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PERSPECTIVES DE L’EXTÉRIEUR : consistait alors à déterminer dans quelle mesure on pouvait permettre aux journalistes de s’entretenir avec les soldats blessés, leurs commandants et les familles des victimes. J’étais présent sur la piste de la Base des Forces canadiennes de Trenton, lorsque les quatre cercueils recouverts d’un drapeau sont déchargés d’un avion de transport militaire. Le pays entier était en deuil ce jour-là. Des funérailles ont été rapidement organisées, et la plupart des cérémonies ont été retransmises en direct sur les ondes de la télévision. En janvier 2003, les deux pilotes de la United States Air Force auteurs de cet incident dû à des « tirs amis » comparaissent devant un tribunal militaire en Louisiane. L’intérêt que les Canadiens portaient à l’affaire n’avait pas reculé, et les journalistes canadiens qui assistent aux audiences sont deux fois plus nombreux que leurs vis-à-vis américains. Des officiers des affaires publiques sont dépêchés en Louisiane pour aider à préserver le droit à l’intimité des familles des victimes et pour orienter les contacts entre ces familles et les journalistes. De rapports tendus à une relation de confiance Ayant eu à traiter quelquefois avec la division des affaires publiques au Quartier général de la Défense nationale avant cet incident, j’ai l’impression, comme c’est souvent le cas quand on a affaire à la plupart des chargés de relations publiques ou d’affaires publiques, qu’il s’agit plutôt « d’improviser ». Parfois, on essaiera de vous convaincre que « il n’y a rien à raconter ». Cela m’est arrivé une fois quand j’ai téléphoné à un officier des affaires publiques à Ottawa pour obtenir une entrevue. Ce genre d’affirmation est une des choses qui agace le plus les journalistes. Dans le monde des médias, l’agence de presse décide des sujets qu’elle couvrira, d’après son évaluation des intérêts de l’auditoire1 et de son propre rôle dans la société. Il n’appartient pas aux responsables des relations publiques ni à ceux des affaires publiques de déterminer si un événement mérite ou non d’être mentionné dans les médias. Leur tâche consiste à faire passer le message de leur organisation et à faire en sorte que les journalistes aient accès aux représentants de l’organisation et aux informations dont celle-ci dispose. Les échéances représentent un facteur critique dans le travail du journaliste. J’ai parfois eu de la difficulté dans mes rapports avec le ministèreCHAPITRE Opinions de journalistes et d’analystes de la Défense sur le leadership militaire au Canada 35

36 CHAPITRE 1 PERSPECTIVES DE L’EXTÉRIEUR : de la Défense national en ce qui concerne les délais. Lorsque je m’intéresse à un sujet militaire et que je téléphone au service des affaires publiques, je précise toujours à quel moment mon reportage sera diffusé; par exemple, dans le cas d’un bulletin radiodiffusé, si l’échéance tombe l’après-midi, il faut au moins une heure avant la mise en ondes pour rédiger, mettre au point et enregistrer le texte. À plusieurs occasions, quand je veux obtenir des réactions concernant un reportage sur des questions militaires, l’officier des affaires publiques me laisse entendre qu’une seule personne est en mesure de me fournir des réponses, et que l’intéressée est absente ce jour-là, ajoutant qu’on va me rappeler dans un jour ou deux pour me donner satisfaction. Dans mon univers professionnel, cette réponse est carrément inacceptable. Si l’enjeu de mon reportage est du domaine militaire, j’ai besoin d’inclure les commentaires des responsables concernés le jour même. Une fois le reportage diffusé, il est très rare qu’on revienne sur le sujet un jour ou deux plus tard pour donner le point de vue des militaires. Si le porte-parole officiel n’est pas disponible ce jour-là, quelqu’un d’autre devrait pouvoir fournir les réponses voulues. Sinon, il devient impossible de présenter la version des militaires, et le journaliste est alors obligé de chercher d’autres sources, qui pourraient s’avérer plutôt peu flatteuses, ou même ignorantes quant au sujet en question. Souvent, les journalistes se tournent alors vers des gens comme Scott Taylor, éditeur et rédacteur en chef de la revue Esprit de Corps, qui a aussi rédigé plusieurs ouvrages peu flatteurs sur l’appareil militaire canadien. Taylor critique sévèrement les tentatives du ministère de la Défense nationale de se faire plus ouvert et plus transparent d’après les recommandations de la Commission d’enquête sur la Somalie. « Je pense qu’ils ont appris à mieux embrouiller les choses », déclare-t-il au quotidien The Globe and Mail. Taylor soutient que la culture chez les militaires demeure fondée sur la tromperie, sauf qu’ils ont appris à mieux la gérer. « Aujourd’hui, les militaires conservent très peu de documents, donc beaucoup moins de traces écrites. Plus personne ne laisse ses empreintes digitales; il n’est plus possible de démontrer par la preuve que tel ou tel a bien lu telle ou telle note de service. On aimerait bien croire que les choses ont changé, mais en fait, rien n’a changé du tout. Les armes et les munitions ne sont pas plus nombreuses [qu’avant]; par contre, les camouflages sont plus répandus ». Opinions de journalistes et d’analystes de la Défense sur le leadership militaire au Canada

