Les Mystère de Paris par Eugène Sue
Les Mystère de Paris par Eugène Sue Les Mystère de Paris par Eugène Sue
Les mystères de Paris (Tome I) - Eugène Sue —Je suis à ma tâche, répondit Rodolphe; mes bonnes journées vont à quatre francs, quelquefois à cinq, mais dans l'été, parce que les jours sont longs. —Et vous flânez souvent, gueusard? —Oui, tant que j'ai de l'argent: d'abord six sous pour ma nuit dans mon garni. —Excusez, monseigneur... vous couchez à six sous, vous! dit le Chourineur en portant la main à son bonnet... Ce mot monseigneur, dit ironiquement par le Chourineur, fit sourire imperceptiblement Rodolphe, qui reprit: —Oh! je tiens à mes aises et à la propreté. —En voilà un pair de France! un banquier! un riche! s'écria le Chourineur, il couche à six. —Avec ça, continua Rodolphe, quatre sous de tabac, ça fait dix; quatre sous à déjeuner, quatorze; quinze sous à dîner; un ou deux sous d'eau-de-vie, ça me fait dans les environs de trente ronds (sous) par jour. Je n'ai pas besoin de travailler toute la semaine; le reste du temps je fais la noce. —Et votre famille? dit la Goualeuse. —Le choléra l'a mangée, reprit Rodolphe. —Qu'est-ce qu'ils étaient, vos parents? demanda la Goualeuse. —Fripiers sous les piliers des Halles, négociants en vieux chiffons. —Et combien que vous avez vendu leur fonds? dit le Chourineur. —J'étais trop jeune, c'est mon tuteur, qui l'a vendu; quand j'ai été major, je lui ai redû trente francs... Voilà mon héritage. —Et votre maître fabricant, à cette heure? demanda le Chourineur. —Mon singe 31 ? Il s'appelle M. Borel, rue des Bourdonnais, bête... mais brutal:... voleur... mais avare; il aime autant se faire crever un œil que faire la paye aux ouvriers. Voilà son signalement; s'il s'égare, laissez-le se perdre, ne le 31 Mon bourgeois, mon maître. 26
Les mystères de Paris (Tome I) - Eugène Sue ramenez pas à sa fabrique. J'ai été apprenti chez lui depuis l'âge de quinze ans, j'ai eu un bon numéro à la conscription; je demeure rue de la Juiverie, au quatrième sur le devant; je m'appelle Rodolphe Durand... Voilà mon histoire. —Maintenant, à ton tour, la Goualeuse, dit le Chourineur; je garde mon histoire pour la bonne bouche. 27
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—Je suis à ma tâche, répondit Rodolphe; mes bonnes journées vont à quatre<br />
francs, quelquefois à cinq, mais dans l'été, <strong>par</strong>ce que les jours sont longs.<br />
—Et vous flânez souvent, gueusard?<br />
—Oui, tant que j'ai <strong>de</strong> l'argent: d'abord six sous pour ma nuit dans mon garni.<br />
—Excusez, monseigneur... vous couchez à six sous, vous! dit le Chourineur en<br />
portant la main à son bonnet...<br />
Ce mot monseigneur, dit ironiquement <strong>par</strong> le Chourineur, fit sourire<br />
imperceptiblement Rodolphe, qui reprit:<br />
—Oh! je tiens à mes aises et à la propreté.<br />
—En voilà un pair <strong>de</strong> France! un banquier! un riche! s'écria le Chourineur, il<br />
couche à six.<br />
—Avec ça, continua Rodolphe, quatre sous <strong>de</strong> tabac, ça fait dix; quatre sous à<br />
déjeuner, quatorze; quinze sous à dîner; un ou <strong>de</strong>ux sous d'eau-<strong>de</strong>-vie, ça me<br />
fait dans les environs <strong>de</strong> trente ronds (sous) <strong>par</strong> jour. Je n'ai pas besoin <strong>de</strong><br />
travailler toute la semaine; le reste du temps je fais la noce.<br />
—Et votre famille? dit la Goualeuse.<br />
—Le choléra l'a mangée, reprit Rodolphe.<br />
—Qu'est-ce qu'ils étaient, vos <strong>par</strong>ents? <strong>de</strong>manda la Goualeuse.<br />
—Fripiers sous les piliers <strong>de</strong>s Halles, négociants en vieux chiffons.<br />
—Et combien que vous avez vendu leur fonds? dit le Chourineur.<br />
—J'étais trop jeune, c'est mon tuteur, qui l'a vendu; quand j'ai été major, je lui<br />
ai redû trente francs... Voilà mon héritage.<br />
—Et votre maître fabricant, à cette heure? <strong>de</strong>manda le Chourineur.<br />
—Mon singe 31 ? Il s'appelle M. Borel, rue <strong>de</strong>s Bourdonnais, bête... mais<br />
brutal:... voleur... mais avare; il aime autant se faire crever un œil que faire la<br />
paye aux ouvriers. Voilà son signalement; s'il s'égare, laissez-le se perdre, ne le<br />
31 Mon bourgeois, mon maître.<br />
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