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Sous le Haut Patronage du Ministère de la Santé - SFAP

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ACTES <strong>SFAP</strong>.qxd 09/01/03 17:36 Page 20<br />

ENSEMBLE, SOIGNER ET ACCOMPAGNER : UNE UTOPIE ?<br />

Hedwige MARCHAND<br />

Infirmière- Centre François Xavier Bagnoud - Paris<br />

Je suis infirmière, infirmière <strong>de</strong> base, formée donc à soigner, à écouter, à accompagner en quelque sorte. Depuis 20 ans, bien passés, j'essaie,<br />

<strong>du</strong> mieux que je peux, <strong>de</strong> remplir cette diffici<strong>le</strong> mission confiée <strong>de</strong>puis ses origines au corps infirmier car soigner et accompagner sont bien<br />

inhérents à notre fonction. Alors ce serait donc <strong>le</strong> 1er mot <strong>du</strong> titre <strong>de</strong> notre congrès - et <strong>de</strong> cette tab<strong>le</strong> ron<strong>de</strong> -, l'adverbe " ENSEMBLE " qui, à<br />

lui tout seul, ferait bascu<strong>le</strong>r <strong>le</strong> soin et l'accompagnement dans l'utopie ?<br />

Ainsi, à plusieurs, l'accompagnement <strong>de</strong>viendrait irréalisab<strong>le</strong>, sans lieu matériel où prendre racine ?<br />

Arrivée là, après quelques secon<strong>de</strong>s <strong>de</strong> paro<strong>le</strong>s, je me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien où <strong>le</strong>s organisateurs <strong>du</strong> congrès ont voulu nous embarquer.<br />

Pourquoi nous avoir réunis, et en plus vouloir nous réunir tous <strong>le</strong>s ans dorénavant, avec cette suspicion-là ?<br />

Quoi que vous fassiez, l'interdisciplinarité est un mythe !<br />

Alors, provocation <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur part ? Sans doute.<br />

Mais peut-être aussi que <strong>le</strong> principe <strong>de</strong> réalité <strong>du</strong> travail au quotidien, <strong>de</strong> l'âpreté, <strong>de</strong> <strong>la</strong> ru<strong>de</strong>sse <strong>de</strong>s tentatives <strong>de</strong> partenariat, <strong>de</strong> coopération <strong>le</strong>s<br />

a con<strong>du</strong>its à nous pousser à nous questionner ENSEMBLE <strong>du</strong>rant ce congrès.<br />

Pour ma part, ce questionnement s'est si fortement posé à moi, déjà en équipe mobi<strong>le</strong> intra-hospitalière puis, plus encore, en équipe mobi<strong>le</strong> à<br />

domici<strong>le</strong> que je m'y suis penchée <strong>du</strong>rant une année, <strong>le</strong> temps <strong>de</strong> l'aboutissement d'un travail <strong>de</strong> recherche auquel je me suis livrée en 1999.<br />

En effet, infirmière dans une équipe <strong>de</strong> soins palliatifs à domici<strong>le</strong>, je ne pouvais que re<strong>le</strong>ver une évi<strong>de</strong>nce : dans <strong>le</strong> travail quotidien, en<br />

nécessaire re<strong>la</strong>tion avec mé<strong>de</strong>cins généralistes et infirmières libéra<strong>le</strong>s, pour ne citer qu'eux, je constatais <strong>de</strong>s différences fondamenta<strong>le</strong>s dans<br />

l'accueil que ceux-ci nous réservaient : ce<strong>la</strong> oscil<strong>la</strong>it entre une réel<strong>le</strong> volonté <strong>de</strong> coopération et <strong>le</strong> refus catégorique <strong>de</strong> toute action commune.<br />

Autrement dit, <strong>de</strong> <strong>la</strong> coopération au conflit.<br />

Cette évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>vint une question donc un problème. Je <strong>le</strong> posais comme tel.<br />

