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Changement d’école et pratiques pédagogiques
IUFM Nord-Pas de Calais
Anne-Marie JOVENET
Maître de conférences
Université de Lille III
Équipe THÉODILE
Le point de départ du travail était d’étudier l’effet d’un changement de pédagogie dans
une école primaire (école maternelle et école élémentaire) de la banlieue lilloise classée
REP dont les résultats étaient bien inférieurs à la moyenne générale. Or, il existe bien des
manières d’étudier le changement et les effets du changement, en fonction de l’objectif qu’on
se donne, des éléments visés (changement dans les résultats des élèves, dans la remontée
des effectifs, changement dans l’image de l’école…), selon aussi que l’on considère le
changement comme un processus ou comme un résultat (« comment s’est mis en place du
changement » vs « le climat de l’école a changé ») mais aussi selon les cadres théoriques
qui servent de référence.
Ici il s’agit essentiellement de se référer à une approche clinique d’inspiration psychanalytique.
De ce point de vue, la notion de changement n’est pas anodine. Le changement apparaît
un révélateur intéressant de la construction psychique du sujet, c’est-à-dire de sa solidité
interne, de son désir de nouer des relations satisfaisantes, de sa capacité à affronter
l’inconnu, qu’il s’agisse du sujet élève ou du sujet enseignant d’ailleurs.
De fait en étudiant à travers divers entretiens, comment les professionnels intervenant
habituellement (ADSEM, aide-éducateurs, personnels de cantine) ou ponctuellement dans
l’école (infirmière scolaire, psychologue du RASED) avaient vécu ce changement, il était
apparu deux dimensions essentielles à prendre en compte pour comprendre ce qu’engendrait
pour eux cette nouvelle situation : l’importance que revêt ce qu’on peut appeler « l’ambiance »
du lieu et le sentiment d’être plus ou moins bien reconnu dans son identité professionnelle.
L’analyse avait alors permis d’évoquer une variable explicative autour du fait d’être dans la
classe ou pas, c’est-à-dire de voir « se dérouler la pédagogie sous ses yeux ».
Pour comprendre ce qu’apportait ce changement de pédagogie (changement étant pris ici
dans son sens de modification de pratique) par rapport à ce qui existait avant et continue
à exister dans d’autres écoles : la comparaison s’est imposée. Pour ma part j’ai comparé
des élèves appartenant à toutes les classes du primaire, dans deux écoles ne pratiquant
pas la même pédagogie, puis les mêmes élèves de l’école Hélène Boucher sur plusieurs
années (ces élèves réalisaient une tâche mathématique face à un adulte) et j’ai comparé
aussi comment se déroulaient des séquences de mathématiques au CE dans deux écoles
différentes. Pour tenter de comprendre ce qui pouvait se jouer pour les enseignants, j’ai
comparé les réponses de cinq maîtres de l’école en pédagogie Freinet et de cinq maîtres
de l’autre école, à propos des élèves qui avaient réalisé ces tâches mathématiques. Mais
revenant sur une définition plus clinique du changement, je me suis intéressée aux élèves
qui arrivaient dans cette école au cours de leur scolarité primaire pour voir comment ils
vivaient le changement de l’intérieur, si l’on peut dire. C’est cette étude déjà présentée
dans le rapport remis en 00 qui servira de base ici. En effet à travers ces entretiens
construits autour d’une consigne qui s’adresse directement à l’enfant : « je sais que tu
n’as pas toujours été dans cette école, peux-tu me raconter comment s’est passé pour
toi le changement ? », on voit apparaître le sentiment général que les enfants éprouvent