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Sous le Haut Patronage du Ministère de la Santé - SFAP

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ACTES <strong>SFAP</strong>.qxd 09/01/03 17:36 Page 55<br />

SOCIETE, MEDECINE ET SOUFFRANCE DES SOIGNANTS<br />

D.Mal<strong>le</strong>t, A.Herbaut, S.Soyer, M.De<strong>le</strong>rue, H.Chekroud.<br />

Hôpital d'Haubourdin. 59481. Haubourdin<br />

La souffrance <strong>de</strong>s soignants est un thème régulièrement abordé dans <strong>le</strong>s milieux <strong>de</strong> soins. L'approche actuel<strong>le</strong> favorise une <strong>le</strong>cture<br />

psychologique <strong>de</strong> cette souffrance. Cette approche a toute sa pertinence mais ne faut-il pas l'é<strong>la</strong>rgir par une vision plus sociologique.<br />

Nous abor<strong>de</strong>rons ce sujet en soulignant combien cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> émerge dans un univers qui privilégie l'autonomie <strong>de</strong> <strong>la</strong> personne. Puis nous<br />

examinerons comment cette autonomie tente <strong>de</strong> se déployer chez un être souffrant. Technique, instrumentalisation <strong>du</strong> corps, recherche <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

maîtrise engendrent l'utopie col<strong>le</strong>ctive d'un corps parfait; <strong>la</strong> mé<strong>de</strong>cine <strong>de</strong>vient une nouvel<strong>le</strong> croyance.<br />

Nous formulons l'hypothèse qu'une partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> souffrance <strong>du</strong> soignant est générée par <strong>la</strong> rencontre entre cette utopie col<strong>le</strong>ctive <strong>de</strong> <strong>la</strong> santé et <strong>la</strong><br />

réalité <strong>de</strong> l'homme souffrant.<br />

1. Du col<strong>le</strong>ctif à l'indivi<strong>du</strong>alisme, <strong>de</strong> l'indivi<strong>du</strong>alisme à l'autonomie<br />

L'évolution <strong>de</strong> nos sociétés se caractérise par un amoindrissement <strong>de</strong>s référentiels col<strong>le</strong>ctifs et une montée <strong>de</strong> l'indivi<strong>du</strong>alisme. Parallè<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong><br />

système d'économie <strong>de</strong> marché se déploie, proposant une autre cohérence. Cette fragmentation <strong>de</strong>s organisations col<strong>le</strong>ctives ou <strong>de</strong>s<br />

représentations symboliques partagées, cette diffusion <strong>du</strong> système libéral con<strong>du</strong>it chacun à s'affirmer indépendant <strong>de</strong>s autres. Loin d'être choisi,<br />

cet indivi<strong>du</strong>alisme apparaît comme une nouvel<strong>le</strong> réalité socia<strong>le</strong> à <strong>la</strong>quel<strong>le</strong> chaque citoyen doit concé<strong>de</strong>r pour continuer à être dans <strong>la</strong><br />

col<strong>le</strong>ctivité.<br />

2. Le déploiement <strong>de</strong> l'autonomie dans <strong>le</strong> corps souffrant<br />

Cette mise en avant <strong>de</strong> l'autonomie <strong>du</strong> sujet va trouver comme champ d'application <strong>le</strong> corps. Le corps est associé à l'avoir et non plus à l'être. Il<br />

est indivi<strong>du</strong>alisé, séparé, délié <strong>de</strong> ses liens.<br />

Dans notre société libéra<strong>le</strong>, cet avoir <strong>du</strong> corps <strong>de</strong>vient disponib<strong>le</strong>. Il est matière sur <strong>le</strong>quel l'indivi<strong>du</strong> peut déployer son autonomie. Le corps est<br />

une matière p<strong>la</strong>stique, modélisab<strong>le</strong> selon ses désirs. Pour notre société, <strong>la</strong> mé<strong>de</strong>cine est <strong>la</strong> technique qui permet <strong>de</strong> vivre son autonomie en son<br />

corps.<br />

Ce corps indivi<strong>du</strong>alisé, p<strong>la</strong>stique, sous <strong>la</strong> volonté <strong>du</strong> sujet par l'intermédiaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> mé<strong>de</strong>cine peut-il être un corps souffrant ? Si l'autonomie<br />

peut exister dans <strong>le</strong> corps souffrant, ce n'est pas dans un rapport <strong>de</strong> maîtrise car <strong>le</strong> propre <strong>de</strong> <strong>la</strong> souffrance est <strong>le</strong> subir.<br />

3. L'utopie d'un corps parfait<br />

Ce corps indivi<strong>du</strong>é, p<strong>la</strong>stique, obéissant à <strong>la</strong> volonté rejoint une utopie col<strong>le</strong>ctive dans <strong>la</strong>quel<strong>le</strong> <strong>la</strong> mé<strong>de</strong>cine est partie prenante. La technique va<br />

faire disparaître <strong>la</strong> souffrance. Une partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> société s'engouffre dans cet imaginaire. La mé<strong>de</strong>cine apparaît comme une nouvel<strong>le</strong> croyance.<br />

4. La fonction médiatrice <strong>du</strong> soignant<br />

Dans <strong>le</strong> contexte social actuel, une <strong>de</strong>s missions <strong>du</strong> soignant est l'exercice d'une fonction médiatrice. Bruno Cadoré distingue plusieurs espaces<br />

<strong>de</strong> médiation.<br />

· Un premier rési<strong>de</strong> dans <strong>la</strong> médiation entre <strong>le</strong> sujet et l'expérience <strong>de</strong> <strong>la</strong> ma<strong>la</strong>die. Le soignant témoigne qu'il cherche à accompagner<br />

l'expérience <strong>de</strong> <strong>la</strong> souffrance dans un réseau <strong>de</strong> solidarité humaine. Celui qui souffre n'est pas tenu à <strong>de</strong>meurer dans son indivi<strong>du</strong>alisme<br />

défail<strong>la</strong>nt.<br />

· Le soignant exerce une médiation dans <strong>le</strong> rapport <strong>de</strong> l'homme avec <strong>le</strong>s représentations qu'il se fait <strong>de</strong> son corps, <strong>de</strong> sa santé, <strong>de</strong> sa temporalité.<br />

Le corps n'est pas qu' " un brouillon à corriger…Phénoménologiquement, l'homme est indiscernab<strong>le</strong> <strong>de</strong> sa chair. Le corps est une épaisseur, un<br />

" vivre incarné ".<br />

· Une autre médiation d'exerce dans l'é<strong>la</strong>boration <strong>de</strong> <strong>la</strong> culture sociéta<strong>le</strong>. " La mé<strong>de</strong>cine comme institution est une sorte <strong>de</strong> corps intermédiaire<br />

par <strong>le</strong>quel une société organise son rapport à <strong>la</strong> ma<strong>la</strong>die et à <strong>la</strong> mort ".<br />

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