une brasserie dans le<br />

Jura, à Saignelégier, son village natal. L’argent remporté lors de ce concours (50’000 CHF)<br />

lui a permis de fi nancer une petite partie de ses installations, mais a surtout conforté l’idée<br />

qu’une entreprise humaine comme la brasserie, dans des régions de montagnes pouvait<br />

aider à faire revivre une région et devenir un élément fédérateur.<br />

« Déguster une première gorgée de bière c’est comprendre et respecter la terre et les gens qui l’ont produite.<br />

Répondre aux pourquois d’une fermentation, d’un arôme, d’un malt, d’une saveur, d’un taux d’alcool,<br />

d’un procédé de fabrication, d’un houblon, d’un verre, d’un ingrédient, d’une bouteille voire d’une étiquette,<br />

c’est aller à la rencontre de traditions, de terroirs, de plaisirs et de personnes. » (René Sépul in Brasseurs<br />

d’ici)<br />

La brasserie depuis sa naissance a connu un franc succès, distribuée en grande partie en<br />

Romandie, on la trouve autant en Suisse alémanique qu’aux Etats-Unis où les amateurs<br />

de bières de caractère en sont friands. Ne produisant pas sa bière pour plaire aux clients,<br />

mais d’abord pour lui-même, il a créé des bières fortes et de caractère. Elles ont plu, et<br />

la production est allée en grandissant avec les années, passant de 60 hectolitres en 1997<br />

au moment de la création à 750 hectolitres en 2006 et 1’100 hectolitres de production de<br />

2007 (soit une augmentation de 30% en par rapport à l’année précédente).<br />

Travailler au niveau du projet avec cette brasserie, est d’autant plus intéressant car il s’agit<br />

de la première à avoir relancé les brasseries artisanales en Romandie dans les années<br />

1990. En effet, avant cela, on trouvait quelques micro-brasseries en Suisse alémanique,<br />

en Allemagne et en Belgique par exemple ; mais la Romandie, trop occupée en grande<br />

partie par une production viticole semblait bouder la brasserie artisanale. Le mouvement<br />

lancé, d’autres brasseries ont commencé à s’installer, citons entre autres la brasserie du<br />

Dérochet à Romanel-sur-Lausanne, la brasserie des Murailles à Meinier, les Faiseurs de<br />

bière, issus de l’<strong>EPFL</strong> et installés à Goumoens-la-Ville dans la région lausannoise, parmi<br />

les nouvelles venues.<br />

Cette année, la brasserie fête ses 10 ans. Elle a bien grandi depuis, et la question d’un<br />

changement de locaux se pose. La brasserie loue actuellement un espace de près de<br />

600 m2 dans un entrepôt à Saignelégier, à une demie heure de voiture de La Chaux-de-<br />

Fonds.<br />

95<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


1.<br />

2.<br />

ci-dessus: le bâtiment industriel dans lequel BFM loue des locaux _ les étiquettes des bières les plus<br />

courantes produites par la brasserie.


La brasserie ayant débuté avec presque rien, la machinerie a disposition est l’œuvre<br />

du brasseur et de son mécanicien. Ils ont presque tout construit eux-mêmes, suivant<br />

leurs besoins et au cours de leur évolution. Nous allons ici présenter l’organisation de la<br />

brasserie actuelle ainsi que ces différents espaces. Ensuite, nous verrons quels sont les<br />

besoins que nous avons établis avec Jérôme Rebetez pour construire le programme du<br />

futur bâtiment de brasserie.<br />

la déficience industrielle<br />

L’article du journal Le Temps parlait du pari des bières invendables. Jérôme Rebetez, brasseur<br />

et directeur de BFM, confi rme en complétant : la brasserie s’est mise sur le créneau de la<br />

défi cience industrielle. Autrement dit, elle fait des choses qui sont illogiques industriellement.<br />

Cet illogisme permet justement de mettre ses bières en valeur pour les vendre beaucoup<br />

plus cher que les autres produits industriels. Du coup, cela permet des marges plus<br />

importantes.<br />

Un exemple représentatif en serait la bière de l’Abbaye de Saint Bon Chien qu’il produit. Il<br />

est totalement illogique de faire une bière comme celle-là, la production est très petite et<br />

chaque bouteille est numérotée. Cependant, il s’agit de la bière vendue la plus chère au<br />

litre en Suisse, et de loin.<br />

Pour la taille de la brasserie, BFM brasse un nombre important de bières différentes.<br />

D’ailleurs les investisseurs trouvent le nombre trop grand, et qu’il faudrait le diminuer<br />

pour permettre une plus grande rentabilité. Seulement, une bière comme l’Alex le Rouge,<br />

par exemple, leur a fait une énorme publicité. Sans compter que des articles sur la brasserie<br />

en elle-même sont régulièrement publiés.<br />

Avec ce grand choix de bières, ils vendent ce qu’ils produisent et non produisent ce qu’ils vendent,<br />

ce qui est sensiblement différent. Si ils produisent plus, ils vendent plus. C’est notamment<br />

pour cela qu’ils créent de nouvelles sortes (par exemple Alex Le Rouge). Bien sûr, cela<br />

complique les choses au niveau de la production, mais si ils vendent 20’000 bouteilles<br />

d’Alex Le Rouge à un prix plus élevé que les autres, c’est toujours cela de gagné. Si ils<br />

n’avaient pas produit ces bières, ils ne les auraient pas vendues. Il est donc fi nalement<br />

logique de jouer sur cette défi cience.<br />

Pour Jérôme Rebetez, il y a trois règles dans la fabrication de la bière, comme dans tout<br />

autre industrie : l’argent, l’argent et l’argent. Pour commencer, il faut de l’argent, après, il faut<br />

pouvoir réinvestir, et ensuite, continuer encore à mettre de l’argent dedans. La brasserie<br />

est donc vouée à s’expandre. D’ailleurs, l’expression brasser de l’argent n’existe pas pour<br />

rien.<br />

97<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


principes de bases de la production de BFM<br />

Outre le principe de défi cience industrielle que nous venons de citer, la brasserie<br />

fonctionne au niveau de sa production selon un schéma très précis que nous décrirons.<br />

Durant les journées de brassage, plusieurs brassins peuvent être effectués. Grâce au<br />

système et à l’organisation en place, il est possible de mettre plusieurs brassins par cuve<br />

de fermentation / garde. Leur organisation suit donc la même logique que les brasseries<br />

industrielles, contrairement aux brasseries artisanales dont la dimension des cuves de<br />

fermentation correspond généralement à celle d’un brassin. Ici, une cuve de fermentation<br />

(40 hectolitres) peut contenir 5 brassins et ainsi, être remplie en deux jours. Ceci est<br />

tout à fait possible étant donné que le levain est amorcé en premier dans les cuves<br />

de fermentation et que le moût est ensuite ajouté par-dessus. Ce système permet une<br />

fermentation très rapide tout en permettant une meilleure clarifi cation.<br />

Cette idée de mettre plusieurs brassins par cuve, et ainsi de faire plusieurs brassins par jour<br />

fait partie des idées de base et de l’organisation de la brasserie. Avoir une organisation de<br />

ce type permet de passer plus facilement à l’étape et à la dimension suivante que suggère<br />

l’agrandissement.<br />

organisation de la production actuelle<br />

Afi n de mieux comprendre l’organisation de la brasserie, il serait intéressant de décortiquer<br />

les différentes étapes qui constituent une journée type passée dans la brasserie. Ceci<br />

nous permettra de comprendre comment la brasserie est installée, de déterminer son<br />

fonctionnement, l’utilisation des espaces en fonction du temps, et de mettre en évidence<br />

les points faibles ou au contraire les points forts de leur organisation spatiale. De plus,<br />

cette analyse des différents moments de production ainsi que de leur enchaînement<br />

permettra la recherche d’une relation optimale entre ces différentes tâches.<br />

Etant donné que le futur bâtiment comprendra deux types de programmes différents,<br />

l’analyse de l’organisation nous aidera, au moment de l’élaboration du projet, à créer des<br />

relations entre un programme et l’autre, afi n de donner une certaine interactivité, mais<br />

aussi en vue d’éviter les molestations.<br />

Aujourd’hui, la brasserie ne travaille pas à plein rendement, seules deux journées de la<br />

semaine sont occupées au brassage. Ainsi, la description que nous faisons ici ne concerne<br />

que l’état actuel de la brasserie, agrémenté de quelques conseils ou idées pour le prochain<br />

bâtiment. Il faudra compter que celui-ci pourra tourner à plein rendement, et que donc,<br />

toutes les manoeuvres s’exécuteront au même moment.


Les activités de la brasserie dépendent des jours de la semaine. Nous présenterons donc<br />

ici les différentes journées correspondant à une semaine type de l’année de production<br />

en cours (2007).<br />

lundi préparation du soutirage, traversage<br />

mardi remplissage des bouteilles (soutirage)<br />

mercredi brassin<br />

jeudi brassin<br />

vendredi entretien et nettoyage<br />

Les journées en brasserie commencent au petit matin et fi nissent généralement vers<br />

17h30, en ce qui concerne les actes de brasserie en tant que tels. Cependant, il faut<br />

compter qu’une journée peut facilement s’étendre jusqu’à 18h30, c’est donc cet horaire<br />

que nous garderons par la suite.<br />

Il s’agit de la solution qui marche actuellement, mais qui comprend malheureusement<br />

deux jours improductifs. Soit les cuves ne sont pas remplies, soit elles ne sont pas vidées.<br />

Idéalement, sur ce site, il faudrait pouvoir faire tourner le système plus vite, en soutirant<br />

le lundi, brassant le mardi et mercredi, pour pouvoir ressoutirer le vendredi une autre<br />

cuve par exemple.<br />

L’entretien et le nettoyage s’effectuent le vendredi, comme dans un grand nombre de<br />

brasserie. Malheureusement, durant le nettoyage, il est impossible de produire en même<br />

temps chez BFM. Cependant, si les espaces sont séparés, alors il devient tout à fait<br />

possible de faire l’entretien en même temps que la production et ainsi ne pas perdre une<br />

journée productive. Les cuves en elle-même sont nettoyées en fi n de cycle de brassage,<br />

c’est-à-dire à la fi n des journées de brassin.<br />

99<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


_cuves de fermentation / garde _entrée des matières premières _laveuse<br />

_cuves de brassage _cuves de fermentation / garde _encaisseuse _étiquettage


_embouteilleuse _chauffe-eau _cuves de brassage: empattage_drèches_ébullition_fl ocullation _concasseur<br />

_dépôt des foudres de chêne _nettoyage des fûts<br />

101<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


privé<br />

17<br />

15<br />

14<br />

stock produit fi ni /<br />

matières premières<br />

1. espace dégustation<br />

2. cuisine<br />

3. bar<br />

à l’étage : administration<br />

4. foudres (tonneaux)<br />

5. nettoyage des fûts<br />

6. cuves de fermentation / garde (40 hecto)<br />

7. à l’étage : cuve d’empattage (cuve n° 1)<br />

au-dessous : lavage des drèches (cuve n°2)<br />

8. à l’étage : cuve d’ébullition (cuve n° 3)<br />

au-dessous : fl ocullation (cuve n° 4)<br />

9. chauffe-eaux<br />

10. laveuse de bouteilles<br />

_ plan actuel de la brasserie<br />

8<br />

7<br />

1<br />

espace clients<br />

2<br />

6<br />

6<br />

privé<br />

9<br />

3<br />

13<br />

12<br />

salle de brassage<br />

11<br />

10<br />

17<br />

4<br />

5<br />

6<br />

16<br />

11. embouteillage<br />

12. encaisseuse<br />

13. étiquettage<br />

14. shop<br />

15. stock<br />

16. entrée clientèle<br />

17. entrées / sortie livraisons<br />

sans échelle<br />

Le concasseur, la machine de mise en fûts, etc.<br />

étant des éléments mobiles, ils n’ont pas été<br />

notés ici. Lors de leur utilisation, ils sont mis<br />

en place au centre de la salle de brassage.


plan actuel de la brasserie<br />

La brasserie actuelle se divise en deux parties distinctes. La première comprend une<br />

petite partie d’accueil avec un espace de dégustation. Attenante à cet espace d’entrée, se<br />

trouve directement la salle de brassage. La deuxième partie du bâtiment présente la même<br />

surface et est occupée par du stock (matières premières et produit fi ni).<br />

description détaillée des différentes étapes<br />

lundi activités zones<br />

07h00 -17h30 préparation du soutirage, salle de brassage, zones n°0<br />

traversage, nettoyage des<br />

bouteilles<br />

4- 4 1/2 employés<br />

mardi<br />

07h00 -17h30 remplissage des bouteilles<br />

4- 4 1/2 employés<br />

mercredi<br />

05h30-06h00 concassage du malt salle de brassage, zone n°0<br />

06h30-09h00 empâtage salle de brassage, cuve n°1<br />

09h00-11h00 lavage des drèches salle de brassage, cuve n°2<br />

10h00-12h45 ébullition et houblonnage salle de brassage, cuve n°3<br />

début d’une nouveau brassin salle de brassage, cuve n°1<br />

12h45-14h00 fl oculation du trouble<br />

refroidissement<br />

14h00 remplissage de la cuve de<br />

fermentation<br />

20h00 fi n de la journée<br />

jeudi même organisation que le mercredi<br />

vendredi entretien (demi-journée)<br />

103<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


ci-dessus: shop de la brasserie et salle de brassage


opérations liées au soutirage<br />

Le soutirage correspond au remplissage des bouteilles. Il est préparé durant la journée<br />

du lundi pour pouvoir permettre de soutirer le mardi. La préparation dure moins d’une<br />

journée, il faut monter les chaînes de soutirages, apprêter les bouteilles, stériliser les<br />

tuyaux de la soutireuse, etc. Il s’agit d’une journée improductive, il faudrait donc pouvoir<br />

améliorer le planning de fabrication à ce niveau là. En ce qui concerne le nouveau bâtiment,<br />

les installations comme le soutirage qui sont aujourd’hui mobiles chez BFM deviendront<br />

des éléments fi xes avec un espace qui leur sera réservé. Ainsi, la journée de préparation<br />

du soutirage tombera et pourra être remplacée par une journée de production ou autre.<br />

La bière est mise en bouteille après la garde. Il est possible de faire ou fi ltration ou une<br />

séparation physique avant ou après la garde. BFM l’effectue après, pour pouvoir clarifi er<br />

la bière avant de la mettre en bouteilles. L’achat d’une centrifugeuse est à l’étude pour<br />

l’année suivante (méthode de séparation physique qui permet d’enlever le gros, d’ôter<br />

la partie des lies). Rappelons juste ici que la clarifi cation est le fait d’ôter le trouble de<br />

la bière, ce qui n’a rien à voir avec sa couleur, ici, c’est la limpidité qui est en cause. La<br />

clarifi cation équivaut à une baisse de la masse de levures. Comme les bières de BFM sont<br />

toutes des bières qui doivent refermenter en bouteilles, elles sont considérées comme des<br />

bières non fi ltrées.<br />

Pour une journée d’embouteillage, il est possible de faire la mise en bouteille et la fi ltration<br />

le même jour. Etant donné que cela occupe seulement certaines machines, il n’y a pas de<br />

raisons qu’il ne soit pas possible de brasser le même jour.<br />

Le soutirage s’effectue donc le mardi dans la salle de brassage, avec 4 ou 4 1/2 employés,<br />

dépendant du fait d’utiliser des bouteilles neuves ou lavées. En effet, il faut une personne<br />

pour le contrôle visuel des bouteilles, afi n de vérifi er si elles ont toutes été lavées<br />

correctement. Par contre, pour du soutirage fût, seule une personne est requise. La mise<br />

en bouteilles suit les étapes suivantes, toutes liées à la machinerie :<br />

- décaisseuse pour sortir les bouteilles réutilisées des caisses<br />

- laveuse (uniquement pour les bouteilles réutilisées)<br />

- contrôle visuel après lavage (UV, trace de soude et autres saletés)<br />

- remplissage des bouteilles à l’aide de la soutireuse<br />

- capsulage des bouteilles<br />

- rinçage<br />

- étiquetage<br />

Les bouteilles et fûts sont donc remplis durant la journée de mardi avec le contenu d’une<br />

des cuves de garde se trouvant dans la salle de brassage. Ceci permet de vider entièrement<br />

une des cuves de fermentation / garde afi n que celle-ci puisse être prête à être remplie<br />

avec des nouveaux brassins les deux jours suivants.<br />

105<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


Il n’y a pas d’embouteillage fi xe et régulier chez BFM. En effet, la brasserie connaît plutôt<br />

des diffi cultés à suivre le stock. Peut-être est-ce dû au nombre de sortes qu’ils proposent.<br />

Cependant, pour dimensionner les besoins de la nouvelle brasserie, il faudra fi xer une<br />

certaine cadence de soutirage. Aujourd’hui, la cadence se monte à 1’800 bouteilles par<br />

heure. Pour Jérôme Rebetez, il semble plus logique d’augmenter la cadence des machines<br />

pour réduire le nombre de jours de soutirage et ainsi économiser de la main d’œuvre tout<br />

en se rendant plus productif. En comptant un doublement de la production, et en utilisant<br />

une embouteilleuse tournant à 2’000-2’500 bouteilles / heure, il sera possible de tout<br />

soutirer en deux jours. La machine tournera ainsi environ 6 heures, laissant amplement le<br />

temps pour de l’entretien et du rangement en fi n de journée.<br />

La brasserie dispose de deux modèles différents de capsules : les capsules mécaniques et<br />

les capsules à couronnes. Si le système de fermeture de capsule à couronne fait partie du<br />

monobloc de remplissage des bouteilles, il n’en est pas le cas des capsules mécaniques<br />

qui sont encore aujourd’hui fermées à la force des doigts (avec un record de 10’050<br />

bouteilles en un jour pour une seule personne !). On comprend donc qu’il sera absolument<br />

nécessaire de prévoir une machinerie aussi pour ce type de capsule, et donc augmenter la<br />

surface liée au soutirage.<br />

ci-dessus: superposition des cuves selon le principe de verticalité


Le soutirage fûts, quant à lui, est séparé du soutirage bouteilles puisque ce sont d’autres<br />

machines qui sont utilisées (une laveuse et une remplisseuse de fûts). Normalement, il est<br />

possible de réunir les deux en une machine ; c’est ce qui sera à prévoir. Le soutirage-fût et<br />

le soutirage-bouteilles ne prennent que peu de place au niveau des machines et de l’espace<br />

de circulation. Normalement, une machine de fût peut vider une cuve en une journée en<br />

n’utilisant qu’une personne.<br />

Si l’on peut prévoir la cadence de soutirage bouteilles, il n’est malheureusement pas<br />

possible de le faire pour les fûts. On ne peut pas prévoir de données plus précises de ce<br />

côté-là puisque la distribution des fûts dans les bars en Suisse est trop contrôlée par les<br />

grands groupes brassicoles.<br />

Au niveau du soutirage, toutes les machines vont devoir être changées puisque la cadence<br />

de la brasserie va doubler. Il faudra donc prévoir les espaces en fonction. Ceux-ci devront<br />

être disposés le plus près possible de la salle de garde, ceci pour limiter la longueur des<br />

tuyaux d’acheminement de la bière. De plus, cette salle devra aussi se trouver à proximité<br />

du stock pour pouvoir charger rapidement les bouteilles vides mais aussi y déposer<br />

facilement les bouteilles une fois remplies. Le stock de bouteilles pleines se disposera en<br />

toute logique à proximité de la sortie du stock pour permettre le chargement.<br />

Notons fi nalement, que le soutirage est l’action de la brasserie qui produit les nuisances<br />

sonores, le reste étant tout à fait supportable voire silencieux, nous le verrons ensuite.<br />

Dans la future brasserie, il faudrait donc pouvoir séparer le soutirage du reste pour<br />

permettre un meilleur rendement de la brasserie afi n de ne pas gêner les autres activités.<br />

activités liées au brassage<br />

Les activités de brassage ont lieu les mardi et mercredi, il s’agit des journées les plus<br />

fatigantes pour un brasseur étant donné leur longueur et la somme des manœuvres<br />

exécutées. Ce sont aussi pour nous, les journées les plus importantes à comprendre étant<br />

donné qu’il s’agit de l’activité principale de la brasserie qui sera mise en relation par la<br />

suite avec l’espace de dégustation et de restauration.<br />

Un brassin en tant que tel dure entre 6 et 6 1/2 heures, et plusieurs brassins sont préparés<br />

à la suite durant la journée. Il faut compter un peu moins de 12 heures (entre 10 1/2 -11<br />

heures) pour faire deux brassins d’affi lée. Un brasseur peut s’occuper d’un double cycle<br />

en entier. Cependant, comme il est assez fréquent de faire trois brassins par jour, le<br />

travail se partage en deux équipes de 2 fois 8 heures. Une grande journée de brassage<br />

comprenant 3 brassins se termine en général aux alentours de 20 heures.<br />

L’organisation de la brasserie a l’avantage de permettre d’enchaîner le second brassin<br />

107<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


alors que le premier n’est pas encore terminé. En effet, au moment du refroidissement<br />

du moût, on aura déjà commencé un nouveau cycle de brassin puisque la première cuve<br />

(empâtage) aura été vidée.<br />

Le brassin en tant que tel est constitué des étapes suivantes :<br />

horaire activité outil<br />

5h30-6h00 concassage du malt concasseur<br />

6h30-09h00 empâtage cuve d’empattage<br />

9h00-11h00 fi ltration etlavage des drèches cuve de lavage<br />

9h30-12h45 ébullition et nettoyage cuve d’ébullition<br />

de la cuve de fermentation cuve de fermentation<br />

12h45-14h00 fl oculation du trouble et cuve de fl oculation<br />

refroidissement du moût échangeur à plaques<br />

14h00 remplissage des cuves de cuves de fermentation<br />

fermentation<br />

Toutes ces étapes s’effectuent actuellement chez BFM dans la salle de brassage, cependant<br />

il sera judicieux au moment du projet de séparer les espaces.<br />

_concassage du malt<br />

Pour une grande journée de brassage correspondant à trois brassins, le concassage<br />

commence entre 5h30 et 6 heures du matin. Il s’agit donc de la première opération à<br />

effectuer sur les deux journées de brassin. Il a lieu dans la salle de brassage au moyen<br />

d’une machine sur roulette que l’on transporte et dispose dans la partie d’espace libre de<br />

la salle de brassage.<br />

Il est cependant recommandé de disposer pour le concassage d’une salle attenante en<br />

raison de la grande poussière produite par le concassage des grains. Ensuite, il suffi rait<br />

de convoyer la farine obtenue. Le charriage du grain n’est pas un élément compliqué, un<br />

simple système de chaînes et de tuyaux suffi t. Le transport de la farine, au contraire de<br />

celui du grain entier dont l’enveloppe doit rester intacte, ne nécessite pas beaucoup de<br />

soins.


