Traité des monnaies - Institut Coppet
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NICOLAS ORESME - TRAITÉ DES MONNAIES<br />
ces revenus peuvent et doivent être assignés ailleurs et réunis<br />
autrement que par ces mutations indues d'où naissent, comme<br />
on l'a montré auparavant, <strong>des</strong> maux si grands et si nombreux.<br />
En admettant même qu'une portion de ces revenus soient pris<br />
sur la monnaie, on devra toutefois en fixer et en déterminer le<br />
montant: par exemple, deux sous sur chaque marc monnayé,<br />
et il ne devra y avoir alors aucune variation ou augmentation<br />
déraisonnable et énorme du gain, telle qu'il en peut provenir<br />
<strong>des</strong> détestables mutations maintes fois évoquées. De tout cela,<br />
i! faut conclure que le prince ne peut faire ces mutations et en<br />
retirer du gain ni par le droit commun ou ordinaire, ni par privilège,<br />
don, concession ou pacte, ni par toute autre autorité ou<br />
toute autre manière, et que cela ne peut être de son domaine<br />
ni lui appartenir en aucune façon. En conséquence, lui refuser<br />
ce droit, ce n'est pas le spolier ni aller à l'encontre de la majesté<br />
royale, comme le disent faussement <strong>des</strong> adulateurs menteurs,<br />
sophistiques, et qui trahissent l'Etat. Par ailleurs, puisque le prince<br />
est tenu de ne pas faire cela, il n'a aucun titre à recevoir une<br />
quelconque allocation ou un don pour s'abstenir de cette exaction<br />
abusive: cela, en effet, ne paraît pas autre chose que le prix<br />
du rachat de la servitude que nul roi ni bon prince ne doit exiger<br />
de ses sujets. Enfin, à supposer, mais ceci n'est pas acquis,<br />
qu'il ait le privilège de prendre quelque chose sur la monnaie<br />
pour en fabriquer de la bonne et la maintenir dans cet état, il<br />
devrait encore perdre ce privilège dans le cas où il en abuserait<br />
au point de muer et falsifier la monnaie pour accroître son gain<br />
personnel de manière non moins cupide que honteuse.<br />
CHAPITRE xxv<br />
Un tyran ne peut durer longtemps<br />
Dans les deux chapitres qui suivent, j'entends prouver qu'exiger<br />
de l'argent pour de telles mutations de la monnaie est contraire<br />
à l'honneur de la royauté et préjudiciable à toute la postérité<br />
royale.<br />
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