22.06.2013 Views

Sommaire - CCIFR

Sommaire - CCIFR

Sommaire - CCIFR

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

L’avenir des sociétés post-impériales du XXIe siècle<br />

directes de cette construction. Or, à la fin des années 1930 et plus encore dans les<br />

années 1940, l’Union Soviétique s’est comportée en empire autoritaire classique.<br />

Ce fut notamment le cas dans le Nord-Caucase et dans les régions méridionales<br />

de la Russie y attenant. C’est précisément à partir de là qu’en 1943 et 1944 ont<br />

été déportées au Kazakhstan (d’après les archives du NKVD) environ 700 000<br />

personnes (Tchétchènes, Ingouches, Kalmouks et autres), le nombre total de<br />

personnes décédées au cours de la déportation dépassant les 100 000 selon les<br />

estimations de l’association Mémorial.<br />

L’écho de cette déportation résonne encore aujourd’hui dans les nombreux<br />

conflits territoriaux et ethniques entre ces peuples. Cependant, la conséquence la<br />

plus pérenne et la plus radicale de l’influence du système politique impérial est<br />

la conscience impériale qui en a résulté : un esprit paternaliste et de sujétion qui<br />

se présente comme une alternative et une limite à la conscience citoyenne. Cette<br />

dernière se définissant comme la mentalité des personnes participant à la gestion<br />

de l’État de manière consciente et responsable. Aristote considérait déjà en son<br />

temps l’État comme une forme de communauté de citoyens inclus au sein du<br />

pouvoir. Seule la participation à la gestion crée le citoyen comme sujet principal de<br />

l’État. Mais voilà, la prise de conscience de la nature d’un sujet politique se forme<br />

difficilement chez les habitants d’un empire.<br />

Revenons sur le fait que dans les situations de crise de la vie des sociétés postimpériales<br />

ont lieu de manière concomitante une destruction de la conscience<br />

de sujétion et la constitution d’une conscience citoyenne. Pour l’instant, je ferais<br />

remarquer que le trait dominant de la conscience de masse en Russie au début<br />

du XXIe siècle est la certitude que « de nous (du peuple), rien ne dépend dans<br />

l’État ». Cet éloignement de la société vis-à-vis de la gestion politique n’est pas<br />

du tout conditionné par une particularité génétique de la population ou par une<br />

caractéristique immanente et invariable de la culture russe, mais par l’adaptation<br />

des gens aux éléments qui se sont maintenus après le régime impérial hiérarchique,<br />

souvent réanimé artificiellement par le pouvoir.<br />

C O N S O L I DAT I O N NAT I O NA L E E T D É M O C R AT I E<br />

D’après les calculs de Robert Dahl, il n’y avait en 1900-1909 que huit pays dont le<br />

régime politique pouvait être qualifié de démocratique. En 1940-1949, ils étaient<br />

déjà 25, et représentaient un tiers de tous les États alors existant. En 1994-1997, 86<br />

pays (c’est-à-dire 45% du nombre total des pays existant) étaient qualifiés par Dahl<br />

comme ayant des traits « démocratiques », et, en 2008, la Fondation Bertelsman en<br />

a classé 125, représentant 65% du total et comprenant 70% de la population de la<br />

planète. L’orientation de l’évolution des régimes politiques dans le sens d’un passage<br />

de la démocratie comme phénomène local et marginal (au début du XXe siècle) à<br />

RUSSIA IN GLOBAL AFFAIRS • VOL. 11 • NUMERO SPECIAL • 2013<br />

209

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!