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PERSPECTIVES DE L’EXTÉRIEUR : mon intérêt professionnel pour les affaires des Forces canadiennes. Il m’a donné le goût de savoir qui sont les protecteurs du Canada et de les voir à l’oeuvre, pour corriger l’impression laissée par la bagarre sanglante qui s’est déroulée dans le terrain de stationnement de l’hôtel Kingsway. (Au fait, les militaires ont eu le dessus!) Tout dirigeant qui sous-estime la puissance de la presse se prive ainsi d’un outil précieux pour obtenir la compréhension et même l’appui de la population. Il faut se demander pourquoi les Forces canadiennes se retrouvent finalement dans un état aussi déplorable : des effectifs rendus au bout du rouleau, des réductions importantes dans les activités de formation, du matériel qui tombe littéralement en morceaux. Bien entendu, c’est là le résultat des compressions budgétaires systématiques imposées pendant toute une décennie par les gouvernements successifs. Mais pourquoi les politiciens sabrent-ils dans les ressources militaires avec autant d’assurance, en affichant une attitude cavalière. Est-ce parce qu’ils perçoivent mieux les volontés des citoyens que les leaders militaires qui seraient déconnectés par rapport aux priorités des contribuables? Les chefs militaires ont depuis longtemps battu en retraite derrière leurs bureaux, et contribué activement par le fait même au fiasco en aidant à formuler, à mettre en oeuvre et à appliquer des politiques qui ont nourri l’apathie du public. Les citoyens ont cessé de prêter attention aux questions militaires. Les politiciens savaient que les réductions dans le secteur militaire ne soulèveraient pas de tôlés dans la population. Pendant longtemps, ils ont eu raison. Mais quelques événements clés ont lentement secoué cette apathie généralisée. MacKenzie a lancé le bal en parlant haut et fort. Puis Addy s’est également mis de la partie. Plusieurs rapports d’enquête, documents et comptes rendus ont ensuite contribué à conscientiser de plus en plus les Canadiens au sujet de l’érosion des capacités militaires nationales. Toutefois, à part la tempête de verglas qui s’est abattue sur l’Est du pays et les inondations survenues à Winnipeg, l’agitation et les catastrophes demeuraient des aléas qui se produisaient hors de nos frontières. Puis, un incident tragique a suscité la sympathie, la compréhension et le soutien des Canadiens qui se sont retrouvés, incrédules, à pleurer la mort insensée d’hommes qui étaient aussi des fils, des pères et des maris. Opinions de journalistes et d’analystes de la Défense sur le leadership militaire au Canada 145 CHAPITRE 8
146 CHAPITRE 8 PERSPECTIVES DE L’EXTÉRIEUR : Le 17 avril 2002, l’incident causé par les soi-disant tirs amis en Afghanistan a transformé radicalement l’humeur populaire et fait comprendre aux citoyens les difficiles tâches qu’assument les militaires canadiens. Le sergent Marc Léger (29 ans), le caporal Ainsworth Dyer (24 ans), le soldat Richard Green (21 ans) et le soldat Nathan Smith (27 ans) ont alors été tués quand le pilote d’un chasseur américain F-16, le major Harry Schmidt, a largué sur eux une bombe de 250 kilos guidée au laser durant un exercice nocturne de tir réel. Huit autres parachutistes ont été blessés. Le colonel Pat Stogran, qui commandait à l’époque les troupes canadiennes en Afghanistan, est un type brave et avisé. Il dit les choses telles qu’elles sont, que ça plaise ou non. En Afghanistan, sa devise était « VIP : vision, inspiration et protection ». Cette devise lui a valu le respect et la confiance de ses subalternes. Il s’est forcé à « apprendre » les pratiques de ses soldats et se faisait un point d’honneur de se joindre à eux dans leurs activités, ce qui a contribué largement à susciter leur respect. Il s’arrêtait pour bavarder avec les militaires qui s’occupaient à réparer un tambour d’embrayage. Un mois après l’incident, Stogran a dit