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u: bey dem Verleger zu Zella”.<br />
(« Six chorals de diverses sortes à jouer sur l’orgue avec deux claviers et<br />
pédalier, établis par Johannes Sebastian Bach, compositeur de la cour<br />
royale de Pologne et de l’électeur de Saxe, maître de chapelle et directeur<br />
du chœur de Leipzig. Imprimé par Georg Schübler à Zella en Forêt de<br />
Thuringe, que l’on peut obtenir à Leipzig chez le Maître de Chapelle<br />
Bach, chez ses fils à Berlin et Halle, ainsi que chez l’éditeur à Zella. »)<br />
C’est là la page de titre de l’édition de ces six chorals, connus désormais<br />
sous le nom de Chorals Schübler, d’après le nom de l’éditeur. On ne<br />
connaît pas la date exacte de la publication, mais elle ne peut en aucun<br />
cas être antérieure au 6 avril 746 lorsque Wilhelm Friedemann,<br />
l’un des fils mentionnés dans le titre, fut nommé au poste d’organiste<br />
de l’église Liebfrau de Halle. Cela dit, de nombreux éléments laissent<br />
penser que l’ouvrage ne fut publié que longtemps après, peut-être<br />
même en 750.<br />
Cinq des six chorals sont des transcriptions réalisées à partir de<br />
cantates de l’époque de Leipzig. Seule la dernière, « Wo soll ich fliehen<br />
hin », semble une composition originale, de par ses figures typiques de<br />
l’écriture pour orgue, en particulier dans la basse qui, dans les autres<br />
chorals, présente des tournures plutôt apparentées au continuo. Les<br />
six chorals sont écrits pour deux claviers et pédalier, avec le cantus<br />
firmus énoncé dans des valeurs rythmiques régulières et égales tandis<br />
que l’accompagnement égrène des mélodies obligées finement ciselées.<br />
Pour les auditeurs de l’époque, le langage de Bach, direct et dénué de<br />
fioritures baroques et de figures contrapuntiques ésotériques, a dû<br />
sembler puissamment moderne. Peut-être le compositeur prenaitil<br />
dans son recueil le contre-pied des Clavierübung III de 739, un<br />
ouvrage chargé de contrepoints complexes et austères, ou même des<br />
Canonische Veränderungen über Vom Himmel Hoch de 747, afin de<br />
s’adresser au public dans un style qui pouvait plaire au plus grand<br />
nombre. Par ailleurs, Bach a donné de nombreuses indications de<br />
registration, ce qui laisse imaginer qu’il espérait une large circulation<br />
de ses partitions.<br />
Existe-t-il un lien entre le contenu des divers textes des chorals, et<br />
la collection présente-t-elle des symbolismes de quelque sorte que<br />
ce soit ? On observe une certaine symétrie : deux morceaux à quatre<br />
voix, encadrés par deux pièces en trio ; les premier et dernier chorals<br />
comportent chacun 54 mesures ; les trois pièces en tonalité majeure<br />
forment un accord parfait majeur (mi bémol, sol, si bémol) ; les trois<br />
pièces mineures forment un intervalle de tierce majeure (ut, ré, mi)…<br />
Les textes initiaux des chorals utilisés semblent orientés vers la fin de<br />
l’année liturgique ou l’Avent, d’autant que Bach a choisi, pour le dernier<br />
choral, le texte assez inhabituel provenant d’une cantate de l’Avent<br />
« Kommst du nun, Jesus, vom Himmel herunter » plutôt que le « Lobe<br />
den Herren » que l’on attend et que tout le monde connaissait alors.<br />
Bach aurait-il ainsi décidé de souligner quelques idées chrétiennes<br />
moins usuelles ? On peut également souligner quelque détails d’ordre<br />
numérologique dans l’édition originale : « Wachet auf » comporte trois<br />
portées sur chacune de ses trois pages, avec trois lignes par portée. Le<br />
cahier compte 4 pages et 4 portées en tout, le titre compte 4 lignes ;<br />
or, selon la numération de l’alphabet (A = , B = , C = 3 etc.), « Bach »<br />
totalise 4 et « J. S. Bach » 4 … Naturellement, tout cela peut n’être que<br />
pure spéculation mais il est malgré tout remarquable de voir combien il<br />
se présente de tels hasards dans l’œuvre de Bach.<br />
Certes, nombreuses sont les compositions pour orgue de tradition<br />
allemande qui comportent des œuvres similaires à celles des Chorals<br />
Schübler : on pense à G. Böhn, J. G. Walther et naturellement à Kaufmann<br />
et son Harmonische Seelenlust. Pourtant, ce recueil rassemble parmi les<br />
œuvres d’orgue les plus connues et admirées de Bach, autant de la part<br />
des auditeurs que des organistes : la forme, parfaitement intemporelle,<br />
offre encore et toujours de nouvelles inspirations pour la musique à<br />
venir et pour l’art de l’improvisation.<br />
Wachet auf, ruft uns die Stimme (Réveillez-vous, nous dit la Voix),<br />
BWV 645. La pièce est tirée de la Cantate BWV 140 qui porte le même<br />
titre – composée pour le 7 e dimanche après la Trinité de 73 – en<br />
l’occurrence la quatrième pièce sur le texte « Zion hört due Wächter<br />
singen » (« Zion entend chanter les gardiens ». Le thème obligato était<br />
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