En réponse provisoire à ce problème, j'ai émis -non sans crainte- l'hypothèse que <strong>la</strong> présence d'une équipe mobi<strong>le</strong> <strong>de</strong> soins palliatifs à domici<strong>le</strong><br />

révè<strong>le</strong> <strong>de</strong>s intérêts divergents et in<strong>du</strong>its <strong>de</strong>s re<strong>la</strong>tions <strong>de</strong> pouvoir entre <strong>le</strong>s acteurs concernés.<br />

Cette hypothèse me semb<strong>la</strong>it être une piste fondamenta<strong>le</strong> mais el<strong>le</strong> m'effrayait un peu.<br />

Je vous l'ai dit, je suis infirmière et al<strong>le</strong>r regar<strong>de</strong>r <strong>du</strong> côté <strong>de</strong> l'intérêt et <strong>du</strong> pouvoir al<strong>la</strong>it à contre-courant <strong>de</strong> toute ma formation et <strong>de</strong> mon<br />

environnement beaucoup plus axés sur l'ai<strong>de</strong>, <strong>la</strong> générosité, <strong>la</strong> compassion…et j'en passe.<br />

Mais je savais que cette piste était à explorer et, grâce à <strong>de</strong> nombreux soutiens, je m'y suis <strong>la</strong>ncée.<br />

Le cadre soli<strong>de</strong>, éprouvé, reconnu <strong>de</strong> <strong>la</strong> sociologie <strong>de</strong>s organisations m'a permis <strong>de</strong> confronter ce que je récoltais comme observations lors<br />

d'entretiens avec mé<strong>de</strong>cins et infirmières avec <strong>le</strong>s écrits principaux <strong>de</strong> cette discipline. En effet, <strong>la</strong> sociologie <strong>de</strong>s organisations s'applique<br />

éga<strong>le</strong>ment aux acteurs indépendants <strong>de</strong> soins à domici<strong>le</strong> parce que -et je cite là Erhard Friedberg- " il y a action organisée partout où<br />

l'interdépendance oblige <strong>le</strong>s hommes à s'organiser et à se coordonner pour réussir <strong>le</strong>ur coopération ".<br />

J'ai observé, entre autres, que <strong>la</strong> crainte <strong>de</strong> <strong>la</strong> perte <strong>du</strong> rô<strong>le</strong> (surtout pour <strong>le</strong>s mé<strong>de</strong>cins), <strong>le</strong> besoin <strong>de</strong> s'adapter continuel<strong>le</strong>ment à d'autres, <strong>la</strong><br />

nécessaire disponibilité à avoir et <strong>la</strong> non-reconnaissance financière et politique, tout ce<strong>la</strong> incite <strong>le</strong>s intervenants <strong>de</strong>s soins à domici<strong>le</strong> à rester sur<br />

<strong>la</strong> réserve en ce qui concerne un partenariat <strong>de</strong> soins bien onéreux, jusqu'à rejeter <strong>la</strong> col<strong>la</strong>boration qui <strong>le</strong>ur est proposée.<br />

Mais, à l'opposé <strong>de</strong> cette attitu<strong>de</strong>, pour (et je <strong>le</strong>s cite) " soigner et accompagner jusqu'au bout " <strong>le</strong>s patients qui se sont confiés à eux, ces<br />

acteurs <strong>du</strong> soin sont prêts à faire appel à <strong>de</strong>s personnes ressources (qui peuvent être très différentes selon <strong>le</strong>s besoins qu'ils évaluent) dans <strong>la</strong><br />

mesure -et dans <strong>la</strong> mesure seu<strong>le</strong>ment- où ce<strong>la</strong> ne <strong>le</strong>ur retire pas <strong>la</strong> responsabilité <strong>de</strong>s décisions. Nous savons tous que nous avons à veil<strong>le</strong>r à<br />

ce<strong>la</strong>.<br />

Deux paramètres fondamentaux pour <strong>le</strong>s soins palliatifs à domici<strong>le</strong> m'ont permis ensuite <strong>de</strong> mesurer <strong>la</strong> volonté réel<strong>le</strong> d'implication dans un<br />

partenariat <strong>de</strong>s acteurs concernés : il s'agit <strong>de</strong> l'acquisition <strong>de</strong>s connaissances et <strong>de</strong> <strong>la</strong> circu<strong>la</strong>tion <strong>de</strong>s informations. Tout ce<strong>la</strong> va apparemment<br />

