N° 252 - Recherche et Technologie

Les héritiers de Darwin
Le darwinisme est parfois présenté comme une théorie qui pourrait être, dans un douteux
souci d’objectivité, renvoyée dos à dos avec la théorie rivale, qu’est le créationnisme.
Rien n’est plus faux. Les amateurs de simplicité sont certes libres de croire à une source
divine qui expliquerait commodément les choses de la vie et tous les autres phénomènes
de l’Univers. Mais l’évolution est plus qu’une théorie, c’est un fait
Et si on disait
que la Terre
est plate ?
Il est parfois utile
de recourir à la
provocation
pour faire passer
un message.
C'est une technique
pratiquée souvent
par les médias, mais
les enseignants ne
sont pas les derniers
à s'en servir.
Lancer l'idée que
« la Terre est toujours
plate» permet
par exemple à
l'animateur d'un
atelier des Jeunesses
scientifiques
(voir page suivante)
de faire s'interroger
les stagiaires sur
la validité des
arguments avancés
en faveur de notre
vision actuelle
d'une Terre sphérique.
C'est aussi la forme
des autres planètes
et d'un objet aussi
modeste que la
goutte d'eau, et ce
n'est pas par hasard...
Athena 252 / Juin 2009
un fait, explique le généticien
Jean Vandenhaute, professeur émé-
«C’est
rite aux Facultés universitaires
Notre-Dame de la Paix à Namur, dans le sens
que la transformation des espèces, depuis des
formes simples (unicellulaires) jusqu’à la diversité
prodigieuse et les bouleversements de celleci
qu’a connus la Terre au cours des temps géologiques,
est attestée par de multiples faits
d’observation.» Cette transformation permanente
peut du reste s’observer tous les jours, dans
les hôpitaux, ne fût-ce que par les incessantes
mutations des virus de la grippe, qui constituent
une des innombrables signatures de l’évolution
(voir aussi Athena n° 249, pp. 319-328).
Un mécanisme efficace
«On doit à Darwin, poursuit Jean Vandenhaute,
d’avoir proposé un principe explicatif de
cette transformation ou évolution des formes
vivantes. Ce principe tient simplement en ceci:
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des variants coexistent dans une population (les
espèces varient entre elles mais les individus
d’une espèce et d’un groupe, même à l’intérieur
d’une famille, présentent des variations héritables)
et certains d’entre eux - c’est là aussi un
fait - sont plus aptes à se reproduire dans les
conditions de milieu rencontrées. Ils produisent
en conséquence plus de descendants que d’autres
et cela tant que le milieu convient à ce type
de variants particuliers qui vont donc imposer
leur hérédité à une part toujours croissante des
descendants: en fait la population évolue avec
les générations successives.
«Cette clé de lecture de l’évolution progressive
- par exemple des poissons vers les amphibiens,
de certains mammifères terrestres vers
les baleines, de précurseurs des chevaux jusqu’aux
équidés actuels - est lumineuse et elle a
plu très vite à l’ensemble des biologistes qui ont
lu Darwin, souligne le professeur Vandenhaute.
Mais l’observateur d’aujourd’hui, ou le visiteur
de la galerie de l’évolution que nous sommes,
est un peu comme l’archiviste qui découvrirait
un palimpseste (un parchemin où un texte est
écrit après que le précédent a été gratté pour
une réutilisation). Certains caractères sont
effacés à jamais, d’autres sont maintenus et
réutilisés, la distinction de ce qui est primitif
n’est pas toujours évidente…et surtout, notre
interprétation du “Comment c’est arrivé ?” se
cantonne obligatoirement dans l’hypothèse,
dans la mesure où, en effet, on n’est pas et on ne
sera pas présent au moment exact où l’évolution
a eu lieu puisqu’elle est une histoire du
passé, révolue à jamais comme toute histoire.»
«Mais pour autant ne peut-on aujourd’hui
constater des évolutions en temps réel qui nous
démontreraient que le principe proposé par
Darwin est bien un mécanisme efficace capable