25.06.2013 Views

John Maynard Keynes (1931), Essais de persuasion

John Maynard Keynes (1931), Essais de persuasion

John Maynard Keynes (1931), Essais de persuasion

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

<strong>John</strong> <strong>Maynard</strong> <strong>Keynes</strong> (<strong>1931</strong>), <strong>Essais</strong> <strong>de</strong> <strong>persuasion</strong> 123<br />

<strong>de</strong> toute cette débâcle) charge Londres d'un trop lourd far<strong>de</strong>au financier. Ainsi<br />

apparaissent d'autres arguments évi<strong>de</strong>nts s'opposant à une politique trop<br />

hardie : car un surcroît d'activité à l'intérieur, provenant d'une main-d'œuvre<br />

plus nombreuse, augmentera l'excès <strong>de</strong> nos importations, et un emprunt <strong>de</strong> la<br />

part <strong>de</strong> l'État pourrait dans leur disposition actuelle, effrayer les spéculateurs.<br />

Ainsi les conséquences directes d'une politique expansionniste seraient<br />

d'obliger le Gouvernement à emprunter, <strong>de</strong> grever le budget, et d'accroître<br />

l'excès <strong>de</strong> nos importations. C'est pourquoi <strong>de</strong> toute façon – soulignent les<br />

adversaires <strong>de</strong> cette politique – elle ne peut qu'aggraver le manque <strong>de</strong> confiance,<br />

le volume <strong>de</strong>s impôts, et l'instabilité internationale, qui, déclarent-ils,<br />

est à la base <strong>de</strong> nos maux actuels.<br />

Ceci dit, les adversaires <strong>de</strong> l'expansion se divisent en <strong>de</strong>ux groupes : ceux<br />

qui estiment qu'il ne faut pas seulement renoncer pour l'instant à toute idée <strong>de</strong><br />

développement mais qu'il faut encore opérer <strong>de</strong>s restrictions, ils enten<strong>de</strong>nt par<br />

là une réduction <strong>de</strong>s salaires, et d'importantes économies sur les dépenses<br />

actuellement prévues au Budget, et ceux qui, tel Mr. Snow<strong>de</strong>n, voient d'un<br />

aussi mauvais œil tout projet <strong>de</strong> restriction dans le sens que je viens d'indiquer<br />

et tout projet d'expansion.<br />

Mais une politique purement négative est en réalité ce qu'il y a <strong>de</strong> plus<br />

dangereux. Car il <strong>de</strong>vient <strong>de</strong> plus en plus douteux, au fur et à mesure que le<br />

temps s'écoule, que nous puissions maintenir notre niveau <strong>de</strong> vie. Nous le<br />

pouvons sûrement avec 1 million <strong>de</strong> chômeurs; nous le pouvons probablement<br />

avec 2 millions <strong>de</strong> chômeurs; avec 3 millions <strong>de</strong> chômeurs. nous ne le pourrons<br />

probablement plus. Ainsi une politique négative qui permet au chômage<br />

<strong>de</strong> s'accroître progressivement, mène infailliblement, à un abaissement du<br />

niveau <strong>de</strong> la vie qui n'est plus tolérable <strong>de</strong> nos jours. Si l'on reste trop longtemps<br />

sans rien faire, il n'y aura finalement plus rien à faire.<br />

Le chômage provient – il faut que je le répète – du fait que l'employeur a<br />

été privé <strong>de</strong> bénéfice. L'absence <strong>de</strong> bénéfices peut avoir <strong>de</strong>s causes multiples.<br />

Mais à moins <strong>de</strong> passer au Communisme, il n'y a pas d'autre remè<strong>de</strong> au<br />

chômage que <strong>de</strong> rétablir une marge suffisante pour laisser un bénéfice aux<br />

employeurs. On peut s'y prendre <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux façons – ou accroître les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s,<br />

c'est la métho<strong>de</strong> expansionniste, ou réduire le coût <strong>de</strong> la production, c'est la<br />

métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> restrictions. Les <strong>de</strong>ux essayent <strong>de</strong> résoudre la difficulté. À<br />

laquelle doit-on donner la préférence?<br />

Diminuer le coût <strong>de</strong> la production en réduisant les salaires et réaliser <strong>de</strong>s<br />

économies sur certains chapitres budgétaires, peut provoquer <strong>de</strong> plus larges<br />

achats <strong>de</strong> nos produits par l'étranger (à moins, ce qui est également possible,<br />

que pareil exemple soit suivi par lès autres pays) mais entraînerait vraisemblablement<br />

une diminution <strong>de</strong>s achats à l'intérieur. Les avantages que<br />

retireraient les employeurs d'une réduction générale <strong>de</strong>s salaires ne sont donc<br />

pas aussi importants qu'ils en ont l'air. Chaque chef d'entreprise voit les<br />

avantages qu'il tirera d'une réduction <strong>de</strong>s salaires qu'il paye lui-même, mais<br />

néglige les conséquences <strong>de</strong> la diminution <strong>de</strong>s revenus <strong>de</strong> ses clients et <strong>de</strong> la<br />

réduction <strong>de</strong>s salaires dont bénéficient aussi ses concurrents. De toute façon, il<br />

y aurait là une injustice sociale qui provoquerait <strong>de</strong> sérieuses résistances, étant<br />

donné que ce serait avantager certaines classes <strong>de</strong> revenus aux dépens d'autres

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!