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Les figures spatio-temporelles dans le roman africain subsaharien ...

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la prison considérée comme un enfer. L’absence de nom n’est pas<br />

présentée comme un élément subjectif, comme s’il re<strong>le</strong>vait du choix<br />

du narrateur. C’est une donnée du référent lui-même. D’où<br />

l’affirmation, « c’était bien ainsi ». Cela confirme tout <strong>le</strong> symbolisme<br />

qu’il peut recouvrir. Le camp est pour confirmer cette impossibilité de<br />

localisation, caractérisé par l’absence de repères temporels et<br />

spatiaux. Toute hypothèse, toute tentative de localisation de cet<br />

espace conduit paradoxa<strong>le</strong>ment à une absence de localisation, à un<br />

non-lieu, hors de tout repère géographique. Tout <strong>le</strong> fragment qui<br />

décrit ce camp <strong>dans</strong> une esthétique de l’écriture mêlant et<br />

juxtaposant <strong>figures</strong> antithétiques, parallélisme et chiasme, mérite<br />

d’être mentionné. Nous citons in extenso :<br />

« Il lui parut d’abord que c’était en savane, <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s lointaines<br />

régions et sauvages des montagnes du Hougon, parce que <strong>le</strong>s<br />

monts empêchaient d’y voir <strong>le</strong>s <strong>le</strong>vers et <strong>le</strong>s couchers du so<strong>le</strong>il.<br />

Mais ce n’était pas en savane : <strong>le</strong>s saisons étaient cel<strong>le</strong>s de la<br />

zone forestière, l’harmattan bref avec d’insignifiants incendies<br />

illuminant <strong>le</strong>s horizons pendant deux ou trois nuits. L’hivernage<br />

était celui de la forêt ; il tombait interminab<strong>le</strong> et lourd ; <strong>le</strong>s<br />

vents, <strong>le</strong>s orages et <strong>le</strong>s tonnerres occupaient continuel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s<br />

nuits et <strong>le</strong>s jours, s’enrageaient, s’entredéchiraient, et<br />

perpétuel<strong>le</strong>ment l’univers restait embrasé. Mais quand il<br />

constata que la flore et la faune étaient en partie cel<strong>le</strong>s de la<br />

côte, Fama pensa que <strong>le</strong> camp avait été construit <strong>dans</strong> une î<strong>le</strong><br />

ou presqu’î<strong>le</strong> au milieu des lagunes. Car <strong>le</strong>s mouches tsé-tsé et<br />

<strong>le</strong>s moustiques harcelaient sans cesse ; et l’air moite des<br />

lagunes pénétrait <strong>dans</strong> <strong>le</strong> corps par <strong>le</strong>s trous de <strong>le</strong>urs piqûres et<br />

<strong>le</strong>s détenus se gonflaient comme si chacun était atteint par un<br />

doub<strong>le</strong> éléphantiasis et un trip<strong>le</strong> béribéri. Dans <strong>le</strong>s eaux<br />

stagnantes environnantes nageaient et coassaient de lourds<br />

crapauds aux cou<strong>le</strong>urs vives, et parfois, des nénuphars,<br />

337 A. Kourouma, <strong>Les</strong> So<strong>le</strong>ils des Indépendances, op. cit., p. 159.<br />

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