Les Mystère de Paris par Eugène Sue

Les Mystère de Paris par Eugène Sue Les Mystère de Paris par Eugène Sue

cyberpoete.fr
from cyberpoete.fr More from this publisher
25.06.2013 Views

Les mystères de Paris (Tome I) - Eugène Sue —Non, non, ce serait trop beau, trop heureux. —On n'a jamais trop de bonheur, Fleur-de-Marie. —Ah! par pitié, monsieur Rodolphe, ne me trompez pas, cela me ferait bien mal. —Ma chère enfant, croyez-moi, dit Rodolphe d'une voix toujours affectueuse, mais avec un accent de dignité que Fleur-de-Marie ne lui connaissait pas encore; oui, vous pouvez, si cela vous convient, mener dès aujourd'hui, auprès de M me Georges, cette vie paisible dont tout à l'heure le tableau vous enchantait. Quoique M me Georges ne soit pas votre tante, elle aura pour vous, lorsqu'elle vous connaîtra, le plus tendre intérêt; vous passerez même pour sa nièce aux yeux des gens de la ferme; ce petit mensonge rendra votre position plus convenable. Encore une fois, si cela vous plaît, Fleur-de-Marie, vous pourrez réaliser votre rêve de tantôt. Dès que vous serez habillée en petite fermière, ajouta-t-il en souriant, nous vous mènerons voir votre future favorite, Musette, jolie génisse blanche qui n'attend plus que le collier que vous lui avez promis. Nous irons aussi donner un coup d'œil à vos amis les pigeons, et puis à la laiterie; nous parcourrons enfin toute la ferme: je tiens à remplir ma promesse. Fleur-de-Marie joignit les mains avec force. La surprise, la joie, la reconnaissance, le respect se peignirent sur sa ravissante figure; ses yeux se noyèrent de larmes, elle s'écria: —Monsieur Rodolphe, vous êtes donc un ange du bon Dieu, que vous faites tant de bien aux malheureux sans les connaître, et que vous les délivrez de la honte et de la misère!!! —Ma pauvre enfant, répondit Rodolphe avec un sourire de mélancolie profonde et d'ineffable bonté, quoique bien jeune, j'ai dans ma vie déjà souffert; cela vous explique ma compassion pour ceux qui souffrent. Fleur-de- Marie, ou plutôt Marie, allez avec M me Georges. Oui, Marie, gardez désormais ce nom, doux et joli comme vous! Avant mon départ, nous causerons ensemble, et je vous quitterai bien heureux de vous savoir heureuse. Fleur-de-Marie ne répondit rien, s'approcha de Rodolphe, fléchit à demi les genoux, et prit sa main et la porta respectueusement à ses lèvres avec un mouvement rempli de grâce et de modestie. 108

Les mystères de Paris (Tome I) - Eugène Sue Puis elle suivit M me Georges, qui la contemplait avec un intérêt profond. 109

<strong>Les</strong> mystères <strong>de</strong> <strong>Paris</strong> (Tome I) - <strong>Eugène</strong> <strong>Sue</strong><br />

—Non, non, ce serait trop beau, trop heureux.<br />

—On n'a jamais trop <strong>de</strong> bonheur, Fleur-<strong>de</strong>-Marie.<br />

—Ah! <strong>par</strong> pitié, monsieur Rodolphe, ne me trompez pas, cela me ferait bien<br />

mal.<br />

—Ma chère enfant, croyez-moi, dit Rodolphe d'une voix toujours affectueuse,<br />

mais avec un accent <strong>de</strong> dignité que Fleur-<strong>de</strong>-Marie ne lui connaissait pas<br />

encore; oui, vous pouvez, si cela vous convient, mener dès aujourd'hui, auprès<br />

<strong>de</strong> M me Georges, cette vie paisible dont tout à l'heure le tableau vous<br />

enchantait. Quoique M me Georges ne soit pas votre tante, elle aura pour vous,<br />

lorsqu'elle vous connaîtra, le plus tendre intérêt; vous passerez même pour sa<br />

nièce aux yeux <strong>de</strong>s gens <strong>de</strong> la ferme; ce petit mensonge rendra votre position<br />

plus convenable. Encore une fois, si cela vous plaît, Fleur-<strong>de</strong>-Marie, vous<br />

pourrez réaliser votre rêve <strong>de</strong> tantôt. Dès que vous serez habillée en petite<br />

fermière, ajouta-t-il en souriant, nous vous mènerons voir votre future favorite,<br />

Musette, jolie génisse blanche qui n'attend plus que le collier que vous lui avez<br />

promis. Nous irons aussi donner un coup d'œil à vos amis les pigeons, et puis à<br />

la laiterie; nous <strong>par</strong>courrons enfin toute la ferme: je tiens à remplir ma<br />

promesse.<br />

Fleur-<strong>de</strong>-Marie joignit les mains avec force. La surprise, la joie, la<br />

reconnaissance, le respect se peignirent sur sa ravissante figure; ses yeux se<br />

noyèrent <strong>de</strong> larmes, elle s'écria:<br />

—Monsieur Rodolphe, vous êtes donc un ange du bon Dieu, que vous faites<br />

tant <strong>de</strong> bien aux malheureux sans les connaître, et que vous les délivrez <strong>de</strong> la<br />

honte et <strong>de</strong> la misère!!!<br />

—Ma pauvre enfant, répondit Rodolphe avec un sourire <strong>de</strong> mélancolie<br />

profon<strong>de</strong> et d'ineffable bonté, quoique bien jeune, j'ai dans ma vie déjà<br />

souffert; cela vous explique ma compassion pour ceux qui souffrent. Fleur-<strong>de</strong>-<br />

Marie, ou plutôt Marie, allez avec M me Georges. Oui, Marie, gar<strong>de</strong>z désormais<br />

ce nom, doux et joli comme vous! Avant mon dé<strong>par</strong>t, nous causerons<br />

ensemble, et je vous quitterai bien heureux <strong>de</strong> vous savoir heureuse.<br />

Fleur-<strong>de</strong>-Marie ne répondit rien, s'approcha <strong>de</strong> Rodolphe, fléchit à <strong>de</strong>mi les<br />

genoux, et prit sa main et la porta respectueusement à ses lèvres avec un<br />

mouvement rempli <strong>de</strong> grâce et <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>stie.<br />

108

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!