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Les figures spatio-temporelles dans le roman africain subsaharien ...

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personnages féminins dénaturés et altérés. L’exemp<strong>le</strong> type de la<br />

négation du noirceur, de la falsification du corps noir est Fania dont<br />

nous avons ici <strong>le</strong> portrait appuyé par des commentaires du<br />

narrateur :<br />

« Une vraie femme moderne. El<strong>le</strong> étudie <strong>le</strong> journalisme […]. Il<br />

paraît que pour el<strong>le</strong> un homme il doit ramper. Si bien que c’est<br />

souvent toute seu<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong> vit […]. A la voir, on dirait une dinde<br />

qui aurait mariné en partie <strong>dans</strong> un bain cuivreux, puis <strong>dans</strong><br />

du vin, qui aurait irrégulièrement cuit <strong>dans</strong> un four, qui aurait<br />

posé sur <strong>le</strong> crane une vraie crinière toute noire. Bien bizarre<br />

qu’el<strong>le</strong> est, sa couenne à Fania. "Ça doit être à cause du so<strong>le</strong>il !<br />

que je me dis. A moins qu’el<strong>le</strong> ne soit passée au stade ultime de<br />

l’amélioration de la peau avec utilisation d’eau de Javel !" Ça<br />

fait une multitude d’années qu’el<strong>le</strong> s’adonne à cette activité-là,<br />

Fania. D’ail<strong>le</strong>urs, je ne me souviens pas l’avoir jamais connue<br />

autrement que contrefaite, frelatée […]. Je doute fort qu’el<strong>le</strong><br />

ignore l’existence d’un seul produit provoquant l’éclaircissement<br />

de la peau noire. El<strong>le</strong> a moulé <strong>le</strong> gras de son corps <strong>dans</strong> un<br />

ensemb<strong>le</strong> en cuir, Fania. El<strong>le</strong> a aux pieds des chaussures à très<br />

hauts talons qui la font tanguer vers l’avant. El<strong>le</strong> a <strong>le</strong>s yeux<br />

verts ce jour-là. Parce que, pour bien faire, pour être tout à fait<br />

<strong>dans</strong> <strong>le</strong> coup, el<strong>le</strong> met des <strong>le</strong>ntil<strong>le</strong>s. Quelquefois el<strong>le</strong> <strong>le</strong>s a b<strong>le</strong>us,<br />

quelquefois noisette. C’est en bel<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong> se vit, Fania. N’y a<br />

qu’à voir <strong>le</strong>s regards qu’el<strong>le</strong> lance ici ou là, sa façon de<br />

marcher. » 731<br />

La cib<strong>le</strong> privilégiée du discours véhément du narrateur, contre<br />

toute transformation de la peau, est <strong>le</strong> corps de femme, comme <strong>le</strong><br />

prouve son obsession pour <strong>le</strong> corps de Fania. Il l’inscrit <strong>dans</strong> <strong>le</strong><br />

cadrage des personnages <strong>africain</strong>s tota<strong>le</strong>ment dévalorisés <strong>dans</strong><br />

l’espace européen. Dans la troisième partie du <strong>roman</strong> intitulée « La<br />

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