_saccharifi cation / empâtage<br />

Une fois le concassage effectué, l’empâtage peut commencer, soit vers 6h30 et dès que<br />

l’eau des cuves a atteint 50°C. Il se fait dans la cuve d’empâtage située avec la cuve<br />

d’ébullition, en surélévation de la cuve de lavage des drèches. La farine est disposée dans<br />

des sacs et montée à l’étage avec un élévateur mobile.<br />

A partir de l’empâtage, toutes les activités peuvent s’effectuer dans la même salle pendant<br />

les 6-7 heures suivantes du brassin.<br />

Pour des raisons de simplicité de transfert du moût d’une cuve à une autre, il est nécessaire<br />

que les cuves d’empâtage, de fi ltration et d’ébullition se situent au même endroit et de<br />

manière contiguë selon leur position dans les étapes de brassage. De plus, l’eau amenée<br />

dans la cuve provient d’un chauffe-eau situé à proximité. Le système de chauffe eau dans<br />

les grandes brasseries ou brasseries totalement équipées est remplacé par un générateur<br />

de vapeur qui alimente la brasserie en chaleur.<br />

_ fi ltration et lavage des drèches<br />

Le lavage des drèches emploie lui aussi une seule personne. Il s’agit de récupérer le<br />

premier jus, et de relaver ensuite les drèches pour récupérer un maximum d’extraits. La<br />

cuve utilisée se situe sous la cuve d’empâtage. Lorsque l’empâtage est terminé, le bas de<br />

la cuve est ouvert, permettant au liquide de tomber à l’étage inférieur, directement dans la<br />

cuve de lavage des drèches. Le liquide est partiellement fi ltré par les drèches. Le fond de la<br />

cuve est percé d’une infi nie de trous permettant l’écoulement du liquide tout en gardant<br />

les drèches. Le premier liquide est récupéré et transvasé dans une seconde cuve mobile.<br />

On rajoute ensuite de l’eau aux drèches restées au fond de la cuve pour procéder à leur<br />

lavage. Cette opération ne nécessite qu’une personne, qui remue l’ensemble de la pâte à la<br />

main. La future brasserie changera ce système, le lavage des drèches se faisant de manière<br />

automatique permettant de rentabiliser le temps de lavage et de libérer un employé.<br />

Le lavage des drèches d’un brassin commencé à 6h30 a lieu à partir de 9h00 et dure<br />

jusqu’à 11h00. Le lavage se fait en même temps que le début de l’ébullition dans la<br />

troisième cuve.<br />

_ébullition<br />

Le liquide obtenu après la fi ltration passe ensuite dans la cuve d’ébullition située au niveau<br />

supérieur, à côté de la cuve d’empâtage. La cuve est chauffée à l’aide d’un système de feu<br />

direct fi xé sous la cuve qui sera remplacé dans le futur par le système de générateur de<br />

vapeur alimentant toute la brasserie. L’ébullition commence vers 9h30 et se termine vers<br />

109<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


1<br />

2<br />

3<br />

entrée / sortie stock<br />

acheminement matières<br />

concassage<br />

1<br />

_ chemin de brassage<br />

sans échelle<br />

4<br />

5<br />

6<br />

empâtage<br />

lavage des drèches<br />

ébullition<br />

2<br />

7<br />

5<br />

6<br />

4<br />

05h30<br />

14h00<br />

9<br />

09h30<br />

12h45<br />

06h30<br />

09h00<br />

7<br />

8<br />

9<br />

flocullation<br />

refroidissement<br />

fermentation<br />

8<br />

13h30<br />

06h00<br />

3<br />

9<br />

14h00<br />

14h00<br />

9


1<br />

2<br />

3<br />

amenée bouteilles<br />

lavage<br />

embouteillage<br />

7<br />

4<br />

5<br />

6<br />

1<br />

6<br />

encaissage<br />

étiquettage<br />

retour au stock<br />

7<br />

2 bis<br />

3<br />

3<br />

2<br />

bis<br />

stock extérieur bouteilles sales<br />

5<br />

4<br />

sortie produit fini<br />

lavage des fûts<br />

remplissage des fûts<br />

3<br />

bis<br />

2 bis<br />

chemin de soutirage _<br />

sans échelle<br />

111<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


_ concassage<br />

_ lavage des drèches<br />

_ brassage des drèches et de l’eau<br />

_empâtage<br />

_écoulement de la cuve d’empattage à la<br />

cuve de lavage des drèches<br />

_ mise en place des tuyaux flexibles<br />

et amovibles pour les transvageages


_cuve d’ébullition : houblonnage<br />

_ installation du filtre à plaques<br />

pour le refroidissement du moût<br />

_ pompe<br />

_écoulement vers la cuve de flocullation<br />

_nettoyage de la cuve de fermentation<br />

avant remplissage<br />

vers la fermentation et ensuite la<br />

garde, toujours dans les mêmes<br />

cuves, avant de pouvoir soutirer<br />

environ 3 semaines plus tard ...<br />

_ étapes en images<br />

113<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


12h45. L’opération ne nécessite qu’une personne. Pendant l’ébullition, on procède au<br />

nettoyage de la cuve de fermentation qui sera remplie par la suite. Celle-ci ayant été vidée<br />

la veille au moment du soutirage, elle est ainsi prête à recevoir un nouveau brassin.<br />

_fl oculation du trouble et refroidissement<br />

Une fois l’ébullition terminée, le moût est transvasé à l’étage inférieur, dans une quatrième<br />

cuve, située à côté de la cuve de lavage des drèches. Le transfert se fait de la même manière<br />

que le passage entre la cuve d’empâtage et la cuve de lavage des drèche. Le fond de la<br />

cuve est ouvert et le liquide tombe directement dans la cuve inférieure. Ce système de<br />

verticalité sera sûrement remplacé dans la future brasserie par un alignement horizontal<br />

des cuves.<br />

La fl oculation dure ¾ d’heure. Ensuite, le moût est passé dans un échangeur à plaques qui<br />

en permet de le refroidir avant de passer en cuve de fermentation. Le refroidissement du<br />

moût, quant à lui, dure ½ heure. La fl oculation peut aussi s’effectuer dans un whirlpool,<br />

qui sera l’un des prochains achats de la brasserie.<br />

Après la clarifi cation du trouble, c’est au tour d’un nouveau cycle de commencer. Trois<br />

heures plus tard, on peut compter que le prochain cycle sort de la cuve de brassage. A<br />

partir de là, on peut faire autant de cycles que l’on veut. BFM se limite à trois cycles par<br />

journées de brassin afi n d’avoir des horaires de travail acceptables. Cependant, dans de<br />

nombreuses brasseries, les brassins tournent 24/24h (par exemple la brasserie valaisanne<br />

à Sion). On peut donc supposer que cette notion de rendement de l’équipement peut<br />

constituer une possibilité d’augmentation importante de la production.<br />

_remplissage des cuves<br />

Un seul brasseur est nécessaire au moment du remplissage des cuves. La salle de brassage<br />

des Franches-Montagnes la capacité de produire 9 hectolitres. La majorité de leurs cuves<br />

de fermentation et de garde comprennent 40 hectolitres. Pour en remplir une dans son<br />

entier, il faut donc réunir 5 brassins de 9 hectolitres.<br />

Si tout se passe bien, le passage du moût dans les cuves de fermentation commence à<br />

14h00 pour être ensemencé. En haute fermentation, la bière restera 5 à 6 jours en cuve,<br />

pour une basse fermentation, il faut doubler le temps, donc 12 jours.<br />

Après la fermentation, on passe en garde directement, sans changer de cuve. Une cuve<br />

de fermentation pouvant tout aussi bien servir de cuve de garde, il est plus logique de<br />

laisser la bière où elle se trouve. Ici, le prochain système de centrifugation prévu sera<br />

particulièrement utile. En effet, il permet d’économiser beaucoup de kilowatts sur la


garde ; au lieu de refroidir 20’000 litres à 2°C pendant trois semaines, on peut les garder à<br />

la même température, passer à la centrifugeuse, la bière est ensuite clarifi ée, ce qui permet<br />

d’effectuer une garde à chaud (entre 15°-20°C). Au niveau du process, cela apporte aussi<br />

un gain de temps appréciable sur la prise de mousse. En effet, si l’on a une bière qui se<br />

trouve à 4°C, il faut compter deux trois jours pour que les levures s’activent après avoir<br />

remonté la température de la bière à 18°-20°C.<br />

_garde<br />

Il faut donc compter entre 15 jours et trois semaines de garde. Elle consiste en un<br />

refroidissement de la bière après fermentation. La salle de garde n’a pas besoin de se<br />

trouver au frais, comme tous les sucres ont été consommés par les levures, il est possible<br />

de conserver les cuves à température ambiante sans craindre une refermentation.<br />

gênes de la brasserie, points faibles<br />

Lorsque l’on demande à Jérôme Rebetez quelles sont les gênes au niveau de la brasserie,<br />

il nous répond : « tout ! ». Il y a donc passablement de choses à améliorer :<br />

résoudre le problème du stock extérieur en hiver qui se retrouve inaccessible à<br />

cause de la neige<br />

problème avec le parc de casiers (nombre de caisses qui circulent). Trop de<br />

casiers sont dérobés, y compris dans le stock extérieur. Il faudrait donc trouver<br />

un système de fermeture de ce stock.<br />

hauteur de plafond du stock intérieur trop bas (4,5m). Avec un élévateur, il serait<br />

possible de se permettre deux ou trois hauteurs de plus. Avec la hauteur de<br />

plafond actuelle, BFM a été obligée de réduire le nombre de caisses par palettes<br />

afi n de pouvoir mettre une palette de plus en hauteur, permettant ainsi de mettre<br />

trois groupes de palettes verticales, mais il s’agit palettes non suffi samment<br />

remplies. Il y a donc une perte de rentabilité du sol au niveau du stock à cause<br />

d’une hauteur de plafond inadaptée.<br />

Il faudrait donc que le plafond de la prochaine brasserie permette une hauteur<br />

utile de stock de 6 mètres au lieu des 4,30 mètres actuels. De plus, il est<br />

important que ce plafond soit le plus plat possible, du moins qu’aucun objet<br />

(luminaires suspendus par exemple) ne viennent interférer dans cette hauteur de<br />

6 mètres.<br />

115<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


_ stock extérieur (casiers, bouteilles sales etc.) inaccessible en hiver à cause de la neige<br />

_ les machines mobiles disposées au centre de la salle de brassage perturbent l’organisation linéaire<br />

_ gênes principales au niveau des espaces


nouveau bâtiment, nouveau programme<br />

La projection d’un nouveau bâtiment pour la brasserie s’accompagne de la proposition<br />

d’une double programmation. Même si le bâtiment restera voué à la production, nous<br />

souhaitons l’augmenter d’un second programme correspondant à espace de dégustation<br />

et de restauration. Ce choix a été motivé à la base pour attirer une plus grande clientèle et<br />

apporter une valeur ajoutée à la brasserie.<br />

Malheureusement, de nombreuses micro-brasseries ou brasseries artisanales ont toujours<br />

de la peine à pouvoir se distribuer, tout autant en Suisse que dans les autres pays. La<br />

situation helvétique s’est révélée problématique dans les années 40-50, où la chasse à<br />

l’hectolitre, grande période de concurrence, a vu de nombreuses brasseries mettre la clef<br />

sous la porte. Si cette époque est terminée, elle a pourtant laissé des traces. Les bars<br />

étant souvent liés par contrat à de grands groupes, il leur est impossible de proposer des<br />

bières artisanales. Seuls quelques bars qui ont su limiter leur contrat d’exclusivité avec les<br />

grandes marques brassicoles peuvent aujourd’hui proposer leur bière sans risques. De<br />

plus, la production des brasseries artisanales étant limitée, cela ne leur permet pas non<br />

plus de pouvoir être distribuées dans les grandes surfaces.<br />

La double programmation a aussi l’avantage de pouvoir faire connaître la brasserie<br />

plus facilement des gens s’y arrêtant pour dîner ou simplement boire un verre, tout en<br />

proposant une revalorisation de la bière. En effet, comme nous l’avons vu dans le premier<br />

<strong>fascicule</strong>, la bière est une boisson sociale et populaire, mais qui souffre malheureusement<br />

d’une dépréciation face à d’autres alcools jugés plus fi ns comme le vin. Or, nous avons<br />

vu que la bière offre une multitude de facettes, d’arômes et que la symbolique qui<br />

accompagne le brassage, tout autant que sa production n’ont rien à envier au vin. Tout<br />

comme il est possible de mettre en avant les goûts et arômes du vin par l’association mets<br />

et vin, il est possible de créer des alliances étonnantes avec la bière. Quelques restaurants<br />

l’ont compris, et se sont d’ailleurs spécialisés dans la mise en avant de la bière. Citons<br />

par exemple ‘t Hommelhof à Watou, près de Westvleteren ou bien le restaurant de l’hôtel<br />

Erasmus à Brugge...<br />

« L’association d’un chocolat au lait à la cannelle et d’un lambic Bruocsella 1999 de Cantillon est<br />

inoubliable. Le mariage d’un chocolat noir à la violette et d’une Kriek normale est tout aussi splendide.<br />

Côté plats, accompagnez une poitrine de faisan rôtie, servie avec une mousseline de pomme de terre au<br />

pain d’épices, d’une Chouffe, et vous vous mariez dans les trois semaines. »<br />

(Entretien avec Eric Boshman, œnologue, in Brasseurs d’ici)<br />

Cette association entre production et dégustation n’est pas sans rappeler la confi guration<br />

des brasseries urbaines du moyen âge. Il ne s’agit pas ici de proposer un retour vers le<br />

passé, mais plutôt d’en proposer une réinterprétation actuelle s’adaptant parfaitement au<br />

type des brasseries artisanales dont la taille modeste permet facilement le contact.<br />

117<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


Les machines et la technique sont parties<br />

intégrantes de la fabrication et du<br />

développement de la bière au cours de<br />

son histoire, créant ainsi un paradoxe<br />

pour la défi nition de l’artisanat dans la<br />

brasserie actuelle.<br />

_ la question de l’artisanat<br />

1.<br />

2.<br />

3.<br />

4.<br />

5.


Nous avons vu précédemment qu’il existe de nombreuses micro-brasseries urbaines qui<br />

proposent un lien entre production et dégustation. Ici, nous voulons mettre l’attention<br />

sur le fait que la relation entre ces deux espaces, dans le cadre du projet, est différente.<br />

En effet, il s’agit d’une brasserie qui a sa propre production distribuée à l’extérieur et qui<br />

se propose, pour des raisons de proximité avec la clientèle, mais aussi d’image, d’installer<br />

un espace de dégustation / restauration dans son propre espace. Ainsi la logique est<br />

inversée : le café produit pour son propre débit tandis que la brasserie produit pour un<br />

marché extérieur et installe un restaurant dans sa propre production, développant ainsi<br />

un débit propre. Il ne s’agit donc pas de cuves que l’on installe parmi les gens, mais de<br />

personnes que l’on va faire entrer dans un lieu de production.<br />

questionnement autour du caractère artisanal<br />

Nous avons vu lorsque nous parlions des différents types de bâtiments de brasseries,<br />

que ces nouvelles brasseries artisanales constituent le nouveau type émergeant. Sachant<br />

qu’un certain nombre a connu un franc succès, il est nécessaire de s’interroger sur leur<br />

agrandissement, ainsi que sur le type de bâtiment qui correspondra à leurs besoins. Ces<br />

brasseries ont fondé une part de leur succès sur leur petite taille avec une production<br />

presque exclusive ainsi qu’un mode de production dit artisanal. Il est donc nécessaire<br />

de s’interroger sur ces deux termes pour la planifi cation d’un agrandissement, afi n de<br />

proposer un bâtiment, une nouvelle structure qui ne contredise pas les principes mêmes<br />

de la brasserie.<br />

Le terme d’artisanat a une forte connotation souvent liée à un terroir et à une région.<br />

Cependant, cette notion est passée depuis quelques années comme une véritable<br />

marque de fabrique, soutenant le produit et lui apportant une valeur ajoutée auprès des<br />

consommateurs.<br />

A l’heure de l’agrandissement de la brasserie, il y a lieu de se poser quelques questions sur<br />

la signifi cation des termes artisanat, artisanal et artisan. En regardant le Petit Robert 2008,<br />

on découvre que :<br />

- l’artisan est une personne qui exerce un métier manuel à son propre compte<br />

- l’adjectif artisanal se rapporterait à l’artisan ou à ce qui n’est pas industrialisé<br />

- l’artisanat fi nalement est le métier, la condition d’artisan ou encore l’ensemble des<br />

artisans.<br />

En parlant d’artisanat, on a souvent tendance à penser que le terme se rapporte donc<br />

à des choses produites à la main. Pour la brasserie, cela correspondrait au fameux tour<br />

119<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


de main dont nous parlions dans la première partie. Cependant, avec l’évolution des<br />

machines et des techniques dans le monde brassicole, il ne reste plus grand monde qui<br />

brasse encore ainsi. Par conséquent, il devient fortement diffi cile de défi nir la notion<br />

d’artisanat en brasserie.<br />

Jérôme Rebetez défi nirait plutôt cette notion comme la personnalité mise dans le produit.<br />

La personne qui développe les recettes de bière travaille-t-elle toujours dans la brasserie,<br />

est-elle impliquées dans les brassins ? C’est l’aspect humain qui transparaît dans cette<br />

personnalité, celle d’un brasseur voulant donner un caractère à sa bière, faire un produit<br />

qui lui corresponde.<br />

L’artisanat se défi nirait donc comme la personnalité mise dans le produit, et ceci, sans<br />

rapport à la quantité produite. Par exemple, Jérôme Rebetez considère les 3 Brasseurs<br />

comme quelque chose de nullement artisanal, bien que l’adjectif soit écrit en grand sur la<br />

devanture. Les 3 Brasseurs sont en quelque sorte l’antithèse de la Brasserie des Franches-<br />

Montagnes : pas d’éducation du consommateur et un produit cher de piètre qualité.<br />

Rien chez eux n’invite les gens à s’intéresser à la bière artisanale puisque même la bière<br />

industrielle a plus de goût et de caractère que ce qu’ils produisent. L’artisanat, c’est aussi<br />

savoir mettre en avant son produit, pouvoir expliquer comment il a été fait, et quels sont<br />

les éléments particuliers qui lui donnent tout son goût, sa couleur, sa saveur, etc.<br />

De plus, toujours selon Jérôme Rebetez, ce n’est pas parce qu’un établissement se réclame<br />

de l’artisanat qu’il ne peut pas croître et s’expandre (du moins en brasserie). L’artisanat<br />

n’est pas voué à rester petit. La brasserie, bien qu’artisanale, est une entreprise qui se<br />

développe. La brasserie, par sa forme et sa production, se rapporte à l’industrie ; il y a<br />

peut-être là un paradoxe entre la base même de la production actuelle de la bière et la<br />

notion d’artisanat. Inversement, si l’artisanat signifi e pour certains une petite production,<br />

ce n’est pas parce qu’une brasserie produit peu que l’on peut parler d’artisanat.<br />

Finalement donc, nous résumerons la qualité d’artisanat par l’implication que le brasseur<br />

met dans son produit, sur sa personnalité en vue de produire une bière de caractère, tout<br />

le contraire d’un produit standardisé. Ainsi, même si la brasserie des Franches-Montagnes<br />

s’agrandit, elle ne perdra pas son caractère artisanal tant que le brasseur continuera de<br />

créer et de travailler ces bières. Le choix de bières proposé par BFM est important, il est<br />

tout le contraire d’une brasserie produisant une bière standardisée en masse. La question<br />

sur l’artisanat et l’industrie pourrait donc être remplacée par les notions de caractère, de<br />

personnalité et d’implication.


caractère du bâtiment<br />

L’espace occupé actuellement par BFM correspond aux nombreux bâtiments industriels<br />

actuels : structure métallique et bardage de tôle ondulée. En proposant un nouveau<br />

bâtiment, il y a lieu de s’interroger son caractère. Pour de nombreuses entreprises, le<br />

bâtiment apporte un surplus à leur image de marque, à leur représentation. BFM brassant<br />

des bières de caractère, leur bâtiment se devra de représenter cette personnalité.<br />

Nous venons d’aborder le sujet de la croissance de la brasserie et de son caractère<br />

industriel ; le nouveau bâtiment suivra cette logique d’entreprise, en proposant une<br />

construction elle aussi basée sur des éléments industriels. La bière étant un produit avant<br />

tout populaire, elle n’appelle pas les matériaux nobles, il s’agit de quelque chose de simple.<br />

Nous nous interrogerons sur l’aspect de ce bâtiment dans les chapitres concernant les<br />

interrogations et volontés de projet.<br />

Stimmung et ambiance de brasserie<br />

Une grande et longue table ainsi qu’un bar ont été installés dans la brasserie actuelle, afi n<br />

que les gens puissent s’asseoir entre eux et discuter. La bière est la boisson sociale par<br />

excellence, on aime à voir ce côté convivial que l’on retrouve facilement en Bavière ou<br />

en Tchéquie, de ces gens tous assis à la même table. La grande table permet la rencontre,<br />

l’échange de quelques mots autour d’une bière.<br />

Les espaces réservés à la clientèle voudront donc suivre ce principe de convivialité. Bien<br />

sûr, il est impossible de proposer uniquement des grandes tables, cependant, on essaiera<br />

d’éviter de créer des espaces appelant l’individualité et le chacun-sa-table.<br />

La brasserie, par son aspect social ne doit pas être quelque chose de guindé, mais ce<br />

n’est pas non plus quelque chose de vulgaire, d’ailleurs John Grand Carteret s’opposait<br />

à l’axiome la brasserie sera pornographique ou ne sera pas ! (John Grand Carteret in préface de<br />

Raphaël et Gambrinus, p.21). La brasserie se doit d’être simple et authentique comme<br />

son brasseur.<br />

On trouvera donc dans la brasserie un espace de dégustation ainsi qu’un espace de<br />

restauration différencié. On peut donc se poser la question de l’ambiance à donner à de<br />

tels lieux. Nous avions vu dans l’histoire des bars et estaminets, que le bois semblait être<br />

un des matériaux prépondérants. Seulement, nous ne nous trouvons pas ici dans le cas<br />

d’un bistrot qui produit sa propre bière, mais d’une brasserie qui propose, attenant, un<br />

programme de restauration et de dégustation. Cette différence, infl uera donc sur l’aspect<br />

121<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


_ caractère du bâtiment<br />

la brasserie est devenue un élément industriel. ci-dessus: les étapes de la construction de<br />

la halle métallique abritant la brasserie Aarebier.


des espaces de dégustation / restauration. Même si les deux doivent se distinguer par<br />

la nature de leur affectation, il n’empêche qu’ils font partie d’un bâtiment à caractère<br />

industriel, qui infl uera fortement sur leur aspect. Entre les différents entretiens avec<br />

Jérôme Rebetez, nous avons conclu qu’un espace pour la bière n’est pas forcément en<br />

bois, même s’il en a presque toujours été ainsi. L’espace ne se caractérise pas par son<br />

matériau mais par sa convivialité. Par contre, sa matérialité ainsi que son agencement<br />

infl uencent sur le côté social et convivial.<br />

relation entre production et dégustation<br />

La relation entre les deux sera donc particulièrement traitée lors du projet. Les grandes<br />

caves à vin mettent toujours l’accent des salles de dégustation sur la vue sur les foudres,<br />

alors que la masse de leur production les oblige, derrière et caché du public, à avoir toute<br />

une machinerie moderne allant avec l’ampleur de leur production. Ils se cachent derrière<br />

les fûts en chêne, et derrière cette vision qui est très traditionnelle, sans montrer la réalité<br />

de la production.<br />

Que veut-on montrer aux gens, leur donner à voir ? Il y a une certaine vérité, quelque<br />

chose qui est intéressant ; il me paraît dommage de cacher tout ce processus. Ici, en<br />

amenant les gens dans la brasserie, il s’agit de leur montrer ce qu’il en est réellement.<br />

Nous ne voulons pas créer une image romantico-antiquisante de la bière. Cette boisson a<br />

une âme, elle implique dans la mémoire collective un certain type d’espace correspondant<br />

à l’estaminet traditionnel.<br />

Cependant, il ne faut pas s’arrêter sur ces images, au risque de tuer l’évolution de la bière.<br />

Nous voulons donc proposer aux gens, de pouvoir voir, tout en dégustant, comment<br />

leur bière est produite. Si cette relation entre les deux programmes est possible dans<br />

toutes les brasseries du monde, ici la relation prend un sens différent. L’accent sera bien<br />

entendu mis sur la salle de brassage, véritable fl euron de toute brasserie. (Il est évident<br />

que l’on ne placera pas les gens à côté de l’embouteillage, d’une part à cause des nuisances<br />

sonores, mais surtout parce qu’il n’est pas beaucoup plus palpitant que cela de regarder<br />

des bouteilles défi ler.)<br />

Nous verrons aussi qu’il y existe toute une série de gênes qui peuvent apparaître entre la<br />

production et la dégustation/restauration (bruit, chaleur, vapeur, etc.). Il faudra trouver<br />

une façon dans le projet de lier les deux espaces, une fonction plutôt privée et une autre<br />

plutôt publique, dans laquelle les brasseurs doivent pouvoir faire leur travail, circuler,<br />

crier, etc. Oui, par exemple, à la brasserie des Franches-Montagnes on crie souvent pour<br />

pouvoir communiquer malgré le bruit, mais aussi pour se parler d’une salle à l’autre…<br />

Au niveau des horaires des deux espaces, nous avons vu que les journées de brasseries<br />

123<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


se fi nissent en général vers 18h30, ce qui coïncide avec le début de l’apéritif. On peut<br />

compter que le gros de la clientèle de la soirée arrivera à partir de 19h, donc au moment<br />

où il ne se passe plus rien dans la brasserie, laissant donc une période plus calme pour les<br />

dégustations du soir et les dîners. Cependant, tout le reste de la journée, la brasserie est<br />

en activité, c’est donc en fonction de ce moment là qu’il faudra le mieux gérer la relation<br />

entre les deux espaces.<br />

Si la dégustation nécessite une ambiance plus calme, nous pouvons imaginer de l’installer<br />

près des foudres et des cuves de fermentation / garde. En revanche, l’espace de<br />

restauration, quant à lui, n’a pas besoin de tant de calme et c’est lui que nous placerions<br />

en relation avec la salle de brassage, créant ainsi, entre la dégustation et la restauration,<br />

deux ambiances par deux types de vues et d’espaces différents.<br />

Pour que le concept de vue soit attrayant, il faut qu’il y ait de l’activité tous les jours. Il faut<br />

éviter à tout prix de reproduire le cliché de la salle de brassage dans les brewpub, car nous<br />

nous trouvons ici dans une logique inverse. Par la vue sur la salle de brassage d’une vraie<br />

production de bière, on peut amener la clientèle à voir les différentes étapes en chaîne de<br />

production de la bière, créer une sorte de vision didactique.<br />

Ce double programme se veut comme une sorte d’attrait, on veut montrer, pousser<br />

les gens à comprendre ce qu’il y a dans leur verre et à se poser des questions. C’est<br />

exactement le rôle que les brewpub prétendent avoir mais ne tiennent pas. Ce sera un<br />

espace social et convivial selon la caractéristique de la bière, lié à une brasserie qui assume<br />

le côté industriel de la production.<br />

Ainsi, le bâtiment ne sera pas expressément prévu en fonction de la dégustation et de la<br />

restauration afi n de leur créer une certaine Stimmung ; on veillera en premier à régler les<br />

questions liées aux espaces de production dans les meilleures conditions possibles. Ce<br />

n’est seulement que dans un deuxième temps, que le second programme sera agencé en<br />

créant des liens avec la production, mais aussi en venant modifi er la première organisation<br />

mise en place jusqu’à arriver au plan du projet.<br />

gênes pour la dégustation / restauration<br />

Bien évidemment, étant donné que l’on se situe dans un bâtiment à caractère industriel,<br />

on peut se poser la question du bruit ainsi que des autres désagréments au sein du<br />

bâtiment. En effet, si les ouvriers travaillent dans cette ambiance, qui peut être améliorée<br />

en séparant certaines fonctions (en particulier l’embouteillage), les personnes fréquentant<br />

les espaces de dégustation ou de restauration ne voudront pas forcément être dérangées<br />

par le bruit et la chaleur de la production.


