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Les figures spatio-temporelles dans le roman africain subsaharien ...

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faufi<strong>le</strong> un éternel va-et-vient entre l’instant présent et l’instant-là,<br />

d’où cette réaction :<br />

« – Approche ! murmura <strong>le</strong> marabout. El<strong>le</strong> recula.<br />

– Approche ! approche ! […]. Il tira à arracher <strong>le</strong> pagne.<br />

– Laisse-moi, ou je crie ! […].<br />

Le couteau à la lame recourbée traînait ; el<strong>le</strong> s’en arma, <strong>le</strong><br />

poursuivi et l’accula entre <strong>le</strong> lit et <strong>le</strong>s valises. Dans <strong>le</strong>s yeux de<br />

Salimata éclatèrent <strong>le</strong> viol, <strong>le</strong> sang et Tiécoura, et sa poitrine se<br />

gonfla de la colère de la vengeance et la lame recourbée frappa<br />

<strong>dans</strong> la vengeance. L’homme à son tour hurla <strong>le</strong> faune, gronda<br />

<strong>le</strong> tonnerre. El<strong>le</strong> prit peur et par la porte s’échappa, pataugea<br />

trois ou quatre pas <strong>dans</strong> la pluie, se précipita sur <strong>le</strong>s cuvettes,<br />

ramassa <strong>le</strong> pou<strong>le</strong>t sacrifié et sortit. » 827<br />

L’accumulation des malheurs <strong>dans</strong> <strong>le</strong> passé crée en Salimata<br />

des réactions troub<strong>le</strong>s. En fonction de ce passé tortueux, même si el<strong>le</strong><br />

n’est pas responsab<strong>le</strong> de ce qui lui est arrivée, el<strong>le</strong> essaiera<br />

pénib<strong>le</strong>ment de refaire une nouvel<strong>le</strong> vie. Ce qui est spécifique en el<strong>le</strong>,<br />

c’est qu’el<strong>le</strong> parvient à se défaire de son passé traumatisant. En se<br />

saisissant du couteau à la tête recourbée pour poignarder Abdoulaye,<br />

Mathieu Sanvée explique que Salimata « brise <strong>le</strong> voi<strong>le</strong> qui la séparait<br />

d’el<strong>le</strong>-même. Mutilée, frustrée, infériorisée, el<strong>le</strong> muti<strong>le</strong> à son tour […] et<br />

par ce geste, el<strong>le</strong> expulse toutes <strong>le</strong>s haines et <strong>le</strong>s rancœurs accumulées,<br />

tout <strong>le</strong> substratum pathologique qui stagnait <strong>dans</strong> son inconscient. » 828<br />

Salimata devient ainsi bourreau de l’autre. Son geste, vu sous cet<br />

ang<strong>le</strong> offre à son axe temporel une ouverture vers l’avenir.<br />

Contrairement à Fama pour qui l’avenir n’offre aucune<br />

perspective heureuse, Salimata entretient une lueur d’espoir <strong>dans</strong><br />

l’avenir. S’étant identifiée à l’élément masculin en poignardant <strong>le</strong><br />

826 A. Kourouma, <strong>Les</strong> So<strong>le</strong>ils des Indépendances, op. cit., p. 73.<br />

827 Idem, p. 77.<br />

828 M.R. Sanvée, <strong>Les</strong> Sens du Sacré <strong>dans</strong> la littérature d’expression française :<br />

Poésie et Roman de 1928 à 1968, op. cit., p. 272.<br />

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