Traité des monnaies - Institut Coppet
Traité des monnaies - Institut Coppet
Traité des monnaies - Institut Coppet
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
ÉCRITS MONÉTAIRES DU XIV' SIÈCLE<br />
Le premier, c'est que c'est une chose très répréhensible chez<br />
un roi et qui porte préjudice à ses successeurs que ce par quoi<br />
la royauté prépare sa propre perte ou son aliénation à <strong>des</strong> étrangers.<br />
Et il ne pourrait assez s'affliger ni pleurer, le roi qui serait<br />
assez infortuné, assez misérable pour créer, par sa négligence<br />
ou son mauvais gouvernement, une situation telle que lui-même<br />
ou ses héritiers perdraient une royauté accrue par tant de vertus<br />
et si longtemps préservée avec gloire. Qui plus est, son âme<br />
glorieuse serait en péril si par sa faute le peuple subissait tous<br />
les fléaux, toutes les calamités qu'entraînent d'ordinaire la chute<br />
et l'usurpation <strong>des</strong> royautés.<br />
Je déclare en second lieu que, lorsqu'il est tyrannique, le pouvoir<br />
<strong>des</strong> rois expose la royauté à sa perte, comme il est démontré<br />
au chapitre précédent et puisque, comme il est écrit dans<br />
l'Ecclésiastique90 , « la royauté passe d'une lignée à une autre<br />
par suite <strong>des</strong> injustices, <strong>des</strong> iniquités, <strong>des</strong> outrages et <strong>des</strong> crimes<br />
divers» : or, la tyrannie est inique et injuste. En outre, pour<br />
en venir aux cas particuliers, il est impossible, grâce à Dieu, que<br />
les cœurs libres <strong>des</strong> Français dégénèrent au point qu'ils acceptent<br />
de bon gré leur asservissement. C'est pour cette raison que<br />
la servitude qu'on leur impose ne peut être durable puisque, si<br />
grande que soit la puissance <strong>des</strong> tyrans, elle n'en reste pas moins<br />
une force brutale pour les cœurs libres de leurs sujets et sans<br />
effet contre les étrangers. Quiconque inciterait d'une façon quelconque<br />
les souverains de France à un régime tyrannique de cette<br />
sorte exposerait donc la royauté à une grande crise et la conduirait<br />
à sa perte. De fait, le noble lignage <strong>des</strong> rois de France n'a<br />
pas eu pour tradition de tyranniser, et le peuple gaulois n'a pas<br />
eu pour coutume d'être asservi. Aussi, si la royale progéniture<br />
perd ses vertus ancestrales, elle perd le royaume, c'est certain.<br />
Troisièmement, je soutiens que, comme je l'ai déjà prouvé et<br />
bien souvent répété, tirer du gain à la faveur d'une mutation de la<br />
90. Ecclésiastique, X, 8 : Regnum a gente in gentem transfertur propter in jus titi as et<br />
injurias et contumelias et diversos dolas.<br />
90