Histoire de la dermatologie latino-américaine - Bibliothèque ...

Histoire de la dermatologie en Colombie
José Celestino Mutis eut une idée claire de la maladie au XVII e siècle, faisant la différence
entre les malades peu contagieux ou très contagieux. Au XVIII e siècle, la lèpre attaqua
les départements d’Antioquia et des Santanderes. Le peuplement du Socorro fut si
ravagé en 1775 que les habitants fuirent l’endroit et les maisons des malades furent lapidées
9 . Vers la fin du siècle, le vice-roi Caballero y Góngora écrivit : « À l’instant où un
patient est déclaré lépreux, il est conduit à l’hôpital de Carthagène, on lui indique sa petite
part de terrain et on lui remet sa maison ou habitation où il passera le reste de sa
vie… comme quoi, ces malheureux sont condamnés à une prison perpétuelle 2 …» Au
XIX e siècle, José Joaquín García décrivit les manifestations sensitives et motrices de la
maladie ; Ricardo de la Parra affirma que la lèpre était contagieuse, héréditaire et
curable. Lors de la présentation de sa pièce représentant le « mal de San Antón » au
musée Dupuytren, Evaristo García lança à Paris la polémique sur l’arthropathie et la
lésion osseuse causées par une anomalie du tube neural. Au cours de ce siècle, les
traitements utilisés étaient la strychnine, les arsenicaux, l’aspirine, les venins de serpents
et l’huile de chaulmoogra (leprol).
Grâce à son ouvrage intitulé La Lepra en Colombia. Etiología, nosología, profilaxis
y tratamiento [La lèpre en Colombie. Étiologie, nosologie, prophylaxie et traitement],
Gabriel José Castañeda favorisa la promulgation de la loi des Lazarets. Lorsqu’il cherchait
les premières manifestations de la maladie, Juan de Dios Carrasquilla (figure 16)
décrivit le « chancre lépreux »; il mena des recherches et produisit une antitoxine qui
parcourut le monde en 1890. Il considéra que la puce pouvait être un vecteur de la
maladie; il conçut sa propre méthode pour trouver le bacille chez la lymphe 33, 34 ; il soutint
l’origine infectieuse de la lèpre causée par un microbe, même contre les théories
héréditaires 35 . Pablo García Medina aboutit pour sa part à la promulgation des lois de
la fin du XIX e siècle pour convertir les léproseries en colonies de malades 2 .
Federico Lleras Acosta (figure 17) effectua plusieurs recherches bactériologiques
dans les années 20 et 30, notamment sur la lèpre; il décrivit la réaction de Lleras — un
test de fixation du complément à 97 % de sensibilité et à 99,7 % de spécificité — qui fut
employé sur plus de 7 000 patients mais qui fut abandonné, sa spécificité ne pouvant
pas être prouvée 24 . Le traitement de la lèpre avec des sulfones fut initié au cours des
années 50, mais à partir de 1981 on passa à la polychimiothérapie à cause de la résistance
de la maladie.
D’importantes institutions et des dermatologues prestigieux participèrent, dans
un passé récent et encore de nos jours, à l’histoire de la lèpre, parmi lesquels nous
citons : Fabio Londoño, Luis Alfredo Rueda, Mariano López, Gerzaín Rodríguez, Antonio
Torres, Luis Hernando Moreno, Adriana Arrunátegui, Gustavo Corredor, Efraín
Solares Alava, Jorge García, Rubén Marrugo, Carlos Garzón Fortich, Álvaro Sabogal,
Pedro Miguel Román, José Félix Zambrano et Antonio Morales, entre autres.
En 1998, le pays recensait 2 933 malades.
Malgré les innombrables recherches, les mesures d’assainissement de l’environnement
et le développement technologique, la lèpre est toujours un fléau pour l’humanité.
Il reviendra aux nouvelles générations de mener les recherches génétiques et de
biologie moléculaire pour parvenir à l’éradication du mal des siècles.
HISTOIRE DE LA SYPHILIS ET AUTRES TRÉPONÉMATOSES
Les infections par tréponèmes apparurent probablement en Afrique équatoriale sous
la forme du pian. Les migrations vers les zones sèches du tropique africain entraînèrent
un changement dans l’emplacement des lésions, qui se situèrent dans les parties plus humides
du corps (autour de la bouche) et devinrent des formes de syphilis non vénérienne ;
elles voyagèrent peut-être ainsi avec les premiers migrants du Nouveau Monde, pour
réintroduire le pian sur le tropique américain. On trouva davantage en Amérique qu’en
Europe des restes osseux présentant des séquelles de tréponématoses, qui furent
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Figure 16.
Juan de Dios
Carrasquilla
Figure 17.
Federico Lleras