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PERSPECTIVES DE L’EXTÉRIEUR : sélection des candidats. L’organisme avait pu dresser une liste de personnes qui, bien que recherchées pour crime de guerre, avaient réussi à se trouver un emploi par l’intermédiaire de la SFOR, surtout dans le secteur sud-ouest. Ces individus locaux étaient de « petits acteurs » et ne faisaient pas partie des nombreux « gros bonnets » dont les portraits étaient affichés sur les tableaux des criminels de guerre partout dans le pays. C’étaient eux les personnages que l’on recherchait pour qu’ils soient jugés par le Tribunal pénal international de La Haye. Quant aux petits acteurs, ils allaient être jugés par des cours locales, à condition évidemment qu’on puisse les arrêter. L’International Crisis Group avait obtenu ces informations à partir de nombreuses plaintes de civils qui, après avoir repéré des individus recherchés parmi les soldats de l’OTAN, avaient protesté auprès d’organismes s’occupant des droits de la personne. Or, la Force de mise en oeuvre et la Force de stabilisation subséquente avaient déjà très mauvaise réputation auprès des gens militants pour les droits humains parce que leurs leaders refusaient d’arrêter des voyous quelle que soit leur taille; cette désinvolture face à des accusations de crime de guerre, au point qu’on avait même négligé de comparer le nom des candidats aux listes de suspects pour finalement les embaucher, nuisait davantage à cette réputation déjà peu flatteuse. Un major australien faisant partie de la section des affaires publiques de la division multinationale pour la région nous a alors escortés jusqu’au lieu de l’entrevue. À notre arrivée au quartier général, plusieurs autres membres du personnel des affaires publiques, dont des Canadiens, ont discuté brièvement avec nous des paramètres de l’entrevue et de sa durée. Nous ne leur avons rien dit à propos du rapport de l’International Crisis Group et de sa teneur. Inutile de préciser que le brigadier-général Hillier a été pris de court par nos interrogations. Personne ne serait aisé de répondre à des questions pour savoir pourquoi son organisation a embauché des individus soupçonnés de crimes haineux contre l’humanité, notamment des tortures, des viols et des meurtres. Il y avait là de quoi gâcher toute une journée. Le poste confié au brigadier-général Hillier représentait par CHAPITRE 7 Opinions de journalistes et d’analystes de la Défense sur le leadership militaire au Canada 113

114 CHAPITRE 7 PERSPECTIVES DE L’EXTÉRIEUR : ailleurs une occasion en or pour un commandant canadien de diriger la division multinationale pour le district en question, et l’intéressé ne voulait sûrement pas que quelqu’un jette une ombre sur le tableau. Mais nous sommes restés ébahis quand celui-ci a saisi la question au vol et donné la meilleure des réponses possibles dans les circonstances. Affirmant que c’était la première fois qu’on lui disait que les procédures d’examen des candidats étaient déficientes, il a promis de corriger immédiatement la situation; il a ensuite réitéré l’engagement de la SFOR d’arrêter les individus accusés, admettant que les efforts précédents avaient manqué de vigueur. Personne ne s’est avancé devant l’objectif. Personne n’a mis fin à l’entrevue. Personne ne nous a embêtés avec les questions de sécurité après l’entrevue. Et par-dessus tout, aucun officier des affaires publiques, ni canadien ni australien, ne nous a reproché ensuite de ne pas leur avoir permis de préparer des réponses aux questions. Et d’après ce que j’ai pu constater par la suite, le brigadier-général Hillier avait encaissé les coups et souffert en silence, sans réprimander quiconque pour l’avoir laissé tomber dans une embuscade. Chacun des intéressés était convaincu d’avoir simplement accompli son devoir, bien que je doute qu’on ait réellement amélioré les procédures de sélection pour l’embauche locale d’employés. Le brigadier-général commandait bien entendu des forces multinationales et pas spécifiquement des troupes canadiennes, mais j’ai tout de même remarqué dans ces circonstances un nouvel esprit de communication. Nous nous retrouvions peut-être devant une nouvelle génération de leaders qui allaient adopter une nouvelle stratégie en la matière. J’ai conclu alors que ce Hillier était soit fichu, soit appelé à une grande renommée. De toute évidence, tous les membres des Forces canadiennes n’ont pas compris d’emblée l’intérêt ou la sagesse d’améliorer les relations avec les médias; d’ailleurs, certains n’ont jamais su le faire. Beaucoup de militaires au bas de la hiérarchie continuent à se méfier des journalistes. Cela se comprend, dans une certaine mesure. La plupart des fois où j’ai discuté avec des membres des Forces canadiennes, ils m’ont donné des exemples où les médias avaient mal cité ou interprété leurs déclarations. (Cela m’étonne toujours de voir le peu de plaintes faites aux journalistes Opinions de journalistes et d’analystes de la Défense sur le leadership militaire au Canada

