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Sous le Haut Patronage du Ministère de la Santé - SFAP

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ACTES <strong>SFAP</strong>.qxd 09/01/03 17:36 Page 56<br />

SOINS PALLIATIFS ET SPIRITUALITÉ : UNE UTOPIE ?<br />

Docteur Dominique BEAUFILS<br />

Chirurgien <strong>de</strong>s Hôpitaux<br />

Membre <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>SFAP</strong><br />

Diacre orthodoxe<br />

La fin <strong>de</strong> vie est <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> par excel<strong>le</strong>nce où tout être est amené à se poser <strong>le</strong>s problèmes fondamentaux: Y a-t-il une vie après <strong>la</strong> mort, ou <strong>la</strong><br />

mort est-el<strong>le</strong> <strong>la</strong> porte <strong>du</strong> néant ? La ma<strong>la</strong>die et <strong>la</strong> souffrance ont-el<strong>le</strong> une signification, débouchent-el<strong>le</strong>s sur une espérance, ou sont-el<strong>le</strong>s stéri<strong>le</strong>s<br />

et désespérantes ? Nous sommes là au coeur même <strong>de</strong> <strong>la</strong> réf<strong>le</strong>xion spirituel<strong>le</strong>, qui est en même temps <strong>la</strong> question existentiel<strong>le</strong>. Nous sommes<br />

bien loin <strong>de</strong> l'utopie, car el<strong>le</strong> représente l'aboutissement, <strong>la</strong> finalité pratique <strong>de</strong> toute <strong>la</strong> vie <strong>du</strong> ma<strong>la</strong><strong>de</strong>. El<strong>le</strong> participe à part entière à sa<br />

"souffrance tota<strong>le</strong>", ref<strong>le</strong>t <strong>du</strong> "mystère <strong>de</strong> l'être", et ne peut être ignorée <strong>de</strong>s soignants, mé<strong>de</strong>cins ou paramédicaux.<br />

Cette composante spirituel<strong>le</strong> détermine en gran<strong>de</strong> partie <strong>le</strong> comportement <strong>du</strong> ma<strong>la</strong><strong>de</strong> face à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> vie, à <strong>la</strong> souffrance. El<strong>le</strong> peut avoir pour<br />

lui une signification ré<strong>de</strong>mptrice, ou cel<strong>le</strong> d'une déchéance. El<strong>le</strong> peut avoir un rô<strong>le</strong> anxiolytique et co-antalgique, comme el<strong>le</strong> peut, à l'opposé,<br />

<strong>le</strong> plonger au plus profond d'une angoisse qui ne pourra qu'accroître <strong>la</strong> dou<strong>le</strong>ur. A ce titre éga<strong>le</strong>ment, el<strong>le</strong> doit être prise en compte.<br />

La fin <strong>de</strong> vie est <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> par excel<strong>le</strong>nce où il n'est plus possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> dichotomiser <strong>le</strong> ma<strong>la</strong><strong>de</strong> en un corps physique, siège d'une ma<strong>la</strong>die<br />

termina<strong>le</strong>, unique préoccupation <strong>de</strong>s soignants, et un élément spirituel, que l'on réserve aux seuls ministres <strong>de</strong>s cultes ou aux accompagnants. Il<br />

est une unité où <strong>le</strong> physique et <strong>le</strong> spirituel sont indissociab<strong>le</strong>s, agissant l'un sur l'autre dans une interdépendance qui ne permet plus d'envisager<br />

l'un sans l'autre, dans un accompagnement global. Si cette unité doit être prise en compte dans <strong>le</strong> projet thérapeutique, el<strong>le</strong> doit en même temps<br />

être un gui<strong>de</strong> dans <strong>le</strong> <strong>la</strong>ngage <strong>du</strong> soignant. En un mot, <strong>la</strong> spiritualité <strong>du</strong> patient doit être un fil d'Ariane qui permet au soignant d'être en<br />

syntonie avec lui.<br />

Nous avons ainsi d'un côté un ma<strong>la</strong><strong>de</strong>, un être souffrant confronté à une mort qu'il sait proche, dans un face-à-face ultime avec son Dieu ou<br />

avec lui-même et ses proches, échappant à tout dogme. De l'autre, nous avons un soignant qui, quel<strong>le</strong> que soit sa foi ou sa philosophie sait que<br />

<strong>le</strong> ma<strong>la</strong><strong>de</strong> ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ni un enseignement ni une catéchèse, mais uniquement à être aidé, à être aimé, et qu'il ne peut imposer sa propre<br />

spiritualité à un être défini par une liberté qui appel<strong>le</strong> <strong>le</strong> plus grand respect, en particulier à ce sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie où el<strong>le</strong> représente <strong>le</strong> <strong>de</strong>rnier<br />

espace <strong>de</strong> sa dignité humaine. Il doit ai<strong>de</strong>r <strong>le</strong> ma<strong>la</strong><strong>de</strong> à vivre sa propre mort comme <strong>le</strong> moment ultime <strong>de</strong> sa vie, qu'on n'a pas <strong>le</strong> droit <strong>de</strong> lui<br />

vo<strong>le</strong>r: La mort <strong>de</strong> notre frère ne nous appartient pas.<br />

Le soin palliatif est une rencontre dans une unité centrée sur <strong>le</strong> ma<strong>la</strong><strong>de</strong>, et où thérapeutique et spiritualité vont <strong>de</strong> pair. Si <strong>le</strong> ma<strong>la</strong><strong>de</strong> - et lui seul<br />

- peut exprimer ouvertement sa spiritualité et en gui<strong>de</strong>r <strong>le</strong> dialogue, <strong>le</strong> soignant peut l'exprimer tota<strong>le</strong>ment dans son comportement. Il<br />

l'exprimera par sa compassion, non pas pitié teintée <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance, mais consistant étymologiquement à "souffrir avec" <strong>le</strong> ma<strong>la</strong><strong>de</strong>. Il<br />

l'exprimera par son regard, ce miroir dans <strong>le</strong>quel <strong>le</strong> ma<strong>la</strong><strong>de</strong> contemp<strong>le</strong> l'image <strong>de</strong> sa dignité humaine. Il l'exprimera par <strong>la</strong> qualité <strong>de</strong> son<br />

écoute, qui conditionne <strong>la</strong> qualité <strong>du</strong> dialogue en y puisant ce que <strong>le</strong> ma<strong>la</strong><strong>de</strong> a besoin d'entendre, et même <strong>le</strong>s mots pour lui dire. Il l'exprimera<br />

dans son attitu<strong>de</strong>, cherchant à transfigurer un état <strong>de</strong> dépendance en une re<strong>la</strong>tion d'Amour.<br />

Tout ce<strong>la</strong> peut être sous-ten<strong>du</strong> par un Dieu, invisib<strong>le</strong>ment présent sans qu'il soit obligatoirement nécessaire d'en par<strong>le</strong>r. Ou tout ce<strong>la</strong> peut être<br />

sous-ten<strong>du</strong> par <strong>la</strong> qualité <strong>du</strong> coeur, exprimant en ce<strong>la</strong> une spiritualité <strong>la</strong>ïque dont <strong>le</strong> point commun avec une foi religieuse est <strong>la</strong> qualité <strong>de</strong><br />

l'Amour.<br />

Non: Soins palliatifs et spiritualité ne sont pas une utopie: El<strong>le</strong>s forment une unité.<br />

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