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d’ouverture, soutenus par les cors conférant à tout le passage une<br />
douce sensation pastorale. Orchestre et continuo, en même temps<br />
que les trois voix, reprennent le thème choral. Ensuite, une aria d’alto<br />
maintient l’atmosphère pastorale, d’autant que le hautbois d’amour<br />
lui prête ses accents ; après l’herbe tendre de la Parole du Seigneur,<br />
nous suivons maintenant les droits chemins de ses commandements.<br />
Un arioso et récitatif de basse dépeint la sombre vallée sur des notes<br />
extraordinairement graves, dont l’obscurité est subitement éclairée<br />
par l’extraordinaire duo entre soprano et ténor qui suit : tout à coup,<br />
une voix prend le dessus sur l’autre dans des motifs évoquant le thème<br />
choral. Ce thème est enfin repris dans le choral final auquel les cors<br />
donnent une coloration tendrement chaleureuse.<br />
C’est l’Evangile selon saint Jean (3, 6- ) que cite littéralement la Cantate<br />
Also hat Gott die Welt geliebt (Dieu a tant aimé le monde), BWV 68<br />
donnée le second jour de la Pentecôte du mai 7 7. De ce verset 6,<br />
Luther disait qu’il devrait être peint en lettres d’or sur tous les murs de<br />
chaque maison ; il est <strong>ici</strong> traduit sur une merveilleuse s<strong>ici</strong>lienne où les<br />
sopranos énoncent le thème, mais dans un tel raffinement d’ornements<br />
qu’il est à peine possible de le reconnaître. Suit l’une des plus belles<br />
arias de soprano de Bach : entre le solo de violoncello piccolo et la ligne<br />
vocale, qui pourrait décider quelle phrase est la plus suave… Cette<br />
aria a pour base une aria de la Cantate BWV 208, mais transformée<br />
de façon incroyable, d’autant qu’après quelques temps, violon solo et<br />
hautbois reprennent le flambeau pour un magique instant de musique<br />
de chambre. À l’issue de ce moment dont on souhaiterait qu’il ne cesse<br />
jamais, survient un récitatif de basse introduisant une « parodie »<br />
de la Cantate de la chasse : <strong>ici</strong>, la basse exprime son soulagement de<br />
savoir que Jésus en a fait assez pour nous. Enfin, c’est sous forme de<br />
grande fugue que se présente le mouvement de clôture, une fugue dont<br />
la rigueur tranche nettement avec le ton tendrement pastoral de l’aria<br />
précédente. Le thème d’ouverture revient sur les derniers mots « denn<br />
er glaubet nicht an den Namen des eingebor’nen Sohn Gottes » (« car il<br />
ne croit pas dans le nom du Fils de Dieu ») : Bach souligne la gravité du<br />
propos en exigeant un « piano » sur les derniers accords, une indication<br />
suffisamment rare chez lui pour que l’on en comprenne l’importance.<br />
CD 28 : Cantates, BWV 77, 24, 126 & 67<br />
Du sollt Gott, deinen Herren, lieben, BWV 77, pour le 3 e<br />
dimanche après la Trinité<br />
Ein ungefärbt gemüte, BWV 4, pour le 4 e dimanche après la<br />
Trinité<br />
Erhalt uns, Herr, bei deinem Wort, BWV 6, pour le dimanche<br />
de la Sexagésime<br />
Halt im Gedächnis Jesum Christ, BWV 67, pour le dimanche de<br />
Quasimodo<br />
La Cantate Du sollt Gott, deinen Herren, lieben (Tu aimeras le<br />
Seigneur, ton Dieu), BWV 77 destinée au 3 e dimanche après la Trinité,<br />
a été donnée le août 7 3. L’ouverture est sans conteste l’une des<br />
plus extraordinaires de Bach. Elle présente d’une part un sermon sur<br />
la parabole du Bon Samaritain : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de<br />
tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de tout ton esprit<br />
et ton prochain comme toi-même » ; en même temps, Bach rajoute la<br />
mélodie du choral « Dies sind die heil’gen Zehn Gebote » sous un verset<br />
de Luc dans lequel Jésus indique que les « grands commandements »<br />
induisent toutes les lois et impliquent tous les prophètes. Et une fois<br />
qu’il a ajouté ce thème, il le fait jouer en canon – symbole de la loi<br />
– et en augmentation, le continuo jouant deux fois moins vite que la<br />
trompette. Comme si cela ne suffisait pas, il distribue l’instrumentation<br />
sur toute l’étendue du spectre sonore disponible ; et pour couronner<br />
le tout, la trompette énonce dix fois le thème, une fois pour chaque<br />
commandement ! Aussi étonnant que cela puisse paraître, le résultat<br />
musical est stupéfiant de clarté malgré la complexité absolument<br />
invraisemblable des mélanges harmoniques et mélodiques. Mieux<br />
encore, l’impression est celle d’une sorte de foisonnement surpuissant,<br />
tout à fait inhabituel même chez Bach.<br />
Suit un récitatif de basse qui laisse bientôt place à une aria de soprano<br />
chantant l’amour de Dieu, deux hautbois ajoutant leurs accents de<br />
satisfaction au discours en tierces parallèles. Peu après, le ténor prie