Histoire de la dermatologie latino-américaine - Bibliothèque ...

Histoire de la dermatologie au Guatemala
langues étrangères. Par conséquent, il devait obligatoirement retourner au Guatemala et
abandonner l’idée de partir à bord d’une frégate pour le Pérou. Adieu aux rêves de richesse
et aux désirs de pèlerin, songeait Dom Francisco Desplanquez, au moment où il
prit humblement le chemin du retour, dûment gardé.
Le 5 septembre 1768, Dom Pedro Salazar Natera y Mendoza, capitaine général du
Guatemala ordonna la capture du suspect Desplanquez et de son compagnon, le chirurgien
Thomas. Le maire Felipe Rubio Morales exécuta l’ordre, emprisonnant les inculpés
accompagnés de huit dragons et placés à l’endroit le plus sûr de la prison appelé chapelle.
Le maire Rubio Morales, l’administrateur de la poste, Joseph de Garayales, et
toutes les autorités jugèrent les papiers innocents de Desplanquez hermétiques et suspects.
Les fantômes des corsaires anglais et l’intrusion d’espions pesaient dans l’accusation
du médecin français. Les traductions et les interrogatoires étaient urgents. Les
autorités simples et inoccupées virent dans ce voyage un redoutable plan d’invasion, souhaitant
trouver dans ces papiers mystérieux toutes les clés de plans stupéfiants. La déception
fut grande quand ils apprirent le contenu des papiers. Comme personne ne
connaissait la langue française dans la ville, Desplanquez dut lui-même les traduire, sous
serment.
Les papiers mystérieux (actuellement conservés dans les archives du gouvernement)
comportaient divers sujets. L’un traitait avec précision de la géographie et de l’histoire
du Pérou ; ces descriptions, retranscrites à partir d’un carnet de voyages, étaient très
utiles au Dr Desplanquez qui partait dans ce pays pour y faire fortune. Un autre contenait
une description du diamant et d’autres pierres précieuses, étude suivie d’une curieuse
technique pour blanchir les culottes en soie. D’autres papiers évoquaient des
animaux et des plantes en lien avec la thérapeutique. Il y racontait des soins tels que l’infaillible
remède contre la rage qui consistait à prendre quelques grammes de fumier
d’oie dans du vin blanc. Suivait une liste complète de remèdes : le jus de chiridono permettait
d’extraire les dents sans douleur, en une fois ; le tlanchinoli soignait le mal vénérien
en peu de jours et privait de raison les malades durant vingt-quatre heures. Le
jagua rendait le visage si noir qu’il était possible de prendre les Blancs pour des Noirs.
Ces remèdes magnifiques et efficaces faisaient le succès du médecin Desplanquez, qui
dut malheureusement laisser au tribunal les recettes infaillibles.
Le château imaginaire s’écroula, car les autorités honteuses durent présenter leurs
excuses à l’innocent Desplanquez. En décembre 1768, le juré dénommé Romaña ordonna
la libération du médecin français, à qui il fut néanmoins interdit de s’enfoncer
dans les provinces ou d’errer en Amérique. Une fois libre et désemparé, Desplanquez
participa à la lutte contre les épidémies en prescrivant de bonnes recettes contre la rougeole
de 1769 et contre le typhus de 1774. Lors du transfert de la ville vers la vallée de
la Ermita, notre médecin au visage horrible vécut quelques années à Nueva Guatemala,
d’où il disparut sans laisser de traces. C’est ainsi que s’achève l’histoire du médecin Desplanquez,
célibataire au visage répugnant, qui trouva la fortune et le profit dans la ville
qui l’avait condamné à une prison redoutable 29 .
LE SCANDALE DU DR IMERY
En 1795, le Dr Marcos Imeria ou Imery, médecin irlandais, fut mis en prison pour
« fautes graves ». Marcos Imeria habitait à San Miguel, et y fut emprisonné par ordre du
capitaine général Domás y Valle. Le maire du village respecta tout de suite l’ordre et incrimina
le professeur de médecine Imery, qui déclara être catholique, originaire d’Irlande,
et ignorer complètement les causes de son emprisonnement. Il sut qu’il avait été
victime de calomnie, d’infidélité inventée par un de ses clients, ce qui était très fréquent
dans la profession.
Il était très malade et ne pouvait pas abandonner ses clients ; la liberté sous caution
ou l’assignation à résidence étant donc nécessaires.
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