Les Mystère de Paris par Eugène Sue

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Les mystères de Paris (Tome I) - Eugène Sue —Ça n'est pas déjà si bien, jeune homme; car le Chourineur ayant rencontré hier matin la Chouette près de Saint-Ouen, il ne l'a pas quittée d'une semelle dès qu'il a vu arriver le grand monsieur en deuil; de sorte que celui-ci n'a pas osé approcher. C'est donc deux mille francs qu'il faut que vous me fassiez regagner, sans compter cinq cents francs pour un portefeuille que nous devions rendre, mais que nous n'aurions pas d'ailleurs rendu, inspection faite des papiers qui nous ont paru valoir mieux que ça. —Il contient donc de grandes valeurs? —Il contient des papiers qui m'ont paru fort curieux, quoique la plupart soient écrits en anglais; et je les garde là, dit le brigand en frappant sur la poche de côté de sa redingote. En apprenant que le Maître d'école avait encore les papiers saisis l'avant-veille sur Tom, Rodolphe fut très-satisfait; ils étaient pour lui d'une haute importance. Ses instructions au Chourineur n'avaient pas eu d'autre but que d'empêcher Tom de s'approcher de la Chouette; celui-ci garderait alors le portefeuille, et Rodolphe espérait s'en rendre possesseur. —Je garde donc ces papiers comme une poire pour la soif, dit le brigand; car j'ai trouvé l'adresse du monsieur en deuil, et, d'une façon ou d'une autre, je le reverrai. —Nous pourrons faire affaire si vous voulez; si notre coup réussit, je vous achèterai ces papiers, moi qui connais l'homme; ça me va mieux qu'à vous. —Nous verrons... Mais d'abord revenons à nos moutons. —Eh bien! donc, j'avais proposé une affaire superbe au Chourineur; il avait d'abord accepté, puis il s'est dédit. —Il a toujours eu des idées singulières... —Mais en se dédisant il m'a observé... —Il vous a fait observer... —Diable... vous êtes à cheval sur la grammaire. —Maître d'école, c'est mon état. 132

Les mystères de Paris (Tome I) - Eugène Sue —Il m'a fait observer que s'il ne mangeait pas de pain rouge il ne fallait pas en dégoûter les autres; et que vous pourriez me donner un coup de main. —Et pourrais-je savoir, sans indiscrétion, pourquoi vous aviez donné rendezvous au Chourineur hier matin à Saint-Ouen? Ce qui lui a procuré l'avantage de rencontrer la Chouette? Il a été embarrassé pour me répondre à ce sujet. Rodolphe se mordit imperceptiblement les lèvres et répondit en haussant les épaules: —Je le crois bien, je ne lui avais dit mon projet qu'à moitié... vous comprenez... ne sachant pas s'il était tout à fait décidé. —C'était plus prudent... —D'autant plus prudent que j'avais deux cordes à mon arc. —Ah, bah! —Certainement. —Vous êtes un homme de précaution... Vous aviez donc donné rendez-vous au Chourineur à Saint-Ouen pour... Rodolphe, après un moment d'hésitation, eut le bonheur de trouver une fable vraisemblable pour couvrir la maladresse du Chourineur; il reprit: —Voici l'affaire... Le coup que je propose est très-bon, parce que le maître de la maison en question est à la campagne... toute ma peur était qu'il revienne. Pour être tranquille, je me dis: «Je n'ai qu'une chose à faire...» —C'était de vous assurer de la présence réelle dudit maître à la campagne. —Comme vous dites... Je pars donc pour Pierrefitte, où est sa maison de campagne... j'ai ma cousine, domestique là... vous comprenez! —Parfaitement, mon gaillard. Eh bien? —Ma cousine m'a dit que son maître ne revenait à Paris qu'après-demain... —Après-demain? —Oui. 133

<strong>Les</strong> mystères <strong>de</strong> <strong>Paris</strong> (Tome I) - <strong>Eugène</strong> <strong>Sue</strong><br />

—Il m'a fait observer que s'il ne mangeait pas <strong>de</strong> pain rouge il ne fallait pas en<br />

dégoûter les autres; et que vous pourriez me donner un coup <strong>de</strong> main.<br />

—Et pourrais-je savoir, sans indiscrétion, pourquoi vous aviez donné ren<strong>de</strong>zvous<br />

au Chourineur hier matin à Saint-Ouen? Ce qui lui a procuré l'avantage<br />

<strong>de</strong> rencontrer la Chouette? Il a été embarrassé pour me répondre à ce sujet.<br />

Rodolphe se mordit imperceptiblement les lèvres et répondit en haussant les<br />

épaules:<br />

—Je le crois bien, je ne lui avais dit mon projet qu'à moitié... vous<br />

comprenez... ne sachant pas s'il était tout à fait décidé.<br />

—C'était plus pru<strong>de</strong>nt...<br />

—D'autant plus pru<strong>de</strong>nt que j'avais <strong>de</strong>ux cor<strong>de</strong>s à mon arc.<br />

—Ah, bah!<br />

—Certainement.<br />

—Vous êtes un homme <strong>de</strong> précaution... Vous aviez donc donné ren<strong>de</strong>z-vous<br />

au Chourineur à Saint-Ouen pour...<br />

Rodolphe, après un moment d'hésitation, eut le bonheur <strong>de</strong> trouver une fable<br />

vraisemblable pour couvrir la maladresse du Chourineur; il reprit:<br />

—Voici l'affaire... Le coup que je propose est très-bon, <strong>par</strong>ce que le maître <strong>de</strong><br />

la maison en question est à la campagne... toute ma peur était qu'il revienne.<br />

Pour être tranquille, je me dis: «Je n'ai qu'une chose à faire...»<br />

—C'était <strong>de</strong> vous assurer <strong>de</strong> la présence réelle dudit maître à la campagne.<br />

—Comme vous dites... Je <strong>par</strong>s donc pour Pierrefitte, où est sa maison <strong>de</strong><br />

campagne... j'ai ma cousine, domestique là... vous comprenez!<br />

—Parfaitement, mon gaillard. Eh bien?<br />

—Ma cousine m'a dit que son maître ne revenait à <strong>Paris</strong> qu'après-<strong>de</strong>main...<br />

—Après-<strong>de</strong>main?<br />

—Oui.<br />

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