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Les figures spatio-temporelles dans le roman africain subsaharien ...

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zéphire, l’oreil<strong>le</strong> discrète du murmure des arbres et la présence<br />

invisib<strong>le</strong> et inspiratrice des mânes tutélaire. » 128 Considérée du point<br />

de vue de la lutte politique comme espace de résistance, la forêt<br />

engendre la fusion entre l’homme et la nature, puis établit la<br />

communication entre <strong>le</strong> visib<strong>le</strong> et l’invisib<strong>le</strong>.<br />

Dans cette même veine, Louis Millogo <strong>dans</strong> son étude Nazi<br />

Boni, premier écrivain du Burkina Fasso : La langue bwamu <strong>dans</strong><br />

Crépuscu<strong>le</strong> des temps anciens consacre un chapitre à la forêt, qu’il<br />

nomme la brousse, perçue comme espace d’initiation. Il relève qu’on<br />

peut associer aux habitants de la forêt « <strong>le</strong>s animaux de la faune, <strong>le</strong>s<br />

génies qui sont <strong>le</strong>urs maîtres et qui résident <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s mêmes<br />

domaines. » 129 Espace d’initiation, en effet, car c’est <strong>dans</strong> la forêt que<br />

l’on apprend aux jeunes <strong>le</strong>s interdits de la chasse ainsi que <strong>le</strong>s<br />

mystères des plantes et des herbes.<br />

Toutefois, <strong>le</strong> décor euphorique de la forêt n’est pas sans faire<br />

apparaître <strong>le</strong>s dangers qu’el<strong>le</strong> cache. El<strong>le</strong> est aussi l’espace où se<br />

rencontrent des forces opposées : mânes des ancêtres et esprit du<br />

mal. On peut se rappe<strong>le</strong>r que Chaïdana, el<strong>le</strong>-même, lors de son<br />

périp<strong>le</strong> <strong>dans</strong> la forêt, a parfois regreté la vie pourtant hasardeuse<br />

qu’el<strong>le</strong> menait en vil<strong>le</strong>. En vil<strong>le</strong>, se souvient-el<strong>le</strong>, « <strong>le</strong>s femmes avaient<br />

une ration spécia<strong>le</strong> d’oxygène. <strong>Les</strong> bel<strong>le</strong>s. El<strong>le</strong>s avaient beaucoup de<br />

place <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s champagnes, <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s <strong>dans</strong>es, <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s rues, <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s<br />

lits. » 130<br />

Ce rejet de la forêt résulte du fait que malgré son séjour<br />

prolongé <strong>dans</strong> la forêt, Chaïdana n’est pas parvenue à s’identifier à<br />

el<strong>le</strong>, pour en être une véritab<strong>le</strong> initiée. El<strong>le</strong> pensait trouver <strong>dans</strong> la<br />

forêt <strong>le</strong> confort de la vil<strong>le</strong>. Or, un initié est un être humain qui<br />

parvient à mieux connaître la forêt et ses secrets et peut vaincre <strong>le</strong>s<br />

ennemis de la forêt, c’est-à-dire <strong>le</strong>s animaux, voire <strong>le</strong>s génies. Le lien<br />

entre l’initié et la forêt tient du fait qu’il peut y survivre des jours<br />

128 J.-P. Makouta Mboukou, <strong>Les</strong> Exilés de la forêt ou <strong>le</strong> grand complot [1974],<br />

Paris, L’Harmattan, 1981, p. 108.<br />

129 L. Millogo, Nazi Boni, premier écrivain du Burkina Faso : La langue bwamu<br />

<strong>dans</strong> Crépuscu<strong>le</strong> des temps anciens, Limoges, PULIM, 2002, p. 156.<br />

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