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THÉRÈSE AUBERT - ADÈLE - Bibliothèque numérique romande

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suis là ! m’écriai-je, ne m’entends-tu pas ? Elle parut étonnée. –<br />

Je t’entends bien, me répondit-elle, mais je ne te sens point. Je<br />

me levai, je plaçai mon visage très près du sien, au point de<br />

l’effleurer de mon haleine. – Comme cela, dit-elle, je suis plus<br />

sûre que tu es auprès de moi. Tu peux même m’embrasser une<br />

fois comme ta sœur et ton épouse. On me l’a permis tout-àl’heure,<br />

et on m’a dit que Dieu n’était point irrité contre nos<br />

amours depuis que tu es revenu. Je l’embrassai. – À la bonne<br />

heure, reprit-elle, ceci n’est pas un péché ; cela ne fait pas le mal<br />

du baiser de l’églantine, – Ô ma Thérèse, lui dis-je, cette fois-là,<br />

c’est moi qui étais coupable ! – Garde-toi bien de le croire, interrompit-elle<br />

vivement, car il n’y a encore que moi qui ai racheté<br />

quelque chose.<br />

Je m’aperçus que sa voix s’embarrassait, que sa poitrine se<br />

soulevait et s’abaissait plus fréquemment, que sa respiration<br />

devenait courte et douloureuse. – Ne parle pas comme cela, repris-je,<br />

tu te fatigues et tu souffres. Je n’ai pas besoin d’entendre<br />

tes pensées. À mesure qu’elles se succèdent dans ton cœur, elles<br />

parviennent au mien. Elle se tourna vers moi en souriant ;<br />

j’appuyai bien doucement ma tête sur son épaule, et je collai<br />

mes lèvres à son cou. Elle frémissait contre moi.<br />

– As-tu bien mal ? lui demandai-je. – Au contraire, me répondit-elle,<br />

je me sens mieux. Elle frémit encore, et sa tête tomba<br />

tout-à-fait sur la mienne ; je ne sais pas ce que j’éprouvai ; je<br />

ne me rendis compte de rien. Seulement je sentis qu’elle saisissait<br />

mes cheveux avec ses dents, et au même moment mon cœur<br />

se glaça et mon sang se figea dans mes veines. Quand je revins à<br />

moi, j’étais sur mon lit ; je n’avais de mon existence qu’une idée<br />

purement physique, l’impression d’une douleur vive à la place<br />

où un instant auparavant j’avais senti se serrer les dents de Thérèse<br />

; j’y portai la main ; mes cheveux avaient été coupés en cet<br />

endroit. Thérèse était morte.<br />

Je n’avais jamais essayé mon courage sur cette supposition.<br />

Elle ne s’était pas présentée à mon esprit ; je fus étonné de<br />

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