Le soutirage constitue l’acte le plus bruyant de la brasserie, à cause du transport<br />

des bouteilles, du compresseur de la machine qui fonctionne, et des bouteilles qui<br />

s’entrechoquent. Il est donc évident que les espaces réservés à la clientèle ne seront pas<br />

disposés à proximité. Nous avons vu aussi qu’avec un générateur de vapeur, en tant que<br />

système de chauffage des cuveries de brassage, il était possible d’éliminer les problèmes<br />

liés au bruit, permettant ainsi de placer les espaces publics en contact direct.<br />

Cependant, même si la salle ne constitue plus un problème sonore, le brassage produit<br />

une grande quantité de chaleur et de vapeur dont il faudra tenir compte en disposant les<br />

espaces de restauration / production. Il faudra veiller dans la forme du bâtiment ainsi que<br />

dans les installations techniques à régler au mieux les problèmes de circulation des fl ux.<br />

prévisions pour l’agrandissement<br />

BFM produit un peu plus de 1000 hectolitres par an et envisage d’augmenter la production<br />

chaque année de 250 hectolitres et ceci, jusqu’à arriver à 2000-2500 hectolitres. En<br />

fonction, le chiffre d’affaire annuel en 2007 oscille entre 650’000 – 700’000 CHF avec<br />

pour objectif une augmentation de 200’000 CHF de croissance par an. Pour le nouveau<br />

bâtiment, on peut donc considérer une production de 3500-4000 hectolitres par an<br />

compte tenu que l’on doublerait la capacité de la salle de brassage (passant de 9 hecto à<br />

20 hectolitres).<br />

Pour Jérôme Rebetez, déplacer la brasserie répond à un besoin pratique. En même temps,<br />

ce déménagement accompagné de la construction d’un nouveau bâtiment, est l’occasion<br />

d’augmenter la production. Ceci impliquerait une révision totale de la brasserie, car<br />

l’augmentation de la production et le déménagement impliquent un changement complet<br />

de la machinerie.<br />

Pour être rentable, une brasserie ne devrait pas faire moins de 1000 litres par brassin.<br />

Entre 1500 et 2000 litres, la production est déjà bien acceptable. Une bonne salle de<br />

brassage qui ferait 20 hectolitres présente un coût entre 300’000 et 400’000 CHF. En<br />

fonction de la production annuelle, le coût du renouvellement des machines n’est pas<br />

si cher. Ainsi, les prévisions pour l’agrandissement se feront en fonction d’une salle de<br />

brassage de 20 - 25 hectolitres.<br />

La production de BFM a augmenté de 30% entre 2006 et 2007. Pourtant, ils ont continué<br />

à avoir des ruptures de stock. Plus ils produisent, plus ils vendent. Selon cette logique,<br />

on peut imaginer dire qu’ils vendront tout ce qu’ils pourront produire en doublant de<br />

capacité, même si ce sont des choses absolument imprévisibles.<br />

125<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


_ implications d’un agrandissement<br />

augmentation de la capacité de la salle de<br />

brassage de 9 hectos à 20 hectolitres<br />

doublement de la surface de 600 m2 à<br />

1000 m2<br />

investissement dans du nouveau matériel<br />

changement d’implantation de site<br />

ajout d’une seconde programmation :<br />

dégustation / restauration<br />

rester dans une logique d’image et de croissance<br />

industrielles


Aujourd’hui, la brasserie n’est pas encore utilisée avec un rendement complet. Cependant,<br />

il est nécessaire de calculer les besoins du prochain bâtiment en fonction d’une utilisation<br />

à 100% du bâtiment. Ceci car nous savons que le bâtiment au début ne sera pas utilisé<br />

dans l’entier de ces capacités. Cette question d’utilisation du bâtiment est importante dans<br />

ce projet à caractère industriel, puisque la brasserie est vouée à s’agrandir dans le temps.<br />

Il faut donc pouvoir prévoir au mieux son agrandissement.<br />

matériel<br />

Le besoin en matériel et en surface dépend de la production (hectolitres / an) prévue<br />

pour la nouvelle brasserie. Nous avons vu précédemment qu’une salle de brassage de<br />

20 - 25 hectolitres semblait être une bonne moyenne pour un agrandissement. En toute<br />

logique, BFM garderait des multiples de ce qu’ils font déjà. Au lieu de faire des brassins<br />

de 9 hectolitres pouvant remplir en 5 fois des cuves de 40 hectolitres, il serait possible<br />

avec une salle de brassage de 20-22 hectolitres de remplir une cuve en 2 brassins et ainsi,<br />

doubler le rythme de production. En général, on dit qu’il faut effectuer une multiplication<br />

par 4 pour gagner vraiment du temps. Donc la salle de brassage idéale devrait faire en<br />

20 et 40 hectolitres.<br />

Si on augmente le nombre de cuves, le nombre de machines, quant à lui, ne devrait pas<br />

augmenter. En toute logique, plus on produit de bière, plus on devrait avoir besoin de<br />

cuves. A l’heure actuelle, la brasserie possède 4 grandes cuves de 40 hectolitres et deux<br />

cuves plus petites servant pour les brassins d’essais. Rappelons que ces cuves servent tout<br />

autant à la fermentation qu’à la garde. Les cuves s’utilisent donc alternativement selon les<br />

besoins entre fermentation et garde.<br />

Nous avons vu que la brasserie utilisait une grande partie de machinerie mobile. Afi n<br />

d’améliorer le rendement, il est nécessaire de fi xer les différents éléments, pour permettre<br />

tout autant un gain de temps qu’un gain de place. Les tuyaux qui relient les cuves<br />

permettant de transvaser le moût ou la bière sont aujourd’hui eux aussi des éléments<br />

mobiles et mous, déplacés par les employés. En fi xant la machinerie, cela permettra aussi<br />

de créer un réseau fi xe de tuyauterie comme on en trouve dans la plupart des brasseries,<br />

avec un tableau échangeur et des électrovannes ou alors des vannes semi-automatiques.<br />

Nous avions vu que l’agencement actuel de BFM utilise le principe de verticalité entre<br />

les cuves d’empâtage, d’ébullition et de lavage des drèches. Dans la nouvelle brasserie,<br />

ce système de verticalité obligeant les employés à monter et descendre sans arrêt sera<br />

abandonné, au profi t d’un système strictement horizontal, rendu possible par un système<br />

de pompes.<br />

127<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


Les constructions ainsi que les agencements de brasseries sont en général organisés par<br />

une entreprise qui produit le matériel de cuverie, en consultation avec le brasseur et un<br />

architecte. Etant donné qu’il est impossible d’étudier un nouveau système de brasserie<br />

spécialement conçu pour BFM avec un fournisseur de machinerie, nous allons établir<br />

le programme de la brasserie (machineries et surfaces) sur la base d’une autre brasserie<br />

possédant une capacité de brassage identique à celle exigée par le nouveau bâtiment de<br />

BFM. La brasserie de base sera la brasserie Aarebier à Aarberg en Suisse alémanique, qui<br />

vient de se construire il y a tout juste un an. La salle de brassage ainsi que leurs techniques<br />

correspondant à ce que BFM prévoit, nous nous inspirerons de leur programme.<br />

La machinerie de la Aarebier est très automatisée, mais comme nous l’avons vu, ce n’est pas<br />

cela qui, selon Jérôme Rebetez, forme le caractère de sa bière. Par contre, cette brasserie<br />

ne comprend pas d’espace public. Nous nous baserons donc, pour le dimensionnement<br />

de cette partie sur la consommation de bière moyenne que l’on trouve dans les brewpubs.<br />

On peut compter raisonnablement une vente de 600-700 hectolitres par an.<br />

Quant au système d’alimentation du bar, un beer drive classique sera mis en place pour<br />

les bières les plus courantes conjointement à une installation de fûts pour les plus petites<br />

productions. Le beer drive est un système de tanks de 1000 litres (équivalent à 50 fûts)<br />

alimentant directement les robinets du bar. Il faudra prévoir deux tanks pour chaque<br />

bière type, sachant qu’en une semaine, ce sont un à deux tanks qui peuvent être vidés<br />

Le programme détaillé de la brasserie qui implique tout autant une augmentation des<br />

fonctions déjà existantes que des nouvelles fonctions à mettre en place du point de vue<br />

matériel et machinerie, sera donné en fi n de ce travail.<br />

parties du projet<br />

En fonction des différentes études de brasseries effectuées et de l’analyse actuelle<br />

de BFM, nous pouvons diviser les espaces du projet en sept parties distinctes, mais<br />

cependant toutes en relation les unes avec les autres. La mise en place des espaces et<br />

de leur fonctionnement sera le premier point à mettre en ordre au commencement du<br />

projet.<br />

-brassage<br />

-fermentation / garde<br />

-soutirage<br />

-stock (matières premières et produit fi ni)<br />

-espace de dégustation<br />

-espace de restauration<br />

-administration


exigences architectoniques<br />

La hauteur des locaux semble être une des plus importantes exigences sachant qu’il s’agit<br />

d’une hauteur utile pour le stockage. Idéalement un stock de 6 mètres de haut est très<br />

bien, maintenant, 9 mètres serait encore mieux.<br />

La hauteur de la salle de brassage doit être au minimum entre 3,50 - 4 mètres. Si l’on veut<br />

pouvoir offrir une bonne qualité de lumière de jour, mais aussi une installation pour les<br />

lumières artifi cielles le soir, il faudrait compter une plus grande hauteur.<br />

La charge utile du bâtiment équivaut à 6 tonnes par mètre carré. On doit pouvoir compter<br />

1500kg d’inox avec 5 m3 d’eau, ce qui équivaut bien à ces 6 t/m2. A ce niveau là, il faudra<br />

suivre les normes pour les constructions de bâtiments industriels étant donné le nombre<br />

de grosses machines.<br />

Bien que la bière souffre au contact de la lumière, il n’y a pas de zones dans la brasserie<br />

qui ont besoin d’éviter le contact à la lumière. Le stock reçoit simplement moins de<br />

lumière de l’extérieur, les bouteilles de bières étant faites en verre brun protégeant au<br />

maximum des rayons lumineux ainsi que rangées dans des casiers. Seul le stock ne devrait<br />

pas recevoir trop de rayons, mais cela ne signifi e pas non plus le garder dans le noir.<br />

dangers spéciaux<br />

Etant donné que nous allons introduire un programme public dans un lieu de production,<br />

il est important de connaître les risques dans un tel lieu, afi n de pouvoir au mieux disposer<br />

les différents espaces en tenant aussi compte de la question de la sécurité:<br />

-utilisation du gaz pour le chauffe-eau et le chauffage des cuves d’empâtage et<br />

d’ébullition<br />

-vapeur sous-pression<br />

-produits chimiques<br />

-dangers d’explosion avec les différents produits chimiques<br />

-soude caustique extrêmement corrosive<br />

-générateur de vapeur (140°C et 10 bars de pression qui circulent composent<br />

un certain risque)<br />

129<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


_ relation entre les espaces<br />

fermentation<br />

/ garde<br />

énergétique<br />

soutirage<br />

salle de brassage<br />

stock<br />

dégustation restauration administration<br />

sortie<br />

produit fini<br />

entrée<br />

matières<br />

Idéalement, la brasserie devrait être le plus possible indépendante énergétiquement,<br />

permettant autant un gain fi nancier important et une réutilisation des ressources qu’un<br />

respect de l’environnement pour les bâtiments industriels. La production de la bière<br />

consomme une grande partie d’eau et d’électricité, sachant qu’il faut environ 10 litres<br />

d’eau pour produire un litre de bière, et que les différentes installations de chauffage<br />

et de refroidissement sont de grandes consommatrices d’électricité (exigence d’un<br />

raccordement à 300 [A]).<br />

Aujourd’hui, la brasserie est le résultat d’une série de bricoles faites par Jérôme Rebetez.<br />

Si le système fonctionne relativement bien pour la production de la bière, elle n’est<br />

malheureusement pas ce qu’il y a de plus logique énergétiquement. L’enveloppe du


dégustation<br />

restauration<br />

bâtiment n’ayant pas été prévue pour, il n’y a pas de système d’extraction d’air valable,<br />

obligeant à ouvrir les fenêtres en toitures pour évacuer la vapeur. Bien entendu, il n’y a<br />

pas non plus de système de récupération de chaleur sur la vapeur, ni de système particulier<br />

concernant les eaux utilisées. Le chauffage comme celui du réservoir d’eau des cuves se<br />

fait au gaz.<br />

Il faudra tenir compte dans la future brasserie des mouvements de convection de l’air,<br />

et ceci d’autant plus que les espaces publics de dégustation / restauration doivent restés<br />

protégés des émanations de vapeur et de chaleur produites par les brassins.<br />

131<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


question de froid<br />

De nombreuses brasseries possèdent des locaux avec un stockage réfrigéré. Cependant,<br />

les cuves de fermentation des BFM sont toutes auto-isolantes, ce qui permet d’avoir une<br />

salle de fermentation à température ambiante.<br />

L’énergie pour garder au froid se concentre donc uniquement sur les cuves et non plus sur<br />

la salle en entier. Cela permet deux avantages non négligeable : d’une part la température<br />

de la salle reste confortables pour les gens qui y travaillent, et d’autre part, cela évite une<br />

grande partie des soucis liés à l’isolation et aux pertes thermiques de la salle ainsi qu’aux<br />

risques de condensation. De plus, au niveau de la relation des espaces, cette fonction<br />

d’auto-isolation des cuves présente elle aussi des avantages. D’une part, au niveau des<br />

espaces de production, cela permet de placer ces cuves en lien direct avec la salle de<br />

brassage sans avoir besoin de séparer les deux espaces par une cloison isolée. Et d’autre<br />

part, étant donné que nous considérons que les cuves de garde et de fermentation font<br />

partie des espaces qui peuvent être donnés à voir au public, une température ambiante<br />

rend plus facile le lien entre les deux espaces.<br />

relation avec les environs<br />

Les camions venant s’approvisionner à la brasserie ainsi que les propres véhicules de<br />

transport de BFM ne constituent pas une grande gêne étant donné qu’à une petite<br />

fréquence.<br />

La vraie gêne que l’on pourrait considérer dans le fait d’avoir une brasserie en milieu<br />

urbain proviendrait des émanations d’odeurs produites par la brasserie jugées différement<br />

selon les personnes. Il est impossible de les quantifi er étant donné qu’elles dépendent<br />

passablement du vent qui les emmènera plus ou moins loin dans le périmètre de la<br />

brasserie.<br />

le choix de l’implantation<br />

Après avoir expliqué tous les fonctionnements de la brasserie ainsi que ces besoins, il y<br />

a lieu de trouver un site qui corresponde aux exigences de la brasserie. Pour la recherche<br />

d’un site, nous pouvons compter que la surface utile de la future brasserie se comprendra<br />

entre 800 et 1000 m2.


Les différents éléments du programme relatif aux besoins en espace ainsi que les éléments<br />

liés au transport vont permettre de défi nir le choix d’une implantation sur le terrain choisi.<br />

De plus, l’implantation dans un lieu précis demande une analyse du terrain en fonction des<br />

critères recherchés pour le projet en suivant l’organisation interne de la production, mais<br />

aussi le deuxième programme à caractère public. Outre les questions de représentation<br />

d’un site, le terrain doit répondre aux différentes conditions : surface minimum du terrain<br />

( 2000 m2 ), raccords nécessaires aux voies de communication, possibilités d’adaptation à<br />

la topographie (pente, surface plane), agents extérieurs indésirables, relations souhaitables<br />

avec les environs immédiats, etc.<br />

Etant donné la double programmation future de la brasserie, ainsi que les problèmes liés<br />

à l’établissement à Saignelégier (enneigement important, éloignement, trop petite surface<br />

de locaux), il nous a apparu intéressant de déplacer la brasserie en région urbaine, soit<br />

près d’une partie des consommateurs. La brasserie s’apparenterait ainsi aux premières<br />

brasseries médiévales alliant production et consommation et qui représentaient un lieu<br />

social important.<br />

Ainsi, le nouveau site pour la brasserie devra se trouver sur la ville la plus proche, soit la<br />

Chaux-de-Fonds, afi n de ne pas trop s’éloigner des aspects liés au territoire et au terroir,<br />

qui constituent une partie de l’identité de la brasserie des Franches-Montagnes.<br />

133<br />

[ BFM - Brasserie des Franches-Montagnes ]


_ insertion dans un milieu: La Chaux-de-Fonds


« Quand tschacon s’aide… »<br />

(par Anne-Lise Grobéty, écrivain née à La Chaux-de-Fonds en 1949)<br />

La force d’un lieu ?<br />

D’abord imaginez : ciel, terre, sapins, pas d’eau (la seule qui roule ici se terre – la Ronde). Et neige,<br />

ajouteront certains. A partir de ça, tout est à inventer.<br />

Le ciel, certes, prend beaucoup de place là où il n’y a ni cours d’eau ni lac, roulant vents et nuages en<br />

vagues, faisant tanguer les lumières, fl eurissant des remous et de l’écume des nuées. Car les nuées ne<br />

manquent pas, mais elles s’engouffrent rarement comme des hordes de hussards, forçant le lieu, elles ont du<br />

savoir-vivre, s’installent gentiment, se mettent à leur aise, quitte ensuite à rester trop longtemps attablées<br />

et à se reverser des verres…<br />

Alors l’horizon est à réinventer. Et le monde au-delà, naturellement. On a toujours bien aimé refaire le<br />

monde, ici en haut, pour ces raisons-là.<br />

Terre, ciel, sapins pour l’éternité ! Il n’y a donc plus qu’à temporiser avec elle, plus qu’à s’y mesurer.<br />

A force d’opiniâtreté et de rigueur, n’ayez peur, on fi nit par y arriver ; on fi nit par faire comprendre au<br />

monde loin à la ronde que la ville existe, là-haut.<br />

Parce qu’on ne fait pas les choses en petit, ici.<br />

(…) Gros bourg montagnard tranquille qui développe son artisanat en industrie, crée de l’embauche,<br />

attire la main-d’œuvre ouvrière, fait s’épanouir les idées sociales progressistes comme dans une serre sous<br />

l’embellie de son ciel, mitonne quelque brouet révolutionnaire (mi-terre, mi-sapin) et le tour est joué : en<br />

1848, on peut inscrire le nom des Montagnes neuchâteloises au blason des Révolutions universelles, en<br />

accueillant la République tel un fruit mûr - sans mort et sans reproche !<br />

« Quand tschacon s’aide, nion ne se crève », clamait l’ancienne langue. Mais pas besoin de brasser les<br />

cartes de la nostalgie, la ville n’a pas changé pour un sou : toujours prête à charrier l’envie d’agir ensemble,<br />

à tout crin et avec cran.<br />

Maintenant, écoutez le nom. Il ne claque certes pas comme bannière au vent. Prend son temps, s’étale<br />

de tout son long, avec article, traits d’union, particule, s’il vous plaît… Un brin mégalo, bien sûr. C’est<br />

dans le ton du lieu. On a toujours tout fait en grand, ici, et sans chichis. La Grande Poste, la Grande-<br />

Fontaine, le Grand Temple, le Grand Pont… Le « plus grand village du monde » jadis, puis « la plus<br />

haute ville d’Europe », ensuite « la plus haute tour de Suisse » - vingt étages en 1958, à croire qu’on<br />

voulait qu’on la voie par-dessus la Vue-des-Alpes… C’est tout à fait nous cette façon de refuser que notre<br />

regard soit trop petit pour l’infi ni ! (...)<br />

Ecoutons encore La Chaux-de-Fonds. Même si ça traîne un peu les pieds, si ça n’a pas l’air de se presser<br />

(les gens de là-haut disent « Chot’fonds » pour gagner du temps, mais le raccourcis ne change rien à<br />

l’affaire), on y sent malgré tout une sorte de détermination d’implantation : j’y suis, j’y reste, là au fond<br />

– terre, ciel ou sapins, on verra bien.<br />

Et, en attendant, on cause.<br />

Car la force d’un lieu, c’est aussi son parler et sa Parole.


Il y a tant à dire sur les liens tissés entre un pays, son parler et la mentalité des gens. Sur ces échanges<br />

organiques incessants entre la nécessité de l’instant et l’expression, entre paysage, état d’esprit et langage.<br />

Puisque le temps presse, pour le parler soyons clair : on n’y mâche pas ses mots. N’est pas Chaux-de-<br />

Fonnier celui qui ne pousse pas de temps à autre une bonne braillée, aussi brusque qu’une bourrasque<br />

de neige d’avril qui vous arrive dessus par-derrière Pouillerel et brouille le paysage, ni une ni deux. Une<br />

braillée contre, évidemment. Râleurs ? Est-ce de notre faute s’il y a toujours de quoi brailler ?<br />

De toute façon, des braillées comme celles-là, vous n’en entendrez nulle part ailleurs. C’est encore la force<br />

du lieu et de ses mots. Chaque lieu rend un son différent. Celui-ci est encore parfumé des éclats de l’ancien<br />

patois chassé par les Français autour du début du XIX ème siècle. Cette vieille piorne qui bringue, elle peut<br />

pas attendre cinq ?... Voilà le miston qui n’arrête pas de faire son gâtion, on aura tout vu ! Et quand<br />

broyot et pètche encrassent les rues, c’est droit le temps à rester chez soi – tout comme quand la bise rône<br />

alentour, qué ?...<br />

Essayez de remplacer l’expression « pousser une ciclée » par quelque chose de plus légalement français ;<br />

vous aurez beau fouailler profond dans les pages du dictionnaire : vo us n’entendrez jamais le même son<br />

aigu et légèrement hystérique de la ciclée, allez ! Pour combien de mots vous ne trouverez pas l’équivalent<br />

aussi précis, aussi sonnant et affi né que le mot régional qui a subsisté – sur lequel on ne salivera peut-être<br />

plus très longtemps et dont la disparition, comme celle de tout vocable régional, appauvrira l’ensemble de<br />

la langue française ?...<br />

Il y a donc le parler, Et la Parole.<br />

Chaque lieu attend-il en secret la rencontre avec son poète. Cette rencontre, la ville l’a enterinée avec l’œuvre<br />

de Monique Saint-Hélier. « Fallait-il dons être intrépide, ou simplement amoureuse, pour s’emparer de ce<br />

grand pays muet, volontairement rétif aux caresses de l’art ? » s’écrie Jean-Marie Nussbaumen octobre<br />

1956, au cours de l’hommage de la ville où elle avait grandit. Il avait donc fallu l’exil parisien de<br />

Monique Saint-Hélier pour offrir sa parole au lieu. Certes, La Chaux-de-Fonds n’avait pas attendu la<br />

romancière pour exister, mais c’est comme si, pour les gens de là-haut, le lieu lesté du poids des mots de<br />

sa plume acquérait enfi n une identité, une sorte de légitimité qu’on avait pas osé lui accorder jusque là. Si<br />

son oeuvre n’avait pas besoin d’être « de quelque part ». le lieu, lui, avait sans doute besoin d’elle !<br />

J’aime tout ce qui se rapporte à ma terre, écrit-elle dans une lettre à un ami de là-haut. Vous voyez ce<br />

que je veux dire par là : c’est un air, une odeur, une rigueur, quelque chose qui brusquement fait lever<br />

les yeux de la page où l’on écrit, comme si un oiseau passait. Mais il n’y a pas d’oiseau – à sa place un<br />

paquet de jonquilles au bord d’une fl aque de neige, le froid vert des sapins.(…)<br />

Terre, ciel, neige et sapins. Et l’éclat jaune vif de la ville qui s’invente. A partir de ça, ne reste plus qu’à<br />

lancer un petit cri de joie en direction de la ville et de ses gens !<br />

137<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


[ le lieu: la Chaux-de-Fonds ]<br />

« Si vous vous arrêtez à la Chaux-de-Fonds, vous serez, c’est sûr, pris des désirs les plus contradictoires :<br />

fuir au plus vite ou, au contraire, céder à l’atmosphère un peu sinistre des lieux. Belle ? Laide ?<br />

Qu’importe. Cette ville est enchantée, enveloppée d’un indéfi nissable mystère. Rasée par le feu en 1794,<br />

elle a été reconstruite selon un plan en damier et se donne aujourd’hui encore des allures d’agglomération<br />

américaine poussée trop vite. Les rangées de casernes ouvrières se succèdent, coupées seulement par une<br />

avenue trop large, le Pod, comme l’appellent les Chaux-de-Fonniers, conçue pour une ville de plusieurs<br />

centaines de milliers d’habitants. Les façades lépreuses, les enseignes effacées, les boulangeries et les<br />

boucheries transformées en bibliothèques ou en boutiques d’antiquaires, les murs repeints de couleurs<br />

vives, trop vives parfois, suggèrent l’histoire d’une région trop longtemps dépendante d’une seule et unique<br />

industrie : l’horlogerie. »<br />

(Alain Jeannet, Horlogère, opiniâtre, libertaire, la Chaux-de-Fonds, in des Villes en Suisse)<br />

S’insérer en ville, mettre la brasserie au cœur de l’urbain, comme c’était le cas durant le<br />

moyen âge. Voilà, le propos. La brasserie des Franches-Montagnes se situe à Saignelégier,<br />

dans les montagnes jurassiennes, là-haut, dans un petit village diffi cilement accessible<br />

lorsque l’on n’a pas son propre moyen de locomotion. Rapprocher donc la brasserie et la<br />

bière de ceux qui aimeraient la côtoyer, s’y rendre, y boire une petite mousse et peut-être<br />

aussi taper le carton tout en discutant avec les amis.<br />

La ville est un élément vivant, générant son propre tissu plus ou moins contrôlé. Tout<br />

projet devrait s’inscrire dans la logique de ce système, de cette vie. S’inscrire dans une<br />

continuité, en respectant les éléments qui l’entourent. Intégrer une brasserie au milieu<br />

d’un tissu dense et continu, majoritairement occupé par du logement et des commerces<br />

n’est pas forcément évident. L’artisanat ainsi que certaines petites industries qui touchent<br />

directement les habitants, souvent reléguées dans des zones industrielles en périphérie de<br />

ville, ne nuisent pas au fonctionnement de ce tissu, alors pourquoi ne pas proposer de les<br />

installer directement dans la ville.<br />

La Chaux-de-Fonds n’est peut-être pas exactement ce qu’on pourrait appeler La Grande<br />

Ville, cependant, elle a au moins le mérite d’être l’environnement urbain le plus proche<br />

de Saignelégier. C’est aussi la troisième ville de Romandie, celle qui pourrait le mieux<br />

accueillir la brasserie sans pour autant la déraciner totalement de son terroir et de son<br />

identité.<br />

La Chaux-de-Fonds, ville qui aujourd’hui s’enorgueillit d’un passé industriel-horloger<br />

important, de personnages illustres tels que Le Corbusier, Blaise Cendrars, Louis-Joseph<br />

Chevrolet. Tous nés là-bas, mais qui ont fuit rapidement la ville.<br />

Perdue en haut de la montagne, dans le froid, souvent dénigrée par le reste des Suisses,


mais aussi par « ceux d’en bas », comme une ville triste, grise, minérale et industrielle…<br />

Nous nous y sommes presque tous déjà rendu. Pour de nombreux étudiants d’architecture<br />

à Lausanne, c’était lors d’un in situ organisé par Vincent Mangeat, féru de la ville, de son<br />

urbanisation et de sa rationalité. Dans mon cas, la rencontre avait été diffi cile, un jour<br />

d’hiver en 2002, sous une neige abondante et un froid exceptionnel (du moins pour<br />

moi). Un souvenir fort et violent, d’un climat rude, en me demandant comment des gens<br />

pouvaient vivre là, comment une ville avait bien pu s’y développer, là haut, tout en haut<br />

du canton de Neuchâtel. En me disant qu’au moins le froid avait poussé les gens à rester<br />

à l’intérieur, développant ainsi plutôt l’horlogerie que la paysannerie…<br />

Une première rencontre donc quelque peu diffi cile, quelques souvenirs gelés ; l’incendie,<br />

la reconstruction de la ville en damier, le Pod et le massif s’entremêlaient dans ma tête.<br />

Le chapitre que nous allons donc commencer ici est une sorte de remise en situation, de<br />

redécouverte, une manière de raviver un souvenir qui, il faut le dire était très mauvais.<br />

Parmi les deux propositions données par Alain Jeannet, j’aurais choisi la première : fuir au<br />

plus vite ! Simplement, après avoir enfi n trouvé une brasserie avec laquelle travailler sur<br />

le projet d’un nouveau bâtiment, je n’allais pas me bloquer simplement parce que j’étais<br />

pleine de préjugés sur cette ville. Je me disais qu’il ne faudrait jamais s’arrêter sur une<br />

première impression, qu’il faut revenir, retourner, creuser, seule, avec mes propres yeux,<br />

et à mon rythme.<br />

Cette partie sera donc en quelque sorte en rupture avec le reste, ne parlant ni de bière ni<br />

de brasserie, mais principalement du lieu et du site choisi pour le projet, de sa découverte.<br />

