Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
A. Sorge et quelques anonymes. Au début, le cahier est rangé selon le<br />
même plan que le Orglbüchlein, en accord avec l’année liturgique, mais<br />
on remarque une plus grande liberté à mesure que l’on avance dans la<br />
série. La majorité des chorals d’introduction sont de Johann Michael<br />
Bach tandis que la partie « libre » échoit à Jean Sébastien Bach.<br />
La forme de variation de choral la plus répandue chez Bach est celle<br />
transmise directement par Johann Michael Bach et Pachelbel : un fugato<br />
introduit la première phrase que suit le choral dans son intégralité,<br />
phrase après phrase, le thème étant confié au soprano, tandis que les<br />
parties intermédiaires et la basse jouent l’accompagnement et, entre les<br />
phrases, quelques interludes.<br />
On peut citer en exemple de ce format Wir danken dir, Hell Jesu Christ<br />
(Nous te remercions, éclatant Jésus Christ), BWV 1096, dont il existait<br />
d’ailleurs une version de 5 mesures seulement, publiée par Max Seiffert<br />
qui l’attribue à Pachelbel et selon qui il devait s’agir d’une pièce plus<br />
longue. Autre exemple, Ach Gott, tu dich erbarmen (Ah Dieu, prends<br />
pitié), BWV 1109 (CD 0), bien que Bach omette <strong>ici</strong> le fugato d’entrée<br />
et commence directement par le choral. On peut également noter les<br />
réalisations particulièrement expressives et émouvantes, et tout aussi<br />
étonnantes en termes de richesse contrapuntique, que sont Das alte<br />
Jahr vergangen ist (La vieille année est passée), BWV 1091, O Lamm<br />
Gottes, unschuldig (Toi, l’Agneau de Dieu, innocent), BWV 1093 ou<br />
encore Wenn dich Unglück tut greifen an (Si le malheur t’assaille), BWV<br />
1104. Dans certains cas, lorsque le thème choral est trop long pour être<br />
cité dans son intégralité, Bach se contente d’écrire une fugue basée sur<br />
la première phrase et, en guise de conclusion, une brève mention de<br />
la dernière : c’est le cas dans Der Tag ist so freudenreich (Ce jour est<br />
si plein d’allégresse), BWV 719 et Wir glauben all an einen Gott (Nous<br />
croyons tous en un seul Dieu), BWV 1098.<br />
Naturellement, le processus décrit ci-dessus est sujet à de nombreuses<br />
licences et variations ; dans certains cas, l’écriture est délibérément<br />
réduite à sa plus simple expression, dans lequel cas le cantus firmus<br />
peut sembler s’élever au-dessus de deux voix seulement, ciselées à<br />
l’extrême : on pense à Allein zu dir, Herr Jesu Christ (Rien que vers toi,<br />
Seigneur Jésus-Christ), BWV 1100 et à Wie nach einer Wasserquelle<br />
(Comme une biche soupire après des courants d’eau), BWV 1119<br />
(CD 0). Parfois, les préludes ressemblent plutôt à des fantaisies<br />
chorales, tellement le cantus firmus se faufile de voix en voix, chargé<br />
de figurations en tous genres. Le meilleur exemple de ce style est sans<br />
nul doute Nun lass uns dein Leib begraben (À présent, ensevelissons<br />
le corps), BWV 1111 (CD 0), un choral funèbre dans lequel l’on peut<br />
éventuellement percevoir l’image de l’âme humaine vers les Cieux dans<br />
les motifs ascendants de la fin. Citons également, dans ce langage, Was<br />
Gott tut, das ist wohlgetan (Ce que Dieu fait est bien fait), BWV 1116<br />
(CD 0). La réalisation se libère de plus en plus des modèles « d’école »<br />
dans Gott ist mein Heil, mein Hilf und Trost (Dieu est mon salut, mon<br />
secours et mon réconfort), BWV 1106, Werde munter, mein Gemüte<br />
(Sois gai, mon cœur), BWV 1118 (CD 0), ou encore dans Jesu, meines<br />
Lebens Leben (Jésus, vie de ma vie), BWV 1107, ce dernier étant une<br />
pièce dans laquelle le caractère enjoué de la gigue souligne la gaieté et<br />
la reconnaissance.<br />
On trouve un format encore plus ramassé de la fantaisie chorale<br />
nord-allemande dans certaines des variations de choral : dans ce<br />
cas, les figurations et les motifs nouveaux se font assez rares. Parmi<br />
les exemples les plus frappants, citons Wir Christenleut (Nous les<br />
chrétiens), BWV 1090 et Herzlich lieb hab ich dich, o Herr (Je vous<br />
aime de tout cœur, ô Seigneur), BWV 1115 (CD 0), ce dernier avec<br />
une introduction à la Buxtehude. Dans cette lignée de pièces assez<br />
libres de toute contrainte formelle se trouvent les préludes de chorals<br />
introduits par une harmonisation stricte à quatre voix qui, au fur et à<br />
mesure, se développe en un langage de plus en plus hardi et spontané.<br />
Les meilleures illustrations de ce style particulier se trouvent dans Gott,<br />
nun schleuss den Himmel auf (Seigneur Dieu, ouvrez le ciel), BWV 1092<br />
et Jesu, meine Freude (Jésus, ma joie), BWV 1105. L’arrangement assez<br />
fantastique de Alle Menschen müssen sterben (Tous les hommes doivent<br />
mourir), BWV 1117 (CD 0), fait également partie de ce genre là ; selon<br />
la mise en musique de Bach, il apparaît que la mort n’est en aucun cas<br />
une tragédie pour les hommes de l’époque baroque. On reconnaît<br />
l’influence nord-allemande également dans la seule réalisation à deux<br />
357