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Le cyclottigneur n°34 : juin 2012 - Cyclottignies.be

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Page 10<br />

Auteur :<br />

André Cloespin<br />

<strong>Le</strong> coin des lecteurs<br />

Je vous propose maintenant de mettre le texte de Delerm en parallèle avec<br />

celui de René Fallet.<br />

Bien avant l’auteur de « La première gorgée de bière », René Fallet, passionné<br />

de vélo, avait abordé ce thème en 1973, dans son essai consacré au cyclisme.<br />

Avec la verve qui était sa marque de fabrique, Fallet y exprimait tout son amour<br />

pour la petite reine (« <strong>Le</strong> vélo », éditions Julliard, 1973 ; réédité chez Denoël en<br />

1992, avec d’amusantes illustrations de René Blachon, caricaturiste de grand talent<br />

auprès de L’ Equipe – hélas récemment décédé).<br />

Quelques mots d’abord à propos de René Fallet (1927-1983). Ce fils de cheminot,<br />

enfant de la banlieue parisienne, quitte l’école à quinze ans, dès l’obtention<br />

du certificat d’études, et exerce ensuite les boulots les plus divers. Malgré son<br />

abandon de l’école, le jeune René manifeste un goût évident pour l’écriture, passion<br />

qu’il cultive avec talent à ses moments perdus. Après la guerre et la démobilisation<br />

en 1945, Fallet publie son premier recueil de poèmes. Il est repéré par<br />

Blaise Cendrars qui le fait entrer à Libération comme critique littéraire En 46,<br />

il connait la réussite dès son premier roman (Banlieue sud-est). Un certain public<br />

plutôt de gauche apprécie sa li<strong>be</strong>rté de ton, sa gouaille, son amour des gens de la<br />

banlieue. Sa rencontre avec Georges Brassens le fera entrer dans le fameux cénacle<br />

qui regroupe les amis fidèles du chanteur-poète (Jacques Brel, Georges<br />

Moustaki, Guy Béart, Marcel Amont, Lino Ventura, Jean Carmet et bien<br />

d’autres). Fallet décède en 83, deux ans après Brassens, auquel il a consacré un<br />

ouvrage (Brassens, Denoël 1972). Fallet laisse derrière lui plus de 20 romans,<br />

des essais, des poèmes, des articles de critique littéraire. Plusieurs de ses romans<br />

sont adaptés au cinéma : <strong>Le</strong>s vieux de la vieille, Paris au mois d’août , <strong>Le</strong><br />

<strong>be</strong>aujolais nouveau est arrivé, Porte des Lilas, La soupe aux choux etc.<br />

René Fallet a toujours été un passionné de cyclisme. Qui ne l’était à l’époque en<br />

banlieue ? On parle bien ici de la banlieue des années d’avant et de l’immédiate<br />

après-guerre ! Cependant, l’âge venant, plutôt accro de la cigarette et du <strong>be</strong>aujolais,<br />

Fallet développa peu à peu une pratique du vélo plus proche de la philosophie<br />

épicurienne que de l’ascétisme sportif, tout en restant un amoureux inconditionnel<br />

de la <strong>be</strong>lle mécanique (le texte que je vous propose ne laisser planer<br />

aucun doute à ce sujet !). <strong>Le</strong> tabac et l’alcool auront hélas prématurément raison<br />

de sa santé.<br />

Avec des copains cyclos, il créa une compétition, les Boucles de la Besbre dont<br />

les points du règlement les plus particuliers étaient : interdiction des échappées,<br />

désignation à l’avance du vainqueur et obligation de ravitaillement dans les<br />

bistrots situés le long du parcours. Mais, prestige oblige, pas question de participer<br />

avec une quelconque bécane ! L’acteur Jean Carmet (plus de 200 films !) et<br />

l’inoubliable dialoguiste des Tontons flingueurs, Michel Audiard, tous deux cyclistes<br />

occasionnels, mais dans le genre « sérieux », ont, parmi bien d’autres,<br />

participé à cette drôle de course, qui eut lieu de 1968 à 1976. C’était l’époque<br />

d’Eddy ! <strong>Le</strong>s cadres étaient en acier à raccords ; à l’entrainement, on s’ équipait<br />

d’une casquette de laine, d’un pantalon golf et de hauts bas à carreaux; en hiver,<br />

on bourrait ses « cyclistes » de papier journal pour ne pas rentrer avec des engelures<br />

aux pieds ou on les recouvrait de vieilles chaussettes (<strong>be</strong>lle invention,<br />

tout de même, ces botillons en néoprène !) Lors d’une interview télévisée, je me<br />

souviens que Michel Audiard avait répondu au journaliste qui lui demandait si le<br />

cyclisme était un sport exigeant : « Oh, vous savez, à quinze à l’heure, on admire<br />

le paysage, à trente, on admire ses cuisses » Du pur Audiard !<br />

Venons-en à la controverse qui nous occupe aujourd’hui : vélo ou bicyclette ?<br />

Entre Delerm et Fallet, il y a certes proximité de pensée sur la question et on<br />

pourrait facilement retrouver du Fallet chez Delerm, avec cette manière subtile<br />

d’évoquer les sensations. Cependant, l’écriture de Fallet apparait plus élaborée,<br />

le vocabulaire plus recherché et, surtout, le ton est plus tranchant, l’ humour<br />

plus rude ... Ceux qui connaissent un peu l’œuvre et la manière de ce grand<br />

tendre savent qu’il ne faut pas trop le prendre au premier degré … C’est qu’il<br />

pouvait difficilement résister à un bon mot, à une phrase-choc, et s’ amusait<br />

<strong>be</strong>aucoup de ses propres outrances littéraires.

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