Il est évident que certains éléments comme l’urbanisation de la ville, ou bien son aspect<br />

horloger, auront déjà été mainte et mainte fois répétés ailleurs, mais je pense qu’il est utile<br />

de répéter une part de l’histoire du développement de cette ville, cela fait partie de son<br />

identité, et en même temps, cela constitue l’occasion de nous remettre ses caractéristiques<br />

en tête.<br />

Mais j’espère aussi pouvoir y apporter un peu du mien, de ma nouvelle rencontre avec<br />

cette ville, de montrer ce qui constitue ma Chaux-de-Fonds, ce que j’en retiens selon<br />

ma sensibilité ; ce qui m’a touché en arpentant les rues, zigzaguant dans cet incroyable<br />

damier, jusqu’à trouver un site pour la brasserie.<br />

139<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


1. 2.<br />

3.<br />

1. la Chaux-de-Fonds entre les vallons et les sapins jurassiens<br />

2. vue aérienne<br />

3. vue aérienne enneigée


entre les sapins<br />

40’000 habitants entre les sapins, une ville considérée comme une métropole horlogère<br />

en haut de la montagne, en pleine nature, à 1000 mètres d’altitude…<br />

Un élément vivant qui s’est établit comme par miracle au fond d’une cuvette, d’un vallon<br />

ouvert, formé par l’arc jurassien, entre les sapins. Qui se serait attendu à trouver une ville<br />

composée d’un vaste rectangle, s’étendant sur 5,5 kilomètres de long pour 3 de large,<br />

rationalité absolue, dans un endroit pareil ?<br />

Région reculée, pays d’en haut, la ville paraît éloignée de tout, et pourtant… ouverte sur<br />

le monde par ses entreprises exportant montres et micro-technologie de pointe au-delà<br />

de nos frontières, ouverte aussi au reste du territoire, se situant au croisement des routes :<br />

l’une vers le bas, vers Neuchâtel et Berne, l’autre vers la France et le nord de l’Europe, et<br />

parallèles à la chaîne de montagne deux autres routes, une vers le reste du Jura, s’étendant<br />

des deux côtés, doublées par le chemin de fer…<br />

Pas si perdue fi nalement, et pas si éloignée non plus. On a l’impression d’être au bout du<br />

monde, mais on oublie que le bout du monde est à juste une heure de train de Lausanne…<br />

« Toutes les commodités de la ville, tout en étant à la campagne », « On est à cinq minutes<br />

à pied de n’importe quel point », voilà ce que vous disent les habitants. Loin d’être des<br />

campagnards, ils sont plutôt des citadins, et ont l’orgueil de l’histoire de leur ville. Làhaut,<br />

ils disent avoir les possibilités et les services d’une petite métropole… tout en étant<br />

tranquilles… Au fait, on n’aime ou l’on n’aime pas la Chaux-de-Fonds, en général, la<br />

réaction est radicale.<br />

Entre les sapins donc, pâturages et vallons, nous disions, non seulement dans cette<br />

impression d’éloignement, de ville à la campagne, mais aussi comme élément participatif<br />

de la ville. La nature forme son paysage environnant. Bien que ville fortement minérale, le<br />

dessin des montagnes au dessus des toits vient fermer l’horizon et dire qu’ici on est chez<br />

les Chaux-de-fonniers, que ce vallon forme leur territoire. Les sapins verdoyants à l’année,<br />

les mélèzes qui jaunissent à l’automne et perdent leurs aiguilles en hiver participent à<br />

l’ambiance sombre et hivernale du lieu. La neige aussi, blanche et légère, vient alourdir et<br />

endormir le paysage.<br />

A mille mètres d’altitude, il faut savoir composer avec. Les toits en pente et leurs<br />

terminaisons nous parlent de cette diffi culté, de cette rudesse. Mais sans la neige et<br />

l’hiver, qui poussait les paysans d’antan à rester cloîtrés chez eux auprès du feu ? Qui<br />

sait si le petit village serait devenu ce qu’il est aujourd’hui ?... Passé l’hiver, lorsque le<br />

soleil réapparaît, les bâtiments se lèvent, tous tournés dans le même sens, bien en ligne<br />

et espacés pour être bien sûr d’être touchés par ces rayons… Voilà la ville qui se réveille,<br />

bercée par les saisons et par son environnement…<br />

141<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


Lausanne<br />

_ situation<br />

Saignelégier<br />

Neuchâtel<br />

Berne<br />

FRANCE<br />

Le Locle<br />

La Chaux-de-Fonds<br />

Neuchâtel<br />

Zurich<br />

Saignelégier<br />

sans échelle<br />

sans échelle


une ville industrielle… et internationale<br />

Tout là-haut, c’est l’horlogerie qui a permis à la ville de croître, de se développer, d’exporter<br />

son image au même titre que ces montres. Sans elle, elle serait restée ce petit village de<br />

montagne, identique à ceux qui l’entourent.<br />

L’activité horlogère commence réellement à la Chaux-de-Fonds en 1830, supplantant très<br />

vite les fi leurs et autres faiseurs de dentelles. Avant cela, les paysans passaient leur longues<br />

soirées d’hiver en s’occupant de rouages et d’autres mécanismes utiles à l’horlogerie.<br />

Artisanat peu coûteux, nécessitant peu de moyens, il s’est facilement implanté dans la<br />

région où la neige empêchait de faire quoique ce soit durant de longs mois. C’est à partir<br />

de 1850 que la Chaux-de-Fonds connaît une forte croissance grâce à cette l’industrie. A ce<br />

moment, la moitié des habitants de la ville exerçant une activité économique s’occupaient<br />

d’horlogerie. La ville s’est spécialisée, développant cette mono-industrialisation.<br />

Le développement de la ville et de son industrie horlogère nécessita rapidement de la<br />

main-d’œuvre. La ville se développa donc en grande partie grâce à l’immigration attirée<br />

par la demande d’ouvriers. La ville ne ressemblait alors absolument pas à une petite cité<br />

industrielle, composée comme on pourrait l’imaginer de cheminées et de manufactures.<br />

Les gens travaillent encore en grande partie chez eux ou alors dans de petits ateliers<br />

dispersés dans la ville. L’industrie et l’artisanat se mêlaient au reste du bâti, faisant de la<br />

ville elle-même une manufacture horlogère selon les dires de Karl Marx.<br />

L’industrialisation ainsi que la modernisation de l’outil sera lente. Peu à peu, les paysans<br />

de la région quittèrent leurs domaines pour ne plus s’occuper que de manufacture. Des<br />

paysans suisses alémaniques vinrent s’installer sur les terres laissées par les chaux-defonniers,<br />

ainsi que travailler dans les manufactures. En 1880, plus du tiers de la population<br />

était composée d’alémaniques. C’est durant cette période qu’apparurent les petites<br />

manufactures horlogères, particulières à la région.<br />

L’organisation en petites manufactures, provoque un changement dans l’image de la<br />

ville. Ces constructions sont aujourd’hui des témoins de l’urbanisme industriel ainsi<br />

que des manufactures du XIX ème et du début du XX ème siècle. La réputation ainsi que<br />

la production de la ville allant grandissant, elle passa de ville artisanale à ville industrielle,<br />

s’agrandissant le long du plan pré-établi. La population ne cessait alors de croître au<br />

rythme des constructions de la ville, triplant, en passant de 13’000 habitants en 1880 à<br />

37’000 en 1900.<br />

La vague suivante d’immigration, dans les années 1960, sera composée principalement<br />

d’une main-d’œuvre venant du sud de l’Europe : Italie, Espagne et Portugal toujours<br />

attirée par l’expansion horlogère. A la fi n des années 60, la ville atteignit presque les<br />

50’000 habitants. Malheureusement, le développement en monoproduction horlogère,<br />

« Mille mètres d’altitude, cela isole, mais les frontières sont poreuses, celles des nations comme celles des<br />

esprits » (Nicole-Lise Bernheim, citée par J.-B. Vuillème, écrivain et journaliste à la Chaux-de-Fonds)<br />

143<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


n’a pas su se diversifi er ni intégrer suffi samment vite le développement électronique<br />

survenu dans les années 70.<br />

A ces années de gloire, suivent des années de crise pour le secteur horloger traditionnel<br />

qui s’est vu concurrencé par les nouvelles montres à quartz et digitales venues des pays<br />

asiatiques. Cette crise dura presque vingt années, provoquant une diminution de la<br />

production ainsi qu’une stabilisation de la population aux environs de 36’000 habitants.<br />

La ville, plongée dans une situation économique et démographique diffi ciles, avait<br />

alors besoin d’un nouvel élan, d’un moyen de se redresser pour ne pas devenir une ville<br />

fantôme. Pour assurer un avenir économique et ne pas risquer de dépendre uniquement<br />

de l’horlogerie, la ville devait se diversifi er et retenir la population établie.<br />

Cette crise a donc passablement bouleversé son économie, l’obligeant à se réorienter<br />

vers d’autres secteurs. Restant dans des domaines de précision, elle a alors accueilli des<br />

nouvelles technologies qui apportèrent un nouveau souffl e à l’économie chaux-defonnière.<br />

Parmi elles, on retrouve les secteurs de la microtechnique, du technico-médical,<br />

de l’informatique, de la chimie, etc. Ces nouvelles usines ne pouvaient s’installer en ville,<br />

bien évidement trop dense et n’acceptant pas en son sein de complexes aussi grands.<br />

Elles ont alors commencé à se construire en périphérie, en particulier au sud-ouest de la<br />

ville, le long de la route qui mène au Locle, ville de plus petite envergure, profi tant des<br />

bienfaits de la Chaux-de-Fonds. La ville continue aujourd’hui d’aller un peu plus à l’ouest<br />

en développant ses industries, provoquant des propositions de rapprochement entre La<br />

Chaux de Fonds et le Locle, sur fond d’industrialisation…<br />

La Chaux-de-Fonds présente toujours une population multiculturelle qui s’est fortement<br />

intégrée à la ville. La population originaire quant à elle est restée stable, et particulièrement<br />

attachée à sa ville ainsi qu’à son image et son histoire. Les nouveaux habitants s’installent en<br />

général pour des raisons professionnelles dans la ville, mais peu sont en réalité réellement<br />

motivés par les attraits de la ville en tant que telle. Peu de Suisses viennent s’y installer, et<br />

la première raison de quitter les lieux est motivée par des exigences professionnelles. C’est<br />

dire que cette ville vit en premier des offres de travail qu’elle peut offrir à ses habitants, et<br />

dépend donc fortement de son développement économique ainsi que de son image pour<br />

pouvoir attirer de nouvelles entreprises dans son secteur. La ville compte aujourd’hui<br />

8’200 pendulaires qui viennent chaque jour y travailler, il semblerait donc important<br />

qu’elle développe en elle-même les moyens d’attirer cette population à s’établir.<br />

« La Chaux-de-Fonds est une seule manufacture horlogère » (Karl Marx, Capital)


« Une ville qui incite à la réfl exion plutôt qu’à la rêverie » (Peter Krebs, in Revue Suisse)<br />

structure de la ville<br />

La Chaux-de-Fonds n’était encore qu’un petit village de 4500 habitants lorsqu’elle fut<br />

ravagée par un incendie en 1794. Bien que les incendies soient des faits courants dans<br />

les villes et villages de l’époque, celui-ci détruisit une soixantaine de maison laissant 172<br />

familles sans abri. Afi n d’éviter une émigration massive suite à cette catastrophe, il fallait<br />

reconstruire rapidement et dans des conditions permettant de réduire à l’avenir ce genre<br />

de d’accident tout en permettant un développement régulier de la ville.<br />

Même si la Chaux-de-Fonds existait avant l’incendie qui la ravagea, on a coutume de dire<br />

que cet événement constitue une sorte de genèse, de tabula rasa qui permis la naissance<br />

de la ville actuelle. Il fut aussi à l’origine d’une solidarité sociale importante, tout autant<br />

que d’une volonté d’urbanisation à partir d’un degré quasiment zéro et sans précédent en<br />

Suisse, pour reconstruire ce qui se voulait être une ville plus belle qu’avant.<br />

Le plan de reconstruction qui fut d’abord entrepris était l’œuvre de Moïse Perret-Gentil<br />

considéré comme le Pater Patriae. Il reprenait l’ancienne structure du village, qui se<br />

développait en étoile à partir de l’actuelle place de l’Hôtel de Ville le long des différentes<br />

routes reliant le village aux agglomérations voisines (routes de Neuchâtel, du Locle, de la<br />

France, du Vallon de Saint-Imier, de l’Evêché et de Bâle). La place, en plus d’accueillir le<br />

pouvoir communal, servait aussi de point de convergence des différents axes de voirie,<br />

formant une organisation centrale.<br />

La volonté de parer à toute éventuelle catastrophe future induisit un regroupement des<br />

massifs de maisons, disposés selon un alignement strict, et séparés entre eux par de larges<br />

rues, contrôlant voiries, alignements et gabarits des maisons. Cet aspect de massifs est<br />

un des points caractéristiques de la Chaux-de-Fonds marquant l’image de la ville ainsi que<br />

son appréhension.<br />

Le véritable plan d’urbanisation de la Chaux-de-Fonds, tel que nous le connaissons<br />

aujourd’hui est apparu quelques années plus tard, entre 1835 et 1841, sous l’impulsion<br />

de Charles-Henri Junod, alors ingénieur des Ponts et Chaussées qui proposa les plans<br />

d’extension de la ville. Il conserva le principe d’orthogonalité du plan, d’alignement et<br />

de regroupement des massifs, en proposant leur développement en direction de l’ouest.<br />

Celui-ci se compose en un système de longues rues parallèles à la pente et suivant la<br />

forme de la vallée, connectées entre elles par un autre système de rues perpendiculaires<br />

suivant la pente du terrain.<br />

Son plan propose donc de contrôler la croissance de la ville, en redressant le plan en étoile<br />

déjà établi et en le canalisant dans cet alignement. Il y incorpore un système de jardins<br />

adossés au sud de chaque massif tout en augmentant la largeur des rues, provoquant<br />

ainsi des espaces largement ouverts entre le bâti et permettant un bon ensoleillement des<br />

145<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


_ un noyau de ville dans une vallon tout en longueur<br />

_ développement des rues longitudinales parallèlement au vallon<br />

_ développement du damier


habitations.<br />

La logique du système cartésien de Junod répond aussi à une logique d’implantation du<br />

lieu, la ville se situe dans la chaîne du Jura, dans le vallon de Saint-Imier, le terrain s’étend<br />

en longueur. Les maisons semblent se blottir dans le vallon à l’abri du vent, à la recherche<br />

de soleil, formant ainsi un regroupement. La forme de la ville nous parle de la forme de<br />

la terre, s’étendant comme le Jura, du sud-ouest au nord-ouest.<br />

Le plan de Junod sera quelque peu revu entre 1854 et 1859 par Charles Knab, ingénieur<br />

cantonal, afi n de rendre plus réalistes certains aspects vis-à-vis des moyens à dispositions<br />

ainsi que des priorités de construction. Il égalise aussi la largeur du réseau de voirie,<br />

rendant constantes les dimensions entre les rues longitudinales et perpendiculaires.<br />

Les massifs résultant de ce découpage ont été soit attribués à du logement, des<br />

manufactures ou des immeubles mixtes soit à des édifi ces ou équipements publics et<br />

techniques. Ainsi, l’idéal du plan en damier prévoit en lui-même une certaine souplesse,<br />

ne fi geant pas l’attribution de chaque massif.<br />

De même, ce plan permet sans diffi culté l’introduction du chemin de fer en 1857, qui suit<br />

l’alignement de l’avenue Léopold-Robert, avenue principale de la ville, surnommée le Pod<br />

par ses habitants. Le chemin de fer va aussi marquer de manière signifi ante l’orientation<br />

du développement urbain de manière longitudinale, parallèle à la vallée. La ville s’étire<br />

donc vers le sud-ouest, s’éloignant du principe de centralité signifi ée par l’étoile se<br />

situant exactement à l’opposé de la ville. Ce développement met donc en valeur l’avenue<br />

Léopold-Robert, qui deviendra l’image de marque et grande fi erté de la ville. Se muant<br />

en grande avenue à la fi n du XIX ème siècle, agrémentée d’une lignée d’arbres, asphaltée et<br />

ornée d’une monumentale fontaine, elle est aujourd’hui le boulevard que l’on emprunte<br />

toujours pour traverser la ville.<br />

La ville suivit donc une croissance époustoufl ante durant la fi n du XIX ème siècle.<br />

Développant son industrie horlogère, elle devint une sorte de métropole spécialisée. La<br />

ville s’augmenta alors de bâtiments à la hauteur de sa renommée. Les gabarits élevés des<br />

immeubles donnant sur le Pod ainsi que les ouvrages publics montraient clairement la voie<br />

moderne empruntée par la ville. Le Pod de par sa représentation sera l’un des axes où le<br />

bâti devait se faire de la manière la plus homogène et moderne, devenant en quelque sorte<br />

le nouveau centre linéaire de la ville. Seulement, le Pod aujourd’hui, qui se veut toujours<br />

être une artère dynamique, est entouré d’une lignée de constructions sans intérêt, tant<br />

d’un point de vue économique, commercial et culturel. Les bâtiments construits depuis<br />

les années 1950 sont d’une piètre qualité architecturale, rendant l’avenue morne et grise.<br />

Elle reste pratique bien sûr en tant que boulevard qui traverse toute la ville, mais c’est<br />

aujourd’hui sa seule qualité.<br />

147<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


_ développement des rues transversales perpendiculairement au vallon<br />

_ occupation des îlots en damier définis par le réseau viaire<br />

_ développement du damier


_ la topographie environnante empêche le développment du damier régulier<br />

_ développement actuel du bâti<br />

149<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


1841<br />

1926<br />

_ évolution historique de la ville<br />

1.<br />

3.


1893<br />

1988<br />

2.<br />

4.<br />

151<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


en découvrant la ville<br />

Je ne suis donc pas chaux-de-fonnière, et cette ville m’était quasiment inconnue. Mise à<br />

part l’histoire de son développement urbain, de la fi erté de ses personnages, de l’orgueil<br />

de ses grandes avenues, mais aussi le côté humble, simple et neutre de son bâti, je ne<br />

savais rien. La meilleure manière pour moi de découvrir une ville est de l’arpenter à pied,<br />

de la traverser de part en part, de s’y balader, parfois levant les yeux, parfois les baissant.<br />

De pouvoir découvrir ainsi à mon rythme, entre les croisements des rues, ce qui allait<br />

me toucher, me permettre de fl âner librement, non guidée par un article d’urbanisme ou<br />

d’architecture.<br />

J’avais donc envie de retranscrire ici les éléments qui étaient pour moi particuliers à la<br />

Chaux-de-Fonds, ce que je vois en premier en fermant les yeux et en repensant à ces<br />

ballades durant des journées glaciales…<br />

notion d’espace<br />

En parcourant la ville, les aspects d’organisation en damier sont marquants. Ils guident<br />

non seulement les espaces de la ville, mais aussi la manière de s’orienter, de se mouvoir<br />

dans tant de rationalité. L’organisation rectangulaire fait que l’on ne s’y ballade pas<br />

n’importe comment: tout droit, à gauche, à droite, notre chemin marque des trajectoires<br />

orthogonales inhabituelles pour la Suisse. On s’amuse même à compter les massifs de<br />

maisons: trois maisons sur la droite et ensuite deux sur la gauche, comme si l’on brodait<br />

sur un canevas un motif au point de croix.<br />

Le plan en damier de la ville provoque une nette distinction entre bâti et non bâti, créant<br />

un espace composé d’une succession de bâtiments individuels laissant suffi samment<br />

d’espace pour la vie publique et sociale, les circulations, les passants, etc. Cette notion<br />

d’espace est importante pour la ville, et constitue même un des critères clefs des ses<br />

dirigeants actuels. Il ne s’agit pas d’une ville congestionnée, construite sur le tard. Ses<br />

impératifs d’implantation lui ont permis de se développer librement sans devoir se<br />

densifi er ou bien se reconstruire sur elle-même.<br />

La construction sous forme de massifs défi nit clairement un espace construit et privé<br />

d’un espace public, résultant du bâti. Ces deux éléments sont clairement défi nis par le<br />

maillage urbain ainsi que par la nature même des massifs, répondant à un système de<br />

barres régulières. Si la longueur est variable, la largeur des maisons ainsi que des jardins<br />

restent des éléments fi xes, ne venant pas empiéter sur l’espace public.<br />

Bien qu’il s’agisse d’une ville en damier, et planifi ée selon des critères rationnels, cette ville<br />

ne présente pas complètement, au niveau visuel, et en parcourant la ville la rigidité des<br />

plans d’autres villes réticulaires. D’une part, car cette articulation suit en grande partie la


forme du terrain, lui donnant un aspect un peu plus naturel, comme évident. Et d’autre<br />

part, car les dimensions choisies pour les constructions restent dans une échelle humaine.<br />

Il s’agit en quelque sorte d’un grand village qui se serait déguisé en ville.<br />

Cependant, tout en offrant une certaine spatialité entre les bâtiments, cet ordonnancement<br />

crée une mise en place est fi gée, réglée de la ville ; tout le monde est aligné dans le<br />

même sens, créant parfois un sentiment d’emprisonnement. Il est parfois impossible<br />

de prendre suffi samment de recul pour pouvoir photographier un bâtiment dans son<br />

entier, en prenant de la distance, on se retrouve vite confronté à un autre immeuble, nous<br />

empêchant de se distancer encore plus. Alors de l’espace oui, mais un espace tellement<br />

contrôlé qu’il me semble presque emprisonnant.<br />

perspectives<br />

Entre cette impression d’emprisonnement, les longues rues rectilignes offrent des<br />

échappées visuelles. En longeant une rangée de bâtiments, on ne voit plus que le point de<br />

fuite qui s’étend loin devant nous. Au bout de la rue, différentes perspectives se créent au<br />

croisement des rues. On passe en quelque sorte d’une vue fermée à une vue ouverte, on<br />

voit ce qui se passe sur les côtés lorsque l’on traverse un carrefour, et l’on ne voit ensuite<br />

plus que ce qu’il y a devant nous. Marcher dans la ville, c’est parcourir cette alternance de<br />

vues qui s’échappent et qui se cachent le long de ses bâtiments.<br />

De la même manière, les bâtiments jouent avec ces vues. Les édifi ces publics et importants<br />

de la rue se trouvent d’ailleurs sur des massifs coupant la rue, comme si le bâtiment avait<br />

décidé d’arrêter notre chemin et notre regard. Mais cela, tout en ne se dévoilant pas trop :<br />

l’organisation des bâtiments empêchant de prendre du recul, on ne découvre alors les<br />

théâtres, écoles, églises et autres bâtiments importants dans leur entier, mais uniquement<br />

dans une perspective marquée par le cadre formé par les autres bâtiments défi nissant la<br />

rue.<br />

Au vu du plan en damier et de ces implications au niveau du bâti, il était impossible de<br />

ne pas s’intéresser aux perspectives et appréhension des rues ainsi que des bâtiments. Les<br />

rues s’étendent et se croisent, en marchant, on passe successivement d’une vue ouverte à<br />

fermée, libre, bâtie… Le village de la ville montre ainsi ces deux aspects, celui de l’espace,<br />

mais aussi celui de la densité de son bâti.<br />

un mélange de constructions<br />

Il est assez amusant de voir, en parcourant la ville, que même si celle-ci a été construite<br />

selon ce plan en damier et en proposant des massifs bien ordonnancés, que l’ensemble<br />

des bâtiments de la ville propose une diversité étonnante. Si le bâti du centre de la ville<br />

153<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


_ le Pod entre deux lignées d’îlots _ les alignements définissent les limites<br />

de construction sur la profondeur des<br />

parcelles, laissant libre la largeur du<br />

bâti.<br />

_ notion d’espaces<br />

_ l’îlot laissé libre forme<br />

un parc


_ les édifices publics importants sont disposés<br />

dans la perspective d’une rue, arrêtant<br />

le chemin du viaire transversal.<br />

_ les îlots du centre ville suivent la configuration<br />

de l’étoile, mais s’alignent déjà de<br />

manière plus rationnelle<br />

155<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


1. 2.<br />

3. 4.<br />

5.<br />

_ perspectives et vues filantes


6. 7.<br />

8.<br />

157<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


_ alternance entre rues, jardins et barres constituant le massif chaux-de-fonnier<br />

_ le massif, entre rue et jardin<br />

_ vue arrière: les entrées<br />

_ vue avant: les jardins


est relativement neutre, formé de massifs presque tous identiques que nous allons<br />

voir par la suite, certains bâtiments constituent des découvertes étonnantes. Entre<br />

les anciennes fermes encore existantes qui ont été englobées dans le tissu urbain, les<br />

maisons individuelles du nord de la ville avec leurs toitures rappelant celles des fermes<br />

neuchâteloises, les maisons plus riches des industriels et négociants ramenant des<br />

infl uences de leurs voyages, les premières œuvres du Corbusier qui se situent dans le<br />

même quartier, le fouillis des maisons installées au sud de la ville, là où le terrain est plus<br />

accidenté et n’a pas permis une continuité rigide du damier, la ville présente une diversité<br />

parfois insolite.<br />

On retrouve donc une quantité de bâtiments qui sont loin d’être les prismes réguliers<br />

et représentatifs de l’architecture de la ville, nous avons reproduit ci-contre quelques<br />

exemples de ce mélange.<br />

le massif bien ordonné<br />

Le massif constitue l’élément far de l’urbanisme chaux-de-fonnier, le premier type de<br />

construction auquel on pense lorsque l’on parle de la ville. D’ailleurs, il s’agissait de<br />

l’élément dont je me souvenais le plus de l’in situ avec Vincent Mangeat.<br />

On constate au fi l des rencontres que la majorité des immeubles sont mitoyens et locatifs,<br />

présentant plusieurs appartements. Les gens vivent donc ensemble, en communauté, ils<br />

ont construit ensemble cette ville, sans eux, plus rien ne tiendrait. Les maisons constituant<br />

les massifs sont donc contiguës. Presque tous les massifs sont construits suivant le même<br />

schéma : les habitations se situent au nord de la parcelle, tandis qu’un jardin privatif<br />

au niveau de la rue vient se placer au sud, le long du bâtiment. Les pièces de jour des<br />

appartements viennent d’ailleurs suivre cette même logique, se tournant aussi vers ce<br />

sud. Ainsi, lorsque l’on remonte les rues perpendiculaires de la ville en direction du nord,<br />

on ne cesse de croiser la même succession composée des quatre éléments : rue, trottoir,<br />

jardin et maison.<br />

J’apprécie l’image qu’offre cette orientation délibérée vers le sud. Nous nous trouvons<br />

dans un vallon où le climat est rude, où même si le soleil est fréquent, ces rayons sont<br />

recherchés pour pouvoir apporter un peu de chaleur. Ainsi, j’ai parfois l’impression de<br />

voir plein de maisons qui se seraient bien serrées entre elles pour être sûr d’avoir chaud,<br />

blotties dans un vallon, tout en se tournant vers la lumière.<br />

159<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


fermes<br />

zone industrielle<br />

manufactures<br />

_ derrière l’orthogonalité: un mélange de constructions<br />

bâti prismatique<br />

grands bâtiments du Pod<br />

bâti clairsemé au sud


d<br />

maisons individuelles du nord<br />

beaux quartiers<br />

ancien bâti<br />

bâti clairsemé au sud<br />

manufactures<br />

fermes<br />

usines<br />

zone industrielle<br />

161<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


_ la Brasserie de l’Ancien Manège, l’aspect sobre de ses façades ne laisserait jamais présager les décors<br />

qui se trouvent à l’intérieur<br />

_ cette maison située dans les quartier nord de la ville est l’un de nombreux exemples de décorations<br />