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CHAPITRE 7<br />

PERSPECTIVES DE L’EXTÉRIEUR :<br />

ailleurs une occasion en or pour un commandant canadien de diriger la<br />

division multinationale pour le district en question, et l’intéressé ne<br />

voulait sûrement pas que quelqu’un jette une ombre sur le tableau. Mais<br />

nous sommes restés ébahis quand celui-ci a saisi la question au vol et<br />

donné la meilleure des réponses possibles dans les circonstances.<br />

Affirmant que c’était la première fois qu’on lui disait que les procé<strong>du</strong>res<br />

d’examen des candidats étaient déficientes, il a promis de corriger<br />

immédiatement la situation; il a ensuite réitéré l’engagement de<br />

la SFOR d’arrêter les indivi<strong>du</strong>s accusés, admettant que les efforts<br />

précédents avaient manqué de vigueur.<br />

Personne ne s’est avancé devant l’objectif. Personne n’a mis fin à<br />

l’entrevue. Personne ne nous a embêtés avec les questions de sécurité<br />

après l’entrevue. Et par-dessus tout, aucun officier des affaires publiques,<br />

ni canadien ni australien, ne nous a reproché ensuite de ne pas leur<br />

avoir permis de préparer des réponses aux questions. Et d’après ce que<br />

j’ai pu constater par la suite, le brigadier-général Hillier avait encaissé<br />

les coups et souffert en silence, sans réprimander quiconque pour l’avoir<br />

laissé tomber dans une embuscade. Chacun des intéressés était<br />

convaincu d’avoir simplement accompli son devoir, bien que je doute<br />

qu’on ait réellement amélioré les procé<strong>du</strong>res de sélection pour<br />

l’embauche locale d’employés.<br />

Le brigadier-général commandait bien enten<strong>du</strong> des forces<br />

multinationales et pas spécifiquement des troupes canadiennes, mais j’ai<br />

tout de même remarqué dans ces circonstances un nouvel esprit de<br />

communication. Nous nous retrouvions peut-être devant une nouvelle<br />

génération de leaders qui allaient adopter une nouvelle stratégie en la<br />

matière. J’ai conclu alors que ce Hillier était soit fichu, soit appelé à une<br />

grande renommée.<br />

De toute évidence, tous les membres des Forces canadiennes n’ont pas<br />

compris d’emblée l’intérêt ou la sagesse d’améliorer les relations avec les<br />

médias; d’ailleurs, certains n’ont jamais su le faire. Beaucoup de<br />

militaires au bas de la hiérarchie continuent à se méfier des journalistes.<br />

Cela se comprend, dans une certaine mesure. La plupart des fois où j’ai<br />

discuté avec des membres des Forces canadiennes, ils m’ont donné des<br />

exemples où les médias avaient mal cité ou interprété leurs déclarations.<br />

(Cela m’étonne toujours de voir le peu de plaintes faites aux journalistes<br />

Opinions de journalistes et d’analystes de la Défense sur le leadership<br />

militaire au <strong>Canada</strong>

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