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Les figures spatio-temporelles dans le roman africain subsaharien ...

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Le marché est à l’image de l’espace des laissés-pour-compte<br />

un lieu de dégradation. Dans l’Afrique traditionnel<strong>le</strong>, comme nous<br />

l’avons souligné, <strong>le</strong> marché exigeait des limites. Le marché de<br />

Salimata lui, n’obéit plus à aucune exigence. Il est quelconque,<br />

constitué uniquement par un conglomérat d’êtres faméliques, qui<br />

n’ont pour objectif premier que de satisfaire un besoin biologique<br />

primaire, jamais assouvi : la faim. Le marché se trouve ainsi<br />

transposé, du rituel qu’il était, à un espace désordonné, <strong>dans</strong> <strong>le</strong>quel<br />

<strong>le</strong>s individus se laissent emporter par <strong>le</strong>s besoins <strong>le</strong>s plus frustes, <strong>le</strong>s<br />

plus immédiats et <strong>le</strong>s plus instinctifs (et donc anti-culturels) : la faim<br />

physique, la vio<strong>le</strong>nce, <strong>le</strong> sens du viol, <strong>le</strong> vol, la mendicité. Sa<br />

population est composée en particulier des mendiants et des<br />

miséreux, traînant avec eux des misères et souffrances inuti<strong>le</strong>s,<br />

pieusement inanes, auxquels il faut ajouter <strong>le</strong>s mouches qui<br />

grouil<strong>le</strong>nt en abondance. C’est <strong>dans</strong> un petit marché que Salimata<br />

ayant eu l’imprudence de nourrir gratuitement des mendiants se voit<br />

tout à coup agresser par des faméliques à qui el<strong>le</strong> a témoigné sa<br />

générosité. El<strong>le</strong> sera presque violée, pourtant, el<strong>le</strong> avait accompli un<br />

geste héroïque :<br />

« Salimata distribua des assiettées aux chômeurs, aux affamés,<br />

jusqu’à vider la cuvette, jusqu'à la rac<strong>le</strong>r. D’autres affamés,<br />

d’autres guenil<strong>le</strong>ux accoururent et bousculèrent et maintenant<br />

tendaient <strong>le</strong>s mains, présentaient <strong>le</strong>urs infirmités, <strong>le</strong>urs plaies.<br />

La cuvette était vide […]. Besaciers en loques, truands en<br />

guenil<strong>le</strong>s, chômeurs, tous accouraient, tous tendaient <strong>le</strong>s mains.<br />

Rien ! Il ne restait plus un seul grain de riz. Salimata <strong>le</strong> <strong>le</strong>ur<br />

avait crié, <strong>le</strong> <strong>le</strong>ur avait montré […]. Ils accouraient quand même,<br />

venaient de tous <strong>le</strong>s coins du marché, s’amassaient, se<br />

pressaient, murmuraient des prières […]. <strong>Les</strong> murmures<br />

s’amplifièrent, s’é<strong>le</strong>vèrent en clameurs et brusquement comme à<br />

un signal tous s’abattirent sur Salimata, l’attaquèrent en meute<br />

de mangoustes, la dépouillèrent, la maltraitèrent et avant<br />

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