Art Nouveau de la ville<br />

_ entre sobriété et décorations


décorations, ornementations et neutralité<br />

Le plan rationnel de la ville, ainsi que le rude climat de la région soumis à des vents<br />

violents venant s’engouffrer dans le vallon, mais aussi à de fortes chutes de neige en<br />

hiver, a engendré des bâtiments de ville robustes, assez neutres et modestes pour résister<br />

à la rudesse de l’hiver. On ne construit pas à la Chaux-de-Fonds comme ailleurs. Ce<br />

sont donc, dans la plupart des cas, des bâtiments sobres, presque austères, parfois même<br />

un peu lourds, construits sans chichi pour répondre à la reconstruction ainsi qu’à la<br />

rapide croissance de la population. Tous égaux et semblables donc, en ce qui concerne le<br />

centre ville, et disposés de la même manière sur ce plan tout aussi égal. Quelle apparente<br />

neutralité, quelle monotonie ! Et pourtant…<br />

Les seuls agréments sont en général composés par les corniches, frontons et autres<br />

chaînes d’angle. Au détour des rues, on remarque sur les façades quelques détails de style<br />

Art Nouveau qui apporte un soupçon d’enjolivures à ces bâtiments. Mais ces détails sont<br />

toujours utilisés en extérieur de manière non ostentatoire, on pourrait presque même<br />

dire avec parcimonie. Dans les éléments des maisons on retrouve ferronnerie, lustrerie,<br />

vitraux, bow-windows, cages d’escaliers, façades, frises, etc. La Chaux-de-Fonds fut un<br />

des foyers intéressant de ce mouvement qui liait artisanat et nature, deux aspects de la<br />

ville.<br />

Il faut, dans la plupart des cas, entrer dans la maison pour en découvrir les trésors<br />

cachés. Citons par exemple l’ancien manège, dont la cour intérieure couverte est ornée de<br />

fresques, d’escaliers en colimaçons menant à des sortes de loggias distribuant les étages.<br />

Mais de tout cela, rien ne transparaît à l’extérieur.<br />

couleurs !<br />

Le bois occupait une grande partie de la construction des maisons, tant au niveau des<br />

parois extérieures, des planchers, des escaliers que des toits en bardeaux. Suite à l’incendie<br />

de 1794, de nouvelles règles de constructions furent adoptées, limitant l’usage du bois.<br />

Ainsi, les planchettes de bardeau furent remplacées par des tuiles, et la maçonnerie devint<br />

l’élément prédominant.<br />

On entend souvent dire que la Chaux-de-Fonds est une ville grise et minérale. Auraisje<br />

manqué quelque chose dans mes promenades? J’ai au contraire été marquée par<br />

l’abondance de couleurs utilisées en façade, au niveau des matériaux utilisés. Apparemment,<br />

la rénovation du centre aurait permis de raviver les couleurs de la ville.<br />

Les simples massifs, qui sont presque les éléments les plus neutres de la ville au niveau de<br />

leur agencement et de leur construction, sont aussi les bâtiments qui jouent le plus avec<br />

163<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


_ couleurs!


leurs façades extérieures : rose, vert, jaune, bleu, les crépis sont peints, et les volets notent<br />

la marque fi nale par une couleur plus soutenue. Bien sûr, toutes les maisons et toutes<br />

les rues ne sont pas comme ça. Cependant, certaines rues et alignements d’immeubles<br />

offraient des mélanges de couleurs qui semblaient venir d’ailleurs, d’endroits plus chauds,<br />

festifs et colorés.<br />

Et en même temps, l’hiver, lorsque la neige a tout recouvert, c’est un paysage en noir et<br />

blanc, silencieux, impressionnant qui s’offre à nous.<br />

toitures<br />

Le plan en damier pourrait supposer l’implantation de massifs présentant la forme<br />

de prismes purs, réguliers, semblables comme le plan. Cependant, la neige abondante<br />

vient dicter le haut des bâtiments, les couvrant d’une importante toiture à forte pente.<br />

L’aspect des toits de la ville vient heureusement détruire en quelque sorte la rigidité<br />

et l’orthogonalité induises par le plan de la ville, pour en offrir une vue quelque peu<br />

différente.<br />

Depuis les points hauts de la ville, les ponts ou les derniers étages des bâtiments, le reste<br />

de la ville ne forme plus qu’un ensemble de toiture. On a presque l’impression de regarder<br />

de haut une série de personnes qui seraient toutes revêtues d’un chapeau, cachant le reste<br />

de leur corps. Cette prédominance de toitures dans les vues de la ville représente un<br />

aspect particulier et important de la ville, qui crée en partie un certain charme et qui nous<br />

montre que, de nouveau, on construit autrement par là-bas.<br />

manufactures et usines<br />

Karl Marx nous disait que la Chaux-de-Fonds était à elle seule une immense manufacture<br />

horlogère. En effet, pendant très longtemps et encore aujourd’hui, les manufactures<br />

horlogères se mêlaient simplement au reste du bâti, en tant qu’immeubles mixtes ou<br />

industries à part entière. Les premiers ateliers d’horlogeries, ainsi que les petites<br />

manufactures se trouvaient d’ailleurs dans les habitations. On en voit d’ailleurs encore les<br />

signes dans les derniers étages des massifs, sous les combles marqués par un alignement<br />

de fenêtres contiguës, sorte de baies vitrées, permettant la luminosité nécessaire à ce<br />

travail minutieux.<br />

D’autres manufactures plus grandes, occupent aussi un ou plusieurs bâtiments en entier,<br />

et revêtent cette fois-ci, un langage beaucoup plus industriel malgré la présence de ces<br />

entreprises dans la ville, toujours mêlées au reste du bâti.<br />

165<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


_ les lignées de fenêtres laissent supposer<br />

la présence d’un atelier dans les combles<br />

des maisons<br />

_ toujours mêlées au reste du bâti, de plus grandes manufactures<br />

_ manufactures et usines<br />

_les manufactures dont la dimension s’apparente<br />

encore à celles des autres maisons de la ville


Alors, ville industrielle oui, mais avec des industries douces, qui ne marquent pas de manière<br />

prépondérante un paysage. L’ensemble se lie, forme une mixité inhérente à la ville et à son<br />

image. C’est d’ailleurs en partie le mécénat des industriels qui a permis de construire des<br />

éléments publics, grands représentants de la grandeur de la ville : monuments, bâtiments<br />

et services publics tels que l’Hôtel communal, la Fontaine monumentale, le musée de<br />

l’horlogerie et le musée des beaux-arts, venant se mêler au reste des bâtiments, y compris<br />

des manufactures.<br />

Nous avons vu que la ville a été forcée de se diversifi er quelque peu suite à la crise<br />

horlogère des années 70. Aujourd’hui, la ville étant bâtie, il ne reste pas suffi samment de<br />

place pour construire des entreprises au cœur de la ville. Ainsi, les nouvelles constructions<br />

viennent se placer en bordure de ville, à l’ouest, dans une sorte de no man’s land entre la<br />

vraie ville de la de ville du Locle. De nouveau, on est saisit dans cette zone par le contraste<br />

entre les anciennes fermes qui ont toujours été là, et qui continuent d’être exploitées,<br />

entourées de vastes champs, et, construit juste à côté de vastes bâtiments modernes<br />

abritant des entreprises travaillant avec des technologies de pointe. On ne sait pas très<br />

bien comment qualifi er cette zone qui a l’air de rester en attente, entre zone agricole et<br />

zone industrielle, entre passé paysan et futur technique. Le fait est que les entreprises<br />

placées là construisent en grand et mettent en avant leur technicité.<br />

_ à l’ouest, entre les prairies et les fermes se développent les grandes usines<br />

d^horlogerie, de microtechnique, etc<br />

167<br />

[ la Chaux-de-Fonds ]


_ le site: le quartier Le Corbusier<br />

169<br />

[ intégration dans le site ]


[ le site : le quartier Le Corbusier ]<br />

La défi nition des différents besoins relatifs à la brasserie des Franches-Montagnes, ainsi<br />

que l’élaboration d’un programme de base, ont permis de cibler les recherches d’un site<br />

correspondant sur la Chaux-de-Fonds. Diverses possibilités ont été étudiées. Suite à des<br />

entretiens avec le service d’urbanisme de la ville, ainsi qu’avec Jérôme Rebetez, brasseur<br />

aux Franches-Montagnes, le choix s’est défi nitivement porté sur le futur quartier Le<br />

Corbusier. Situé au centre ville, le site répond exactement aux volontés de proximité de<br />

la clientèle ainsi qu’au caractère social que nous avions envie de rendre au bâtiment de<br />

brasserie, en proposant une continuité historique avec les brasseries d’antan.<br />

Le quartier dans lequel se situe le site qui nous intéresse n’est pas encore construit, il s’agit<br />

du réaménagement de la gare aux marchandises de la ville de la Chaux-de-Fonds. Ce site<br />

est donc aujourd’hui encore occupé par un certain nombre d’infrastructures appartenant<br />

aux CFF. Etant donné qu’il s’agit d’une friche ferroviaire, celle-ci a actuellement un<br />

caractère très gris, minéral et abandonné. Sa transformation en nouveau quartier de ville<br />

a été prévue par un plan d’aménagement.<br />

Ce plan spécial d’aménagement a déjà été établi entre la Ville et les CFF et rendu public<br />

au mois de septembre 2007. Les différentes parcelles composant le site, vont être mises<br />

en vente par les CFF en début 2008. Le coût global du projet d’aménagement devrait<br />

atteindre environ 200 millions.<br />

Ce quartier, en cours de développement, ne peut donc se révéler qu’intéressant pour la<br />

brasserie : situé en centre ville, la mixité des installations à prévoir sur le site va permettre<br />

à ce lieu d’insuffl er une nouvelle dynamique au centre ville. Il est donc particulièrement<br />

intéressant, pour une brasserie qui vient s’installer à la Chaux-de-Fonds pour continuer<br />

son développement, de se positionner directement dans ce nouveau lieu en expansion.<br />

Nous allons ici étudier le site, sa composition et ses relations avec le reste de la ville, ainsi<br />

que les différentes réglementations établies par le plan spécial afi n d’en déterminer les<br />

enjeux ainsi que de trouver le positionnement de la brasserie sur cette frange de ville. Nous<br />

émettrons aussi quelques critiques envers ce plan et énoncerons les éléments qui seront<br />

pris en compte dans le cadre du projet. Cela nous permettra d’arriver ensuite dans la<br />

dernière partie de ce travail, posant les différentes volontés ainsi que les questionnements<br />

au sujet du projet. La description des éléments relatifs au plan d’aménagement a été<br />

tirée des différents documents fournis par la ville de la Chaux-de-Fonds, ainsi que par le<br />

bureau Geapartners à Lausanne.<br />

Le site présentant une surface importante, il est bien entendu que la brasserie s’installera<br />

sur un des îlots créés par le plan d’aménagement ; celui-ci sera choisit en fonction des<br />

besoins de la brasserie et de l’étude qui suit.


situation<br />

Le secteur de la gare aux marchandises se situe au centre de la ville, le long des voies<br />

ferrées, au bord de la gare CFF ainsi qu’en parallèle de l’avenue Léopold-Robert (Pod),<br />

axe principal de circulation de la ville. Les immeubles longeant le Pod, sont alignés sur<br />

celui-ci et orientés sur l’avenue, ce qui a pour conséquence que le site se trouve à l’arrière<br />

d’un front bâti tout en devant proposer une prolongation du tissu urbain jusqu’aux voies<br />

ferrées. Outre le fait de se trouver entre les deux plus importants axes de la ville au<br />

nord et au sud (le Pod et les voies), le site se trouve aussi entouré à l’est à et l’ouest par<br />

deux pôles commerciaux du centre-ville correspondant au centre commercial Métropole<br />

(Migros) et au centre Les Entilles (Coop).<br />

Les aspects de porte d’entrée de la ville, ainsi que d’interface des transports publics (trains,<br />

cars postaux, bus) joués par la gare rendent ce site particulièrement intéressant pour la<br />

brasserie. En effet, nous avons vu que les brasseries artisanales présentaient une forte<br />

identité et attachement au lieu. Le fait de se trouver au bord de l’emplacement même où<br />

arrivent une grande majorité des personnes dans la ville ainsi qu’au centre, est un endroit<br />

de représentation important, une manière de faire partie du lieu tout en étant un des<br />

premiers éléments discernables en arrivant en train.<br />

Comme toutes les friches ferroviaires, les dimensions du site sont importantes et font de<br />

lui un morceaux de ville d’une surface totale de 49’000 m2 s’étendant sur environ 700<br />

mètres de long pour 70 mètres de large, entre la gare et le grand pont que l’on emprunte<br />

en arrivant dans la ville. La réintégration de ce site au reste du tissu urbain constitue donc<br />

un enjeu important permettant de restituer une tranche urbaine pour le développement<br />

de la ville. Ainsi, situé au cœur de la ville, le site lui permet de s’agrandir en son intérieur,<br />

se retrouvant au cœur d’une dynamique que l’on n’aurait pas forcément retrouvée en se<br />

développant en périphérie.<br />

Toutes les caractéristiques de ce site semblent le mettre au centre d’une attraction urbaine<br />

qui s’est développée autour. Sa position ainsi que son intégration au reste du bâti devrait<br />

permettre d’offrir un cadre attractif pour la brasserie.<br />

171<br />

[ intégration dans le site ]


_ évolution historique du site<br />

_1898<br />

_1903<br />

_1908<br />

_1944<br />

_ l’ancienne gare de 1856


mémoire du lieu<br />

Comme pour tout site, il est toujours intéressant de survoler son histoire, afi n d’y trouver<br />

quelque inspiration, de servir de référence vis-à-vis de l’histoire du lieu, ou simplement<br />

pour mieux connaître le développement de ce morceau de ville.<br />

Lié au chemin de fer, ce site a évidement commencé son activité à peu près au même<br />

moment que l’installation des voies ferrées, à la fi n du XIX ème siècle, permettant de suivre<br />

l’essor de l’activité horlogère de la ville. Une petite gare a été construite en 1878. En<br />

face, et longeant l’avenue Léopold-Robert, un grand parc a été aménagé. Déjà quelques<br />

bâtiments relatifs à la gare aux marchandises s’installèrent sur le site.<br />

L’augmentation du trafi c ferroviaire ainsi que les besoins d’espaces dans le quartier<br />

environnant engendrèrent la construction d’une gare plus grande en 1898 ainsi que la<br />

disparition du parc adjacent. C’est à ce moment-là qu’apparu une passerelle piétonne<br />

surplombant les voies et reliant le sud de la ville avec la place de la gare. C’est justement<br />

cette passerelle, qui sera détruite par la suite, que le nouveau quartier le Corbusier<br />

proposera de remettre en place pour augmenter les liens entre les deux parties de la<br />

ville.<br />

Si le parc situé en face de la gare a disparu, il a été remplacé par un square situé à l’ouest du<br />

bâtiment entre 1903 et 1908. Ce nouveau parc est d’ailleurs délimité à l’ouest par l’accès<br />

à la passerelle piétonne. Ce square existe d’ailleurs toujours à l’heure actuelle et accueille<br />

le monument en mémoire de Numa-Droz. La place de la gare, quant à elle, commençait<br />

à jouer un rôle d’interface dans la ville puisque des voies de tram ont installées, donnant<br />

ainsi à cette place une identité de station.<br />

Durant ce temps, les bâtiments longeant le Pod se sont développés, et le bâtiment de la gare<br />

aux marchandises s’est agrandit. La construction de ces deux entités va se développer au<br />

fur et à mesure des années, la frange sud du Pod se complètera enfi n jusqu’à marquer un<br />

arrière de front bâti avec notre site. Ce sont principalement les différentes mutations liées<br />

au trafi c ferroviaire qui vont transformer le site de la gare aux marchandises. Aujourd’hui<br />

désuètes, leur réaffectation permettra d’inscrire une nouvelle étape dans ce lieu.<br />

173<br />

[ intégration dans le site ]


_ plan orienté nord de La Chaux-de-Fonds, échelle 1:50’000<br />

_ vue aérienne orientée selon le Pod, sans échelle<br />

_ insertion du plan d’aménagement et relation avec les autres éléments de la ville<br />

_ situation du quartier dans la ville<br />

1.<br />

2.<br />

3.


enjeux de l’aménagement du quartier par rapport à la ville<br />

Les principaux enjeux de l’aménagement du site consistent à proposer un quartier<br />

mixte et dynamique en se basant sur les points suivants (d’après le dossier remis par<br />

Geapartners) :<br />

• inscrire la nouvelle urbanisation dans le contexte historique et urbanistique<br />

propre à la Chaux-de-Fonds<br />

• rendre le site attractif et valoriser son image<br />

• densifi er un morceau du territoire au centre-ville<br />

• renforcer le potentiel de clients pour les commerces du centre<br />

• permettre la réalisation de constructions par étapes<br />

• garantir une grande fl exibilité d’affectation en fonction de l’évolution du contexte<br />

socio-économique<br />

• assurer la cohérence de chaque étape de développement en rapport avec<br />

l’intégration du nouveau quartier dans l’ensemble de la ville<br />

Ces différents points conjugués ensemble devraient permettre de rendre un nouveau<br />

pôle d’attractivité dans le centre-ville, sous la forme d’un ensemble cohérent, tout en<br />

renouvelant l’image du quartier. L’installation de ce quartier répond aux critères de<br />

développement durable (économique, social, environnemental) en proposant une<br />

mixité d’activités pouvant permettre une nouvelle dynamique économique, une mixité<br />

sociale, une qualité de vie offerte par les différents espaces verts et espaces accueillant<br />

principalement les piétons, des règles de préservation de l’environnement en proposant<br />

de densifi er et restructurer un morceau de ville déjà existant. Il est entendu évidement<br />

que le plan de développement prévoit aussi d’autres points vis-à-vis de l’écologie du<br />

site, citons notamment par l’utilisation d’énergies renouvelables, des réglementations de<br />

constructions (minergie, toitures végétalisées).<br />

relation avec le reste de la ville et intégration<br />

La relation directe entre le site et ses alentours s’effectue, pour les urbanistes de<br />

Geapartners, par le biais de trois aménagements principaux :<br />

• la rue verte entre l’ouest de la ville et la gare,<br />

• l’aménagement de la place de la gare permettant de défi nir cet espace qui est<br />

aujourd’hui fl ou et problématique, et en même temps créer une transition entre<br />

l’interface de transport et le site<br />

• la passerelle piétonne venant relier le sud de la ville avec le quartier du<br />

Corbusier.<br />

175<br />

[ intégration dans le site ]


_ vue sur le site, en premier plan le square de la gare, le site s’étend ensuite jusqu’au pont<br />

_ la friche ferroviaire dans son état actuel


177<br />

[ intégration dans le site ]


_ centre Coop les Entilles _ les moulins _ le Pod<br />

_ rue du Commerce _ Grand Pont _ les voies<br />

_ environnement proche<br />

(sans échelle)


_ square de la gare _ gare de La Chaux-de-Fonds _ centre Migros Métropole<br />

_ le parc des Crétêts _ l’arrière du front bâti du Pod<br />

179<br />

[ intégration dans le site ]


0 10 50 m.<br />

0 10 50 m.<br />

_ le plan d’aménagement dans son rapport aux éléments verts et au bâti<br />

(sans échelle)<br />

_ plantation structurante<br />

_ rue verte<br />

_ espace paysager entre le bâti<br />

_ pôles _ parc urbain _ frange paysagère sud<br />

_ bâtiments de tête, forte densité _ bâti pavillonnaire, faible densité<br />

_ tissu bâti, moyenne densité


_ parvis _ place de la gare _ espace mixte<br />

_ emprise des constructions nouvelles<br />

_ pôles<br />

_ front bâti sur la place de la gare _ espace non bâti<br />

181<br />

[ intégration dans le site ]


COUPE A<br />

AVENUE LEOPOLD-ROBERT<br />

AVENUE LEOPOLD-ROBERT<br />

5695<br />

Coordonnées moyennes : 553 150 / 216 360<br />

657<br />

5530<br />

5034<br />

Etabli sur la base des données de la mensuration officielle de Août 2006 par:<br />

Fabrice Bovay et Laurent Huguenin<br />

Ingénieurs géomètres brevetés<br />

1066 Epalinges<br />

(5888)<br />

15.00 m.<br />

F<br />

10825<br />

10825<br />

DDP 10826<br />

F<br />

_ directives d’implantation<br />

(sans échelle, légende page suivante)<br />

7382<br />

1438<br />

8183<br />

1014.00<br />

994.00 DOMAINE FERROVIAIRE<br />

FERROVIAIRE<br />

998.50<br />

995.00 DOMAINE<br />

E<br />

1437<br />

A<br />

1436<br />

F<br />

15920<br />

E<br />

E<br />

5048<br />

DP255<br />

DP68<br />

807<br />

E<br />

10.00 m.<br />

1 / 1'000<br />

11243<br />

D<br />

D<br />

3135<br />

15934<br />

8461


3136<br />

5162<br />

5161<br />

5028<br />

699<br />

D<br />

AVENUE LEOPOLD-ROBERT<br />

DP685<br />

7355<br />

995.00<br />

C<br />

7354<br />

11.50 m. 14.00 m. 10.00 m.<br />

C<br />

994.00<br />

C<br />

8160<br />

18.00 m.<br />

8322<br />

1014.00<br />

8506<br />

15596<br />

1015.00<br />

F<br />

C<br />

8320<br />

B<br />

8505 8202<br />

7.00 m.<br />

1005.00<br />

B<br />

8203<br />

DP752<br />

B<br />

DOMAINE FERROVIAIRE<br />

DOMAINE FERROVIAIRE<br />

DP686<br />

5069<br />

2947<br />

A<br />

A<br />

DP 687 com<br />

A<br />

G<br />

G<br />

G<br />

5260<br />

5260<br />

15595<br />

9730A<br />

9730A<br />

DP379<br />

183<br />

[ intégration dans le site ]


_ périmètre du plan spécial<br />

_ éléments voies ferroviaires voués à la démollition<br />

_ périmètre d’évolution des constructions A à D et F<br />

_ alignement obligatoire côté rue verte<br />

_ alignement obligatoire Ouest<br />

_ périmètre d’évolution des constructions E, G<br />

_ césure (positionnement à titre indicatif)<br />

_ parc urbain<br />

_ aire d’aménagement ouest de la place de la gare<br />

_ parvis du périmètre d’évolution des constructions A<br />

_ frange paysagère Sud<br />

_ espace paysager<br />

_ arborisation structurante<br />

_ emprise de la rue verte<br />

_ position de l’espace circulation<br />

_ traversée piétonne<br />

_ passerelle piétonne (positionnement à titre indicatif)<br />

_ accès véhicules<br />

_ emprise des rues de desserte<br />

_ alignement obligatoire Sud<br />

_ alignement obligatoire Est


Cependant, la complexité de l’aménagement d’un nouveau quartier demande d’autres<br />

critères, ainsi que d’autres systèmes de liens pouvant répondre aux questions de relation<br />

entre l’échelle de la ville et celle du nouveau quartier à bâtir. Même si ces trois points<br />

demeurent les leitmotivs du développement de ce quartier, je pense que la défi nition du<br />

réseau viaire à travers le site, permettant une continuité du tissu urbain est un élément fort<br />

et important. Dans l’établissement du projet de brasserie, nous tiendrons donc d’abord<br />

compte du prolongement du réseau viaire, des pôles d’attractions environnants, des<br />

mouvements, et de l’accessibilité, etc.<br />

prolongement du damier<br />

Par l’édifi cations des règles de constructions du futur quartier, le plan propose d’établir<br />

la relation avec le reste de la ville par la continuité du tissu urbain préexistant se trouvant<br />

au nord, mais par une liaison faite d’éléments végétaux.<br />

Commençons par la continuité de la trame historique de la ville. En effet, le morceau<br />

de ville correspondant à l’ancienne gare aux marchandises s’inscrit géométriquement<br />

parfaitement dans le système urbain en damier. Il est donc logique de proposer un<br />

prolongement des rues transversales jusqu’aux voies, défi nissant ainsi les différents espaces<br />

à bâtir sur le site, sans interrompre la logique préexistante. Nous devrions donc retrouver<br />

sur le site des groupements de quatre îlots, correspondant au découpage viaire.<br />

Mais cette situation en bordure de voie n’est pas forcément facile, d’une part à cause des<br />

nuisances causées par un tel voisinage, mais aussi en fonction de la défi nition à donner<br />

à un terrain venant jouer le rôle d’interface entre les voies et le centre de la ville. C’est ici<br />

qu’intervient un mode doux de relation avec l’environnant.<br />

mixité et dynamisme du site<br />

L’intégration du site dans le reste de la ville passe aussi par le type de programme qui y<br />

sera installé. Afi n de jouer un rôle important dans la centralité urbaine, le site propose<br />

une mixité d’affectations correspondants aux besoins d’un centre-ville : logements,<br />

commerces, atelier, lieux d’enseignements etc. Ainsi, se seraient quelques 350 logements<br />

qui pourraient se construire. Les réglementations de densité ainsi que de hauteurs des<br />

bâtiments ont été prévues pour offrir un maximum d’espace tout en évitant une trop<br />

forte densité dans le périmètre du site. Ainsi, cela exclu la construction de grands centres<br />

comme des supermarchés, évitant que l’ancienne friche passe à côté de sa nouvelle<br />

185<br />

[ intégration dans le site ]


