THÉRÈSE AUBERT - ADÈLE - Bibliothèque numérique romande
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sées, en implorant l’assistance de Dieu avec des larmes et des<br />
sanglots. Je défaillis ; je suivis de la main le montant de la porte<br />
contre lequel j’étais appuyé, et quand je fus à genoux, je m’y retins<br />
fortement en y collant mon visage et en enfonçant mes<br />
doigts dans les inégalités des moulures. J’avais le sentiment que<br />
la pensée de Dieu s’arrêtait un moment sur la petite ferme de<br />
Sancy, et que mon âme était en sa présence. J’aurais voulu faire<br />
un vœu ; je ne sais quelle inspiration secrète me disait qu’il ne<br />
serait point agréé, et que ce jour n’était pas un jour de promesses,<br />
mais un jour de sacrifices.<br />
Je ne pus me lever que lorsque le prêtre sortit ; il essuyait<br />
une larme.<br />
Après avoir fait quelques pas, il s’arrêta tout-à-coup et<br />
nomma Antoinette ; je me présentai. – Mademoiselle vous demande,<br />
dit-il en me regardant fixement d’un air d’abord triste et<br />
austère, mais qui s’éclaircit peu à peu. Ensuite il se rapprocha<br />
vivement de moi, pressa ma main entre ses mains, et me donna<br />
sa bénédiction. Tout le monde le regardait avec étonnement, car<br />
j’étais seul à le comprendre. Je crus deviner que la bénédiction<br />
et le serrement de main de ce saint prêtre n’étaient qu’un ajournement<br />
à quelque prochain rendez-vous, dans un monde où<br />
nous étions attendus. Cette pensée me donna un peu de force,<br />
parce que les apparences de la mort s’embellissaient pour moi<br />
de tout ce que j’avais perdu, de tout ce qui me restait à perdre<br />
dans la vie. J’entrai à pas posés dans la chambre de Thérèse ; je<br />
croyais cependant la trouver éveillée, et je fus étonné de son<br />
immobilité. Un petit mouvement de sa tête qui était relevée sur<br />
son oreiller, et qui était animée d’un coloris très vif, quoique les<br />
traces de sa maladie n’y parussent presque plus, me décida à<br />
m’approcher davantage. Elle m’appela d’une voix basse ; je me<br />
précipitai à genoux auprès d’elle, et je pris sa main qui tombait<br />
de son lit pour y appliquer mes lèvres. Elle était extraordinairement<br />
froide ; inutilement j’essayais de la réchauffer de mon<br />
souffle ; l’ardeur même de ma bouche ne pouvait y rappeler la<br />
vie. Thérèse m’appela encore en essayant d’élever la voix. – Je<br />
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