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Dies sind die heiligen zehn Gebot (Vo<strong>ici</strong> les dix commandements),<br />
BWV 635 fait appel à un motif principal en croches dérivé de la phrase<br />
d’ouverture du choral répétée rien moins que 4 fois dans les trois voix<br />
d’accompagnement, un effet d’insistance assurément voulu par Bach.<br />
Cela dit, il semble impossible de trouver la moindre correspondance<br />
numérologique entre les Dix commandements et le thème – huit notes<br />
seulement – ou les 4 redites. Pour Vater unser in Himmelreich (Notre<br />
Père qui êtes aux cieux), BWV 636, l’écriture simple crée une impression<br />
de choral à quatre voix que l’on aurait redistribuée à l’instrument<br />
avec quelques notes additionnelles. Le choral suivant ne manque pas<br />
d’étonner l’auditeur actuel, au même titre qu’il a dû effrayer les fidèles<br />
du temps de Bach par sa violence extraordinaire : Durch Adams Fall<br />
ist ganz verdebt (La chute d’Adam a corrompu), BWV 637 présente<br />
une ligne de basse absolument aberrante (« saltus duriusculus »)<br />
faite de sauts catastrophiques auxquels les chromatismes des parties<br />
intermédiaires chromatiques ajoutent une dimension quasi-atonale. En<br />
réponse à ce cri de terreur, Es ist das Heil uns gekommen her (Le salut<br />
nous est venu), BWV 638 semble promettre la grâce et le pardon : des<br />
croches régulières et « droites » au pédalier et des doubles-croches dans<br />
les parties intermédiaires permettent de retrouver calme et sérénité. Ich<br />
ruf zu dir, Herr Jesu Christ (Je t’invoque, Seigneur Jésus Christ), BWV<br />
639 est le seul choral à trois voix du recueil : le cantus firmus au soprano,<br />
une partie d’alto d’essence violonistique (« imitatio violonistica ») et<br />
une basse dans le style du continuo. Malgré la modestie des moyens<br />
mis en œuvre et la rigueur quasi-mathématique du contrepoint, Bach<br />
crée là l’une des atmosphères les plus tendres et douloureuses de tout<br />
son œuvre, preuve qu’il n’est pas besoin de trop d’effets pour atteindre<br />
le cœur. In dich hab’ ich gehoffet, Herr (J’ai mis mon espoir en toi,<br />
Seigneur), BWV 640 offre un moment de recueillement promettant<br />
consolation et confiance en soi et dans le Seigneur. Dans Wenn wir in<br />
höchsten Nöten sein (Quand nous sommes en grande détresse), BWV<br />
641, l’on retrouve les ornementations déjà rencontrées dans O Mensch<br />
bewein… L’accompagnement se résume à reprendre les quelques notes<br />
de tête du choral ; on observera que le même choral est réalisé de<br />
manière quasi-indentique dans les 18 Chorals BWV 668, quand bien<br />
même la présente écriture offre quelques interludes entre les phrases<br />
chorales. Avec sa « figura corta » et sa basse stable, Wer nur den lieben<br />
Gott lässt walten (Celui qui laisse faire le Bon Dieu sans partage),<br />
BWV 642 apporte un moment d’assurance parmi de nombreuses<br />
pièces déchirantes, dont justement le choral suivant, Alle Menschen<br />
müssen sterben (Tous les hommes doivent mourir), BWV 643, un choral<br />
funéraire. Bach traite pourtant le thème avec une immense douceur et<br />
dans une tonalité majeure, sans réussir à en gommer l’infinie tristesse.<br />
Les motifs soupirants, alternés entre basse et alto/ténor, ne font rien<br />
pour alléger la souffrance… Le dernier choral du Orgelbüchlein, Ach<br />
wie nichtig, ach wie flüchtig (Hélas, combien éphémère, combien futile),<br />
BWV 644, se singularise par sa brièveté : dix mesures seulement, mais<br />
chargées de difficultés telles que l’on se demande si Bach se préoccupait<br />
de savoir s’il serait jouable. Mais la rigueur absolue de son propos et<br />
l’exactitude de ses figures semblent l’avoir emporté. On remarquera les<br />
quelques figurations évidentes : de courts sauts d’octaves descendants<br />
sur « nichtig » (« insignifiant ») et un mouvement en gammes<br />
virevoltantes pour « flüchtig » (« fugitif »).<br />
Les autres pièces contenues dans ce même CD partagent toutes la<br />
douteuse caractéristique de n’être probablement pas de Bach, quand<br />
bien même elles faisaient toutes parties de son programme pédagogique.<br />
Pour en terminer avec Le Petit Livre d’orgue, commençons par<br />
la Fantaisie et fugue en la mineur, BWV 561 ; elle pourrait sembler<br />
une œuvre de jeunesse dans le style nord-allemand, jusqu’à ce que<br />
surviennent des tournures harmoniques qui ne peuvent appartenir<br />
qu’aux années 750. L’œuvre se divise en trois parties : une introduction<br />
et un dernier mouvement présentant des motifs de clavecin sur une<br />
basse de pédalier, et une fugue pour clavier au milieu. Certains pensent<br />
que la pièce a pu être conçue pour le clavecin à pédalier. Le compositeur<br />
– un élève de Bach ? – connaissait assez bien les œuvres de son maître<br />
pour écrire là une pièce dont le sujet ressemble furieusement à la grande<br />
Fugue en la mineur, BWV 543.<br />
On peut certainement relier le Trio en ut mineur, BWV 585 aux<br />
activités pédagogiques du maître : il s’agit de la transcription de deux<br />
mouvements d’une sonate en trio de J. F. Fasch, une transcription<br />
probablement due à Bach lui-même. Peut-être désirait-il démontrer<br />
à l’un de ses élèves (Krebs, à qui l’on a attribué l’ouvrage un certain