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LES PILIERS DE LA TRAITRISE - Scandale-France.org

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Accoudée depuis un quart d’heure au balcon, Simone guettait notre<br />

arrivée. Par chance, deux emplacements de parking sont vacants, et nous<br />

garons sans nous faire prier les voitures respectives, en file indienne au pied<br />

de la tour de l’immeuble. Parfumée aux extraits de patchouli, Simone<br />

s’évente le balconnet sur la balustrade. Depuis la terrasse de l’appartement,<br />

elle nous fait signe de monter. Etrange coïncidence, la route du hasard<br />

rapprochait en une fraction de seconde le destin de nos mères, toutes deux<br />

confrontées aux plaies de la solitude. Aussi bien l’une que l’autre vivait en<br />

recluse depuis des années. Nous frappons à la porte, et après les<br />

embrassades, Simone nous présente déjà un plateau de sandwichs et des<br />

rafraîchissements. Voilà nos deux mères bavassant comme de vieilles<br />

connaissances. Assises confortablement sur le vieux canapé houssé d’une<br />

veloutine, elles ravivent à tour de rôle les souvenirs d’enfance de leurs<br />

bambins.<br />

D’un côté, ma tendre mère encense ses enfants, et de l’autre Simone<br />

revit les moments où elle houspillait Phaï, dans ses jeunes années, mi-ange<br />

mi-démon. Quelquefois, les rapports mère et fils sont tendus voire<br />

conflictuels. Sans doute leur promiscuité et la pression de son activité ne<br />

favorisent pas toujours l’épanouissement relationnel. Simone a pour manie<br />

de bavasser avec son animal de compagnie, son petit chat de gouttière, au<br />

poil ras, paresseuse comme une couleuvre, baptisée « La Minette », avec<br />

laquelle elle partage ses colères, ses peines et ses espoirs. Elle reporte toute<br />

son affection sur la Minette et tient à cette petite chatte comme à la prunelle<br />

de ses yeux.<br />

Cette veuve éplorée, un peu voûtée, la peau laiteuse et le regard vif<br />

bleuté, apparaît sous les traits d’une discrète et serviable maîtresse de<br />

maison, ayant des prédispositions pour les arts plastiques. Dans son bloc à<br />

dessin posé sur le guéridon, Simone avait griffonné un épouvantail accoutré<br />

en haillons, un laideron au bec d’aigle, aux serres crochues enlacé dans les<br />

bras d’un Apollon. Cette caricature amusante représentait son ancienne<br />

voisine, une commère qui incarnait la bêtise et lui inspirait l’inappétence.<br />

L’observant intriguée par ce portrait peu flatteur, Simone dépeint à<br />

maman, la précieuse ridicule qui venait fort heureusement de déménager.<br />

Cette ex-voisine d’une douceur affectée, au ton mielleux était en réalité un<br />

despote. Tous les soirs, à des heures tardives, elle faisait un tapage de diable.<br />

Nous éclatons de rire lorsqu’elle la décrit comme l’héroïne des<br />

« Fourberies de Scapin » logeant dans un décor miteux. Elle nous dépeint<br />

son logis comme l’auberge des Thénardier tant ce cloaque faisait référence<br />

à l’œuvre « Les Misérables » de Victor Hugo. Le roman était selon ses dires<br />

l’unique livre de chevet de cette inculte potiche.<br />

Le feeling passe bien, tout semble aller au mieux dans le meilleur<br />

des mondes.<br />

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