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L'immigration en Russie<br />
l’immigration dans l’hémisphère oriental, et ne le cède qu’aux États-Unis en volume<br />
des flux migratoires », voilà une formulation typique des journaux, représentative<br />
de l’idée sur l’ampleur du phénomène.<br />
En général, compte tenu de ce que la Russie est le pays doté du plus grand<br />
territoire au monde et qu’elle est le deuxième État après les États-Unis à accueillir<br />
des immigrés, en population totale (ni la Chine, ni l’Inde, ni d’autres géants<br />
démographiques ne se positionnent comme pays d’immigration), sa deuxième<br />
place en nombre d’immigrés accueillis est tout à fait naturelle. Est-ce cependant la<br />
place qu’elle occupe dans les faits ?<br />
Selon les données de l’ONU et les évaluations de la Banque mondiale qui en<br />
découlent, le nombre d’immigrés en Russie était de plus de 12 millions en 2010,<br />
ce qui place effectivement le pays à la deuxième place après les États-Unis selon<br />
cet indice (avec un grand écart cependant, puisqu’ils sont 42,8 millions aux États-<br />
Unis), avec l’Allemagne à la 3ème place. Mais il s’agit de valeurs absolues, dont la<br />
signification est fortement limitée. Il y a par exemple eu en Russie, en 2010, presque<br />
1,8 millions de naissances – soit plus que dans tout autre pays européen. Pourtant,<br />
il ne viendrait à l’idée de personne de s’appuyer sur ce constat pour affirmer que la<br />
Russie a la natalité la plus forte d’Europe ! C’est la même chose en ce qui concerne<br />
l’immigration. Si on compare ces chiffres aux calculs réalisés par les experts de<br />
la Banque mondiale sur le total d’immigrés par rapport au pays de résidence, on<br />
constate que ces derniers ont représenté 8,7% de la population – ce qui situe la<br />
Russie très loin de la tête de liste des États classés selon leur « charge migratoire », liste<br />
où les États-Unis se retrouvent d’ailleurs également devancés (voir schéma 1). Sans<br />
parler d’Israël dont la population ne s’est constituée que récemment et principalement<br />
par le fait de l’immigration, la plupart des pays européens et non-européens – et même<br />
un certain nombre d’anciennes républiques de l’Union –repoussent la Russie presque<br />
à la fin de cette liste de 37 États.<br />
Mais ce n’est pas tout. Sur le fond, les appréciations concernant la Russie ne sont<br />
pas comparables à celles données pour les pays figurant au schéma 1. Elles portent<br />
sur le nombre cumulé des immigrés, c’est-à-dire le nombre des personnes vivant<br />
dans un autre pays que celui où elles sont nées. En effet, selon le recensement de<br />
2002, 12 millions de personnes originaires d’autres États vivaient en Russie ; et ces<br />
personnes sont considérées par les experts de l’ONU et de la Banque mondiale<br />
comme des migrants internationaux. Il est cependant spécifié nommément que,<br />
dans le cas de l’ex-Union Soviétique, il s’agit de migrants internes qui se sont<br />
transformés en migrants internationaux : ces personnes ne se sont pas déplacées<br />
mais ont subi l’apparition de nouvelles frontières.<br />
La masse d’immigrés ainsi comprise s’est constituée, pour l’essentiel, à l’époque<br />
soviétique. Selon l’ONU, elle comprenait 11,5 millions de personnes en Russie en<br />
RUSSIA IN GLOBAL AFFAIRS • VOL. 11 • NUMERO SPECIAL • 2013<br />
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