Les Mystère de Paris par Eugène Sue
Les Mystère de Paris par Eugène Sue Les Mystère de Paris par Eugène Sue
Les mystères de Paris (Tome I) - Eugène Sue —Quand je dis qu'ils ont bu, je me trompe, ils n'ont fait que tremper leurs lèvres dans leurs verres; et... —Je te demande ce qu'ils ont dit au Chourineur? —Ils lui ont parlé de choses et d'autres, quoi! De Bras-Rouge, de la pluie et du beau temps. —Ils connaissent Bras-Rouge? —Au contraire, le Chourineur leur a expliqué qui c'était... et comment vous l'aviez battu. —C'est bon, il ne s'agit pas de ça. —Vous demandez votre monnaie? —Oui... et j'emmènerai la Goualeuse passer la journée à la campagne. —Oh! impossible, ça, mon garçon. —Pourquoi? —Elle n'a qu'à ne pas revenir? Ses nippes sont à moi, sans compter qu'elle me doit encore deux cent vingt francs pour finir de s'acquitter de sa nourriture et de son logement, depuis que je l'ai prise chez moi; si elle n'était pas honnête comme elle l'est, je ne la laisserais pas aller plus loin que le coin de la rue, au moins. —La Goualeuse te doit deux cent vingt francs? —Deux cent vingt francs dix sous... Mais qu'est-ce que ça vous fait, mon garçon? Ne dirait-on pas que vous allez les payer? Faites donc le milord! —Tiens, dit Rodolphe en jetant onze louis sur l'étain du comptoir de l'ogresse. Maintenant, combien vaut la défroque que tu lui loues? La vieille, ébahie, examinait les louis l'un après l'autre d'un air de doute et de défiance. —Ah çà, crois-tu que je te donne de la fausse monnaie? Envoie changer cet or, et finissons... Combien vaut la défroque que tu loues à cette malheureuse? 76
Les mystères de Paris (Tome I) - Eugène Sue L'ogresse, partagée entre le désir de faire une bonne affaire, l'étonnement de voir un ouvrier posséder autant d'argent, la crainte d'être dupée, et l'espoir de gagner davantage encore, l'ogresse garda un moment le silence, puis elle reprit: —Ses hardes valent au moins... cent francs. —De pareilles guenilles! allons donc! Tu garderas la monnaie d'hier et je te donnerai encore un louis, rien de plus. Se laisser rançonner par toi, c'est voler les pauvres qui ont droit à des aumônes. —Eh bien! mon garçon, je garde mes hardes: la Goualeuse ne sortira pas d'ici: je suis libre de vendre mes effets ce que je veux. —Que Lucifer te brûle un jour selon tes mérites! Voilà ton argent, va me chercher la Goualeuse. L'ogresse empocha l'or, pensant que l'ouvrier avait commis un vol ou fait un héritage, et lui dit, avec un ignoble sourire: —Pourquoi, mon fils, ne monteriez-vous pas chercher vous-même la Goualeuse!... Cela lui ferait plaisir... car, foi de mère Ponisse, hier elle vous reluquait joliment! —Va la chercher et dis-lui que je l'emmènerai à la campagne... rien de plus. Surtout qu'elle ne sache pas que je t'ai payé sa dette. —Pourquoi donc? —Que t'importe? —Au fait, ça m'est égal, j'aime mieux qu'elle se croie encore sous ma coupe. —Te tairas-tu! Monteras-tu!... —Oh! quel air méchant! Je plains ceux à qui vous en voulez... Allons, j'y vais... j'y vais... Et l'ogresse monta. Quelques minutes après, elle redescendit. —La Goualeuse ne voulait pas me croire; elle est devenue cramoisie quand 77
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<strong>Les</strong> mystères <strong>de</strong> <strong>Paris</strong> (Tome I) - <strong>Eugène</strong> <strong>Sue</strong><br />
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lèvres dans leurs verres; et...<br />
—Je te <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ce qu'ils ont dit au Chourineur?<br />
—Ils lui ont <strong>par</strong>lé <strong>de</strong> choses et d'autres, quoi! De Bras-Rouge, <strong>de</strong> la pluie et du<br />
beau temps.<br />
—Ils connaissent Bras-Rouge?<br />
—Au contraire, le Chourineur leur a expliqué qui c'était... et comment vous<br />
l'aviez battu.<br />
—C'est bon, il ne s'agit pas <strong>de</strong> ça.<br />
—Vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z votre monnaie?<br />
—Oui... et j'emmènerai la Goualeuse passer la journée à la campagne.<br />
—Oh! impossible, ça, mon garçon.<br />
—Pourquoi?<br />
—Elle n'a qu'à ne pas revenir? Ses nippes sont à moi, sans compter qu'elle me<br />
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<strong>de</strong> son logement, <strong>de</strong>puis que je l'ai prise chez moi; si elle n'était pas honnête<br />
comme elle l'est, je ne la laisserais pas aller plus loin que le coin <strong>de</strong> la rue, au<br />
moins.<br />
—La Goualeuse te doit <strong>de</strong>ux cent vingt francs?<br />
—Deux cent vingt francs dix sous... Mais qu'est-ce que ça vous fait, mon<br />
garçon? Ne dirait-on pas que vous allez les payer? Faites donc le milord!<br />
—Tiens, dit Rodolphe en jetant onze louis sur l'étain du comptoir <strong>de</strong> l'ogresse.<br />
Maintenant, combien vaut la défroque que tu lui loues?<br />
La vieille, ébahie, examinait les louis l'un après l'autre d'un air <strong>de</strong> doute et <strong>de</strong><br />
défiance.<br />
—Ah çà, crois-tu que je te donne <strong>de</strong> la fausse monnaie? Envoie changer cet or,<br />
et finissons... Combien vaut la défroque que tu loues à cette malheureuse?<br />
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