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CHAPITRE 1<br />

PERSPECTIVES DE L’EXTÉRIEUR :<br />

de la Défense national en ce qui concerne les délais. Lorsque je m’intéresse<br />

à un sujet militaire et que je téléphone au service des affaires<br />

publiques, je précise toujours à quel moment mon reportage sera diffusé;<br />

par exemple, dans le cas d’un bulletin radiodiffusé, si l’échéance tombe<br />

l’après-midi, il faut au moins une heure avant la mise en ondes pour<br />

rédiger, mettre au point et enregistrer le texte. À plusieurs occasions,<br />

quand je veux obtenir des réactions concernant un reportage sur des<br />

questions militaires, l’officier des affaires publiques me laisse entendre<br />

qu’une seule personne est en mesure de me fournir des réponses, et que<br />

l’intéressée est absente ce jour-là, ajoutant qu’on va me rappeler dans un<br />

jour ou deux pour me donner satisfaction.<br />

Dans mon univers professionnel, cette réponse est carrément inacceptable.<br />

Si l’enjeu de mon reportage est <strong>du</strong> domaine militaire, j’ai besoin<br />

d’inclure les commentaires des responsables concernés le jour même.<br />

Une fois le reportage diffusé, il est très rare qu’on revienne sur le sujet<br />

un jour ou deux plus tard pour donner le point de vue des militaires. Si<br />

le porte-parole officiel n’est pas disponible ce jour-là, quelqu’un d’autre<br />

devrait pouvoir fournir les réponses voulues. Sinon, il devient impossible<br />

de présenter la version des militaires, et le journaliste est alors obligé<br />

de chercher d’autres sources, qui pourraient s’avérer plutôt peu flatteuses,<br />

ou même ignorantes quant au sujet en question.<br />

Souvent, les journalistes se tournent alors vers des gens comme Scott<br />

Taylor, éditeur et rédacteur en chef de la revue Esprit de Corps, qui a<br />

aussi rédigé plusieurs ouvrages peu flatteurs sur l’appareil militaire canadien.<br />

Taylor critique sévèrement les tentatives <strong>du</strong> ministère de la<br />

Défense nationale de se faire plus ouvert et plus transparent d’après les<br />

recommandations de la Commission d’enquête sur la Somalie. « Je<br />

pense qu’ils ont appris à mieux embrouiller les choses », déclare-t-il au<br />

quotidien The Globe and Mail. Taylor soutient que la culture chez les<br />

militaires demeure fondée sur la tromperie, sauf qu’ils ont appris à mieux<br />

la gérer. « Aujourd’hui, les militaires conservent très peu de documents,<br />

donc beaucoup moins de traces écrites. Plus personne ne laisse ses<br />

empreintes digitales; il n’est plus possible de démontrer par la preuve<br />

que tel ou tel a bien lu telle ou telle note de service. On aimerait bien<br />

croire que les choses ont changé, mais en fait, rien n’a changé <strong>du</strong> tout.<br />

Les armes et les munitions ne sont pas plus nombreuses [qu’avant];<br />

par contre, les camouflages sont plus répan<strong>du</strong>s ».<br />

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militaire au <strong>Canada</strong>

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