_ situation actuelle<br />

_ le prolongement du damier au travers du site améliore son intégration et son accessibilité<br />

_ découpage du site en îlots s’inscrivant dans la logique du plan en damier<br />

_ prolongation du damier<br />

(sans échelle)


vocation en devenant un regroupement de centres de shoppings.<br />

Cette volonté de mixité nous intéresse particulièrement. La brasserie étant un espace de<br />

production et de consommation, elle peut autant être liée au programme d’ateliers qu’à<br />

celui de commerces. Ce mélange d’activités sur le site, permet un certain foisonnement de<br />

personnes dont la brasserie pourrait profi ter avantageusement. De plus, de par la double<br />

programmation de la brasserie, celle-ci se propose comme étant un bâtiment à caractère<br />

social et public. Elle pourrait ainsi jouer le rôle de lieu de rencontre pour la ville dans ce<br />

quartier tout en étant une sorte de pôle d’attraction sur le site.<br />

éléments du site<br />

L’intégration du site au reste de la ville devrait aussi se faire par la diversité des éléments<br />

que l’on pourrait retrouver sur le site. Tels qu’ils se trouvent dans le plan d’aménagement<br />

urbain, ils s’agit des éléments suivants :<br />

• un bâtiment de forte densité (h max = 20 m) venant marquer la tête du quartier à<br />

l’est tout en défi nissant un front bâti sur la place de la gare (A). Il devrait devenir<br />

un pôle d’accueil vis-à-vis de la gare, mais pourrait aussi héberger un centre de<br />

formation lié à l’école d’ingénieurs cantonale.<br />

• un second bâtiment de tête à l’ouest, aussi de forte densité (h max = 20 m),<br />

devrait permettre un pôle de loisir en relation avec l’espace public attenant ainsi<br />

que le centre commercial les Entilles venant refermer le site. (F)<br />

• une zone de bâtiments mixtes se présentant en trois îlots défi nis par le<br />

prolongement des rues transversales, formés de deux lignées de barres de<br />

bâtiments (B, C, D). On distingue deux hauteurs de barres : au nord du site<br />

et contre le front bâti du Pod, les barres atteindront une hauteur maximale de<br />

20 mètres, tandis que les barres sud, le long des voies seront d’une hauteur<br />

maximale de 9 mètres.<br />

• un bâtiment pavillonnaire (E) situé sous le Grand Pont, destiné à accueillir des<br />

activités alternatives. Sa hauteur est limitée par le pont à 3 mètres.<br />

• une rue verte située au nord et longeant l’intégralité du site<br />

• une frange paysagère longeant le sud de la parcelle et créant la limite avec les<br />

voies<br />

• une passerelle piétonne (G) reliant l’aménagement de la place de la Gare avec la<br />

rue du commerce, situées de l’autre côté des voies.<br />

Nous verrons plus tard que la rue verte devra servir à créer une continuité avec le reste<br />

de la ville. La frange paysagère sud constituera l’un des éléments que nous ne prendrons<br />

absolument pas en compte pour le projet. En effet, il s’agit d’une sorte d’allée plantée de<br />

187<br />

[ intégration dans le site ]


_ étape 0<br />

_ étape 1<br />

_ étape 2<br />

_ étape 3<br />

_ une implantation par étape


végétation longeant les voies. Cette allée pourrait tout aussi bien être remplacée par des<br />

éléments de protection en verre contre les voies. Etant donné que les voies de chemin de<br />

fer constituent de mon point de vue un des éléments importants constitutifs de la beauté<br />

du lieu, il serait regrettable de les cacher par quelques éléments. De plus, le nombre de<br />

trains qui passent par la gare de la Chaux-de-Fonds très réduit, chaque train s’arrêtant, ils<br />

ne constituent pas une gêne sonore importante.<br />

Les différentes affectations liées au site ne sont pas encore exactement défi nies, ainsi, on<br />

ne peut pas encore dire ce que contiendra chacun des bâtiments ni quel sera leur forme<br />

défi nitive. Si le plan d’aménagement préconise telle ou telle activité, il faut dire que leur<br />

développement dépend aussi des différentes opportunités d’investissement au fur et à<br />

mesure de la réalisation par étapes.<br />

une implantation par étape<br />

Pour pouvoir répondre aux différentes possibilités d’évolutions ainsi qu’aux besoins de<br />

la ville, la réalisation du quartier est prévue en trois étapes, permettant une occupation<br />

progressive du lieu, venant relier la place de la Gare à l’est et le centre commercial<br />

des Entilles à l’ouest. Dans cette logique de développement et de liaison, les premiers<br />

bâtiments construits seront ceux se situant à l’est, pour terminer par les bâtiments ouest.<br />

L’organisation des bâtiments en sorte de modules défi nit par le réseau viaire permet de<br />

marquer les différentes étapes tout en offrant une certaine fl exibilité d’adaptation au fur<br />

et à mesure des besoins du site.<br />

Les éléments considérés par les urbanistes comme des points forts de l’aménagement,<br />

comme le tapis végétal et la rue verte qui concernent tout le quartier seront être mis<br />

en place dès les premières constructions afi n de commencer déjà à changer l’image du<br />

quartier auprès des habitants.<br />

Ainsi, la première étape prévoit :<br />

• la réalisation du bâtiment de tête du site, donnant sur la place de la Gare (A)<br />

• l’aménagement de la place de la Gare<br />

• la réalisation du premier îlot du tissu bâti (B)<br />

• la mise en place du tapis végétal sur l’îlot adjacent au bâti<br />

• l’aménagement complet de la rue verte<br />

La deuxième étape, plus courte, mène le bâti jusqu’au grand pont en effectuant:<br />

• la réalisation des deuxièmes et troisièmes îlots du tissu bâti (C, D)<br />

• l’aménagement défi nitif de la rue verte en relation avec le bâti<br />

189<br />

[ intégration dans le site ]


Quant à la dernière étape, elle termine le site de l’autre côté du grand pont en<br />

proposant :<br />

• la réalisation du pavillon et du parc urbain sous le Grand Pont (E)<br />

• la réalisation du bâtiment de tête à l’ouest du site (F)<br />

• l’aménagement défi nitif de la rue verte en relation avec le bâti<br />

Le tapis végétal consiste en une plantation de prairie sur le terrain adjacent déjà construit<br />

afi n de commencer à modifi er déjà son image, passant de minéral à végétal…<br />

Vis-à-vis du projet de la brasserie, et de l’implantation exacte par rapport au site, nous ne<br />

pouvons pas choisir un emplacement particulier par rapport aux bâtiments avoisinants<br />

puisque ceux-ci n’existent pas encore. Cependant, on peut préférer se situer dans la<br />

première, ou deuxième tranche de construction en fonction de la période désirée pour<br />

l’achat du terrain ainsi que la construction de la brasserie. Simplement, étant donné qu’il<br />

_ état actuel du site en rapport aux espaces verts de la ville<br />

_ relations que le plan d’aménagement tend à établir en végétalisant le site<br />

_ du minéral au végétal<br />

(sans échelle)


s’agit ici d’un travail théorique, nous allons nous affranchir de cette question en imaginant<br />

l’implantation en fonction du bâti défi nitif, en regardant quels sont les avantages à se<br />

trouver plutôt dans le premier, deuxième ou troisième îlot, en avant ou en arrière des<br />

voies et selon les bâtiments et zones environnantes au site.<br />

du minéral au végétal<br />

En tant que friche ferroviaire, le site présente des qualités esthétiques intéressantes,<br />

une particularité et une identité très forte. Voué uniquement à l’utilité, il ne présente ni<br />

arbre ni éléments adapté directement à l’homme, tout y est conçu selon la dimension des<br />

wagons et des marchandises. Cela donne à ce site une sorte d’ambiance colorée par les<br />

voies rouillées, la prépondérance d’éléments métalliques et d’entrepôts en pierre, en bois<br />

ou encore en métal.<br />

Pour réadapter ce site au reste de la ville, le plan d’urbanisation prévoit de casser totalement<br />

cet univers minéral pour le remplacer par une prépondérance d’éléments végétaux qui<br />

semblent-il est plus adapté à l’être humain.<br />

Le plan propose donc de mettre en place un important système de végétalisation<br />

permettant de transformer cet espace principalement minéral en espace végétal venant<br />

dialoguer avec les parc des Crétêts situé en face, tout en permettant une transition douce<br />

de la ville aux voies, mais aussi entre le quartier et l’avenue Léopold-Robert, elle aussi<br />

arborisée. De plus, la valorisation du site par de la verdure devrait privilégier les habitants<br />

ainsi que les piétons. Ces éléments s’inscrivent dans une volonté de cadre de vie de<br />

qualité et durable. L’utilisation des espaces verts répond à la volonté de transformer<br />

une friche qui était alors jugée sans vie et minérale en un espace actif et agréable. La<br />

réalisation par étapes du quartier devrait aussi permettre aussi de transformer peu à peu<br />

le site, renouvelant son image. Si la rue verte sera directement entièrement construite,<br />

chaque étape de construction d’un îlot s’accompagne de la reverdisation de la parcelle<br />

adjacente, c’est-à-dire que cette parcelle sera recouverte d’un tapis végétal, autrement<br />

dit d’un pâturage, en attendant qu’un nouvel îlot vienne s’y installer et ainsi de suite,<br />

permettant de resanifi er les parcelles.<br />

Un important projet de rapprochement entre Le Locle (petite ville située à l’ouest) et la<br />

Chaux-de-Fonds prévoit de conforter la liaison entre les deux villes par une importante<br />

zone verte plantée le long de la route. Cette bande arriverait à la Chaux-de-Fonds par la<br />

zone ouest, soit par le quartier des Eplatures. De là, une continuité de cette bande est<br />

prévue en se transformant en rue verte se prolongeant jusqu’à la gare en passant le long<br />

du quartier du Corbusier. Ainsi, cette rue verte au niveau du quartier serait non seulement<br />

un espace public agréable permettant de servir d’espace tampon entre le dos du bâti de<br />

191<br />

[ intégration dans le site ]


l’avenue Léopold-Robert avec le quartier, mais aussi une volonté de fortifi er la zone en<br />

tant qu’espace d’une centralité en liaison avec le reste de la ville, mais aussi de la région.<br />

J’éprouve quelques diffi cultés envers les projets d’urbanisme qui ont tendance à surutiliser<br />

les espaces verts pour marquer des liens ou alors une ambiance à l’échelle humaine<br />

et piétonne. La route entre Le Locle et la Chaux-de-Fonds est déjà entourée de champs<br />

et les forêts de sapins, je comprends donc mal comment une nouvelle bande de verdure<br />

plantée à cet endroit pourrait venir conforter cette liaison. Maintenant, poursuivre cette<br />

liaison en rue verte me semble aussi quelque peu tirée par les cheveux. Par contre,<br />

justifi er cette rue verte en tant qu’espace tampon entre un arrière de front bâti (celui<br />

correspondant à la frange sud du Pod) et un nouveau bâti me semble plus cohérent.<br />

Finalement, une frange paysagère est aussi prévue le long du côté sud du site et longeant<br />

les voies pour marquer la limite de cette zone créer une sorte de barrière protégeant des<br />

voies. Les voies constituent un élément esthétique fort du site qu’il semble dommage de<br />

cacher. Si maintenant, certains habitants sont gênés par cette vue, rien ne les empêche de<br />

se protéger par leurs propres moyens, mettant à leurs fenêtres, au balcon ou au sol toutes<br />

sortes de plantes. De plus, cela aura au moins l’avantage de marquer un peu de vie formée<br />

par les usages des habitants.<br />

0 10 50 m.<br />

_ accessibilité<br />

(sans échelle)<br />

_ réseau principal _ réseau secondaire _ rue desserte secondaire<br />

_ rue verte avec espace circulation _ cheminement piétonnier


Transformer le site d’espace minéral en espace végétal pour conforter le lien avec la ville<br />

est lui aussi quelque peu paradoxal. La Chaux-de-Fonds est reconnue comme une ville<br />

principalement minérale. Créer un quartier vert paraît plus être une enclave qu’une liaison<br />

ou un prolongement de la ville.<br />

Nous ne nous occuperons donc pas particulièrement de la relation aux différents éléments<br />

végétalisés, privilégiant plutôt le rapport avec les voies ferrées et la mémoire du lieu. De<br />

plus, l’aspect minéral et ferroviaire / industriel, paraît correspondre d’autant mieux pour<br />

un bâtiment de brasserie.<br />

accessibilité<br />

Par sa situation en bordure de la gare, le site profi te de toutes les possibilités de transports<br />

et d’accessibilités offertes par la ville : bus communaux, car postaux et trains. Cependant,<br />

il ne faut pas oublier que si les voies ferrées représentent un mode de communication<br />

important, au niveau du sol urbain elles peuvent devenir une barrière urbaine diffi cilement<br />

_ stationnement en surface _ stationnement souterrain<br />

_ emprise sous-sol bâti<br />

_ passerelle _ espace mixte _ place de la gare<br />

_ arrêts bus<br />

193<br />

[ intégration dans le site ]


franchissable. A l’heure actuelle, les voies séparent à ce niveau le nord du sud de la ville<br />

et seules deux possibilités de franchir les voies se trouvent à proximité du site : le passage<br />

sous-voies de la gare ainsi que le grand pont que l’on emprunte pour entrer de la ville en<br />

sortant de la route. Si ces deux possibilités d’accès sont encore suffi santes étant donné<br />

que le site est encore occupé par les entrepôts CFF, une nouvelle possibilité d’accès a été<br />

prévue par le plan afi n de rendre le site directement accessible depuis la partie sud de la<br />

ville. Il s’agit d’une passerelle piétonne, reliant la rue du commerce située au sud des voies<br />

avec le quartier Le Corbusier, qui reprend exactement l’ancienne place de la passerelle<br />

qui existait auparavant.<br />

Au niveau des accès piétons et automobiles, le site est desservi par le réseau viaire qui a<br />

été prolongé jusqu’aux voies ferrées. Le schéma reproduit ci-contre permet de voir les<br />

différentes possibilités d’accès.<br />

En parlant de la Chaux-de-Fonds, nous avions évoqué la taille de la ville en disant qu’il<br />

était possible de joindre depuis le centre n’importe quel endroit en moins de 10 minutes à<br />

pied. La brasserie située à cet endroit jouirait donc d’une accessibilité piétonne importante<br />

et non négligeable connaissant les réglementations ainsi que les risques liés à l’alcool au<br />

volant.<br />

conclusions au sujet du plan d’urbanisme<br />

Si le plan en damier de la ville de la Chaux-de-Fonds permet une certaine souplesse<br />

dans l’attribution des massifs, ici, le plan d’aménagement urbain, par ces nombreuses<br />

contraintes (obligation d’implanter des îlots constitués de barres et coupés par des<br />

césures) vient fi ger complètement le site, lui retirer toutes les possibilités qu’il aurait pu<br />

permettre en gardant simplement les périmètres délimités par le réseau viaire et formant<br />

les massifs.<br />

Fort de cette constatation, le projet sera conçu en ne tenant compte que des points<br />

forts et intéressants établis par le plan. Nous ne sommes pas là pour faire une critique<br />

complète du plan, il semblait simplement nécessaire de mettre au clair certains éléments<br />

qui contredisent l’identité du lieu. Nous pourrions aussi parler de la continuité d’identité<br />

ou de mémoire d’un lieu à travers ses changements et différentes affectations, mais ce<br />

n’est pas le propos ici. Il s’agit d’un site intéressant qui offre de nombreuses possibilités,<br />

et que, dans le cas d’un projet de diplôme, nous pouvons nous affranchir de certaines<br />

données jugées comme trop rigides et ne correspondant pas à l’identité du site en tant<br />

qu’ancienne friche ferroviaire.<br />

Le morcellement provoqué par les limites d’implantation et les césures, ainsi que la


surabondance d’espaces verts et piétons proposés par le plan d’affectation semblent<br />

quelque peu diffi ciles et viennent détruire l’unité du site. Nous ne respecterons donc pas<br />

les données liées aux césures entre les barres de bâtiments ainsi que la nécessité de créer<br />

deux alignements de barres par îlot.<br />

Ainsi, nous tiendrons compte des questions liées à l’environnement de la ville, du<br />

territoire, et du fait de travailler en bordure de chemin de fer. Nous garderons du plan<br />

le principe de rue verte en tant qu’espace tampon, ainsi que les alignements extérieurs<br />

donnés pour chaque îlot, et la continuité des rues préexistantes jusqu’aux voies, venant<br />

défi nir les îlots.<br />

Les éléments du plan qui ont été mis de côté ne l’ont pas été en vue de faciliter<br />

l’implantation de la brasserie, mais simplement pour rendre le plan moins rigide. Les<br />

projets d’urbanisme ne devraient pas être aussi directeur allant jusqu’à défi nir la moindre<br />

lignée d’arbre, les moindres passages, etc., limitant les libertés d’implantation.<br />

De plus, la fi xité des règles et la multiplication d’espaces verts vont à l’encontre des idées<br />

de foisonnement et de dynamisme que l’on imagine pour un centre ville. A proposer trop<br />

d’espaces verts ou d’espaces piéton, on dilue l’espace au risque fi nalement qu’il n’y ait<br />

plus personne nulle part.<br />

Bien sûr il faut des réglementations, mais il faut qu’elles soient suffi santes pour laisser la<br />

ville vivre, l’étouffer n’aidera pas à développer un quartier dynamique.<br />

situation de la brasserie dans le quartier<br />

Certaines critiques ont été émises vis-à-vis du plan d’urbanisme établi pour ce lieu. Il<br />

n’empêche que les aspects liés à la centralité du site, à la mixité des occupations qui y<br />

seront implantées, ainsi que sa proximité avec la gare en font un lieu particulièrement<br />

intéressant pour l’implantation de la brasserie.<br />

Etant donné qu’aucun bâtiment sur le site n’a encore été construit, nous ne pouvons pas<br />

déterminer de liens avec l’entourage direct du bâtiment. Nous situerons donc le bâtiment<br />

de brasserie en fonction de l’entourage du site, ainsi que des possibilités de surfaces<br />

offertes par les îlots.<br />

Le site dans son entier se situe au centre-ville. Cependant, il semblerait pour les chauxde-fonniers<br />

que la partie ouest, à proximité du centre Coop les Entilles, soit déjà excentré<br />

bien qu’il se situe entre 5 et 10 minutes à pied de la gare. De plus, il semble que le chauxde-fonnier<br />

ne soit pas très enclin à parcourir des petites distances à pied, au vu de ce<br />

195<br />

[ intégration dans le site ]


_ éléments à retenir, la brasserie dans le site<br />

(sans échelle)<br />

120 m<br />

51 m<br />

_ éléments du plan d’aménagement à retenir: la définition des îlots en fonction du réseau viaire<br />

le reste du bâti sera imaginé comme obéissant au plan d’aménagement<br />

F<br />

46 m<br />

_ le bâtiment de brasserie demande une surface au sol de 1000 m2 en voulant occuper un îlot dans son entier<br />

50 m<br />

E<br />

10 m<br />

155 m<br />

16 m 15 m


13-15 m<br />

D<br />

11.5 m 14 m<br />

13-15 m<br />

73 m<br />

16 m 16 m<br />

96 m<br />

rapport entre les dimensions des îlots A et C et celles de la brasserie<br />

16 m 15 m 13 m<br />

les limites d’implantation sur le bord extérieur des îlots laissant libre la disposition interne pour BFM<br />

la rue verte et les différents accès<br />

3430 m2<br />

1000 m2<br />

C<br />

B<br />

10 m<br />

36 m<br />

A<br />

1000 m2<br />

2016 m2<br />

56 m<br />

197<br />

[ intégration dans le site ]


que les personnes interrogées ont bien pu me répondre. Il est sans doute préférable de<br />

se positionner le plus possible à l’est, à proximité de la gare et non loin du centre de la<br />

vieille ville, et ceci d’autant plus que l’on se rapproche d’un important lieu de trafi c et de<br />

mouvement de la ville.<br />

Bien que les livraisons ne s’effectuent pas tous les jours à la brasserie, les infrastructures<br />

doivent tout de même permettre la circulation, les manœuvres ainsi que le parcage de<br />

camions. Le périmètre extérieur de la brasserie devrait aussi comprendre des places de<br />

parking, une installation de terrasses ainsi qu’un espace de stock extérieur. Ces surfaces<br />

ne sont pas comprises dans les 1000 m2 au sol estimés pour le bâtiment de brasserie. Bien<br />

qu’il ne s’agisse pas à proprement dit d’une grande brasserie, elle nécessite tout de même<br />

une grande surface de terrain.<br />

De plus, comme nous l’avions vu, la brasserie est une entreprise vouée à s’agrandir. Même<br />

si nous proposons un nouveau bâtiment doublant les capacités de l’ancienne brasserie,<br />

il ne faut pas perdre de vue les futurs agrandissements possibles. La plupart des usines<br />

se trouvent en périphérie, où l’espace est suffi sant pour leur agrandissement. Ici, nous<br />

nous situons en ville, le périmètre est donc donné d’avance. Selon ces deux points de vue<br />

(infrastructures extérieures et surface limitée) il est sans doute plus judicieux de consacrer<br />

à la brasserie un îlot dans son entier, lui permettant suffi samment d’espaces en vue d’un<br />

agrandissement mais aussi pour ses installations extérieures.<br />

La profondeur des parcelles sur tout le site est constante entre 60 et 65 mètres, la largeur<br />

variant selon les îlots.<br />

Selon ces critères, deux possibilités d’implantations sont considérées comme intéressantes :<br />

l’occupation de l’îlot A, en tête est du site, et celle de l’îlot C.<br />

L’îlot A s’avère intéressant du point de vue de sa proximité directe avec la gare, en<br />

particulier de la place. La zone ouest de la place, contiguë au bâtiment A, sera aménagée<br />

en espace piéton. Sur ce site, il serait donc possible de bénéfi cier du foisonnement de<br />

population drainée par cette interface de transport, d’une possibilité d’ouverture donnant<br />

sur la place, créant ainsi un excellent moyen de représentation, tout autant que la proximité<br />

des voies, qui, comme nous l’avions vu constitue un élément majeur de l’esthétique du<br />

site.<br />

De plus, il s’agit d’un des deux bâtiments de tête du quartier. L’emplacement en serait<br />

d’autant plus fort ; la brasserie venant servir de limite à un complexe urbain. Maintenant,<br />

le plan d’aménagement prévoyait que le bâtiment A devrait marquer un front bâti fort<br />

venant défi nir la place de la gare. Par fort, il faut comprendre haut (environ 20 mètres)<br />

Si une telle hauteur permet peut-être de défi nir une limite et un front bâti, elle peut<br />

aussi devenir une sorte de mur entre le nouveau quartier et la place. Si l’un des buts<br />

du quartier est de se créer une continuité avec le reste de la ville et permettre plusieurs


moyens de liaison, je pense qu’un bâtiment de tête haut de 20 mètres n’est pas forcément<br />

la solution (même si cette hauteur correspond à celle des bâtiments de la frange nord du<br />

site). Permettre de voir, depuis la place de la gare, derrière ce bâtiment de tête, de faire<br />

sentir qu’il s’y passe quelque chose, qu’un quartier à remplacé les anciens entrepôts me<br />

parait intéressant. Le bâtiment de brasserie ne sera pas une construction haute, puisque<br />

nous avions vu que la surface utile nécessaire à l’intérieur équivaut à 9 mètres. Sa hauteur<br />

s’apparentera donc à celle des constructions de la frange sud du site. Ainsi, selon son<br />

implantation, le bâtiment de brasserie pourrait garder cette fonction de défi nition de la<br />

place de la gare tout en évitant de ce présenter comme une limite. La surface totale de<br />

cette parcelle équivaut à 3000 m2 (50 x 63 m), elle est jugée comme suffi sante pour les<br />

besoins de la brasserie.<br />

La deuxième possibilité d’implantation se situe sur l’îlot C. De par sa position plus ou<br />

moins centrale dans le quartier, elle se trouve dans une autre position, entourée de deux<br />

autres îlots occupés par des logements et ateliers. Le rapport à l’entourage est donc<br />

sensiblement différent. Nous avions soutenu précédemment qu’il était tout à fait possible<br />

d’implanter une brasserie à proximité de logements dans un cadre urbain, compte tenu<br />

du caractère social du programme. Ici, cet emplacement permet peut-être une meilleure<br />

intégration en tant qu’éléments participatifs du quartier, mais il perd la relation directe<br />

qu’il avait avec le reste de la ville en se situant au bord de la place de la gare. Cette<br />

appartenance au quartier peut s’avérer intéressante vis-à-vis de la position en tant que<br />

centre de rencontre et de quartier que possèdent certains bars à bière. Ici, la brasserie<br />

servirait de lieu public du quartier entre les logements et ateliers, une alternative aux<br />

espaces extérieurs. La brasserie présentant une certaine taille, elle concerne l’ensemble<br />

de la ville. En se trouvant au cœur du quartier elle peut permettre d’attirer les habitants<br />

extérieurs à pénétrer au cœur de ce quartier, ajoutant ainsi à son dynamisme. Le plan<br />

d’urbanisme a créé un quartier de logements et d’ateliers délimité par deux fronts bâtis<br />

importants venant accueillir des activités de commerce, de culture et d’éducation. Si<br />

l’ensemble du site permet une certaine mixité, les différentes activités ont été défi nies<br />

par îlots, créant ainsi un site en 3 parties : îlot A, îlots B-C-D, et îlots E-F. Les îlots B-C-<br />

D étant réservés à du logement et des ateliers et entourés de verdure ne correspondent<br />

pas tout à fait au dynamisme d’un centre urbain. Disposer une brasserie en son centre<br />

permettrait donc peut-être d’augmenter les liens avec le reste de la ville.<br />

La question de l’implantation du projet dans le quartier reste ici encore ouverte, chacune<br />

des implantations ayant ses répercutions sur le bâtiment. Le choix se fera sûrement au<br />

début de l’élaboration du projet, lorsque les besoins en espaces et agencements de la<br />

brasserie auront été étudiés de manière plus profonde.<br />

199<br />

[ intégration dans le site ]


_ volontés de projet, synthèse et conclusion


_ bodegas Ysios, Rioja, Espagne, Santiago Calatrava, 2001<br />

_ domaine Quintessa, Californie, Walker Warner Architects, 2001


[ volontés de projet, synthèse et conclusion ]<br />

Nous avons vu que les brasseries artisanales constituent le nouveau type naissant dans le<br />

monde brassicole actuel et qu’il nécessite de trouver une forme, un espace, ainsi qu’une<br />

représentation. Ainsi se pose la question de l’image à donner pour un nouveau bâtiment<br />

brassicole correspondant à la Brasserie et Franches Montagnes et implanté dans la ville<br />

de la Chaux-de-Fonds.<br />

du côté des domaines viticoles<br />

Les recherches pour arriver jusqu’ici ont été longues, oui, mais elles nous ont permis de<br />

défi nir le côté social et populaire de la bière, chose qui ne m’était pas vraiment clair au<br />

départ. En effet, au début de mes recherches, je voulais faire un bâtiment de brasserie<br />

alliant dégustation et restauration dans le but de rendre à la bière ses lettres de noblesse<br />

qu’elle avait perdu face au vin. Perdu ? Pas vraiment fi nalement, puisqu’elle a toujours<br />