<strong>de</strong> soi mais <strong>la</strong> pratique décrite est en fait bien autre notamment en ce qui concerne l'apprentissage qui reste essentiel<strong>le</strong>ment celui <strong>du</strong> terrain.<br />

Ce<strong>la</strong> aussi nous <strong>le</strong> savions déjà.<br />

A partir <strong>de</strong> ces faits mis en perspective avec <strong>le</strong>s écrits <strong>de</strong>s auteurs principaux <strong>de</strong> l'analyse stratégique, j'ai pu é<strong>la</strong>borer quelques interprétations<br />

dont voici <strong>le</strong>s principa<strong>le</strong>s.<br />

> La première est probab<strong>le</strong>ment <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion au pouvoir, comme enjeu principal <strong>du</strong> savoir, que tout acteur <strong>du</strong> soin peut détenir, en <strong>de</strong>hors<br />

<strong>de</strong> toute logique hiérarchique. Pour y parvenir, il peut s'appuyer sur <strong>de</strong>s experts prêts à lui transmettre <strong>le</strong>urs connaissances.<br />

> La <strong>de</strong>uxième en décou<strong>le</strong> car l'acteur <strong>de</strong> soin peut éga<strong>le</strong>ment refuser cette proposition pour préserver un prestige, à ses yeux menacé,<br />

en fonction <strong>de</strong>s ressources d'action dont il dispose (savoir sur <strong>le</strong> patient, maîtrise <strong>de</strong>s informations, maîtrise <strong>de</strong>s moyens et <strong>de</strong>s règ<strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong> fonctionnement) et qui détermine ses marges <strong>de</strong> manœuvre.<br />

> Enfin <strong>la</strong> troisième met en lumière l'impact <strong>de</strong>s transformations culturel<strong>le</strong>s profon<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s soins à domici<strong>le</strong> sur <strong>le</strong>s comportements <strong>de</strong>s<br />

acteurs qui y sont confrontés, d'autant plus bruta<strong>le</strong>ment que ce<strong>la</strong> touche <strong>le</strong>ur re<strong>la</strong>tion à <strong>la</strong> vie et à <strong>la</strong> mort.<br />

Pour nous aujourd'hui, j'ai juste envie <strong>de</strong> souligner quelques axes <strong>de</strong> réf<strong>le</strong>xion :<br />

> L'usage <strong>du</strong> savoir, sa maîtrise, notamment dans sa dimension re<strong>la</strong>tionnel<strong>le</strong>, enjeu particulier pour <strong>le</strong>s soignants.<br />

Qui possè<strong>de</strong> ce savoir ? Quel<strong>le</strong> profession ? Ce<strong>la</strong> est d'autant plus important lorsque ce savoir re<strong>la</strong>tionnel rejoint <strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs<br />

fondamenta<strong>le</strong>s (respect, dignité <strong>de</strong> l'autre, entrai<strong>de</strong> et compassion) qui accroissent <strong>la</strong> renommée <strong>du</strong> soignant.<br />

> La transmission <strong>du</strong> savoir ou sa rétention. L'expert (celui qui est capab<strong>le</strong> <strong>de</strong> mobiliser <strong>de</strong>s savoir-faire techniques et re<strong>la</strong>tionnels<br />

particuliers) ne communique-t-il que partiel<strong>le</strong>ment informations ou connaissances pour accroître son pouvoir ? Y a-t-il réciprocité<br />

dans <strong>la</strong> communication ou est-el<strong>le</strong> à sens unique ?<br />

> Gar<strong>de</strong>r en tête <strong>le</strong>s 4 types d'enjeux liés à <strong>la</strong> communication :<br />

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