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Les figures spatio-temporelles dans le roman africain subsaharien ...

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Grâce aux sacrifices tués par nos aïeux. » 628<br />

Ce rappel du passé et sa projection <strong>dans</strong> <strong>le</strong> futur, en élidant <strong>le</strong><br />

présent, situe et instal<strong>le</strong> <strong>le</strong> Horodougou <strong>dans</strong> un espace-temps de<br />

l’authenticité que rien au monde ne puisse perturber 629.<br />

Chaque fois que Fama retourne au village, <strong>le</strong> récit de son<br />

voyage apparaît comme un retour aux sources mythiques d’un monde<br />

excitant, spécial, une métaphore d’un pays comme une relation<br />

amoureuse. Ainsi lors de son premier voyage, au moment où <strong>le</strong><br />

véhicu<strong>le</strong> qui <strong>le</strong> transporte entre <strong>dans</strong> <strong>le</strong> territoire du Horodougou, une<br />

joie presque enfantine l’envahit entièrement. Aux yeux de Fama, « ce<br />

qui se voyait ou ne se voyait pas, s’entendait ou ne s’entendait pas, se<br />

sentait ou ne se sentait pas, tout : <strong>le</strong>s terres, <strong>le</strong>s arbres, <strong>le</strong>s eaux, <strong>le</strong>s<br />

hommes et <strong>le</strong>s animaux, tout ce qui entourait aurait dû appartenir à<br />

Fama comme sa propre épouse. » 630 Seu<strong>le</strong>ment, il est <strong>le</strong> seul<br />

personnage à avoir une vision aussi fabu<strong>le</strong>use du territoire du<br />

Horodougou. L’emploi du conditionnel ou futur hypothétique « aurait<br />

dû » informe sur <strong>le</strong> décalage entre la réalité et ce qui appartient<br />

purement au domaine du conditionnel, qui est justement <strong>dans</strong> <strong>le</strong><br />

champ de l’imaginaire, autrement dit, un fait à va<strong>le</strong>ur d’irréel <strong>dans</strong> <strong>le</strong><br />

présent. Deux fois de suite, car voulant transposer l’imaginaire <strong>dans</strong><br />

<strong>le</strong> réel, Fama aura des altercations à la frontière. La première a lieu<br />

lors de son premier voyage pour Togobala. Sans la pièce d’identité, il<br />

lui était en principe interdit de traverser la frontière. Mais il s’en<br />

moque éperdument :<br />

« Un bâtard, un vrai, un déhonté de rejeton de la forêt et d’une<br />

maman qui n’a sûrement connu ni la moindre bande de tissu, ni<br />

la dignité du mariage, osa, débout sur ses deux testicu<strong>le</strong>s,<br />

sortir de sa bouche que Fama étranger ne pouvait pas traverser<br />

628 A. Kourouma, <strong>Les</strong> So<strong>le</strong>ils des Indépendances, op. cit., p. 136-137.<br />

629 <strong>Les</strong> faits démontrent l’irréalité des choses car Fama se rendra rapidement<br />

compte que la bâtardise de la capita<strong>le</strong> a gagné <strong>le</strong> Horodougou. Fama est<br />

parfaitement déconnecté et en retard sur <strong>le</strong>s réalités de son pays.<br />

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