à un journaliste que les camarades des soldats décédés avaient pour le moment passer l’éponge sur ce dur coup pour pouvoir se concentrer sur les tâches à accomplir dans le cadre de la coalition antiterroriste. Ce qu’il n’a pas dit, c’est le soutien qu’il leur a apporté à ce dessein. Conscient qu’il fallait à ses soldats un exécutoire pour exprimer leur colère et leur douleur, Stogran a, au cours d’un défilé du bataillon, donné à ses troupes l’autorisation implicite de se laisser aller, leur demandant de ne pas « tourner leur colère » contre les Américains, mais contre la bonne cible, c’est-à-dire contre Al-Qaïda. « Je n’avais pas de scénario écrit, mais c’était là le message que je voulais transmettre », a-t-il expliqué. Un peu plus tard, Stogran a rencontré les membres de la Compagnie « A », qui étaient les plus éprouvés, et il a eu le courage de dévoiler son âme au point de verser des larmes. Pourtant, il connaissait seulement deux des soldats tués. « Je ne me le pardonnerai jamais. J’avais sous mes ordres ces quatre soldats, et deux d’entre eux sont morts sans que je les aie réellement connus. » C’est le grand général MacKenzie qui a déclaré un jour « Je n’irai jamais au combat aux côtés d’un homme qui ne sait pas pleurer. » Stogran lui Opinions de journalistes et d’analystes de la Défense sur le leadership militaire au Canada
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qui s’est déroulée dans le terrain de stationnement de l’hôtel Kingsway.<br />
(Au fait, les militaires ont eu le dessus!) Tout dirigeant qui sous-estime<br />
la puissance de la presse se prive ainsi d’un outil précieux pour obtenir<br />
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Il faut se demander pourquoi les Forces canadiennes se retrouvent<br />
finalement dans un état aussi déplorable : des effectifs ren<strong>du</strong>s au bout <strong>du</strong><br />
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matériel qui tombe littéralement en morceaux. Bien enten<strong>du</strong>, c’est là le<br />
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Mais pourquoi les politiciens sabrent-ils dans les ressources militaires<br />
avec autant d’assurance, en affichant une attitude cavalière. Est-ce<br />
parce qu’ils perçoivent mieux les volontés des citoyens que les leaders<br />
militaires qui seraient déconnectés par rapport aux priorités des<br />
contribuables? Les chefs militaires ont depuis longtemps battu en<br />
retraite derrière leurs bureaux, et contribué activement par le fait même<br />
au fiasco en aidant à formuler, à mettre en oeuvre et à appliquer des<br />
politiques qui ont nourri l’apathie <strong>du</strong> public. Les citoyens ont cessé de<br />
prêter attention aux questions militaires. Les politiciens savaient que les<br />
ré<strong>du</strong>ctions dans le secteur militaire ne soulèveraient pas de tôlés dans<br />
la population. Pendant longtemps, ils ont eu raison. Mais quelques<br />
événements clés ont lentement secoué cette apathie généralisée.<br />
MacKenzie a lancé le bal en parlant haut et fort. Puis Addy s’est<br />
également mis de la partie. Plusieurs rapports d’enquête, documents et<br />
comptes ren<strong>du</strong>s ont ensuite contribué à conscientiser de plus en plus les<br />
Canadiens au sujet de l’érosion des capacités militaires nationales.<br />
Toutefois, à part la tempête de verglas qui s’est abattue sur l’Est <strong>du</strong> pays<br />
et les inondations survenues à Winnipeg, l’agitation et les catastrophes<br />
demeuraient des aléas qui se pro<strong>du</strong>isaient hors de nos frontières. Puis, un<br />
incident tragique a suscité la sympathie, la compréhension et le soutien<br />
des Canadiens qui se sont retrouvés, incré<strong>du</strong>les, à pleurer la mort<br />
insensée d’hommes qui étaient aussi des fils, des pères et des maris.<br />
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