été populaire. Toujours est-il que nous pouvons nous interroger maintenant, avant de<br />

commencer le projet, sur un parallélisme entre les grands bâtiments vinicoles, projetés<br />

aujourd’hui par de grands architectes, et la volonté d’un bâtiment de brasserie.<br />

Depuis plusieurs années, on voit les architectes s’intéresser au cas des caves à vin. Les<br />

techniques dans le monde vinicole s’étant passablement modernisées, les besoins pour<br />

les nouveaux bâtiments s’avèrent différents des anciennes caves. Si il existe une grande<br />

quantité de petites caves, la dimension des domaines est tout autre dans le Nouveau<br />

Monde par exemple, et la production impressionnante, s’apparentant à une production<br />

industrielle. Les architectes se sont intéressés aux deux cas de manière indifférente.<br />

Aujourd’hui, les grandes caves utilisent de nombreuses machines, les foudres en chêne<br />

sont remplacées en grande partie par des cuves en inox. Cependant, bien que les nouveaux<br />

bâtiments de caves soient tout à fait modernes, ils s’inscrivent dans une sorte de tradition<br />

et de noblesse du vin. Rien, mise à part les dimensions, ne laisse supposer une production<br />

industrielle, les installations de production ultramodernes sont cachées derrière l’idée de<br />

tradition et de grandeur représentée par le bâtiment.<br />

La plupart de ces bâtiments créent un lien particulier avec leur environnement, chose que<br />

l’on ne retrouve que très peu dans le domaine brassicole. En effet, en ce qui concerne les<br />

caves à vin, celles-ci se trouvent sur le domaine même où sont plantées les vignes, créant<br />

un rapport au sol ainsi qu’à son environnement particulier. Chose que l’on ne retrouve<br />

absolument pas pour les brasseries, puisque l’ensemble des matières premières (mise<br />

à part l’eau) sont importées. Cette notion d’importation des matières dans le cas des<br />

203<br />

[ volontés de projet, synthèse et conclusion ]


_ Weingut Schützenhof, Autriche, Pichler & Traupmann Architekten, 2004<br />

_ Dornier Wines, South Africa, Christoph Dornier, Malherbe + Rust Architects, 2003


asseries en constitue un facteur social important, puisque l’affranchissement du terrain<br />

permet de construire une brasserie presque n’importe où. Revenons-en donc aux caves.<br />

Intégrées au terrain, utilisant des matériaux propres à la région, ou alors s’inscrivant dans<br />

la linéarité des vignes, celles-ci tissent une relation avec le territoire important. Citons par<br />

exemple le cas des Bodegas Ysios de Santiago Calatrava, dont la forme courbée des murs et<br />

les toits arqués dialoguent avec les montagnes alentours.<br />

Du point de vue de la clientèle, ces domaines mettent en général un accent particulier sur<br />

les espaces de dégustation et de vente. Ainsi, la transparence de ces espaces semble de<br />

mise, mais il est rare de voir une transparence sur les lieux de production. Comme si l’on<br />

voulait éviter de noircir la grandeur du produit par une image industrielle. Dans les visites<br />

de grandes caves, on se garde bien souvent de montrer les moyens de productions actuels,<br />

préférant mettre en scène les anciennes machines, et les tonneaux de bois, plus propres<br />

à véhiculer une image traditionnelle. Il en est de même en ce qui concerne le bâtiment.<br />

L’utilisation de matériaux nobles dans la construction et dans les espaces intérieurs n’en<br />

est qu’une partie. La production se trouve souvent au sous-sol ou alors totalement cachée<br />

du public. En général, la dégustation se fait dans un showroom ou un espace loundge<br />

généreux et vitré, avec vue sur les vignes ou alors sur les barriques. La mise en scène des<br />

tonneaux est un aspect important de ces caves, puisque le tonneau représente, avant la<br />

vigne même, la production du vin. Le fait de vouloir montrer essentiellement la partie<br />

fi nale de la production ou bien les vignes semble tellement fort qu’il m’a été impossible<br />

de trouver des images des tapis roulants amenant les grappes pour être triées avant de<br />

passer dans les pressoirs, ni les pompes, ni les laboratoires de contrôle, etc…<br />

caractère du bâtiment<br />

Avant de devenir de grands groupes, les usines ont d’abord été des petites brasseries.<br />

En s’agrandissant et en produisant en plus grande quantité, les brasseries artisanales ne<br />

doivent toutefois pas passer de l’autre côté en perdant les qualités qui en ont fait leur<br />

renommée. Nous avons vu que l’artisanat n’était pas fonction de la taille ni de l’utilisation<br />

ou non de machines par la brasserie. Il se défi nirait ici comme la personnalité mise par le<br />

brasseur dans son produit, brassant ainsi ce qu’on appelle des bières de caractère.<br />

Nous avons vu aussi que la brasserie semble être une entreprise tendant à s’agrandir,<br />

et qui doit être considérée comme une industrie. D’ailleurs, la technicité des machines<br />

employées répond de ce caractère industriel. Même la brasserie Cantillon, qui utilise<br />

toujours des machines datant du début du 20 ème siècle se défi nit comme une industrie.<br />

Nous avons critiqué différents brewpub en rapport à leur côté pseudo antiquisant de la<br />

bière et leur décor créé de toutes pièces, créant ainsi une image derrière laquelle se cacher.<br />

205<br />

[ volontés de projet, synthèse et conclusion ]


_ bodegas Ysios, Rioja, Espagne, Santiago Calatrava, 2001<br />

_ Dornier Wines, South Africa, Christoph Dornier, Malherbe + Rust Architects, 2003


La réponse pour un nouveau bâtiment de brasserie alliant dégustation / restauration et<br />

production serait donc à rechercher en rapport à ce côté industriel. Le projet ne consiste<br />

pas en un bar qui veut brasser de la bière à servir à ses clients, mais en une industrie<br />

produisant de la bière qui propose d’offrir, dans le cadre de sa production, un lieu de<br />

consommation. La logique est ici inversée et pourrait amener à un concept ainsi qu’à<br />

des relations originales. Amener les gens dans une brasserie pour déguster ou boire et<br />

manger, c’est le amener dans un univers industriel afi n qu’ils voient comment la bière est<br />

produite, et arrêter de se cacher derrière des faux-semblants.<br />

image du bâtiment<br />

L’importance de l’image d’un bâtiment dans la représentation est un élément à considérer<br />

en tant que vecteur d’une identité. L’image évoquée par un bâtiment est importante non<br />

seulement vis-à-vis de son identifi cation en tant qu’élément participatif d’un lieu, mais<br />

surtout, en ce qui concerne des bâtiments de production, en tant qu’image du produit<br />

lui-même ainsi que des valeurs véhiculées par l’entreprise.<br />

Etant donné que le site pour le nouveau bâtiment de la brasserie des Franches-Montagnes<br />

se situe dans la ville de la Chaux-de-Fonds, et non plus dans un zoning industriel, le<br />

bâtiment va devoir s’intégrer ou s’accorder à son environnement, tout aussi bien bâti que<br />

paysager. C’est ici que l’histoire de la bière et ses traditions mais aussi la présentation de<br />

la Chaux-de-Fonds et de ces éléments signifi catifs vont nous aider à établir une suite de<br />

volontés.<br />

aspect extérieur du bâtiment et conception (forme et fonction)<br />

L’aspect ainsi que la forme extérieure du bâtiment seront logiquement fortement<br />

dépendants de l’organisation interne ainsi que des différentes étapes de productions de<br />

la bière, sachant que certains espaces ont besoin d’être séparés ou mis à l’écart. Cette<br />

organisation est liée par des impératifs d’exploitation et d’économie au niveau de la<br />

production, qui ont en général un certain impact sur la construction ainsi que l’aspect<br />

extérieur du bâtiment.<br />

Cependant, même si le bâtiment sera le résultat d’une organisation ainsi que de choix les<br />

plus rationnels possibles, l’image du bâtiment doit apporter une certaine émotion.<br />

Une des volontés du projet dans le cadre de ce diplôme sera de proposer un projet<br />

207<br />

[ volontés de projet, synthèse et conclusion ]


« Des bières ont en elles des parcelles de lumières. D’autres préfèrent jouer avec les refl ets du soleil, de la<br />

bougie ou de l’âtre, certaines ont la couleur des épis mûrs des moissons, d’autres la rousseur des chevelures<br />

de pucelles, d’autres encore sont pareilles à des morceaux d’ambres que les marchands rapportent du<br />

Nord. Et j’en sais aussi dont la noirceur est celle des nuits sans lune ou, pire, celle des consciences des<br />

mécréants. Infi nies sont les nuances de leurs robes, pour qui a des yeux pour voir. Car l’oeuil a sa part,<br />

et ce serait grave faute que de le négliger. Boit-on avec bonheur ce qui déplaît à la vue ? Ouvrez encore les<br />

yeux pour contempler la mousse. N’est-ce pas prodigieux spectacle que de la voir naître, prendre forme et<br />

s’épanouir ? C’est l’écume de la mer servie à votre table. Et comme elle, elle est selon l’humeur des fl ots<br />

fi ne ou grossière, calme ou tumultueuse, dentelle ou drap de laine. Tendez l’oreille : honnête mousse n’élève<br />

pas la voix. Elle chuchote ou dit messe basse, pas plus. Brève est la destinée d’une mousse bruyante.<br />

Maintenant respirez votre godet. Sentez l’orge et le froment de vos champs, et le houblon qui monte le<br />

long des murs de l’évêché. Si vous avez affaire à la cervoise, débusquez le parfum des plantes du gruyt,<br />

celles de la forêt ou du jardin de l’apothicaire. Notez comme affl eurent les accents du miel amoureusement<br />

récolté. Bref, laissez passer dans vos narines les trésors emprisonnés dans le précieux liquide, les moissons,<br />

les herbes et les mystérieux ferments.<br />

Enfi n, après nous être pas à pas approché de notre bière, buvons-là et suivons sont chemin sur notre<br />

langue et dans notre gosier de bon chrétien- Qu’elle pétille en bouche, qu’elle soit calme ou tempête,<br />

qu’elle s’épanouisse en amertume, en douceur, en âcreté, qu’elle se fasse ronde et moelleuse, mince et sèche,<br />

qu’importe ! A chaque bière sa personnalité. Maudites soient celles qui n’en ont point ! Mais n’allez pas<br />

pour autant accorder votre confi ance à ces brasseurs qui, pour donner du caractère à leurs bières, puisent<br />

dans les essences les plus exotiques et les plantes et fruits d’au-delà des mers. Ils mériteraient de sentir sur<br />

leur nuqze le glaive de l’excommunication ! Le mériteraient aussi ceux qui vont que de la bière compte<br />

seule la première gorgée et que les autres sont désillusion ! Bien au contraire le plaisir s’épanouit en se déclinant<br />

sur des registres inédits, tant la bière en perdant sa fraîcheur gane en saveur et arômes nouveaux.»<br />

(Pierre Guingamp, in Histoires de Bières, L’imposteur)


éalisable constructivement et fi nancièrement. Bien que l’aspect fi nancier ne soit pas<br />

la première donnée à prendre en compte dans le projet, il semble important, vu le type<br />

d’industrie projetée de rester dans un cadre simple et humble. Le travail de l’architecte<br />

consiste à proposer une solution originale pour le bâtiment de production, en ressemblant<br />

et organisant certaines fonctions. Son rôle ne se limite donc pas à proposer un bâtiment<br />

qui soit simplement agréable à regarder, mais qui soit aussi effi cace et hospitalier.<br />

relations entre production et restauration<br />

Nous avons vu en parlant des bars produisant leur propre bière qu’il était quasiment<br />

impossible de boire un verre dans un de ces bars en même temps que le brasseur produise<br />

sa bière. Ainsi, on se trouve généralement dans un cadre lié à la bière, mais sans jamais<br />

voir comment elle est vraiment produite. Bien sûr, on peut voir les cuves, mais cela ne<br />

nous avance pas vraiment.<br />

Nous voulons donc éviter ici ce cas, ainsi que celui des domaines vinicoles, dans lequel on<br />

déguste dans un certain cadre, bien souvent agréable, mais qui ne nous plonge pas non<br />

plus dans la réalité de la production. Ainsi, nous voulons apporter un caractère didactique<br />

à la combinaison entre dégustation-restauration et production. De mon point de vue, ils<br />

serait fascinant et captivant de pouvoir déguster une bière tout en regardant comment<br />

est produite.<br />

Les espaces pour le public donneraient ainsi directement sur la salle de brassage pour la<br />

restauration et sur la salle de fermentation / garde pour la dégustation, donnant à voir<br />

ainsi le différentes étapes de production. Cette mise en relation a pour but de créer une<br />

certaine interaction entre les deux programmes et un aspect didactique pour celui qui<br />

regarde.<br />

lumière !<br />

En parlant de la dégustation dans le premier <strong>fascicule</strong>, nous avions vu que la lumière était<br />

un facteur important afi n de pouvoir apprécier la couleur, la mousse, la limpidité et la<br />

clarté d’une bière. Il faudrait pouvoir jouer avec la palette des couleurs de la bière pour<br />

mettre en avant la lumière. Développer une ambiance interne qui refl ète ces couleurs de<br />

bière.<br />

209<br />

[ volontés de projet, synthèse et conclusion ]


De plus, même si de nombreuses machines interviennent dans la production de la<br />

bière, la brasserie est une entreprise humaine, il ne s’agit pas d’un lieu de production<br />

dépourvu de vie. En cela, la lumière extérieure sera un point important du projet afi n<br />

de rendre agréable le travail en salle. Les usines aveugles ainsi que les entrepôts faits<br />

d’assemblages métallique et de bardage de tôle ondulée ne sont pas vraiment les espaces<br />

les plus humanisés. Etant donné que le programme du projet met en avant l’aspect social<br />

de la brasserie, il est donc logique de travailler sur les notions de calme, d’air, de salubrité,<br />

de couleur, d’esthétique et de lumière, et ceci autant pour les gens qui y travaillent que<br />

pour ces qui viennent s’y détendre permettant ainsi de créer peut-être aussi des relations<br />

entre les deux programmes.<br />

Cette lumière sera donc particulièrement traitée en ce qui concerne les espaces de<br />

restauration et de dégustation. Si les anciennes tavernes et estaminets avaient en grande<br />

partie l’habitude d’être sombres ou nichés au fond de cave, ici l’attitude à prendre est<br />

différente. Il ne s’agit pas de questions d’hygiénismes mais plutôt de bien-être, dans la<br />

volonté d’offrir le meilleur espace possible pour la dégustation d’une bière.<br />

De nombreuses publicités de bières reprennent les thèmes de la couleur et de la lumière,<br />

éclairant souvent la bière d’une grand soleil pour en révéler l’éclat, ou alors jouant sur<br />

les nuances d’un coucher de soleil rappelant les différentes teintes que peu prendre la<br />

bière. D’une couleur dorée, avec plus ou moins de refl ets, des tons chauds et ambres, ou<br />

alors le sombre des bières brunes, la palette de nuances de couleurs est infi nie et presque<br />

indéfi nissable. Le contrôle de la lumière dans le bâtiment devrait permettre de rendre ces<br />

couleurs au mieux. En toute logique, l’enveloppe du bâtiment ainsi que les ouvertures<br />

participeront fortement dans cette gestion lumineuse, ne se voulant donc pas simplement<br />

enveloppe fonctionnelle, mais aussi créatrice d’émotions. La lumière est aussi importante<br />

dans la ville de la Chaux-de-Fonds, où l’implantation et l’échelonnement des massifs<br />

permettent le maximum d’ensoleillement.<br />

La question de l’enveloppe et de ses ouvertures sera donc primordiale. Comme nous<br />

l’avons vu, les bâtiments de la Chaux-de-Fonds sont particulièrement massifs pour<br />

résister au rude climat. La neige y est abondante en hiver, forçant l’aspect robuste des<br />

constructions. Il faut que la façade puisse résister à ce poids, à cette masse qui tombe du<br />

ciel, parfois tout droit, mais aussi parfois, quand il y a trop de vent, de manière presque<br />

horizontale…. Des bâtiments souvent simples donc, avec des ouvertures de petites<br />

tailles.<br />

Le bâtiment de brasserie devra-t-il suivre cette logique ou bien se positionner en contrecourant<br />

? Sera-t-il une sorte de cube de verre recouvert d’une seconde enveloppe fi ltrant<br />

la lumière, ou bien un autre bâtiment massif jouant sur la forme de ses ouvertures ? En<br />

voulant travailler la lumière naturelle, le projet sera confronté au problème de fi ltration<br />

de lumière extérieure: s’ouvrir assez pour avoir la lumière qui nous convient tout en étant<br />

suffi samment barricadé pour supporter les conditions hivernales.


des toits<br />

En parcourant la Chaux-de-Fonds, on est frappé par les importantes toitures des bâtiments.<br />

Leurs dimensions, leur surface et leur forte inclinaison pour recevoir la quantité de neige<br />

ont font une partie importante du paysage urbain. Leur forme vient rompre l’aspect<br />

prismatique du bâti en damier. Lorsque l’on regarde la ville depuis les quartiers nord ou<br />

bien le parc de Crétêts, la couleur des tuiles, cette sorte de brun-ornagé particulier vient<br />

casser l’apparence grise de la ville, en la transformant en bâti bicolore.<br />

Cette prédominance infl ue l’envie de créer pour le bâtiment de brasserie une enveloppe<br />

continue qui soit à la fois toiture et à la fois façade. Le site se situant dans la partie la plus<br />

basse de la ville, la vue que l’on a du site depuis le parc des Crétêts situé juste en face est<br />

intéressante. Le plan d’aménagement du site demande que les bâtiments construits aient<br />

forcément une toiture plate, soit végétalisée soit accessible. Ce choix aurait été motivé par<br />

des raisons esthétiques. Toujours est-il que ce type de toitures rompt souvent la continuité<br />

avec le reste de la façade, et ne s’inscrit pas nom plus dans la vision des toitures de la<br />

Chaux-de-Fonds. Depuis le parc, on aurait l’impression de voir sur le site une suite de<br />

plateaux ne s’inscrivant pas particulièrement dans la continuité de la ville.<br />

une différenciation par la structure et les matériaux ?<br />

Nous avons évoqué dans la lumière, la volonté de faire transparaître à l’intérieur du<br />

bâtiment une ambiance lumineuse ainsi qu’une qualité de lumière se rapprochant des<br />

différentes teintes que l’on trouve dans la bière. Les matériaux de l’enveloppe ainsi qu’une<br />

partie des matériaux internes devraient concourir à cet aspect.<br />

Deux programmes différents, mais cependant en relation directe et visuelle, se côtoieront<br />

dans le nouveau bâtiment de brasserie. Si nous avons déjà énoncé que le bâtiment en<br />

lui-même revêtirait un certain côté industriel, nous pouvons nous poser la question des<br />

espaces intérieurs.<br />

En parlant des différents débits de boissons (estaminets, bar à bière, tavernes, etc.), nous<br />

avions vu que le bois semblait être un des matériaux de prédilection de ce genre de lieu.<br />

Table, chaises, boiseries sur les murs et le plafond, tout est fait de bois. Cet agencement<br />

se mélange aux vitraux qui se trouvent régulièrement dans ce genre de lieux et à la<br />

décoration, entre fumée de tabac et lumière sombre. Un bar à bière devrait-t-il forcément<br />

regrouper ces critères ? Je ne pense pas.<br />

211<br />

[ volontés de projet, synthèse et conclusion ]


_ la prédominace des toitures


Cependant, la question du bois s’est bien évidement posée en tant qu’élément de<br />

construction. La brasserie des Murailles à Meinier a installé un lieu de dégustation attenant<br />

à leur installation de cuverie. Les meubles, en passant des armoires, au bar et à la table<br />

rappellent le lourd mobilier campagnard en bois. Pour eux, il était totalement impossible<br />

de concevoir un espace où boire la bière sans une prépondérance de bois.<br />

En discutant avec Jérôme Rebetez, le bois ne fait pas la bière et inversement. Il n’y a<br />

aucun décor à créer autour de la bière. Elle est ce qu’elle est. Ce n’est par le décor qui<br />

nous entoure qui fait que l’on ouvrira une bouteille, mais le fait d’être avec des amis, ou<br />

des gens avec qui discuter. Pour lui, le décor de la bière est avant tout social.<br />

Introduire un espace de dégustation/restauration dans un lieu de production ne facilite pas<br />

la différenciation entre les deux programmes. On ne boit pas une bière exactement dans<br />

la même ambiance ni le même espace que celui où elle est produite. C’est ici qu’intervient<br />

une volonté de différencier les deux programmes co-existants dans le bâtiment par un<br />

changement au niveau de la structure et peut-être aussi des matériaux.<br />

La structure première correspond au but même du bâtiment : le lieu de production.<br />

Ensuite, viendrait s’y greffer une seconde structure correspondant aux espaces publics<br />

que l’on veut y introduire pour faire découvrir la bière. Nous aurions ainsi deux structures<br />

s’entremêlant, l’une était dépendant de l’autre.<br />

Au niveau des matériaux fi nalement, les lieux de production de bière exigent que les<br />

sols, murs et plafonds soient lavables, ceci pour des raisons d’hygiène. Etant donné que<br />

de nombreux produits corrosifs sont utilisés, les matériaux de construction en contact<br />

doivent être résistants. Ces exigences ne s’appliquent pas aux lieu de dégustation /<br />

restauration.<br />

La structure ainsi que les matériaux utilisés dans les bâtiments de production suivent en<br />

général les mêmes volontés de rationalisation et d’économie que celles qui on engendré<br />

le process de production. La solution la plus rationnelle possible est adoptée. En général,<br />

la structure porteuse s’avère être la plus simple possible, suivant une facilité de mise en<br />

œuvre tout autant qu’un coût intéressant.<br />

Aujourd’hui, la construction métallique proposant une mise en œuvre plus simple, ainsi<br />

que l’utilisation d’éléments normalisés semble avoir fait ses preuves, laissant derrière elle<br />

les anciens bâtiments de bois ou de briques, plus massifs. Ce type de construction dénote<br />

une tendance à dissocier la structure porteuse de la couverture qui viendra s’appuyer dans<br />

un deuxième temps par-dessus. La notion de préfabrication est très importante dans ce<br />

type de bâtiment, afi n de rationaliser autant la structure elle-même que la mise en œuvre<br />

sur chantier.<br />

Dans les différents types de brasseries, nous avions évoqué le sujet des grands cubes<br />

213<br />

[ volontés de projet, synthèse et conclusion ]


métalliques, ceux-ci ne se différenciant que par la couleur de leur revêtement en bardage<br />

métallique ou bien par leur enseigne. Les architectes Herzog et de Meuron, en projetant<br />

deux bâtiments pour les entrepôts Ricola, ont proposé une autre alternative, mais en<br />

utilisant toujours des matériaux et une structure propres à l’industrie et aux entrepôts. Ici,<br />

ce ne sont donc pas ces deux éléments qui les différencient, mais la mise en œuvre des<br />

éléments, l’utilisation du caractère brut de ces matériaux et de ces détails, rapprochant ces<br />

deux bâtiments du brutalisme.<br />

la brasserie dans la ville<br />

Nous avions parlé de la volonté d’implanter la brasserie en ville, soit de déplacer les<br />

installations du village de Saignelégier à la Chaux-de-Fonds. Ce choix a été motivé par le<br />

besoin de rapprocher la production de sa clientèle tout en se positionnant de manière plus<br />

pratique par rapport aux réseaux de distribution. En rapport à la ville et à la clientèle, la<br />

brasserie incorporant la double programmation production / consommation se rapproche<br />

des premières brasseries urbaines du moyen âge. En mêlant les deux programmes, la<br />

brasserie devient tout autant un lieu social qu’un lieu de production, d’où sa possibilité<br />

d’introduction en ville.<br />

Tout projet urbain se doit de devenir une composante urbaine qui fonctionne et qui<br />

s’intègre à la ville. Les usines font partie des infrastructures qui marquent les villes, elles<br />

doivent donc devenir des éléments positifs du paysage urbain, en d’intégrant et en le<br />

complétant.<br />

Aujourd’hui, suite à l’augmentation démographique, aux mutations urbaines et<br />

industrielles, il est devenu très rare de trouver des entités industrielles ou des équipements<br />

techniques au cœur des villes, laissant ainsi certaines zones en friches.<br />

La brasserie en ville ne doit pas être dessinée sur mesure uniquement autour des machines,<br />

mais se doit d’établir des relations entre les différentes entités du bâtiment comme entre<br />

le bâtiment et le reste de la ville. Pour moi, c’est l’interaction qui fait le tissu, quand les<br />

choses vivent et fonctionnent, elles génèrent de l’urbain.


agrandissement<br />

Nous avons vu lorsque nous parlions des différents bâtiments brassicoles que ceuxci<br />

ont presque toujours été sujets à des agrandissements pour suivre l’évolution de la<br />

production. Afi n d’anticiper les possibilités futures d’évolution de la brasserie des Franches<br />

Montagnes, le bâtiment devrait intégrer les possibilités d’agrandissement. Celles-ci sont<br />

toutefois dépendantes de la taille du terrain à disposition.<br />

Toutefois, la construction actuelle doit pourvoir soit par sa position et par l’organisation<br />

de son bâtiment, permettre un possible agrandissement nuisant le moins possible à<br />

la construction déjà existante. Cette même construction devrait avoir été planifi ée de<br />

manière simple, laissant une certaine neutralité aux espaces afi n de pouvoir changer leur<br />

attribution. La construction en elle-même pourrait suivre une logique de module facilement<br />

réplicables par la suite et permettant un agrandissement par leur agglomération.<br />

Mais il ne s’agit pas forcément simplement d’agrandissement, mais aussi de fl exibilité. La<br />

technologie ainsi que l’automatisation évoluant constamment, il est important de tenir<br />

compte du fait que les techniques utilisées aujourd’hui peuvent changer quelque peu d’ici<br />

dix, vingt ou trente ans. L’évolution des machines réduit parfois le besoin en surface de la<br />

production, en changeant les différents espaces d’attribution. C’est le cas par exemple de<br />

la brasserie de l’abbaye Notre Dame d’Orval qui a pu éviter certains agrandissements en<br />

modernisant son outil. Les différents espaces ne doivent peut-être pas être fi gés, ni trop<br />

connotés en fonction d’un usage précis.<br />

questionnements autour de l’architecture industrielle<br />

Construire un bâtiment industriel demande quelques précautions. D’une part parce qu’il<br />

s’agit de bâtiments visant à abriter une production mais aussi des personnes. Ceux-ci<br />

répondent à certains besoins, à une suite rationnelle d’éléments qui transforment des<br />

matières premières (ou matières de base) en un produit fi ni.<br />

Aujourd’hui, l’image des usines a fortement changé depuis le début de l’ère industrielle.<br />

Développement durable et écologie obligeant, certaines usines commencent à apporter<br />

un soin particulier à leur image, soin qui se répercute aussi sur l’identité du bâtiment. Les<br />

lieux de productions doivent être, dans la mesure du possible, propres, esthétiques, et<br />

intégrés dans le paysage.<br />

215<br />

[ volontés de projet, synthèse et conclusion ]


3.<br />

4.<br />

1. 2.


