Traité des monnaies - Institut Coppet
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ÉCRITS MONÉTAIRES DU XIV' SIÈCLE<br />
philosophique et théologique24 » se creusa entre deux partis qui<br />
s'affrontèrent en une lutte incessante pour la domination de l'université<br />
<strong>des</strong> Arts de Paris. Ces deux écoles appartenaient toutes<br />
deux à la scolastique. Elles étaient formées d'une part par les<br />
réalistes groupés autour <strong>des</strong> thèses d'Albert le Grand, Thomas<br />
d'Aquin et, pour le XIVe siècle, Duns Scot (1266-1308), et d'autre<br />
part par les nominalistes dont le chef de file était incontestablement<br />
Guillaume d'Occham. Les nominalistes, essentiellement<br />
recrutés parmi les intellectuels parisiens, se posaient d'emblée<br />
comme <strong>des</strong> réformistes, voire <strong>des</strong> révolutionnaires. « Non seulement<br />
Occham fait une révolution qui ruine le réalisme, mais<br />
sait qu'il la faiF5.» En intitulant leur mouvement la via<br />
moderna, l'opposant ainsi à la via antiqua représentant le réalisme,<br />
ces philosophes nominalistes étaient conscients d'être porteurs<br />
d'une modernité jugée jusqu'alors inexprimée.<br />
Le point de départ de ce qui aurait pu n'être qu'une réforme,<br />
mais qui, par les conséquences immenses sur l'évolution du<br />
savoir, fut bien une révolution, était une divergence ponctuelle<br />
purement philosophique26 • C'est sur le terrain de la théorie de<br />
la connaissance que le conflit prit corps. Pour les réalistes, la<br />
science ne devait porter que sur le général: elle se voulait abstraite,<br />
spéculative et universelle. Au contraire, pour le nominalisme,<br />
la science ne portait que sur le particulier: pour lui, l'universel<br />
n'étant qu'un nom (d'où l'appellation de nominaliste)<br />
dépourvu de réalité, l'appréhension de la réalité et de ses phénomènes<br />
concrets ne pouvait être faite que par une approche<br />
de l'objet individuel. Toutefois, le véritable enjeu du débat théorique<br />
entre l'universalisme et l'individualisme était la place de<br />
la théologie dans la connaissance. Le réaliste affirmait que la<br />
science ne peut être qu'universelle, car il posait au préalable de<br />
toute connaissance l'acceptation d'une fin unique et permanente,<br />
24. Etienne Gilson, La Philosophie au Moyen Age, t. 2, Payot, Paris, p. 712.<br />
25./dem.<br />
26. Pour une approche complète de la philosophie de Guillaume d'Occham, voir<br />
Etienne Gilson, op. cit., pp. 638-655.<br />
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