THÉRÈSE AUBERT - ADÈLE - Bibliothèque numérique romande
THÉRÈSE AUBERT - ADÈLE - Bibliothèque numérique romande
THÉRÈSE AUBERT - ADÈLE - Bibliothèque numérique romande
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
à des formes plus gracieuses des proportions plus remarquables<br />
par leur élégance et leur harmonie. Ses cheveux noirs, qui<br />
étaient rattachés avec simplicité sur le sommet de la tête, à découvert<br />
un front plus blanc que l’ivoire ; deux boucles seulement<br />
s’arrondissaient de l’un et de l’autre côté comme pour en relever<br />
l’éclat. Elle n’avait pas un coloris animé, mais la moindre impression<br />
vive le faisait naître, et ce charme fugitif n’en était que<br />
plus enchanteur. Il en résultait un caractère de beauté qui<br />
n’était pas moins fait pour l’âme que pour les yeux. Cet avantage,<br />
qui n’est dans les autres femmes que le signe accoutumé<br />
de la jeunesse et de la santé, paraissait dans Thérèse un privilège<br />
particulier du sentiment. Dès le premier regard, on la trouvait<br />
charmante, mais on ne savait pas à quel point elle était<br />
digne d’être aimée, tant qu’on ne l’avait pas vue rougir d’une<br />
douce émotion. La même facilité à sentir et à exprimer embellissait<br />
toutes les parties de sa physionomie de cet attrait indéfinissable<br />
qu’on sent mieux qu’on ne peut le décrire, et qui se renouvelle<br />
si vite que l’œil attentif de l’amour même ne le saisit<br />
pas toujours. C’était quelquefois le transport d’une gaieté si<br />
franche et si ingénue, l’expression du bonheur facile d’un enfant<br />
contint de peu de chose ; c’était plus souvent je ne sais quelle<br />
tristesse indéterminée qui ne semblait pas se nourrir d’un objet<br />
réel et qui s’égarait dans des pensées étrangères aux lieux, aux<br />
temps, aux circonstances où elle venait à se manifester. Il est<br />
possible que la mélancolie ne soit pas dans tous les êtres sensibles<br />
l’effet du souvenir des peines passées. Pourquoi ne seraitelle<br />
pas quelquefois une disposition involontaire du cœur à essayer<br />
les peines qui le menacent et un avis de s’y préparer ? Son<br />
cou était extrêmement délié et cédait presque à tout moment<br />
sous le poids de sa tête qui retombait alors penchée sur une de<br />
ses épaules avec un abandon plein de grâces. Cette habitude<br />
était probablement un défaut, mais un défaut dont aucune perfection<br />
n’aurait pu remplacer le charme, tant il s’y rattachait<br />
d’idées tendres et délicates ! Au reste, ce ne sont là que des réminiscences,<br />
et non un portrait. J’ai voulu parler d’elle, et non<br />
pas substituer à cette vive image qu’elle a laissée dans mon<br />
– 21 –