Voir D2-176-2005-fra.pdf - Publications du gouvernement du Canada
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PERSPECTIVES DE L’EXTÉRIEUR :<br />
Chose déplorable, dans le cas <strong>du</strong> Rwanda, il a fallu le courage <strong>du</strong><br />
commandant désabusé d’une force onusienne, le lieutenant-général<br />
(à la retraite) Roméo Dallaire, pour dévoiler l’ineptie consternante des<br />
Nations Unies. Le capitaine (à l’époque) Tim Isberg faisait partie de la<br />
petite troupe héroïque de Casques bleus dirigée par Dallaire, prise au<br />
beau milieu d’un génocide sans merci qui a fait plus de 800 000 victimes.<br />
À chaque jour, Isberg recevait des comptes ren<strong>du</strong>s à propos de décès, de<br />
meurtres ou de massacres. Son travail était d’enquêter. Une fois ou deux<br />
par semaine, il allait examiner entre un et trente, ou même quarante<br />
cadavres. Il devait confirmer chaque incident, le nombre de personnes<br />
massacrées, les moyens utilisés, les auteurs, le moment où le geste a été<br />
perpétré, et éventuellement les raisons de ces crimes; il devait par la<br />
suite envoyer son rapport au siège de l’ONU. Il lui est arrivé, au cours<br />
d’une enquête, de tomber dans une fosse commune. Parfois, quand il se<br />
rendait seul dans des coins reculés pour mener son enquête, il voyait des<br />
gens qui venaient « l’aider » dans la recherche de la vérité, mais il savait<br />
que ces gens avaient <strong>du</strong> sang sur les mains puisque c’était ceux-là mêmes<br />
qui avaient commis les atrocités.<br />
Isberg a fini par quitter le Rwanda, mais les « images et odeurs » ne l’ont<br />
pas lâché. Les odeurs réminiscentes étaient très variées, allant de la<br />
bière à la banane à l’arôme de la viande <strong>fra</strong>îchement coupée, jusqu’à la<br />
puanteur pestilentielle de la mort. Tous ceux qui ont participé aux<br />
missions dans l’ex-Yougoslavie, au Rwanda ou en Somalie ou ont<br />
participé à d’autres missions de maintien ou de rétablissement de la<br />
paix, et qui ont vécu les horreurs révélatrices <strong>du</strong> côté sinistre de<br />
l’humanité, sont rentrés chez eux avec l’esprit et la mémoire imprégnés<br />
d’images, d’odeurs et de souvenirs. Chacun y réagit à sa façon. Certains<br />
maintiennent leurs forces et poursuivent de plus belle. Beaucoup<br />
demeurent hantés par ces horreurs. Chez d’autres, le stress de combat se<br />
manifeste sous des formes cruelles et insidieuses. Parfois, il n’y a aucun<br />
symptôme ni signe avertisseur, aucun indice révélant que les sujets sont<br />
rongés à l’intérieur par les atrocités qu’ils ont observées et les conditions<br />
épouvantables auxquelles ils ont survécu. Le stress causé par un incident<br />
critique, donnant lieu à de fortes réactions physiques et émotives, peut<br />
dégénérer en syndrome de stress post-traumatique si le sujet n’est pas<br />
traité. On estime à 15 p. 100 le pourcentage d’observateurs militaires de<br />
l’ONU qui souffrent de ce syndrome.<br />
Opinions de journalistes et d’analystes de la Défense sur le leadership<br />
militaire au <strong>Canada</strong><br />
139<br />
CHAPITRE 8