25.06.2013 Views

John Maynard Keynes (1931), Essais de persuasion

John Maynard Keynes (1931), Essais de persuasion

John Maynard Keynes (1931), Essais de persuasion

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

<strong>John</strong> <strong>Maynard</strong> <strong>Keynes</strong> (<strong>1931</strong>), <strong>Essais</strong> <strong>de</strong> <strong>persuasion</strong> 152<br />

Prenons mon cas – où va bien me mener cette épreuve négative ? Comment<br />

pourrais-je m'astreindre à faire partie <strong>de</strong>s Conservateurs ? Ils ne me<br />

procurent ni nourriture ni boisson, ni consolation intellectuelle ni consolation<br />

morale. Cela ne m'amuserait ni ne m'enthousiasmerait ni ne m'instruirait.<br />

Partager l'atmosphère, la mentalité, le point <strong>de</strong> vue dans l'existence <strong>de</strong>... –<br />

mieux vaut ne nommer personne – ne servirait en rien mon intérêt personnel<br />

ni le bien public. Car cela ne mène nulle part, ne répond à aucun idéal, ne<br />

correspond à aucune culture intellectuelle n'est même pas pru<strong>de</strong>nt ou, calculé<br />

pour mettre à l'abri <strong>de</strong>s démolisseurs, ce <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> civilisation que nous avons<br />

déjà atteint.<br />

Devrais-je donc me rallier au Labour Party ? En apparence, cela est plus<br />

tentant. Mais si l'on y regar<strong>de</strong> <strong>de</strong> plus près, il y a <strong>de</strong> grosses difficultés. Tout<br />

d'abord, c'est un parti <strong>de</strong> classe et d'une classe qui n'est pas la mienne. Si je<br />

dois revendiquer <strong>de</strong>s avantages pour une fraction <strong>de</strong> la Société, autant que ce<br />

soit pour celle à laquelle j'appartiens. S'il s'agit <strong>de</strong> la lutte <strong>de</strong>s classes, mon<br />

patriotisme personnel et étroit, ainsi que celui <strong>de</strong> tout le mon<strong>de</strong>, en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong><br />

quelques exceptions d'un zèle gênant, s'attache à mon propre milieu. Je puis<br />

ne pas <strong>de</strong>meurer insensible à ce que je crois être la justice et le bon sens; mais<br />

la lutte <strong>de</strong>s classes me trouvera du côté <strong>de</strong> la Bourgeoisie instruite.<br />

Mais, par-<strong>de</strong>ssus tout, je ne crois pas que l'élément intellectuel parvienne<br />

jamais à exercer un contrôle effectif sur le Labour Party ; trop <strong>de</strong> décisions<br />

seront toujours prises par ceux qui ne savent pas du tout <strong>de</strong> quoi ils parlent; et<br />

si – ce qui n'est pas improbable – le contrôle du Parti tombe dans les mains<br />

d'un petit cercle d'autocrates, ce contrôle jouera au bénéfice <strong>de</strong> l'extrême<br />

gauche – <strong>de</strong> cette aile du parti que j'appellerai le Parti <strong>de</strong> la Catastrophe.<br />

En procédant négativement, j'ai tendance à croire que le parti Radical<br />

<strong>de</strong>meure le meilleur instrument <strong>de</strong> progrès pour l'avenir – si seulement il était<br />

fermement mené et s'attachait à un vrai programme. Mais si l'on examine le<br />

problème <strong>de</strong>s partis sous un angle positif – en considérant davantage ce qui<br />

vous attache, que ce qui vous en détourne, les perspectives sont lugubres dans<br />

tous les partis, que nous cherchions à nous confier aux hommes ou aux<br />

programmes. Et les raisons sont les mêmes pour tous les partis. Les questions<br />

historiques <strong>de</strong> partis du XIX e siècle sont aussi périmées que le rôti <strong>de</strong> la<br />

semaine <strong>de</strong>rnière, et tandis, que surgissent les questions <strong>de</strong> l'avenir, elles ne<br />

sont pas encore <strong>de</strong>venues <strong>de</strong>s questions <strong>de</strong> partis, et elles chevauchent les<br />

frontières <strong>de</strong>s anciens partis.<br />

La liberté <strong>de</strong> pensée, civile et religieuse, la franchise douanière, l'autonomie<br />

<strong>de</strong>s Dominions, les pouvoirs <strong>de</strong> la Chambre <strong>de</strong>s Lords, l'impôt<br />

progressif sur le Revenu et la Fortune acquise, la part <strong>de</strong>s Revenus publics<br />

consacrée aux réformes sociales : assurances-chômage, assurances en cas <strong>de</strong><br />

maladie et assurances-retraites, à l'éducation, au logement et à la santé<br />

publique; toutes ces réformes pour lesquelles le parti Radical a combattu, ont<br />

été acquises ou ont été dépassées ou sont <strong>de</strong>venues l'apanage <strong>de</strong> tous les<br />

partis. Que reste-t-il ? les uns diront la question agraire. Pas moi – car j'estime<br />

que cette question, sous sa forme traditionnelle, a perdu, par suite <strong>de</strong> l'évolution<br />

<strong>de</strong>s faits, toute son importance politique. Je ne vois que <strong>de</strong>ux planches <strong>de</strong><br />

la doctrine libérale historique encore susceptibles <strong>de</strong> surnager – la question <strong>de</strong>

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!