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THÉRÈSE AUBERT - ADÈLE - Bibliothèque numérique romande

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la côte, et qui auraient pu me dire ce qui se passait. La porte<br />

était ouverte, les domestiques n’y étaient point. Thérèse couchait<br />

dans la seconde chambre, il y avait beaucoup de monde,<br />

les domestiques, les amis, les médecins auprès de son lit.<br />

J’entrai le plus doucement possible ; mais je remarquai qu’on<br />

parlait ; je m’avançai, sans précaution, jusqu’à l’endroit où elle<br />

devait me voir. Elle ne me vit cependant point ; je ne compris<br />

pas précisément pourquoi ; une fille se pencha vers elle, et lui<br />

dit avec une expression singulière : Antoinette est arrivée !… –<br />

J’observai un mouvement, et j’entendis un cri sourd, un cri voilé<br />

qui ne me rappelait pas distinctement la voix de Thérèse ; elle se<br />

souleva sur son lit, et demanda : Où est-elle ? Ce n’était pas<br />

Thérèse comme je l’avais vue ; son teint était animé d’un éclat<br />

extraordinaire, qui contrastait avec la pâleur livide de son front ;<br />

ses yeux étaient tournés sur moi, et je ne trouvais pas ses regards.<br />

Je songeai à la petite vérole que je devais avoir eue peu<br />

de temps après ma naissance, à ce que m’avait dit ma mère, et<br />

dont je ne connaissais point les effets. Confirmé dans cette idée<br />

par un mot échappé à l’une des personnes qui étaient là, je fus<br />

frappé de la pensée que la petite vérole faisait quelquefois mourir,<br />

et que Thérèse avait une maladie mortelle : ce fut l’affaire<br />

d’un moment, mais ce moment usa tellement ma vie, que<br />

j’éprouvai que le bonheur même ne la prolongerait pas. – Oh !<br />

n’approche pas, dit Thérèse, n’approche pas, si tu n’as pas eu la<br />

petite vérole !… – J’ai eu la petite vérole, lui dis-je en<br />

m’appuyant sur son lit, car j’avais peine à me soutenir, et en<br />

couvrant de baisers et de larmes sa main qu’elle venait de<br />

m’abandonner : – J’ai eu la petite vérole. Je n’en étais pas bien<br />

sûr, et combien j’aurais voulu être sûr du contraire pour espérer<br />

de souffrir du même mal, et de courir les mêmes dangers !…<br />

Thérèse avait pressé ma main ; elle l’avait portée sur sa<br />

bouche. Je l’avais embrassée aussi. Elle m’avait repoussé un<br />

peu. Ses lèvres étaient sèches et ardentes. Quand j’eus reposé,<br />

calmé le trouble de mon âme, je remarquai qu’il n’y avait plus<br />

personne autour de nous, et que Thérèse avait recouvert son visage<br />

de son drap. Je compris, je crus comprendre son intention.<br />

– 49 –

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