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CD 16 / 17 : Suites françaises, BWV 8 -8 7<br />
N° 1 en ré mineur, BWV 8<br />
N° 2 en ut mineur, BWV 8 3<br />
N° 3 en si mineur, BWV 8 4<br />
N° 4 en mi bémol majeur, BWV 8 5<br />
N° 5 en sol majeur, BWV 8 6<br />
N° 6 en mi majeur, BWV 8 7<br />
Pour autant que l’on puisse en juger, Bach se familiarisa avec la<br />
musique française aux alentours de 700 lorsqu’il était jeune étudiant<br />
à Lüneburg. La Michaelisschule qu’il fréquentait pouvait s’enorgueillir<br />
d’une « Ritteracademie », une école pour les fils de la riche noblesse<br />
où l’on parlait français et où l’on apprenait les coutumes et l’étiquette<br />
françaises. Dans les environs, l’Orchestre français du duc de Celle<br />
donnait de nombreux concerts de musique française auxquels Bach<br />
et les autres étudiants prenaient parfois part. À cette même époque,<br />
l’organiste de la Johanniskirche, Georg Böhm, dévoila les chefs-d’œuvre<br />
de la musique française pour clavecin à Bach, et lui apprit l’art de la jouer.<br />
On peut estimer que Bach a joué bon nombre de suites françaises et de<br />
préludes non-mesurés, des œuvres notées librement sans aucune barre<br />
de mesure. Ces deux genres avaient été développés par des luthistes<br />
et clavecinistes français du 7 ème siècle tels que Denis Gaultier, Gallot,<br />
Blancroche, Chambonnières et naturellement Louis Couperin. Grâce<br />
à ce que lui apprit Böhm, le jeune claveciniste allemand Bach pouvait<br />
jouer, pour la noblesse locale, des pièces de danse au parfum français<br />
datant de l’époque du Roi Soleil. Toujours soucieux d’approfondir ses<br />
connaissances, Bach s’initia au monde galant et au langage raffiné de la<br />
suite française, l’article français d’exportation musicale par excellence.<br />
Les « gros bonnets » de l’époque dans ce genre délicat et richement<br />
ornementé s’appelaient Jean-Henry D’Anglebert, François Couperin,<br />
Jean-Philippe Rameau et Louis Marchand.<br />
En dehors d’un certain nombre de suites pour clavecin moins connues,<br />
les Suites anglaises, les Suites françaises (toutes deux rassemblées en<br />
cycle au cours des années 7 8- 7 5), ainsi que les Six Partitas qui,<br />
elles, avaient fait l’objet d’éditions séparées entre 7 6 & 730 avant<br />
d’être rassemblées dans un seul et même volume, la première série de<br />
Klavier-Übung, en 73 . Le second volume de la Klavier-Übung contient<br />
également une suite, la grande Partita en si mineur, intitulée Ouverture<br />
dans le style français, pour clavecin à deux claviers ». Il semble acquis<br />
que le titre « Suites françaises ».<br />
Comme les Suites anglaises, les Suites françaises – dont il semble<br />
acquis que le titre ne soit pas de Bach – consistent, comme on l’a dit<br />
plus haut, en une série traditionnelle de danses : Allemande, Courante,<br />
Sarabande, Gigue, ces deux dernières entrecoupées de quelques<br />
courtes « galanteries ». Mais à la différence des Suites anglaises, les<br />
Suites françaises ne comprennent pas de « doubles » (les variantes<br />
ornementées du mouvement doublé). De plus, les Suites françaises<br />
commencent directement par l’Allemande ; ainsi semblent-elles de<br />
dimensions plus modestes, le langage en est moins stylisé et la virtuosité<br />
moins exigeante. Les deux modes, majeur et mineur, sont représentés à<br />
égalité : ré mineur, ut mineur, si mineur, mi bémol majeur, sol majeur<br />
et mi majeur.<br />
Les Suites françaises jouèrent un rôle primordial dans la musique<br />
« domestique » chez les Bach et pour l’usage pédagogique. Anna<br />
Magdalena copia les cinq premières suites dans son premier Petit livre<br />
( 7 ), et trois ans plus tard elle reprit à nouveau les deux premières<br />
dans son second Petit livre. De plus, un grand nombre de copies<br />
manuscrites, provenant des élèves de Bach, nous sont connues ; dans<br />
l’enseignement de Bach, ces œuvres se situaient, en termes de difficultés<br />
techniques, entre les Inventions et le Clavier bien tempéré. Un élève de<br />
Bach, Kirnberger, rapporte qu’il était alors très fashionable et évident<br />
de se complaire dans la musique française : « Les bons professeurs de<br />
musique recommandent surtout les différentes sortes de danse à leurs<br />
élèves. Ceux-ci travaillent toutes sortes de difficultés et se familiarisent<br />
avec un jeu éloquent, expressif et varié grâce aux divers rythmes,<br />
aux différents mouvements qui doivent être clairement marqués, à<br />
l’art d’appuyer ou d’alléger le propos, et à la diversité de caractère et<br />
d’expression. Il ne faut pas dire que ces morceaux de danse manquent<br />
de goût : ils possèdent du caractère et de l’expression, et permettent à