L’enveloppe des bâtiments à caractère industriel va de pair avec leur image. La construction<br />

d’un bâtiment industriel répond à des besoins rationnels de production qui se répercutent<br />

sur l’aspect du bâtiment. Il y a une contrainte économique ainsi qu’une contrainte<br />

fonctionnelle qui pèsent de manière déterminante sur les constructions industrielles.<br />

Lorsqu’un maître d’ouvrage prévoit une nouvelle construction, il prend en compte les<br />

coûts que représentent la construction, les moyens d’amortissements et la durée de<br />

vie du bâtiment. Il est à regretter aujourd’hui que la plupart des zonings industriels,<br />

usines, entrepôt séparé etc., soient toujours construit avec la même ossature métallique et<br />

recouverte du même bardage gris métallisé. Certes, il s’agit d’une solution peu coûteuse,<br />

d’un abri rationnel est minimal, mais on est obligé de constater qu’il entraîne avec lui une<br />

banalisation de l’aspect des usines. Seul le nom semble nous indiquer ce qu’on peut bien<br />

y produire.<br />

Il faudrait réinventer un type d’enveloppe, proposer autre chose, donner une image à<br />

un bâtiment, lui rendre une identité assimilable. Ainsi par exemple, les entrepôts Ricola<br />

d’Herzog et de Meuron, propose une solution alternative au bardage gris, tout en restant<br />

dans un langage simple redevant du brutalisme. Il s’agit d’une recherche sur l’enveloppe,<br />

sur la simplicité de ces matériaux, sur la provocation d’émotion qui participe àson identité.<br />

Les matériaux n’ont en eux-mêmes pas que la simple fonction d’abriter.<br />

Lorsqu’un bâtiment industriel est planifi é, on établit les différents besoins de surfaces<br />

relatifs aux lieux de productions, de stockages, locaux administratifs, etc. Ce calcul est fait<br />

selon les besoins actuels et à venir de l’entreprise. Cependant, ils sont diffi ciles à prévoir<br />

avec exactitude. Il faut éviter à tout prix, qu’une fois les bâtiments terminés, l’on se rende<br />

compte que l’on manque d’espace, et que l’on aurait dû prévoir plus grand…<br />

Pour la brasserie, le programme ainsi que l’installation des machines sont des points<br />

donnés par les entreprises de construction de matériel brassicole. L’architecte ne<br />

devrait pas s’occuper de réinventer un programme et une installation, mais se plier à<br />

des exigences de production. Il ne peut connaître, sauf quelques rares cas, toutes les<br />

techniques de possibles afi n de proposer et de réinventer une mise en place des postes<br />

de travail. L’architecte est là pour mettre en place les choses, leur donner un sens et une<br />

émotion particulière. Il donne une sorte de langage affectif. Cette question de langage se<br />

rapproche aussi de celle de l’enveloppe.<br />

« L’ordonnancement est la notion fondamentale de la réfl exion sur une usine, l’architecte a comme<br />

principale action de mettre en œuvre tous ces éléments qui occupent de l’espace et sont fi nalement assez peu<br />

mesurés par les ingénieurs qui conçoivent les machines. L’ingénieur conçoit sa machine dans une stricte<br />

nécessité, hors d’un contexte. Je crois que le rôle de l’architecte est d’arriver à imaginer comment vont<br />

pouvoir s’intégrer par la suite tous ces réseaux. Il doit évidement imaginer un principe pour cela puisqu’il<br />

n’en a pas la connaissance du détail. » (Jacques Ripault, in Ordonnancement et lumière)<br />

217<br />

[ volontés de projet, synthèse et conclusion ]


En parlant de l’émotion que provoque le bâtiment, on pense surtout à son image. L’usine<br />

est en général un bâtiment humble et fonctionnel, l’émotion qu’elle transmet doit toucher<br />

au sentiment d’appartenance. Appartenance autant pour les ouvriers qui y travaillent, fi ers<br />

de leur production que pour la région dans laquelle elle se situe. Ce paramètre est d’autant<br />

plus important lorsque la production est typique d’une région et qu’elle ne pourrait se<br />

faire, de la même manière, ailleurs.<br />

Aujourd’hui, la plupart des entreprises devraient s’intéresser à l’architecture de leur<br />

bâtiment, au langage qu’il communique aux autres, à l’image qu’il leur transmet. Il ne<br />

faut plus être honteux de l’industrie en tant que telle, de ces bâtiments, il faut la mettre<br />

en valeur. Le bâtiment nous intéresse, nous interpelle, il donne envie d’en savoir un peu<br />

plus, de découvrir quelque chose, d’entrer fi nalement dans ces usines.<br />

conclusion<br />

Les recherches pour aboutir au début d’un développement de projet ont été longues.<br />

Cependant, je pense qu’il était nécessaire de fi xer un cadre autour de la bière, boisson<br />

tant consommée et si peu connue. En parcourant l’histoire de la bière, ses coutumes, en<br />

visitant nombre de bars et de brasseries, en rencontrant les gens, en parlant avec eux,<br />

l’univers brassicole et les idées de projet se sont posés peu à peu.<br />

Projeter un bâtiment brassicole pour une brasserie artisanale en voie d’expansion, se<br />

rapprochant avant tout de l’industrie, puisque c’est ainsi que la bière y est produite.<br />

L’artisanat dans la brasserie ne se rapporte pas à l’utilisation des machines, mais à celle<br />

du caractère de la bière produite. Le bâtiment, intégré au centre de la Chaux-de-Fonds,<br />

tiendra compte de son environnement, du reste de la ville et de sa relation avec les<br />

habitants. La double programmation du projet en est un des aspects, puisqu’il ne s’agit<br />

non pas uniquement d’un lieu de production, mais d’un lieu qui invite aussi les gens à<br />

venir à la rencontre de la bière ; ceci dans un cadre différent de ceux que l’on a l’habitude<br />

de voir dans les bars à bière ou les brewpubs.<br />

Faire découvrir la bière et sa production dans un cadre industriel, dans lequel on prendra<br />

soin de créer le meilleur agencement entre les espaces, privilégiant les relations entre<br />

production et consommation, tout en travaillant sur les conditions lumineuses requises<br />

pour chaque espace, sur l’intégration et les relations du bâtiment face à son entourage,<br />

seront les objectifs premiers de ce projet.


219<br />

[ volontés de projet, synthèse et conclusion ]


[ programme ]<br />

salle de brassage 65.00 – 70.00 m2 ( 10.00 x 7.00 m)<br />

bloc 1 (surrélevé de 2.00 m, sur châssis métallique)<br />

- cuve d’empâtage, diam. 2.00 m<br />

- cuve d’ébullition diam. 2.00 m<br />

- ventilateur (système de récupération d’air chaud)<br />

- échangeur à plaques<br />

poids total : 10 tonnes<br />

surface : 3.50 x 6.00 m<br />

liaison par tuyauterie :<br />

cuve d’empâtage – salle de concassage<br />

filtre à plaque, ventilateur – salle de chaufferie<br />

bloc 2<br />

- tank de réserve d’eau chaude diam. 2.00 m<br />

poids total : 7.3 tonnes<br />

surface : 2.00 x 2.00 m<br />

bloc 3<br />

- whirpool diam. 2.00 m<br />

- cip-behälter diam 1.25 m<br />

- filtre à plaques<br />

poids total : 5.00 tonnes<br />

surface : 2.00 x 4.50 m<br />

espace libre centre de la salle 4 x 4 m2<br />

espace circulation couloir 10 m2<br />

nb : prévoir pente au sol 2 % et système central d’évacuation des eaux au sol<br />

salle de fermentation / garde 110 m2<br />

- 12 cuves de fermentation / garde, diam. 2.00 m (40 hectos)<br />

- 2 ptes cuves 20 hectos, diam. 1.70 m<br />

- espace circulation centre 60.00 m2<br />

- espace circulation côtés 18.00 m2<br />

- système contrôle CO2<br />

- système contrôle température<br />

- lavabo<br />

nb : prévoir pente au sol 2 % et système central d’évacuation des eaux au sol<br />

double portes pour permettre le passage des cuves (L=2.10m, H=2.20m)


salle de soutirage 126.00 m2<br />

- 2 cuves filtration diam. 2.00 m (40 hecto) 14.50 m2<br />

- espace circulation 45 m2<br />

- soutirage fûts (2.20 x 1.00 m)<br />

- chaîne de remplissage 70.00-75.00 m2<br />

(décaisseuse, laveuse, soutireuse, étiqueteuse, encaisseuse)<br />

nb : prévoir pente au sol 2 % et système central d’évacuation des eaux au sol<br />

lavabo<br />

locaux techniques 37 m2<br />

- chauffage 14.00 -15.00 m2<br />

(générateur de vapeur 1.20 x 3.50 m)<br />

attention : à placer contre mur extérieur en cas de risque d’explosion<br />

- technique générale 22.00 – 23.00 m2<br />

système traitement eau (0.70 x 2.20 m)<br />

système refroidissement (3.50 x 1.20 m)<br />

tableau électrique<br />

tableau conduites eau<br />

- système ventilation 14.00 m2<br />

réserve de malt 50.00 m2<br />

- stock malt 40 m2<br />

1 bloc<br />

- container malt 500 kg (1.20 x 1.20 m)<br />

- concasseur ( 1.50 x 1.50 m)<br />

- tuyauterie d’acheminement mouture ( 0.75 x 0.75 m)<br />

total surface bloc : 1.75 x 4 m = 7 m2<br />

stock produit fini 90.00 m2<br />

nb : prévoir pente au sol 2 % et système central d’évacuation des eaux au sol<br />

stock bouteilles salles 90.00 m2<br />

stock matériel de représentation 40.00 m2<br />

réserves annexes intérieures 18.00 m2<br />

- local de réserve 9.00 m2<br />

- local mécanicien 9.00 m2<br />

221<br />

[ programme ]


ureau 14 m2<br />

espaces personnel brasserie 30.00 m2<br />

- cuisine et repos 10.00 m2<br />

- sanitaires (1 lavabo, 1 urinoir, 1 wc) 10.00 m2<br />

- douches et vestiaires (2 douches, lavabo, casier) 10.00 m2<br />

salle de dégustation 70.00 m2<br />

- bar 17.00 m2<br />

- salle (1 gde table, 3 ptes) 50.00 – 60.00 m2<br />

- wc H-F (2 wc, 1 urinoir) 7-8 m2<br />

restaurant 180.00-190.00 m2<br />

beershop<br />

- salle 120.00 m2<br />

- cuisine 25.00-30.00 m2<br />

- wc H-F 24 m2<br />

- vestiaire personnel 9 m2<br />

- terrasse extérieure 80.00 m2<br />

- espace vente et stock 90.00 m2<br />

parking extérieur 240.00 m2<br />

espace livraison 100 m2<br />

nb : prévoir les espaces de circulation en fonction<br />

total surfaces intérieures: 1015 m2<br />

total surfaces extérieures : 340 m2 ( + circulation)


[ bibliographie ]<br />

ANDRIEUX Jean-Yves, Le patrimoine industriel, collection Que sais-je?, Presses<br />

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www.brasseriedelasenne.be<br />

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source : Un Défi Permanent, brasserie du Cardinal<br />

p. 18 1. crieur annonçant la mise en perce, source : URION Edmond, EYER, Frédéric,<br />

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2. L’Etrille, rue de Rollebeek, source internet<br />

3. brasserie au XVIIIème siècle, source : URION Edmond<br />

4. A L’Imaige Nostre Dame, enseigne, sources personnelles<br />

5. A L’Imaige Nostre Dame, impasse des cadeaux qui y mène, sources<br />

personnelles<br />

p. 20 1. cabaret du moyen âge, dessin de Henri Pille, source : GRAND-CARTERET<br />

John, Raphaël et Gambrinus, ou l’Art dans la brasserie<br />

2. La Grande Cave de Berne, dessin de Auguste Viollier,<br />

3. Brasserie Alsacienne<br />

4. Le Café Bauer à Berlin, dessin de W. Busch<br />

5. L’arrivée du nouveau tonneau à la Brasserie Royale de Munich<br />

source : GRAND-CARTERET<br />

p. 22 1. Les fumeurs, Adriaen Brouwer, 1638, huile sur bois, source : LEMOINE Serge,<br />

MARCHAND Bernard, Les peintres et la bière<br />

2. Autoportrait dans une auberge, David Ténier le Jeune, 1646, huile sur toile<br />

3. In the Pub, John-Henry Henshall, 1928, huile sur toile


source : LEMOINE Serge<br />

p. 24 1. Le Poechenellekelder, en face du Manneken-Pis à Bruxelles, source : Le Soir,<br />

Hors-Série, « Bière, Amour et Fantaisie », Bruxelles, 2007<br />

2. Le Dulle Griet à Gand, source : Le Soir, Hors-Série<br />

[ typologies : d’une organisation verticale à horizontale ]<br />

p. 32 1. façade principale d’un projet de brasserie-modèle par A. Riche<br />

source : ROHART F., Traité théorique et pratique de la fabrication de la bière<br />

2. coupe longitudinale de l’ensemble, source : ROHART F.<br />

3. plan du rez<br />

4. coupe transversale<br />

source : ROHART F.<br />

p. 36 1. Schéma expliquant le principe de verticalité des brasseries<br />

source : JACKSON Michael, Les Bières<br />

2. plans de la brasserie Artois à Louvain, source : Musée schaerbeekois de la bière<br />

p. 38 1. schéma d’une organisation verticale de brasserie<br />

source : BRIGGS D. E. et al., Brewing : science and practice<br />

2. schéma d’une organisation horizontale actuelle<br />

source : BRIGGS D. E.<br />

[ classification des types ]<br />

p. 42 1. plan de Saint Gall, source : bibliothèque ETH<br />

p. 43 1. auberge avec brasserie (domus confi ciendae celiae)<br />

2. brasserie des pèlerins (bracitorium)<br />

3. brasserie réservée aux moines (hic fratibus confi ciatur cervisia)<br />

source : bibliothèque ETH<br />

p. 44 plans de la brasserie de Villers-la-Ville<br />

source : ZSCHALER Willy, Die Cistercienserabtei Villers in Brabant<br />

p. 46 1-2. abbaye Notre Dame d’Orval,<br />

source : VAN DEN STEEN Jef, les Trappistes, leurs abbayes et leurs bières<br />

3. brasserie Chimay à l’abbaye de Scourmont, source : SEPUL, Brasseurs d’ici<br />

4. abbaye de Westmalle, source : VAN DEN STEEN<br />

5. salle de brassage, brasserie de Chimay, source : SEPUL<br />

229<br />

[ sources iconographiques ]


6. salle de brassage, abbaye Notre-Dame de Saint-Rémy, Rochefort<br />

source : SEPUL<br />

p. 48 1. intérieur de l’église de l’abbaye de Scourmont, Chimay<br />

source : VAN DEN STEEN<br />

2. abbaye de Scourmont, Chimay, sources personnelles<br />

p. 50 les bâtiments isolés de brasserie, sources personnelles et internet<br />

p. 52 les bâtiments de brasserie en alignement d’une rue, sources personnelles et<br />

internet<br />

p. 54 1. le concasseur relié au grenier situé au dessus (2 e )<br />

2. la cuve d’empâtage situé à l’étage inférieur du concasseur (rez)<br />

3. la cuve d’ébullition située au même étage que le concasseur (1e)<br />

4. magasin de futaille (2 e et 1 e )<br />

5. bac refroidissoir situé dans le grenier (2 e )<br />

6. système de poulie pour descendre les tonneaux à l’étage inférieur<br />

7. nettoyage des fûts (sous-sol)<br />

sources personnelles<br />

p. 56 les bâtiments en îlot, sources personnelles et internet<br />

p. 58 1. plan masse de la brasserie Friart, sans échelle, sources : brasserie Friart<br />

2. bâtiment de la brasserie, sources personnelles<br />

3. bâtiments environnants au village du Roeulx, sources personnelles<br />

4. concasseur situé au grenier, sources personnelles<br />

5. cuve d’empâtage à fond perforé, sources personnelles<br />

p. 60 les petites usines en milieu habité, sources personnelles et internet<br />

p. 62 les brasseries-fermes, sources personnelles et internet<br />

p. 64 1. évolution des bâtiments de la brasserie à travers le temps<br />

source : revue le patrimoine industriel de Wallonie<br />

2. vue aérienne de Purnode<br />

source : brasserie du Bocq<br />

p. 66 1-2. système de montée des sac de malt dans le grenier, sources personnelles<br />

3. vue extérieure de la brasserie du Bocq, sources personnelles<br />

p. 68 les moyennes / grandes fabriques et les grandes usines de briques, sources<br />

personnelles et internet


p. 72 1. maquette de train électrique reprenant la forme de ces brasserie, Musée<br />

Schaerbeekois de la bière, sources personnelles<br />

2. vue extérieure de la brasserie Feldschlösschen, sources personnelles<br />

p. 74 1. salle de brassage, sources personnelles<br />

2. fresque dans la salle des machines, sources personnelles<br />

3. salle de brassage, sources personnelles<br />

4. détail du vitrail de la salle de brassage, sources personnelles<br />

5. entrepôt et embouteillage, sources personnelles<br />

6. cuves de garde, sources personnelles<br />

p. 76 les brasseries béton, sources personnelles et internet<br />

p. 78 les cubes métalliques, sources personnelles et internet<br />

p. 80 1. vue aérienne du site InBev à Jupille, Liège, sources : InBev<br />

2. salle de brassage, source : SEPUL<br />

3. entrepôt et embouteillage, source : SEPUL<br />

p. 82 les brasseries bricolage ou brasserie en devenir, sources personnelles et internet<br />

p. 84 1. ZIP City Brewery, New York, sources : HUERLIMANN Martin, 150 Jahre<br />

Hürlimann Bier 1836-1986<br />

2. Brauhaus Goslar, Hambourg, source : HUERLIMANN Martin<br />

3. les Brasseurs, Lausanne, sources personnelles<br />

[ BFM – Brasserie des Franches-Montagnes ]<br />

p. 94 source : journal Le Temps, 15 juillet 2007 (Genève)<br />

p. 96 1. la brasserie des Franches Montagnes à Saignelégier, vue extérieure, sources<br />

personnelles<br />

2. étiquettes de différentes bières, source : brasseriebfm.ch<br />

p. 101 photomontages panoramas depuis le centre de la salle de brassage, sources<br />

personnelles<br />

p. 102 plan actuel de la brasserie, sources personnelles<br />

p. 104 shop de la brasserie et salle de brassage, sources personnelles<br />

p. 106 superposition des cuves selon le principe de verticalité, sources personnelles<br />

231<br />

[ sources iconographiques ]


p. 110 chemin de brassage et chemin de soutirage, sources personnelles<br />

p. 112 les étapes de production en image, sources personnelles<br />

p. 116 principales gênes de la brasserie, sources personnelles<br />

p. 118 1. cuve d’empâtage de Cantillon, sources personnelles<br />

2. cuves de fi ltration jumelles, source : BOULLANGER<br />

3. cuve de garde, brasserie des Murailles, sources personnelles<br />

4. embouteilleuse, brasserie Hürlimann, source : HUERLIMANN<br />

5. tableau échangeur de conduites, brasserie Het Anker, sources personnelles<br />

p. 122 étapes du chantier de la brasserie Aarebier, source : Aarebier.ch<br />

p. 130 relation entre les espaces, sources personnelles<br />

[ le lieu : la Chaux-de-Fonds ]<br />

p. 140 1. la Chaux-de-Fonds entre les vallons et les sapins jurassiens<br />

source : BLANT Michel, point(s) d’eau<br />

2. vue aérienne<br />

source : WÜLSER, GROBETY, ZIMMERMANN, La Chaux-de-Fonds XXe<br />

3. vue aérienne enneigée, source : WÜLSER<br />

p. 142 situation, sources personnelles<br />

p. 146 développement du dammier, sources personnelles<br />

p. 150 1. plan de 1841<br />

2. plan de 1893<br />

3. plan de 1926<br />

4. plan de 1988<br />

source : Service d’urbanisme, Ville de La Chaux-de-Fonds<br />

p. 154 notion d’espaces, sources personnelles<br />

p. 156 perspectives et vues fi lantes, sources personnelles<br />

p. 158 le massif, entre rue et jardin, sources personnelles<br />

p. 161 derrière l’orthogonalité : un mélange de constructions, sources personnelles


p. 162 entre sobriété et décorations, sources personnelles<br />

p. 164 couleurs !, sources personnelles<br />

p. 166 manufactures et usines, sources personnelles<br />

[ intégration dans le site ]<br />

p. 172 1. plans historiques, source : Musée d’Histoire de La Chaux-de-Fonds<br />

2. la gare en 1856, Musée d’Histoire de La Chaux-de-Fonds<br />

p. 174 1. plan orienté nord de La Chaux-de-Fonds, échelle 1 :50’000, source : swisstopo<br />

2. vue aérienne orientée selon le Pod, sans échelle, source : Geapartners<br />

Lausanne<br />

3. insertion du plan d’aménagement et relation avec les autres éléments de la ville<br />

source : Geapartners<br />

p. 176 1. vue sur le site, source : Geapartners<br />

2. panorama du site, sources personnelles<br />

p. 179 environnement proche, sources personnelles<br />

p. 181 le plan d’aménagement dans son rapport aux éléments verts et au bâti<br />

source : Geapartners<br />

p. 183 directives d’implantation, coupes et plan, source : Geapartners<br />

p. 186 1. situation actuelle, source : Geapartners<br />

2. prolongement du damier et relations, source : Geapartners<br />

3. logique du plan en damier, sources personnelles<br />

p. 188 une implantation par étapes, photo de la maquette de concour, source :<br />

Geapartners<br />

p. 190 du minéral au végétal 1. état actuel, 2. situation avec le plan d’aménagement,<br />

source : Geapartners<br />

p. 192 accessibilité, source : Geapartners<br />

p. 196 éléments à retenir, la brasserie dans le site : sources personnelles<br />

233<br />

[ sources iconographiques ]


[ volontés de projet, synthèse et conclusion ]<br />

p.202 1. bodegas Ysios, Rioja, Espagne, Santiago Calatrava, 2001<br />

source : Winery design, Te Neues<br />

2. domaine Quintessa, Californie, Walker Warner Arch, source: Winery design<br />

p.204 1. Weingut Schützenhof, Autriche, Pichler & Traupmann Architekten, 2004, s<br />

source: Winery design<br />

2. Dornier Wines, South Africa, Christoph Dornier, Malherbe + Rust Architects,<br />

2003, source: Winery design<br />

p.206 1. bodegas Ysios, Rioja, Espagne, Santiago Calatrava, 2001, source: Winery<br />

design<br />

2 Dornier Wines, South Africa, Christoph Dornier, Malherbe + Rust Architects,<br />

2003, source: Winery design<br />

p.208 les couleurs de la bière, source inconnue<br />

p.212 1-2. toitures à La Chaux-de-Fonds, sources personnelles<br />

p.216 1. entrepôt Ricola, Mulhousem 1994, Herzog & de Meuron, photo : Thomas Ruff,<br />

source : ricola.com<br />

2-3.. entrepôt Ricola, Laufen, 1992, Herzog & de Meuron, photo : Thomas Ruff,<br />

source : ricola.com<br />

4. entrepôt Ricola, Mulhousem 1994, Herzog & de Meuron, photo : Thomas Ruff,<br />

source : ricola.com


[ remerciements ]<br />

Jérôme Rebetez, brasseur et initiateur de la Brasserie des Franches-Montagnes qui a<br />

accepté de me recevoir et me soutenir dans mes recherches et interrogations, mais aussi<br />

pour m’avoir fait découvrir ses coups de cœur de la Tchaux.<br />

Cesare Gallina (Aarebier), Michel de Maeght (InBev Brewery), Alexis Briol et Maud Friart<br />

(brasserie Saint-Feuillien), Xavier Yernaux (brasserie du Bocq) pour avoir réussit à me<br />

faire monter jusqu’en haut des toits de la brasserie du Bocq, Dominique Denis (Chimay),<br />

Georges Hanin, M. Humblet (brasserie Val Dieu), Hans Van Remoortere (brasserie<br />

Het Anker), Nathalie Droz et Philippe Margand (brasserie des Murailles à Meinier),<br />

Christophe Pradervand (les Faiseurs de Bière), la brasserie Feldschlösschen, Claude de la<br />

Maison des Brasseurs à Bruxelles, Michel de Triest (Poechenellekelder à Bruxelles), Yves<br />

Moens (l’Imaige Nostre-Dame à Bruxelles), Pierre Mees (Musée schaerbeekois de la<br />

bière) et à tous ceux du monde brassicole que j’aurais oubliés…<br />

M. Clerc et Catherine Huther du service d’urbanisme de La Chaux-de-Fonds, et le bureau<br />

Geapartners à Lausanne.<br />

Michel et Catherine Lastschenko pour m’avoir gentillement hébergé durant mon séjour<br />

belge.<br />

Michel Kostal pour ses corrections orthographiques, et sa maîtrise de la langue<br />

française.<br />

Mon père pour ses corrections orthographiques, sa voiture, et pour m’avoir accompagné<br />

dans ma première brasserie et avoir accepté de boire autre chose que de la Tuborg et ma<br />

mère aussi pour avoir apprécié une abbaye de Saint Bon Chien… Nicolas qui a supporté<br />

écouté mes grands discours brassicoles, et ceci même dans son sommeil et dans le mien<br />

aussi.<br />

Un grand merci à tout le groupe de suivi de diplôme : Bruno Marchand, Yves Weinand,<br />

Hani Buri et Yvan de Baets.<br />

235<br />

[ remerciements ]

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