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THÉRÈSE AUBERT - ADÈLE - Bibliothèque numérique romande

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vous, au nom du ciel ! Laissez-moi, a-t-elle continué d’une voix<br />

altérée, vous savez bien que je suis Adèle Évrard ! – mon sein<br />

était gonflé, ma tête embarrassée, j’étouffais. – Adèle, ma sœur,<br />

mon épouse, ma bien-aimée, l’unique objet de toutes mes pensées,<br />

l’unique charme de mon existence, l’affection, l’espoir qui<br />

me reste, voilà ce que tu es pour Gaston. – Et mes pleurs, des<br />

pleurs délicieux ruisselaient sur mes joues ! Comme je me sentais<br />

chanceler, je me suis assis sur un de ces bancs naturels qui<br />

entourent, ainsi que je te l’ai dit, ce petit salon de feuillage où<br />

aboutissent les principaux sentiers du bois, et j’ai appuyé ma<br />

tête sur mes mains. Après quelque temps j’ai levé les yeux, et j’ai<br />

vu Adèle debout, mais tournée du côté opposé, qui assortissait<br />

un petit bouquet de fleurs. Je suis allé auprès d’elle, et j’ai passé<br />

doucement mon bras autour de son cou, sans rien oser lui dire.<br />

– Voyez, m’a-t-elle dit, voyez les belles fleurs que j’ai cueillies ;<br />

je voudrais savoir le nom de celle-ci. – C’était cette fleur charmante<br />

qu’on appelle la Silvie, parce qu’elle ne se plaît que dans<br />

les lieux sauvages et à l’ombre des forêts. Je me suis soudain<br />

rappelé, et j’ai répété tout haut la jolie strophe du poète allemand.<br />

« C’est Silvie, la fraîche Silvie, la douce anémone des bois.<br />

Il n’y a point de fleurette, ô Silvie, qui puisse rivaliser avec toi de<br />

grâce et de beauté, quand tu balances au souffle de l’air ta couronne<br />

blanche et pose découpée en cinq parties. Toute la pompe<br />

des autres fleurs, et l’amour lui-même n’en excepterait pas la<br />

rose, ne vaudra jamais ta modeste beauté. Ta tige courbée sur<br />

elle-même est l’emblème de la mélancolie, et la mobilité de ton<br />

calice flottant exprime les agitations d’un jeune cœur. Que le<br />

ciel, ô la plus aimable des fleurs, multiplie à jamais autour de toi<br />

la mollesse des gazons humides, la fraîcheur des nouveaux ombrages<br />

et le souffle des nouveaux zéphyrs ! C’est Silvie, la fraîche<br />

Silvie, la fleur de la solitude et du printemps, la douce anémone<br />

des bois. »<br />

– 105 –

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