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THÉRÈSE AUBERT - ADÈLE - Bibliothèque numérique romande

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parti, que je me porterais mieux quand les arbres repousseraient<br />

leurs feuilles et que les prés viendraient à reverdir comme<br />

par le passé ; mais je crois que pour cette fois il n’y aura plus de<br />

printemps. Le soleil est blanc et froid, les fleurs éclosent toutes<br />

pâles, et on n’entend aux champs que des petits oiseaux d’hiver<br />

qui sifflent dans les buissons. Autrefois, il y avait un vent doux,<br />

si agréable quand il se levait le soir, et j’aimais tant à le sentir<br />

souffler dans mes cheveux. Maintenant, ce sont des brises qui<br />

dessèchent tout, et dont le bruit m’épouvante quand elles font<br />

crier les branches mortes. Si je pouvais seulement revoir un<br />

printemps comme ceux qui étaient dans ma jeunesse, il me<br />

semble que je guérirais, mais je crois qu’il n’y en aura plus. –<br />

J’ai voulu lui parler d’Adèle ; il m’a interrompu en imprimant<br />

son doigt sur sa bouche, comme pour m’engager au silence. – Il<br />

ne faut pas la nommer si haut, m’a-t-il dit, de peur qu’on ne s’en<br />

souvienne. Les anges ne font que passer un moment sur terre.<br />

Jamais on n’en a vu vieillir. Dieu les envoie quelquefois pour<br />

consoler les pauvres et les malades, mais il les rappelle sitôt !<br />

Quand ils meurent, c’est avec un sourire de joie, parce qu’ils aiment<br />

à s’en retourner. Si vous en rencontrez par hasard, prenez<br />

garde de les perdre de vue un moment, car ce serait fini pour<br />

toujours.<br />

En achevant ces paroles, il s’est agenouillé sur un bloc de<br />

pierre, et s’est mis à prier à voix basse. Je me suis éloigné sans<br />

qu’il me remarquât, réfléchissant à tout ce que j’avais éprouvé<br />

dans cette journée, et encore incertain sur ce qui me restait à<br />

faire, mais déjà bien persuadé de l’innocence d’Adèle.<br />

Comme je rentrais au château de Valency, je l’ai aperçue<br />

qui marchait lentement sous le vestibule, du côté de l’escalier<br />

par lequel on monte à sa chambre. J’ai couru à elle, et, la saisissant<br />

brusquement par le bras, je l’ai entraînée, sans lui dire un<br />

seul mot, jusqu’au salon de compagnie où l’on était encore réuni.<br />

Fort indifférent sur ce qu’on penserait de cette incartade, –<br />

parlez, mademoiselle, me suis-je écrié en l’introduisant, justifiez-vous<br />

des soupçons qu’on élève, sur votre conduite. C’est en<br />

– 114 –

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