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John Maynard Keynes (1931), Essais de persuasion

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<strong>John</strong> <strong>Maynard</strong> <strong>Keynes</strong> (<strong>1931</strong>), <strong>Essais</strong> <strong>de</strong> <strong>persuasion</strong> 128<br />

Je crois que nous regretterons par la suite cette décision <strong>de</strong> même que nous<br />

regrettons déjà la plupart <strong>de</strong>s décisions graves prises au cours <strong>de</strong>s dix<br />

<strong>de</strong>rnières années par les hommes qui font partie du ministère actuel.<br />

Mais là n'est pas en ce moment la question. La décision <strong>de</strong> maintenir à tout<br />

prix l'étalon-or a été prise. Ce qui est grave, c'est que ni le Gouvernement ni le<br />

public ne semblent avoir la moindre notion <strong>de</strong> ce qu'il faut faire pour appliquer<br />

cette décision. Les ministres ne voient que la nécessité d'avoir recours à<br />

un emprunt étranger pour couvrir les besoins immédiats <strong>de</strong> trésorerie, ce qui<br />

revient à remplacer <strong>de</strong> l'argent emprunté antérieurement sous forme <strong>de</strong> sterling<br />

par <strong>de</strong> l'argent emprunté sous forme <strong>de</strong> francs et <strong>de</strong> dollars. Mais ils ne<br />

peuvent s'imaginer que nous pourrons continuer éternellement à avoir recours<br />

à <strong>de</strong>s emprunts étrangers. Il reste pour résoudre le problème, tout d'abord à<br />

améliorer notre balance commerciale au profit <strong>de</strong> notre trésorerie. C'est à quoi<br />

le Ministère <strong>de</strong>vrait songer.<br />

Il n'y a que <strong>de</strong>ux moyens pour cela. Le premier (qui constitue la mesure la<br />

plus bénigne) consiste en <strong>de</strong>s mesures directes pour restreindre les importations<br />

(et si possible subventionner les exportations). Le second est <strong>de</strong> réduire<br />

tous les salaires et traitements à l'intérieur. Il nous faudra peut-être avoir<br />

recours finalement à ces <strong>de</strong>ux métho<strong>de</strong>s, si nous nous refusons à dévaloriser.<br />

Mais la question pour le moment est <strong>de</strong> savoir par quel moyen commencer.<br />

Or le second procédé, pour être efficace, comporterait <strong>de</strong> telles<br />

réductions <strong>de</strong> salaires et <strong>de</strong>s problèmes si complexes, si difficiles à résoudre,<br />

tant en ce qui concerne la justice sociale que leur application pratique, qu'il<br />

serait fou <strong>de</strong> ne pas tenter d'abord l'autre alternative tellement plus bénigne, à<br />

savoir une réduction <strong>de</strong>s importations.<br />

Il se trouve du reste que cette métho<strong>de</strong> a également d'autres avantages.<br />

Non seulement elle atténuera la tension <strong>de</strong>s changes, mais contribuera plus<br />

que toute autre à faciliter un équilibre du budget; c'est la seule forme d'impôts<br />

qui permette à la fois l'augmentation <strong>de</strong>s bénéfices, la reprise <strong>de</strong> la maind'œuvre,<br />

et un retour <strong>de</strong> confiance et d'espoir dans le milieu <strong>de</strong>s affaires.<br />

Enfin c'est la seule mesure qui dispose à juste titre, <strong>de</strong> la faveur <strong>de</strong><br />

l'opinion publique. On dit, et cela est plausible, que dans le <strong>de</strong>rnier ministère,<br />

un membre du Gouvernement sur trois, était partisan d'un tarif douanier. Il<br />

semble que dans le ministère actuel, on en compte quatre contre un. Le seul<br />

ministère possible après celui-ci serait un ministère qui se rallierait à cette<br />

mesure à l'unanimité. Mais les sacrifices étant à l'ordre du jour, nous avons,<br />

dans un esprit désintéressé, conçu la brillante formule d'un Gouvernement<br />

« National ». Il faut entendre par là un Gouvernement dont chaque membre a<br />

résolu <strong>de</strong> sacrifier, tant qu'il sera au pouvoir, ses idées propres sur ce qu'il<br />

convient <strong>de</strong> faire, pour nous tirer <strong>de</strong> nos misères.<br />

Car si nous écartons la dévalorisation, que je tiens personnellement pour le<br />

vrai remè<strong>de</strong>, mais qui ne figure encore dans la politique d'aucun parti, il reste<br />

trois lignes <strong>de</strong> conduite à adopter.<br />

La première est <strong>de</strong> courir les risques que comporte une active reprise<br />

intérieure, certainement préférable à une oisiveté forcée.

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