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THÉRÈSE AUBERT - ADÈLE - Bibliothèque numérique romande

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cœur, et que nul effort humain ne saurait faire passer dans<br />

l’esprit et dans le cœur des autres, une esquisse imparfaite qui<br />

se décolore, qui s’efface sous ma plume. Ah ! ce n’est point ainsi<br />

que je l’ai vue, ou plutôt je ne l’ai jamais vue assez distinctement<br />

pour entreprendre de la peindre ! Il y avait sur ses traits un voile<br />

lumineux qui m’en dérobait tous les détails, et, maintenant encore,<br />

je ne me rappelle son visage que dans le vague de cette vapeur<br />

éblouissante dont il était enveloppé.<br />

Mon premier abord avait inspiré à Thérèse un intérêt affectueux,<br />

mais familier. Elle m’avait souri avec une cordialité<br />

franche où se révélait toute la bonté de son cœur. À mesure<br />

qu’elle lisait, ses dispositions, sans changer tout-à-fait de nature,<br />

prenaient un autre caractère. Quelque embarras, qui augmentait<br />

à chaque ligne, se développait sur sa figure. La timidité<br />

paraissait gêner l’effusion d’âme que cette lettre lui inspirait.<br />

Son sein palpitait ; ses joues s’étaient vivement colorées. On<br />

voyait qu’elle cherchait à retenir des larmes prêtes à jaillir de ses<br />

yeux. Quand elle eut fini, elle vint à moi, me prit la main avec<br />

expression, jeta au feu l’écrit de son père après y avoir appliqué<br />

ses lèvres ; et, relevant le doigt sur sa bouche, elle me regarda<br />

d’un air d’intelligence. – Mademoiselle, me dit-elle, comptez sur<br />

tous les soins… Elle me regarda de nouveau, et remarquant mon<br />

émotion, elle passa un de ses bras autour de mon cou ; – si<br />

l’amitié peut vous dédommager de vos peines, reprit-elle, si du<br />

moins elle peut les adoucir, vous ne serez pas tout-à-fait malheureuse.<br />

– Mes joues se mouillèrent de pleurs de reconnaissance<br />

; mon cœur donnait le change à son trouble, en se livrant<br />

sans réserve à ce sentiment. Je sentais mes genoux faillir ; mes<br />

lèvres s’attachèrent à sa main, un feu inconnu s’en échappait et<br />

se répandait dans mes veines. Toutes ces impressions étaient<br />

aussi nouvelles pour moi que si j’avais fait le premier essai de<br />

l’air, de la lumière et de la vie. Je voulais parler, je balbutiais des<br />

mots confus comme un homme qui rêve. Enfin, elle se laissa<br />

tomber dans mes bras, en me disant : – Oh ! si tu savais comme<br />

je t’aime déjà… – elle m’aimait, elle l’avait dit ! – Apprends-moi<br />

ton nom, continua-t-elle, ou celui que tu veux qu’on te donne.<br />

– 22 –

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